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14/05/2018

2°/Les fresques de la chapelle San Tumasgiu di Pastureccia

(suite des notes consacrées à San Tumasgiu )

2°/Les fresques de la chapelle San Tumasgiu di Pastureccia (fin XV°, début XVI° s.)

(en attente de leur restauration prochaine)

à Castellu di Rustinu (Pieve du Rustinu)

***

Malgré les mutilations barbares dont elle a été victime (cf note précédente), cette chapelle conserve sa sérénité méditative : c'est toujours avec une émotion intacte que nous pénétrons ici, comme pour un rendez-vous amoureux et le sentiment obscur d'y rejoindre un centre.

Même blessées, dégradées, effacées, délavées, ces peintures nous rejoignent, nous parlent, nous relient.

 

L'ABSIDE

 

 

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l'ensemble de l'abside

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approchons ...

 

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LE CHRIST PANTOCRATOR

 

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Au centre de l'abside, vertical comme un arbre cosmique reliant la terre au ciel,

 

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 le Christ Pantocrator occupe en majesté sur son trône l'espace central de cette voûte céleste: " Ne jurez pas! ni par le ciel, parce qu'il est le trône de Dieu, ni par la terre, parce qu'elle est l'escabeau de ses pieds" ( Evangile de saint Matthieu, chapitre 5)

Encadré par une chevelure longue et une barbe blanches bien soignées, son visage est jeune,  représentation parfaite et lisible par tous  de cette double présence du Père et du Fils. Il  nous tient sous son regard où que nous soyions dans la chapelle. Un regard intérieur, impartial, presque mélancolique: c'est qu'il est aussi le Juge de la fin des temps. Il nous bénit des trois doigts levés de sa main droite, évoquant la réalité de la Trinité  et dans sa main gauche,  tient  posé sur ses genoux le Livre des Ecritures: "EGO SUM LUX MUNDI ET VIA VERITAS E(T) V(ITA)". Ce Livre que nous retrouvons dans nombre de nos chapelles à fresques ... 

" Thomas lui dit: " Seigneur , nous ne savons pas où tu vas. Comment en connaitrions-nous le chemin? Jésus lui dit:

" Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. Nul ne va au Père que par moi.

Si vous me connaissez, vous connaitrez aussi mon Père.

Dès maintenant vous le connaissez et vous l'avez vu"

Evangile selon Saint Jean 14

Derrière sa tête, les murailles de la nouvelle  Jérusalem, la Jérusalem Céleste décrite dans l'Apocalypse de saint Jean, la cité de Dieu, celle qui n'abrite aucun temple car " son temple, c'est le Seigneur, le Dieu Tout-Puissant, ainsi que l'agneau"  (Apocalypse de saint Jean, XXI, 22-23). Une cité carrée à laquelle répond le carré du Livre tenu par le Christ, le Livre de la Révélation qui rompt la ronde sans fin des cycles des vies.

 

anges musiciens et Christ.jpg

De part et d'autre de la tête du Christ, deux anges musiciens font résonner la musique céleste pour l'éternité. Au sol, la perspective fuyante des carreaux anime la profondeur de l'ensemble.

 

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L'ange de gauche joue une sorte de luth 

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L'ange de droite sonne un cornet, ce merveilleux instrument au son fragile et sensible, si proche de la voix: à l'époque de cette fresque, c'est un instrument privilégié de la musique religieuse.  Un étendard pend sous son bras: la croix de saint Georges, emblême de la ville de Gênes ...  la Corse de cette époque est génoise.

***

LE TETRAMORPHE

De part et d'autre de ses genoux, la représentation zoomorphe et symbolique u Tétramorphe,  ou ... ce qu'il en reste: quatre créatures ailées proclamant la Parole:

divers 17 octobre 065.jpg

l'Aigle de Saint Jean, portant accroché à la patte le phylactère représentant son évangile

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le Taureau de saint Luc

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l'Ange ou plus exactement l'Homme ailé de Matthieu

Nous avons perdu (dans les explosions de 1930 ?) le Lion de saint Marc.

 

 Autour du TETRAMORPHE :

 

Le Christ est entouré du Tétramorphe, la  personnification zoomorphe, ailée, symbolique  des quatre Evangélistes . Un peu de révision, en passant par les traditions ésotériques, de ces quatre éléments qui apparaissent dans l'Apocalypse de Saint Jean, hérités des civilisations égyptiennes et mésopotamienne, et  en particulier de la vision d'Ezechiel dans l'Ancien Testament :

Le Taureau (ou le Boeuf) de Saint Luc : aux premiers versets de son évangile, Saint Luc fait allusion à Zacharie qui offre un sacrifice à Dieu. Ici, le sacrifice et la Mort (le taureau, animal royal du sacrifice dans l'antiquité), la terre, la résistance. Symbole du corps et des forces de l'Homme.

- Le Lion de Saint Marc : la Résurrection, le feu, la force, le mouvement.

« Commencement de l'Évangile de Jésus Christ, fils de Dieu. Selon qu'il est écrit dans Isaïe le prophète : « Voici que j'envoie mon messager en avant de toi pour préparer ta route. Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur… » » (Mc 1, 1-3). Symbole du cœur et des passions.

- L''Homme ailé de Saint Matthieu :   l'Ange de la Naissance, l'intuition de la vérité. Cet évangile s'ouvre sur la généalogie de Jésus, en commençant par Abraham. Symbole de l'esprit, et des pensées.

L'Aigle de Saint Jean : son évangile, le dernier livre du Nouveau Testament,  commence par le mystère céleste. C’est l’évangile le plus visionnaire, il évoque l'Ascension, l'air, l'intelligence, l'action.  Symbole de l'âme.

