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16/02/2012

patrimoine: le pistachier-lentisque de Ghisonaccia

" Tous les pays qui n'ont plus de légende

Seront condamnés à mourir de froid ..."

(Patrice de la Tour du Pin)

Patrimoine naturel de la Corse:

Le pistachier-lentisque de Ghisonaccia élu l'arbre de l'année 2011

(je relaie ici l'article envoyé par les amis d'Altiani)

le pistachier lentisque de Ghisonaccia.jpg

 

"LE PISTACHIER LENTISQUE DE GHISONACCIA A ETE ELU ARBRE REMARQUABLE DE L’ANNEE 2011

Retrouvez les 26 autres arbres du concours sur www.arbredelannee.com

« C’est au lieu dit « Gattone » (parcelles ZA 13 et 14), sur la commune de Ghisonaccia en Haute Corse, située à la jonction de la route nationale reliant Bastia à Bonifacio et de la route départementale 344 reliant la commune à Ghisoni, chef lieu du canton, que nous a été signalé cet arbre pittoresque. Il s’agit d’un pistachier lentisque, arbuste aux feuilles persistantes, formées de folioles pointues, tout d’abord cotonneuses puis devenant coriaces leur permettant ainsi de résister à la déshydratation. Il fournit de petites baies rouges puis brunes.  Le tronc quant à lui exsude une résine qui entre dans la composition de vernis, ou qui est utilisée, après distillation, pour des confitures ou des pastilles. "Dans l'Empire ottoman, les femmes turques, grecques, arméniennes et juives mâchent avec délices cet odorant mastic, surtout le matin ; il se ramollit, parfume l'haleine, fortifie les gencives et blanchit les dents. On le brûle dans des cassolettes pour parfumer les appartements, on le mêle à la pâte et on en fait un pain agréable". (Larousse)

Ce « pistachier lentisque de Ghisonaccia » est considéré comme un arbre vénérable d’un mètre quatre-vingt-douze de diamètre pour une hauteur de 7 mètres alors que leur taille habituelle maximum tourne aux alentours des 6 mètres.

Son âge est difficile à déterminer même par les professionnels car la croissance normale de cet arbre est très lente. A la date de ce jour, son âge est donné pour 700 ans mais certains lui donnent entre 1000 et 1500 ans… aussi des tests vont être entrepris afin d’en obtenir une plus grande précision scientifique... lorsque nous connaitrons le résultat de ces tests, nous serons alors plus à même de vous communiquer son âge avec une plus grande précision.

Corse Matin - 6 juillet

Il n'est pas rare en Corse de trouver plantes, fleurs ou arbres étonnants, voire extraordinaires. Parmi eux, certains ont même obtenu le label "d'arbre remarquable". Le dernier en date est un pistachier lentisque, découvert par Elise Inversin à Ghisonaccia-gare.

Pour entrer dans cette catégorie recherchée, l'arbre a notamment satisfait à des critères de rareté, dimensions, position, âge, et pour sa force symbolique.

C'est en démaquisant une parcelle de terrain à la végétation particulièrement dense qu’Elise Inversin a mis à jour le pistachier lentisque, envahi par des plantes lianescentes et quasiment recouvert de gravats et de déblais. Le reverdissement du feuillage a permis d'admirer un tronc au tronc dense de 1,90 m de circonférence, d'une hauteur de près de 7 mètres et avec une surface de houppier de près de 80 M2. Ses racines se perdent dans une construction enfouie qui pourrait être un ancien four romain.

Son âge reste à déterminer : les spécialistes l'estiment entre 800 et 1000 ans, peut-être davantage. Son tronc est si dense que les carottages n'ont pu avoir lieu pour l'instant. Mais l'arbre pourrait être le plus ancien de Corse.

Après plusieurs observations de professionnels en la matière, et grâce à la ténacité d'Elise Inversin, ce pistachier a été finalement répertorié "arbre remarquable".

Il est désormais en cours d'inscription sur la liste des "arbres vénérables" classés par l'Unesco.

