10/04/2011
Lumière
à la lumière d'avril, au bord des chemins ...
... dans les jardins de la Balagne la danse des oliviers ...
16:09 Publié dans balades en Corse, Méditerranée, nature, sentiers de Balagne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : oliviers de balagne | Facebook |
05/04/2011
Balade sur les sentiers de Costa à Speluncatu ...
Sentiers de Balagne:
Dimanche matin, impossible de rester enfermés par ce beau temps.
Nous décidons de tester un parcours au pas de l'homme de la Montagne des Orgues : départ de la gare de Belgodère, puis Costa, Couvent de Tuani, Ville di Paraso, Speluncatu ... et retour.
Départ au matin depuis la gare de Belgodère
un enchantement floral: anémones , euphorbes, petits arums encapuchonnés, pastels, bourraches, pâquerettes, asphodèles, mourons et myosotis minuscules et leur fervent langage de vie ... corolles, étamines, anthères, stigmates, pétales, styles, pistils, calices, ovules, ovaires, réceptacles ...
fleurs habitées et zonzinnantes de bourdons et d'abeilles
petit crochet par San Bastianu, avant de terminer la grimpette vers Costa
Sur la place de Costa, silence paisible, presque trop: où sont donc passés les enfants d'antan?
l'église san Salvatore
... et toujours le même plaisir d'y retrouver son petit orgue ... Puis l'ancien couvent franciscain observentin de Tuani, d'où nous prenons le sentier de Ville di Paraso:
tout près du couvent, les ruines de l'église San Giovanni Battista, ancienne piévanie de Tuani, récupérée par la suite par san Michele de Speluncatu : une église romane entièrement reconstruite vraisemblablement au 14° siècle.
Derrière l'église, on aperçoit E Ville di Paraso et, plus haut, Speluncatu ... Dans le champ, pas le moment de traîner: beuglements des vaches et des taureaux, c'est le printemps vitaminé!
Une fois passé le beau village d' E Ville di Paraso, et grimpé le raidillon vers Speluncatu, nous voilà bientôt arrivés à la Collégiale Santa Maria Assunta
... et son orgue Crudeli ...
En redescendant de Speluncatu, visite amicale à la petite chapelle de la Nunziata
aux murs gravés de pieux graffitis
et par la porte béante, en face, le couvent de Tuani que nous regagnons
au retour, à l'entrée de Costa, le lavoir et la source généreuse à l'eau si légère
traversée de Costa, puis nouveau sentier ...
encore l'eau vive d'une source aménagée
et le long du sentier, la récolte des olives sur un lit de pâquerettes
sentier dallé, ombragé
et son pont génois par-dessus la rivière du Pinzu Corbu:
nous voici quasiment revenus, après quelques cinq heures de marche tranquille ... Si ça vous dit, c'est la bonne saison!
23:04 Publié dans balades en Corse, corse, la montagne des orgues, orgues historiques de Corse, sentiers de Balagne | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : sentiers de balagne, costa, ville di paraso, speluncatu | Facebook |
30/03/2011
Chemins de Croix de Corse
Sa mission inavouée, pour lui, le franciscain ligure d'Imperia: remettre au pas ces Corses turbulents et ingérables, les faire rentrer dans le giron de Gênes ... ce qui fait de lui une sorte d' agent-double sexagénaire très efficace sous son habit de moine. Nous reparlerons de cet évènement une autre fois, ce saint visiteur méritant d’être rencontré de plus près, tant il a marqué de son influence la dévotion populaire à l’époque : ce franciscain au verbe inspiré a développé cette vénération du Chemin de Croix en Corse, qui aujourd’hui encore se déroule dans nos églises avec une si grande ferveur, traditions et confréries à l'appui. Pour aider le peuple à vivre pleinement la Passion du Christ et "encadrer" cette dévotion, saint Leonard a encouragé la réalisation de « séries » de peintures représentant les quatorze stations du Chemin de Croix. La pédagogie par l'image, d'autant plus fortement vécue qu'elle est déambulatoire et chantée : le corps et l'esprit en mouvement.