 

Selon Saint Jérôme de Stridon (mort en 420), les quatre Vivants rassemblés autour de la figure du Christ évoquent les quatre moments essentiels de la vie du Christ:

Le Verbe de Dieu s'est incarné (l'Homme), il a été tenté au désert (le lion), il a été immolé (le taureau) et il est monté au ciel (l'aigle).

Le Tétramorphe chrétien hérite d'une longue tradition dans l'Antiquité qui passe par l'Egypte et surtout irrigue la Mésopotamie, dont les visions inspireront celles du prophète Ezéchiel.

 

Le Christ Pantocrator et le Tétramorphe sont évoqués dans les Visions prophétiques de l’Apocalypse de Saint Jean :

 

(…) « Après cela, je regardai, et voici, une porte était ouverte dans le ciel. La première voix que j'avais entendue, comme le son d'une trompette, et qui me parlait, dit: Monte ici, et je te ferai voir ce qui doit arriver dans la suite. Aussitôt je fus ravi en esprit. Et voici, il y avait un trône dans le ciel, et sur ce trône Quelqu'un était assis. Celui qui était assis avait l'aspect d'une pierre de jaspe et de sardoine; et le trône était environné d'un arc-en-ciel semblable à de l'émeraude. Autour du trône je vis vingt-quatre trônes, et sur ces trônes vingt-quatre vieillards assis, revêtus de vêtements blancs, et sur leurs têtes des couronnes d'or. Du trône sortent des éclairs, des voix et des tonnerres. Devant le trône brûlent sept lampes ardentes, qui sont les sept esprits de Dieu. Il y a encore devant le trône comme une mer de verre, semblable à du cristal. Au milieu du trône et autour du trône, il y a quatre Vivants constellés d'yeux devant et derrière.

 

Le premier Vivant est semblable à un lion, le second Vivant est semblable à un jeune taureau, le troisième Vivant a le visage d'un homme, et le quatrième Vivant est semblable à un aigle en plein vol. Les quatre êtres vivants ont chacun six ailes, et ils sont remplis d'yeux tout autour et au dedans. Ils ne cessent de dire jour et nuit: Saint, saint, saint est le Seigneur Dieu, le Tout Puisant, qui était, qui est, et qui vient! Quand les êtres vivants rendent gloire et honneur et actions de grâces à celui qui est assis sur le trône, à celui qui vit aux siècles des siècles, les vingt-quatre vieillards se prosternent devant celui qui est assis sur le trône et ils adorent celui qui vit aux siècles des siècles, et ils jettent leurs couronnes devant le trône, en disant: Tu es digne, notre Seigneur et notre Dieu, de recevoir la gloire et l'honneur et la puissance; car tu as créé toutes choses, et c'est par ta volonté qu'elles existent et qu'elles ont été créées. » (Apocalypse de Saint Jean – 4)

 

***

LES APÔTRES

A l'étage inférieur, sous les pieds du Christ, la série, hélas, très lacunaire des apôtres. Ils sont les piliers de l'Eglise: un collège de douze apôtres solidaires, où le malheureux traître de service, Judas, a été remplacé par Matthias.

 

les apôtres côté droit.jpg

A droite de la fenêtre , l'on reconnait la présence juvénile de saint Jean l'Evangéliste. Alors que les autres personnages tiennent leur livre fermé, lui a ouvert le sien, et le calame à la main ...

st Jean blog.jpg

... il semble prêt à écrire, suspendu à la révélation divine.

A sa gauche, quatre apôtres difficilement identifiables, si ce n'est, à droite,  celui de St Barthélémy, l'écorché vif portant sa peau sur l'épaule ... 

***

L'ANNONCIATION

 

ecce angile Domini.jpg

 

De part et d'autre de l'abside, dans les écoinçons de l'arc, la représentation de  l'Annonciation.

 Voici le récit de l’Annonciation dans l’Evangile selon Saint Luc:

 

Au sixième mois [de la conception de Jean-Baptiste, le fils d'Elisabeth, cousine de Marie], l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth, vers une vierge qui était fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph; et le nom de la vierge était Marie. Etant entré où elle était, il lui dit: " Salut, pleine de grâce! Le Seigneur est avec toi.  Mais à cette parole elle fut bouleversée, et elle se demandait ce que signifiait cette salutation. L'ange lui dit: "Rassure-toi, Marie, car vous tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu concevras, et enfanteras un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé F ils du Très-Haut; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père;   il règnera à jamais sur la maison de Jacob, et son règne n'aura point de fin. «  Mais Marie dit à l'ange: " Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point l'homme? " L'ange lui répondit: " L'Esprit-Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c'est pourquoi l'enfant sera saint et sera appelé Fils de Dieu. Et voici qu'Elisabeth, ta parente, vient, elle aussi, de concevoir un fils dans sa vieillesse, et elle en est à son sixième mos, elle qu’on appelait la stérile ; car rien ne sera impossible pour Dieu. " Marie dit alors: " Je suis la servante du Seigneur: qu'il m’advienne selon ta parole! " Et l'ange la quitta."

Saint Luc, 1-38

 

Annonciation Gabriel blog.jpg

Dans l'écoinçon de gauche, l'archange Gabriel venu du (bleu du ) ciel, dans sa robe blanche immaculée, ornée d'une belle écharpe décorée de riches motifs, agenouillé, brandissant en sa main gauche  le lys symbole de la pureté et du messager divin,  salue la Vierge de sa main droite: magnifique! ici les carreaux rouges et blancs répondent aux ornements de la ceinture ...