Entretenu régulièrement par celle qui l'a découvert, le pistachier lentisque de Gattone n'a dû sa survie qu'aux attentions qu'elle lui a prodiguées. Pour continuer le travail, Louis Cesari, adjoint au maire et chargé de l'urbanisme, tente de faire localiser les propriétaires de ce lopin de terre, même si les recherches sont infructueuses pour le moment.

 

La mairie a cependant décidé de commencer quelques travaux afin de donner enfin, à l'arbre de Gattone, la trace privilégiée qu'il mérite.

"Nous allons préserver ses abords, installer une clôture solide, le protéger des incendies autant que faire se peut, le signaler aussi de manière à ce qu'on puisse venir l'admirer et sensibiliser les habitants de notre région et notamment les écoliers sur la valeur de cet arbre magnifique véritable joyau de notre patrimoine."

Lily Figari

(1) La loi du 2 mai 1930 relative à la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, permet le classement d'un arbre, ou d'un alignement d'arbres."


... Et sur le site http://www.arbredelannee.com/ :

"De juillet à octobre 2011, le grand public a pu voter par Internet pour élire le lauréat du public.
Le 24 novembre dernier, le jury présidé par Didier Van Cauwelaert a désigné l’arbre de l’année 2011 : le pistachier lentisque de Guisonaccia.
Tous les arbres “nominés” sont désormais visibles sur les grilles de l’UNESCO à Paris dans le cadre d’une très belle exposition en plein air de photos d’Emmanuel Boittier, photographe au magazine Terre sauvage.
Elles feront l’objet d’un numéro spécial d’Arbres et Forêts, hors série de Terre sauvage à paraître en mars 2012.
Vous pourrez bientôt déposer de nouvelles candidatures pour élire l’arbre de l’année 2013 !"

 

le tronc du pistachier de GH..jpg

Que ces arbres "remarquables" - et leurs frères - trouvent un regain d'intérêt qui les sauve de la destruction: la Corse reste, malgré les incendies, un refuge d'élection pour tant d'arbres vénérables. On comprend que la religiosité des anciens corses se soit tournée vers sa Nature: arbres, rochers, sources ont une âme, et celle de ces arbres remarquables nous plonge en des temps où se perdait l'homme individuel au profit d'une sève commune et  sacrée. Si la déforestation de la planète - commencée il y a près de dix mille ans à l'époque où les hommes commencent à vouloir exploiter la nature par l'agriculture et l'élevage - s'est accélèrée au cours des dernières décennies avec les techniques actuelles d'exploitation forestière jusqu'à un point de non retour pour de nombreuses régions du globe, on peut craindre pour l'avenir des hommes. Toutefois, il faut garder espoir: que, responsable et consciente, chaque population locale prenne en main la sauvegarde de son patrimoine naturel, et en assume la gestion.


Enfin, vous pouvez voter ( jusqu'à la fin du mois de février) pour que ce pistachier lentisque de Ghisonaccia devienne le héros européen de l'année, en votant sur le site:

http://www.treeoftheyear.org/?lang=fr


Vous pouvez aussi, si vous ne l'avez pas encore, découvrir le très beau livre poétique (photos d'arbres de Corse ) du photographe Tomas HEUER:

RACINES CELESTES / RADICHE SUPRANE

édité par Alain Piazzola.


12/02/2012

la mort du héron cendré

 

Le beau héron cendré qui volait encore

DSC_1986 copyle héron en vol janvier 2011.jpg

l'an dernier en janvier

le héron cendré janvier 2011.jpg

du côté du ruisseau, sous Belgodère,

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a redu son âme d'oiseau, ce matin, au ruisseau:

hier soir il était encore en vie, grelottant sur la berge

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est-il mort de froid (glacial cette nuit) ou de faim, ou des deux conjugués ?

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 si léger ... l'hiver est impitoyable cette année..

11/02/2012

Février

 

Février neigeux


éloge du doux éphémère

 

 

fenêtre blog.jpg

éloge du silence

 du dedans où se taire

en regardant dehors

voleter

blanche

l'éphémère pensée

 

il neige.jpg

éloge du dehors

des mots vagabonds

légers

comme neige

à peine

audibles

où se recueillir avant de fondre

 

 

Février Bréviaire Grimani-1450-1510 miniature sur parchemin bibliothèque nationale, Venise.jpg

et du petit garçon qui fait pipi entre deux sur le pas de sa porte

(Miniature du Bréviaire Grimani, XV° siècle, Bibliothèque Nationale de Venise)

 

bréviaire grimani venise

(au col de Battaglia: merci Carole et Marie-Laure!)bréviaire grimani venise

(à Castellu di Rustinu: merci Toussaint!)

Légèreté des flocons, mais quelle chappe au fil des heures!

 

04/02/2012

le sepolcru de Castellu sort de l'ombre

Ce 31 janvier, à Castellu di Rustinu,

peu avant la neige ...

 

Castellu sepolcru ensemble montage blog.jpg

Bien sûr, ce n'est pas encore la saison, mais ... un grand merci , Richard!

A l'occasion de la rédaction d'un article sur les sepolcri peints de la Semaine Sainte en Corse pour la belle revue "Art Sacrés", et reprenant contact avec les amis de Castellu di Rustinu pour éclairer ce sujet, j'ai eu le grand plaisir de voir sortir de sa cachette et monté, tant bien que mal, pour la première fois depuis environ 80 ans, le magnifique sepolcru peint de Castellu. Son état actuel - chassis vermoulu, toiles très fragilisées ... n'a pas permis de le dresser totalement comme il le devrait, les deux panneaux latéraux épousant normalement exactement la forme trapézoïdale du" plafond" de la Résurrexion. Mais tel que (merci, Richard!) cet ensemble parle comme jamais jusqu'ici je ne l'avais entendu: la colline du Golgotha faisant le lien entre les trois panneaux. Ce remontage , très éphémère (il ne peut rester ainsi dans l'église) signe la prise de conscience de la communauté de Castellu qu'elle possède ici un héritage précieux et rare de la dévotion de ses ancêtres, et qui aboutira, j'en suis certaine, à une restauration: la municipalité  est impliquée dans la restauration de son patrimoine: outre celle de la chapelle san Tumasgiu et de ses fresques, qui devrait débuter très prochainement, il  est prévu de continuer l'effort de restauration dans la très belle église paroissiale : l'ensemble des autels et de leurs toiles dans un temps relativement proche également ... Le sepolcru suivra, je n'en doute pas, dans la foulée, et ... espérons-le aussi,  l'orgue de Saladini retrouvera sa voix ...

Quelques détails du sepolcru

groupe Pilate blog.jpg

le Jugement de Ponce Pilate en compagnie de Caïphe (reconnaissable à son vêtement jaune, signe distinctif longtemps imposé aux Juifs ...)

Jésus chargé de sa croix blog.jpg

Jésus chargé de sa croix: le trou dans la toile a probablement, comme les autres du sepolcru, été fait par la flamme des bougies ...

groupe de cavaliers blog.jpg

un premier groupe de cavaliers

Castellu di Rustinu Jésus tombe sous la Croix détail blog.jpg

Jésus tombe sous le poids de la croix, et Simon de Cyrène est appelé à la rescousse

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En haut du panneau central, la scène de la Crucifixion

le cavalier de la crucifixion et soldats blog.jpg

le groupe de soldats de la crucifixion. A noter les armes, très codifiées de ces messieurs (on les retrouve dans les sepolcri et les chemins de croix  du XVIII° siècle) et leurs casques pointus. Le cavalier porte a baretta misgia, cette sorte de bonnet phrygien qui faisait partie du costume des montagnards corses, et un cimeterre tout-à-fait turc ou barbaresque. Une armée qui va pieds-nus ...

Castellu, sepolcru crucifixion détail blog.jpg

... les solutions techniques de la crucifixion ...

pas facile, mais nos gens ont de la ressource!

la Déposition blog.jpg

chorégraphie de la Déposition de croix

déploration du Christ blog.jpg

le groupe douloureux de la Déploration du Christ: la Vierge, Mater Dolorosa,  a reçu sur ses genoux  le corps supplicié de son fils et l'expose à,la compassion de tous, tandis que  Marie-Madeleine - en robe jaune et cheveux dénoués,- pleure en saisissant la main de Jésus.