Annonciation la Vierge.jpg

Dans l'écoinçon de droite, la Vierge enclose dans sa chambre tendue de rouge, agenouillée près de son prie-Dieu où repose la parole de son acceptation: 

"Ecce Ancilla Domini, fiat mihi secundum voluntas sua"

("Marie dit : Voici la Servante du Seigneur, qu'il me soit fait selon ta Parole"

(mais ici, l'on croit lire "Ecce Angile Domini ...?)

 

La Colombe de l'Esprit Saint est déjà à l'oeuvre, elle a traversé l'espace clos de la chambre, rouge comme le secret inviolable du ventre maternel de Marie: "Vas spirituale". De même que les vêtements de la Vierge proclament sa double appartenance: le rouge de sa robe évoque  la part d'humanité de sa maternité, et le bleu de son manteau sa part céleste ...

***

SAN MICHELE

 

 

Saint Michel écoinçon droit.jpg

 

 

 

Sur le pied-droit à droite de l'arc, sous la Vierge de l'Annonciation, voici un acteur essentiel de cette chapelle: saint Michel Archange saisi ici dans sa double fonction de Général en chef des milices célestes et de "psychopompe" passeur et peseur d'âmes.

Saint Michel peseur d'âmes.jpg

 

Flamboyant sur un fond ocre rouge il porte la cuirasse étincelante de son emploi guerrier, cotte de maille, jambières, et maintient fermement de sa main droite sous sa lance Satan (ou ce qu'il en reste ...).

De sa main gauche, il pèse:

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Hélas, hélas, hélas! Nous n'irons pas tous (du moins pas directement! ) au Paradis...

 

La petite âme qui monte, bien accrochée à sa balance, peut se réjouir d'avoir fait le bon choix: de la sainte vie chrétienne sans concession ou du martyre ... Ce n'est pas le cas pour l'âme pêcheresse de droite, qui bascule déjà par-dessus bord et dégringole : proie facile, lorgnée par le Diable et ses milices infernales, emberlificotée dans la nasse de ses innombrables péchés, savoir quel sera son sort?

Heureusement pour elle, cette fresque a été peinte à la fin du XV°s. ou au début du XVI° s. , ce qui lui laisse encore quelque espoir: c'est que, depuis le XIII°s., l'idée du Purgatoire a pris forme dans les mentalités religieuses, idée généreuse en soi, conçue pour être rassurante,  exalter l'incommensurable bonté divine, mais si vite phagocytée par de nombreux appétits trop humains, récupérée,  objet de marcketting juteux ...

Quoi qu'il en soit, notre petite âme pécheresse n'ira peut-être pas en enfer, car cette pastorale en images des fresques de san Tumasgiu semble être diffusée par le monde franciscain, si actif en Corse, pastorale de la Rédemption plus que de la Damnation.

Soulignant et reliant les différents éléments de l'abside, un motif de papiers pliés  ocre rouge et blanc concourt à l'unité de l'ensemble.

 

 (à suivre)

Rappel: à retrouver

le beau livre didactique de Joseph Orsolini publié en 1989:

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Je signale ici également l'approche intéressante de François Xavier Ajaccio, livre publié en 2016: 

Livre François Xavier Ajaccio.jpg

 

En annexe du Tétramorphe, la Vision d'Ezéchiel:

vision d'Ezéchiel.jpg

(extrait du site:http://ufo-scepticisme.forumactif.com/t3536-la-vision-d-ezechiel-du-nouveau )

Ézéchiel ( VIᵉ siècle av. J.-C. : On lui attribue le livre d'Ézéchiel, le troisième dans l'ordre canonique des grands prophètes.

"[… ] La trentième année, le cinquième jour du quatrième mois, comme j'étais parmi les captifs du fleuve du Kebar, les cieux s'ouvrirent, et j'eus des visions divines. Le cinquième jour du mois, c'était la cinquième année de la captivité du roi Jojakin, la parole de l'Éternel fut adressée à Ézéchiel, fils de Buzi, le sacrificateur, dans le pays des Chaldéens, près du fleuve du Kebar ; et c'est là que la main de l'Éternel fut sur lui. Je regardai, et voici, il vint du septentrion un vent impétueux, une grosse nuée, et une gerbe de feu, qui répandait de tous côtés une lumière éclatante, au centre de laquelle brillait comme de l'airain poli, sortant du milieu du feu. Au centre encore, apparaissaient quatre animaux, dont l'aspect avait une ressemblance humaine. Chacun d'eux avait quatre faces, et chacun avait quatre ailes. Leurs pieds étaient droits, et la plante de leurs pieds était comme celle du pied d'un veau, ils étincelaient comme de l'airain poli. Ils avaient des mains d'homme sous les ailes à leurs quatre côtés; et tous les quatre avaient leurs faces et leurs ailes. Leurs ailes étaient jointes l'une à l'autre; ils ne se tournaient point en marchant, mais chacun marchait droit devant soi. Quant à la figure de leurs faces, ils avaient tous une face d'homme, tous quatre une face de lion à droite, tous quatre une face de bœuf à gauche, et tous quatre une face d'aigle. Leurs faces et leurs ailes étaient séparées par le haut; deux de leurs ailes étaient jointes l'une à l'autre, et deux couvraient leurs corps. Chacun marchait droit devant soi; ils allaient où l'esprit les poussait à aller, et ils ne se tournaient point dans leur marche. L'aspect de ces animaux ressemblait à des charbons de feu ardents, c'était comme l'aspect des flambeaux, et ce feu circulait entre les animaux; il jetait une lumière éclatante, et il en sortait des éclairs. Et les animaux couraient et revenaient comme la foudre. Je regardais ces animaux; et voici, il y avait une roue sur la terre, près des animaux, devant leurs quatre faces. A leur aspect et à leur structure, ces roues semblaient être en chrysolithe, et toutes les quatre avaient la même forme; leur aspect et leur structure étaient tels que chaque roue paraissait être au milieu d'une autre roue.

En cheminant, elles allaient de leurs quatre côtés, et elles ne se tournaient point dans leur marche. Elles avaient une circonférence et une hauteur effrayantes, et à leur circonférence les quatre roues étaient remplies d'yeux tout autour. Quand les animaux marchaient, les roues cheminaient à côté d'eux; et quand les animaux s'élevaient de terre, les roues s'élevaient aussi. Ils allaient où l'esprit les poussait à aller; et les roues s'élevaient avec eux, car l'esprit des animaux était dans les roues. Quand ils marchaient, elles marchaient; quand ils s'arrêtaient, elles s'arrêtaient; quand ils s'élevaient de terre, les roues s'élevaient avec eux, car l'esprit des animaux était dans les roues. Au-dessus des têtes des animaux, il y avait comme un ciel de cristal resplendissant, qui s'étendait sur leurs têtes dans le haut. Sous ce ciel, leurs ailes étaient droites l'une contre l'autre, et ils en avaient chacun deux qui les couvraient, chacun deux qui couvraient leurs corps. J'entendis le bruit de leurs ailes, quand ils marchaient, pareil au bruit de grosses eaux, ou à la voix du Tout Puissant ; c'était un bruit tumultueux, comme celui d'une armée; quand ils s'arrêtaient, ils laissaient tomber leurs ailes. Et il se faisait un bruit qui partait du ciel étendu sur leurs têtes, lorsqu'ils s'arrêtaient et laissaient tomber leurs ailes ... ».

[Une vision pour le moins complexe: vu du petit bout de la lorgnette, je ne sais si notre prophète Ezéchiel consommait quelques herbes très spéciales ou champignons hallucinogènes avant de plonger dans ses visions, mais, sur grand écran, cela devrait surpasser les réalisations les plus folles de science-fiction d'aujourd'hui. Toujours est-il qu'ici souffle en force l'Esprit ]

 

Et la Vision de Saint Jean, dans l'Apocalypse:

 

"J’eus ensuite une vision. Voici : une porte était ouverte au ciel, et la voix que j’avais naguère entendu me parler comme une trompette me dit : Monte ici, que je te montre ce qui doit arriver par la suite. À l’instant, je tombai en extase. Voici, un trône était dressé dans le ciel, et, siégeant sur le trône, Quelqu’un… Celui qui siège est comme une vision de jaspe et de cornaline; un arc‐en‐ciel autour du trône est comme une vision d’émeraude. Vingt-quatre sièges entourent le trône, sur lesquels sont assis vingt-quatre Vieillards vêtus de blanc, avec des couronnes d’or sur leurs têtes. Du trône partent des éclairs, des voix et des tonnerres, et sept lampes de feu brûlent devant lui, les sept Esprits de Dieu. Devant le trône, on dirait une mer, transparente autant que du cristal. Au milieu du trône et autour de lui, se tiennent quatre Vivants, constellés d’yeux par‐devant et par‐derrière. Le premier Vivant est comme un lion; le deuxième Vivant est comme un jeune taureau ; le troisième Vivant a comme un visage d’homme ; le quatrième Vivant est comme un aigle en plein vol. Les quatre Vivants, portant chacun six ailes, sont constellés d’yeux tout autour et en dedans. Ils ne cessent de répéter jour et nuit : « Saint, Saint, Saint, Seigneur, Dieu Maitre-de-tout, Il était, Il est et Il vient »."

 (Ap 4, 1-8)

Cluny.jpg

L'héritage chrétien du Tétramorphe: ici, au Musée Cluny

 

01/11/2017

les fresques de la chapelle San Michele de Castirla

les fresques de la chapelle San Michele de Castirla

Pieve de Talcini

(je réactualise ici une note ancienne)

restaurées en 2012, en écho futur au commentaire que j'en ferai demain auprès des villageois de Castirla après la messe des Défunts dite à la chapelle:

merci à Monsieur le maire de son invitation!

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Voici ce que disait Mgr MASCARDI de cette petite chapelle après sa visite en 1589 (fol 244) _ cité par Geneviève Moracchini Mazel, p. 329 de son ouvrage (hélas épuisé) sur les églises romanes de Corse:

  " ... Eglise paroissiale San Michele, annexe de Sant'Andrea d'Omessa ... elle se trouveà un tiers de mille des habitations ... son toit laisse passer la pluie ... il y a deux portes ... les murs sont pleins de trous et comportent une fenêtre en mauvais état ... il y a une cloche pendue à un arbre ... l'autel est placé sous une abside peinte ... il y a 21 feux et 80 âmes".

 

la chapelle San Michele et cimetière.jpg

J'avais signalé en Août 2008 l'état inquiétant de cette petite chapelle préromane en son cimetière  ( une première fois sauvée de la ruine en 1963, première restauration des fresques en 1964, puis  toiture refaite en 1984 ...)

Entre temps les volontés conjuguées de la Municipalité de Castirla et de la Collectivité Territoriale de Corse  ont permis de restituer l'intégrité et tout le charme de cette modeste chapelle. La charpente (qui s'était effondrée sous l'action des intempéries et de la mérule) a été à nouveau refaite, elle a reçu une nouvelle couverture de teghje, l'extérieur et l'intérieur nous accueillent aujourd'hui à nouveau avec grâce et simplicité.