 

 

Castellu mise au tombeau blog.jpg

 la Mise au tombeau. Je propose cette lecture:  Joseph d'Arimathie à la tête du Christ et Nicomède à ses pieds, et le groupe de Marie-Madeleine et de  saint Jean entourant la Vierge

la Vierge et M Madeleine détail blog.jpg

détail: Marie-Madeleine soutient la Vierge

le tombeau du Christ.jpg

... et le tombeau du Christ (partie basse du panneau central): oups! les anges sont assez effrayants. De mauvaises langues en déduiraient que le Christ leur a faussé compagnie dès qu'Il a pu ...

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le panneau de la Résurrection formant plafond:

ce thème de la Résurrection est suffisamment rare dans les sepolcri de Corse pour être signalé: un Christ triomphant, dans toute sa gloire. Généralement les sepolcri s'arrêtent à la Déploration de la mort du Christ et le message de Pâques reste à venir... ...


  Il y a une quinzaine d’années, les hasards d’une recherche sur les orgues de Corse m’avaient conduite à Castellu di Rustinu, un village de montagne proche de la Castagniccia : seules quelques fumées paresseuses s’élevant des toits de lauze dans la lumière de janvier et au passage, une télé tonitruante mariée à une bonne odeur de soupe  témoignaient encore de la vie au milieu de ces hautes maisons de schiste aux volets trop souvent clos. La délicieuse vieille dame qu’on m’avait indiquée m’accompagna pour me faire les honneurs de son église – elle venait de finir son déjeuner, me dit-elle avec un sourire serein, et n’avait rien d’autre à faire -   Malgré l’état un peu dégradé des lieux, à l’époque, j’avais été frappée par la joyeuse propreté qui régnait ici, nappes impeccables soigneusement repassées, profusion attendrissante d’angelots joufflus et de fleurs artificielles, et par la qualité et la richesse du patrimoine : datant en majorité du XVIII° siècle, décors muraux, chaire de prêche et élégants autels de stuc baroques, retables, quatorze tableautins peints d’un intéressant chemin de croix populaire,

sepolcri de corse,le sepolcru de castellu di rustinu,semaine sainte en corse

(ici le Christ mis en croix: chemin de croix peint par Giacomo Grandi pour Castellu au milieu du XVIII° siècle)

et, un peu plus tardif, un orgue hélas muet, bref  … c’était ici l’une de ces surprenantes églises de la région qui racontent à foison une communauté dynamique à une époque où la majorité des Corses vivaient dans leurs villages, et où l’expression d’une religiosité dramatique et festive resserrait les liens.
  Puis, passant derrière le maître-autel, ce fut pour moi un choc imprévu : contre le mur s’entassaient, abandonnées en vrac, plusieurs toiles rectangulaires,  grossières et en mauvais état, de très grande taille, clouées sur des châssis vermoulus. Peintes à la détrempe, elles n’avaient rien à voir avec l’art savant des retables de l’église, mais s’apparentaient plus à l’esprit vernaculaire du chemin de croix – j’y reviendrai : elles disaient d’une façon immédiate et émouvante la Passion du Christ. Sur un premier panneau, du haut du perron de son prétoire, Pilate, enturbanné comme un oriental, prononçait son jugement, puis Jésus se trouvait chargé de la croix , gravissait un Golgotha où se tordaient de grands arbres, trébuchait, martyrisé par des soldats bigarrés, barbus,  moustaches  retroussées, une soldatesque disparate aux  pieds nus, coiffés de casques ronds, de la barreta misghia (une sorte de bonnet phrygien, coiffure traditionnelle des corses jusqu’à la fin du XIX° siècle), armée de cimeterres, de lances et de hallebardes, montée sur de magnifiques chevaux, le tout dans un paysage abrupt de montagne … Sur un deuxième, c’était la crucifixion et la douleur de la Vierge, de saint Jean et des saintes femmes, et sur un autre, la déposition de croix,  la déploration du Christ,  la mise au tombeau efficacement racontées dans l’émotion, et enfin une dernière toile en forme de trapèze exaltait la Résurrection du Christ  …
Comme je m’étonnais de la présence et de l’importance de ces décors, Laurence M. m’expliqua qu’il s’agissait du « Sepolcru », qu’on ne le sortait plus depuis longtemps, que lorsqu’elle était petite on le dressait dans l’église dès le jeudi saint pour accueillir le Christ mort, que chaque famille était chargée d’apporter un litre d’huile d’olive pour entretenir la flamme des lampes qui veilleraient sur le Crucifié en compagnie des fidèles : « c’est qu’ ici, on ne laisse jamais le mort seul » … et elle se souvenait de sa terreur, petite fille, lorsqu’il s’agissait  de pénétrer la nuit dans cet espace étrange peuplé de ces silhouettes inhabituelles dansant à la lueur des cierges et des lampes… Par la suite, j’ai appris que ces grandes toiles servaient aussi autrefois de décor pour une Passion jouée par les villageois de Castellu -  dramaturgie évoquée par les derniers anciens, et dont Laurence est désormais le dernier témoin vivant. Il semble que ce sepolcru anonyme du début XIX° siècle ne soit plus ressorti en situation depuis 1930 … Telle fut ma première rencontre avec ce monde si attachant des sepolcri peints de la Corse et elle a le visage rond et souriant d’une vieille dame optimiste née en 1917 …