Dans l’abside l’on découvre une fresque certes naïve dans sa réalisation, mais qui maîtrise parfaitement la teneur des messages délivrés : 

vue d'ensemble.jpg

Ce que l'on découvre en entrant, vers l'abside, côté est

Castirla vers l'ouest.jpg  

et vers la porte ouest

Les fresques ( fin XV° siècle) restaurées en 2012 :

(par l'atelier Paillard Boyer de Montpellier)

ensemble abside.jpg

l'ensemble des fresques:

Dans l'abside en cul de four, au registre inférieur, le niveau des hommes, la série des douze apôtres dont on peut encore lire certains noms; au-dessus, pieds nus en dedans le personnage central du Christ en majesté, entouré du Tétramorphe (les quatre Evangélistes), Dans l'arc triomphal, la traditionnelle représentation de l'Annonciation; sous l'Ange Gabriel,  Marie tient l'Enfant Jésus sur ses genoux; sous la Vierge de l'Annonciation, Saint Michel, le saint patron de la chapelle.

Castirla Christ Pantocrator.jpg

au centre, le "Christ Pantocrator" : le Christ en majesté

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Le Christ Pantocrator : bénissant de sa main droite, pouce, index et majeur levés- le geste de la bénédiction "latine". Dans cette représentation du Christ en majesté, telle qu'on le retrouve habituellement peint au centre des absides de nos chapelles à fresques, ce geste de bénédiction délivre en outre le message trinitaire, bénédiction donnée par le Père, le Fils et l'Esprit Saint. Il est le Logos incarné : « Au commencement était le Verbe (le Logos), et le Verbe était avec Dieu, et le Verbe était Dieu. » (Première ligne du Prologue de l’évangile selon Saint Jean).

Assis sur un trône, il tient sur ses genoux le Livre divin ouvert sur cette parole :

" EGO SUM LUX MUNDI ET VIA VERITAS ET VITA" :

« Thomas lui dit: Seigneur, nous ne savons où tu vas; comment pouvons-nous en savoir le chemin? Jésus lui dit: Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. Et dès maintenant vous le connaissez, et vous l'avez vu… » (Saint Jean 14- 6)

 

 

Castirla Ego sum lux mundi.jpg

 

" EGO SUM LUX MUNDI ET VIA VERITAS ET VITA"

  

Le Christ est entouré du Tétramorphela  personnification zoomorphe, ailée, symbolique  des quatre Evangélistes . Un peu de révision, en passant par les traditions ésotériques, de ces quatre éléments qui apparaissent dans l'Apocalypse de Saint Jean, hérités des civilisations égyptiennes et mésopotamienne, et  en particulier de la vision d'Ezéchiel dans l'Ancien Testament :

vision 4 Vivants gravure 1571.jpg

(la vision cosmique d'Ezéchiel: les 4 Vivants tirant le char divin  ont chacun 4 faces : homme, taureau, lion et aigle ...) - gravure de 1571

Au registre inférieur les évangélistes « terrestres » :

Castirla Taureau-st Luc.jpg

-  Le Taureau (ou le Boeuf) de Saint Luc : aux premiers versets de son évangile, Saint Luc fait allusion à Zacharie qui offre un sacrifice à Dieu. Ici, le sacrifice et la Mort, la terre, la résistance.

Castirla Lion St Marc.jpg

- Le Lion de Saint Marc: la Résurrection, le feu, la force, le mouvement.

Au registre supérieur les évangélistes « célestes » :

Castirla l'ange-Mathieu.jpg

- L'Ange (ou l'Homme ailé) de Saint Matthieu:   l'Ange de la Naissance, l'intuition de la vérité. Cet évangile s'ouvre sur la généalogie de Jésus, en commençant par Abraham.

Castirla l'Aigle -St Jean.jpg

-  L'Aigle de Saint Jean (ici très effacé, hélas): son évangile (l’Apocalypse), le dernier livre du Nouveau Testament,  commence par le mystère céleste. C’est l’évangile le plus visionnaire,  il évoque l'Ascension, l'air, l'intelligence, l'action.

  

Le Christ Pantocrator et le Tétramorphe sont évoqués dans les Visions prophétiques de l’Apocalypse de Saint Jean :

(…) « Après cela, je regardai, et voici, une porte était ouverte dans le ciel. La première voix que j'avais entendue, comme le son d'une trompette, et qui me parlait, dit: Monte ici, et je te ferai voir ce qui doit arriver dans la suite. Aussitôt je fus ravi en esprit. Et voici, il y avait un trône dans le ciel, et sur ce trône Quelqu'un était assis. Celui qui était assis avait l'aspect d'une pierre de jaspe et de sardoine; et le trône était environné d'un arc-en-ciel semblable à de l'émeraude. Autour du trône je vis vingt-quatre trônes, et sur ces trônes vingt-quatre vieillards assis, revêtus de vêtements blancs, et sur leurs têtes des couronnes d'or. Du trône sortent des éclairs, des voix et des tonnerres. Devant le trône brûlent sept lampes ardentes, qui sont les sept esprits de Dieu. Il y a encore devant le trône comme une mer de verre, semblable à du cristal. Au milieu du trône et autour du trône, il y a quatre Vivants constellés d'yeux devant et derrière.

Le premier Vivant est semblable à un lionle second Vivant est semblable à un jeune taureaule troisième Vivant a le visage d'un homme, et le quatrième Vivant est semblable à un aigle en plein vol. Les quatre êtres vivants ont chacun six ailes, et ils sont remplis d'yeux tout autour et au dedans. Ils ne cessent de dire jour et nuit: Saint, saint, saint est le Seigneur Dieu, le Tout Puisant, qui était, qui est, et qui vient! Quand les êtres vivants rendent gloire et honneur et actions de grâces à celui qui est assis sur le trône, à celui qui vit aux siècles des siècles, les vingt-quatre vieillards se prosternent devant celui qui est assis sur le trône et ils adorent celui qui vit aux siècles des siècles, et ils jettent leurs couronnes devant le trône, en disant: Tu es digne, notre Seigneur et notre Dieu, de recevoir la gloire et l'honneur et la puissance; car tu as créé toutes choses, et c'est par ta volonté qu'elles existent et qu'elles ont été créées. » (Apocalypse de Saint Jean – 4)

Castirla les douze apôtres.jpg

 

 Au registre inférieur, sous le Christ, et derrière l'autel, alternant sur fond ocre rouge ou blanc, les douze apôtres, représentés en pied et curieusement proportionnés, raccourcis, espace oblige. Leurs visages animés, dialoguant, de trois quart,  semblent suspendus à leur vision intérieure, et leurs mains prêchent et dialoguent: chacun tient précieusement le Livre ...

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certains portent leur nom au-dessus de leur tête, comme ici Saint Philippe et Saint Matthieu

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Saint André et Saint Taddée,

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Saint Jacques le Mineur

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Saint Jacques le Majeur et un autre apôtre

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Saint Pierre et ses clefs sous le pied nu du Christ

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un autre apôtre, enseignant, index levé

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et encore celui-ci: le juvénile Saint Jean, me semble-t-il, l'apôtre bien aimé sous l'autre pied du Christ ...

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Saint Barthélémy, impressionnant écorché, armé du couteau de son supplice,

Castirla le double de St Barthélémy.jpg

et portant sur son épaule son double: sa peau ...

 

 Les prunelles se sont parfois effacées, sans doute initialement peintes "a secco"

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L'Annonciation

De part et d’autre de l'arc triomphal, dans les écoinçons, la traditionnelle représentation de l'Annonciation, très effacée :

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à gauche, l’Archange Gabriel, le lys à la main (la fleur du messager, et symbole de la pureté), fait son annonce à Marie: sa main gauche, poing fermé, a quelque chose de presque violent, le message ne laisse pas de place au doute et encore moins à la négation - Marie, même craintive,  ne peut pas se refuser.

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A droite, agenouillée sur son prie-Dieu, habillée de sa traditionnelle robe rouge et drapée dans son manteau bleu, Marie reçoit. Le rouge de la robe évoque pour moi le ventre fécondé de la Vierge (son humanité), tandis que le manteau bleu symbolise sa nature céleste et pure, le bleu étant une couleur extrêmement chère à produire à cette époque, et donc réservée au plus grand.Tous deux sont représentés dans la chambre close de la Vierge, symbolisée par une tenture rouge, et évoquant la pureté inviolable de Marie. En même temps que la parole du messager Gabriel, la Colombe de l’Esprit Saint a pénétré cet espace clos et elle est déjà à l’œuvre dans l’intimité de Marie.

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(avec Josquin Desprez: Gaude Virgo, Mater Christi)

https://youtu.be/rdZWmiYmlYc

 

Sur le piédroit à gauche de l’arc triomphal, sous l'Archange Gabriel,  Marie tient l'Enfant Jésus sur ses genoux. La Vierge présente l'Enfant à l'adoration des fidèles : à la fois Mater Christi  (Mère du Christ)  et Mater Ecclesiae (Mère de l'Eglise).

 

(avec Jacky Micaelli, Tota pulchra es Maria, d'après un manuscrit franciscain du XVIII° s.de Corse, revu par Marcel Perez) 

http://youtu.be/jJhLAND4gc0

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Sur l’autre piédroit de l’autre côté de l’arc, sous la Vierge de l'Annonciation, Saint Michel, le saint patron de la chapelle, noble guerrier armé et cuirassé, pèse les âmes et maîtrise de sa lance le Diable : une représentation omniprésente dans toutes nos chapelles à fresques. Saint Michel est le chef des milices célestes et le grand peseur d’âmes des chrétiens.

Castirla,le Diable sous la lance.jpg

Sous la lance de Saint Michel, Satan, toujours actif: il ronronne comme un gentil dragon apprivoisé, fouettant l'air de sa queue: méfiance! je crois qu'il tente d'attraper la petite âme vacillante qui glisse par-dessus bord du plateau de la balance ...

 

Castirla visage Christ détail.jpg

silence!

Certes le peintre de Castirla n'est sans doute pas un fresquiste virtuose, mais il a su donner toute leur intériorité à ses visages et transmettre avec sincérité les messages essentiels, sans gloses superflues ...

 

Une petite chapelle paisible 

où il fait bon revenir

et se retrouver.

 

Elle est située le long d'un chemin de transhumance autrefois très fréquenté, reliant la vallée du Golo à la région du Niolo, en passant par la saignée minérale de la Scala di Santa Regina...

 

Renseignements à la mairie de Castirla : 04 95 47 41 40

 

les fresques de la chapelle San Michele de Castirla

les fresques de la chapelle San Michele de Castirla

Pieve de Talcini

(je réactualise ici une note ancienne)

restaurées en 2012, en écho futur au commentaire que j'en ferai demain auprès des villageois de Castirla après la messe des Défunts dite à la chapelle San Michele:

merci à Monsieur le maire pour son invitation!

panneau.jpg

Voici ce que disait Mgr MASCARDI de cette petite chapelle après sa visite en 1589 (fol 244) _ cité par Geneviève Moracchini Mazel, p. 329 de son ouvrage (hélas épuisé) sur les églises romanes de Corse:

  " ... Eglise paroissiale San Michele, annexe de Sant'Andrea d'Omessa ... elle se trouveà un tiers de mille des habitations ... son toit laisse passer la pluie ... il y a deux portes ... les murs sont pleins de trous et comportent une fenêtre en mauvais état ... il y a une cloche pendue à un arbre ... l'autel est placé sous une abside peinte ... il y a 21 feux et 80 âmes".