le fronton triomphal.jpg

le fronton triomphal que l'on n'a pas pu replacer sur le "plafond", faute de solidité



 

23/01/2012

"l'encre serait de l'ombre", méditation avec Philippe Jaccottet et Rembrandt

 Méditation

avec Bach, "Ich ruf zu dir", Anne Qeffélec au piano
http://youtu.be/Zky2YUek4zo

la méditation du philosophe- 1631 Musée du Louvre.jpg

(Rembrandt, la méditation du philosophe, 1631, Musée du Louvre: une oeuvre minuscule par la taille (29 x 33 cm) dans ce labyrinthe du Louvre, mais que je vais régulièrement retrouver comme on visite les siens, à chaque passage à Paris ...)


avec Sweelinck, Fantasia cromatica, Helmut Walcha à l'orgue

(pour l'escalier en colimaçon ...)

http://youtu.be/vNghGPptA98


et Purcell, in guilty night

http://youtu.be/lEiGhP6-vNo


"L'IGNORANT

 

Plus je vieillis et plus je crois en ignorance,

plus j'ai vécu, moins je possède et moins je règne.

Tout ce que j'ai, c'est un espace tour à tour

enneigé ou brillant, mais jamais habité.

Où est le donateur, le guide, le gardien?

Je me tiens dans ma chambre et d'abord je me tais

(le silence entre en serviteur mettre un peu d'ordre),

et j'attends qu'un à un les mensonges s'écartent:

que reste-t-il? que reste-t-il à ce mourant

qui l'empêche si bien de mourir? Quelle force

le fait encor parler entre ses quatre murs?

Pourrais-je le savoir, moi l'ignare et l'inquiet?

Mais je l'entends vraiment qui parle, et sa parole

pénètre avec le jour, encore que bien vague:

 

"Comme le feu, l'amour n'établit sa clarté

que sur la faute et la beauté des bois en cendres ..."

 

Philippe Jaccottet, dans "L'IGNORANT", extrait (p.35)  de "L'encre serait de l'ombre" , la dernière parution de Philippe JACCOTTET chez Poésie/ Gallimard: notes, proses et poèmes choisis par l'auteur de 1946 à 2008 . A garder précieusement à portée de main,  petite flamme tenace dans la nuit.


avec Gesualdo: O vos omnes ...

http://youtu.be/I_MmCv08PVE

avec Tallis: O Nata Lux ...

http://youtu.be/-4pwX_ru7fc

 

 

et avec Purcell (again!), O Solitude, avec Alfred Deller

http://youtu.be/-W9BMgup7-A

... même si le silence reste le meilleur compagnon de ce beau texte de Jaccottet : " (le silence entre en serviteur mettre un peu d'ordre)" ...

philippe jaccottet,bach ich ruf zu dir,rembrandt,sweelinck fantaisie cromatique,gesualdo,tallis,purcell,alfred deller

(Georges de LA TOUR: Marie Madeleine, 1638- 43
 133,4 x 102,2 cm
Metropolitan Museum of Art, New York)