 

la chapelle San Michele et cimetière.jpg

J'avais signalé en Août 2008 l'état inquiétant de cette petite chapelle préromane en son cimetière  ( une première fois sauvée de la ruine en 1963, première restauration des fresques en 1964, puis  toiture refaite en 1984 ...)

Entre temps les volontés conjuguées de la Municipalité de Castirla et de la Collectivité Territoriale de Corse  ont permis de restituer l'intégrité et tout le charme de cette modeste chapelle. La charpente (qui s'était effondrée sous l'action des intempéries et de la mérule) a été à nouveau refaite, elle a reçu une nouvelle couverture de teghje, l'extérieur et l'intérieur nous accueillent aujourd'hui à nouveau avec grâce et simplicité.

Dans l’abside l’on découvre une fresque certes naïve dans sa réalisation, mais qui maîtrise parfaitement la teneur des messages délivrés : 

vue d'ensemble.jpg

Ce que l'on découvre en entrant, vers l'abside, côté est

Castirla vers l'ouest.jpg  

et vers la porte ouest

Les fresques ( fin XV° siècle) restaurées en 2012 :

(par l'atelier Paillard Boyer de Montpellier)

ensemble abside.jpg

l'ensemble des fresques:

Dans l'abside en cul de four, au registre inférieur, le niveau des hommes, la série des douze apôtres dont on peut encore lire certains noms; au-dessus, pieds nus en dedans le personnage central du Christ en majesté, entouré du Tétramorphe (les quatre Evangélistes), Dans l'arc triomphal, la traditionnelle représentation de l'Annonciation; sous l'Ange Gabriel,  Marie tient l'Enfant Jésus sur ses genoux; sous la Vierge de l'Annonciation, Saint Michel, le saint patron de la chapelle.

Castirla Christ Pantocrator.jpg

au centre, le "Christ Pantocrator" : le Christ en majesté

Castirla bénédiction.jpg

Le Christ Pantocrator : bénissant de sa main droite, pouce, index et majeur levés- le geste de la bénédiction "latine". Dans cette représentation du Christ en majesté, telle qu'on le retrouve habituellement peint au centre des absides de nos chapelles à fresques, ce geste de bénédiction délivre en outre le message trinitaire, bénédiction donnée par le Père, le Fils et l'Esprit Saint. Il est le Logos incarné : « Au commencement était le Verbe (le Logos), et le Verbe était avec Dieu, et le Verbe était Dieu. » (Première ligne du Prologue de l’évangile selon Saint Jean).

Assis sur un trône, il tient sur ses genoux le Livre divin ouvert sur cette parole :

" EGO SUM LUX MUNDI ET VIA VERITAS ET VITA" :

« Thomas lui dit: Seigneur, nous ne savons où tu vas; comment pouvons-nous en savoir le chemin? Jésus lui dit: Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. Et dès maintenant vous le connaissez, et vous l'avez vu… » (Saint Jean 14- 6)

 

 

Castirla Ego sum lux mundi.jpg

 

" EGO SUM LUX MUNDI ET VIA VERITAS ET VITA"

  

Le Christ est entouré du Tétramorphela  personnification zoomorphe, ailée, symbolique  des quatre Evangélistes . Un peu de révision, en passant par les traditions ésotériques, de ces quatre éléments qui apparaissent dans l'Apocalypse de Saint Jean, hérités des civilisations égyptiennes et mésopotamienne, et  en particulier de la vision d'Ezechiel dans l'Ancien Testament :

Au registre inférieur les évangélistes « terrestres » :

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-  Le Taureau (ou le Boeuf) de Saint Luc : aux premiers versets de son évangile, Saint Luc fait allusion à Zacharie qui offre un sacrifice à Dieu. Ici, le sacrifice et la Mort, la terre, la résistance.

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- Le Lion de Saint Marc: la Résurrection, le feu, la force, le mouvement.

Au registre supérieur les évangélistes « célestes » :

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- L'Ange (ou l'Homme ailé) de Saint Matthieu:   l'Ange de la Naissance, l'intuition de la vérité. Cet évangile s'ouvre sur la généalogie de Jésus, en commençant par Abraham.

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-  L'Aigle de Saint Jean (ici très effacé, hélas): son évangile (l’Apocalypse), le dernier livre du Nouveau Testament,  commence par le mystère céleste. C’est l’évangile le plus visionnaire,  il évoque l'Ascension, l'air, l'intelligence, l'action.

  

Le Christ Pantocrator et le Tétramorphe sont évoqués dans les Visions prophétiques de l’Apocalypse de Saint Jean :

(…) « Après cela, je regardai, et voici, une porte était ouverte dans le ciel. La première voix que j'avais entendue, comme le son d'une trompette, et qui me parlait, dit: Monte ici, et je te ferai voir ce qui doit arriver dans la suite. Aussitôt je fus ravi en esprit. Et voici, il y avait un trône dans le ciel, et sur ce trône Quelqu'un était assis. Celui qui était assis avait l'aspect d'une pierre de jaspe et de sardoine; et le trône était environné d'un arc-en-ciel semblable à de l'émeraude. Autour du trône je vis vingt-quatre trônes, et sur ces trônes vingt-quatre vieillards assis, revêtus de vêtements blancs, et sur leurs têtes des couronnes d'or. Du trône sortent des éclairs, des voix et des tonnerres. Devant le trône brûlent sept lampes ardentes, qui sont les sept esprits de Dieu. Il y a encore devant le trône comme une mer de verre, semblable à du cristal. Au milieu du trône et autour du trône, il y a quatre Vivants constellés d'yeux devant et derrière.

Le premier Vivant est semblable à un lionle second Vivant est semblable à un jeune taureaule troisième Vivant a le visage d'un homme, et le quatrième Vivant est semblable à un aigle en plein vol. Les quatre êtres vivants ont chacun six ailes, et ils sont remplis d'yeux tout autour et au dedans. Ils ne cessent de dire jour et nuit: Saint, saint, saint est le Seigneur Dieu, le Tout Puisant, qui était, qui est, et qui vient! Quand les êtres vivants rendent gloire et honneur et actions de grâces à celui qui est assis sur le trône, à celui qui vit aux siècles des siècles, les vingt-quatre vieillards se prosternent devant celui qui est assis sur le trône et ils adorent celui qui vit aux siècles des siècles, et ils jettent leurs couronnes devant le trône, en disant: Tu es digne, notre Seigneur et notre Dieu, de recevoir la gloire et l'honneur et la puissance; car tu as créé toutes choses, et c'est par ta volonté qu'elles existent et qu'elles ont été créées. » (Apocalypse de Saint Jean – 4)

Castirla les douze apôtres.jpg

 

 Au registre inférieur, sous le Christ, et derrière l'autel, alternant sur fond ocre rouge ou blanc, les douze apôtres, représentés en pied et curieusement proportionnés, raccourcis, espace oblige. Leurs visages animés, dialoguant, de trois quart,  semblent suspendus à leur vision intérieure, et leurs mains prêchent et dialoguent: chacun tient précieusement le Livre ...

Castirla St Philippe et St Mathieu.jpg

certains portent leur nom au-dessus de leur tête, comme ici Saint Philippe et Saint Matthieu

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Saint André et Saint Taddée,

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Saint Jacques le Mineur

Castirla st Jacques (majeur) et autre saint.jpg

Saint Jacques le Majeur et un autre apôtre

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Saint Pierre et ses clefs sous le pied nu du Christ

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un autre apôtre, enseignant, index levé

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et encore celui-ci: le juvénile Saint Jean, me semble-t-il, l'apôtre bien aimé sous l'autre pied du Christ ...

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Saint Barthélémy, impressionnant écorché, armé du couteau de son supplice,

Castirla le double de St Barthélémy.jpg

et portant sur son épaule son double: sa peau ...

 

 Les prunelles se sont parfois effacées, sans doute initialement peintes "a secco"

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L'Annonciation

De part et d’autre de l'arc triomphal, dans les écoinçons, la traditionnelle représentation de l'Annonciation, très effacée :

Castirla Archange Gabriel.jpg

à gauche, l’Archange Gabriel, le lys à la main (la fleur du messager, et symbole de la pureté), fait son annonce à Marie: sa main gauche, poing fermé, a quelque chose de presque violent, le message ne laisse pas de place au doute et encore moins à la négation - Marie, même craintive,  ne peut pas se refuser.

Castirla Vierge Annonciation.jpg

A droite, agenouillée sur son prie-Dieu, habillée de sa traditionnelle robe rouge et drapée dans son manteau bleu, Marie reçoit. Le rouge de la robe évoque pour moi le ventre fécondé de la Vierge (son humanité), tandis que le manteau bleu symbolise sa nature céleste et pure, le bleu étant une couleur extrêmement chère à produire à cette époque, et donc réservée au plus grand.Tous deux sont représentés dans la chambre close de la Vierge, symbolisée par une tenture rouge, et évoquant la pureté inviolable de Marie. En même temps que la parole du messager Gabriel, la Colombe de l’Esprit Saint a pénétré cet espace clos et elle est déjà à l’œuvre dans l’intimité de Marie.

Castirla, la Vierge à l'Enfant.jpg

(avec Josquin Desprez: Gaude Virgo, Mater Christi)

https://youtu.be/rdZWmiYmlYc

 

Sur le piédroit à gauche de l’arc triomphal, sous l'Archange Gabriel,  Marie tient l'Enfant Jésus sur ses genoux. La Vierge présente l'Enfant à l'adoration des fidèles : à la fois Mater Christi  (Mère du Christ)  et Mater Ecclesiae (Mère de l'Eglise).

 

(avec Jacky Micaelli, Tota pulchra es Maria, d'après un manuscrit franciscain du XVIII° s.de Corse, revu par Marcel Perez) 

http://youtu.be/jJhLAND4gc0

Castirla saint Michel.jpg

Sur l’autre piédroit de l’autre côté de l’arc, sous la Vierge de l'Annonciation, Saint Michel, le saint patron de la chapelle, noble guerrier armé et cuirassé, pèse les âmes et maîtrise de sa lance le Diable : une représentation omniprésente dans toutes nos chapelles à fresques. Saint Michel est le chef des milices célestes et le grand peseur d’âmes des chrétiens.

Castirla,le Diable sous la lance.jpg

Sous la lance de Saint Michel, Satan, toujours actif: il ronronne comme un gentil dragon apprivoisé, fouettant l'air de sa queue: méfiance! je crois qu'il tente d'attraper la petite âme vacillante qui glisse par-dessus bord du plateau de la balance ...

 

Castirla visage Christ détail.jpg

silence!

Certes le peintre de Castirla n'est sans doute pas un fresquiste virtuose, mais il a su donner toute leur intériorité à ses visages et transmettre avec sincérité les messages essentiels, sans gloses superflues ...

 

Une petite chapelle paisible 

où il fait bon revenir

et se retrouver.

 

Elle est située le long d'un chemin de transhumance autrefois très fréquenté, reliant la vallée du Golo à la région du Niolo, en passant par la saignée minérale de la Scala di Santa Regina...

 

Renseignements à la mairie de Castirla : 04 95 47 41 40