IIème Station: Jésus reçoit la Croix sur ses épaules.
Le drame se met en place: acteurs, spectateurs, costumes identifiant les protagonistes...
IVème Station:Jésus rencontre sa Mère très affligée.
La Vierge, reconnaissable à son manteau bleu, se fait bousculer par la soldatesque. Derrière elle, Marie-Madeleine tient à la main le flacon de parfum. A droite, un féroce soldat fait avancer Jésus enchainé en le fouettant. Dialogue de proximité entre la Mère et le Fils, inscrit dans un cercle de silence.
Même station, ailleurs: la Vierge, pâmée, impuissante, reçoit en plein coeur la souffrance dynamique du Fils qui marche en parallèle vers son destin, ployé sous le poids de la Croix: entre eux, le vide et déjà l'absence.

6ème station: sainte Veronique, bravant le danger, se fraye un chemin entre les gardes et essuie le visage de Jésus.
Dernièrement j'ai circulé avec un passionné de tauromachie qui m'a signalé que ce geste de pieuse compassion a donné son nom à une célèbre passe : " la Véronique ", où le torero présente sa muleta face au taureau...
J'avoue mon incompétence en la matière, mais je dois dire que cette remarque a fait remonter en moi un fort souvenir: c'était le mois de juin 1989, nous étions, Pierre et moi en chemin à pied vers St Jacques de Compostelle, arrêtés pour une étape à Burgos. Il y avait ce soir là une corrida dans les arênes et Pierre m'avait convaincue que c'était l'occasion ou jamais d'assister à ce genre de choses, ce qui, honnêtement, ne m'attirait franchement pas du tout et même m'angoissait d'avance. Je ne veux pas ici raconter cette expérience particulière, sinon dire la perception physique, électrique, très chaude, de la foule excitée (ce que je n'avais plus ressenti depuis mai 68), se levant comme un seul homme à certaines passes, hurlant ses insultes lorsque dans l'arène est apparu un taureau qui refusait le combat malgré les blessures et qu'il avait fallu sortir avec l'aide de ces dames génisses... Tout ce que je sais, c'est que le petit appareil photo que j'avais acheté pour cette route de saint Jacques m'a lâché là, pendant cette corrida, et que je n'ai donc pris aucune photo de notre périple, seulement dessiné et écrit chaque soir... C'était mieux comme ça.
Ce tableautin fait partie de la très belle série d'un Chemin de Croix peint par Giacomo GRANDI en 1757. Restauré par Ewa POLI.

Le plus acharné, le plus grotesque et bestial ( barbaresque, bien sûr) en a perdu son froc et toute dignité , mais pas son bonnet : il s'est drapé dans le manteau rouge (du Christ en dérision) qui lui cache "les parties honteuses". Les autres méchants, gardes romains à la solde du Mal, cuirasses et âmes noires, tourmentent aussi avec une rare violence le pauvre Jésus tombé sous le poids de la Croix : pourtant celui-ci, fidèle à son image, ne cesse de sourire doucement... Derrière, le spectateur enturbanné et impuissant (que nous sommes), Simon le Cyrénéen ... Choisissez vite votre camp!
(Chemin de Croix de Giacomo Grandi).
XIème Station: Jésus est cloué sur la Croix (Carcheto).
Dans ce tableautin d'une autre main que les précédents, le peintre semble avoir croqué quelques villageois de Castagniccia, une région réputée pour ses menuisiers (le chataîgnier y est roi: du reste je parie que la Croix a été taillée dans l'un d'eux). Regardez: le petit garçon bien dru sur ses jambes aide son papa en lui tenant gentiment le panier d'outil... Ici le pinceau de l'artiste se fait moins agressif, plus quotidien...
Ailleurs, la même scène de crucifixion, mais évoquée de façon plus violente: les "méchants" bourreaux au visage basanné (l'autre!) se contorsionnent tandis que les "bons" assistent, impuissants, et restent sobres... L'index tendu du soldat au premier plan à droite souligne l'irrémédiable exécution du décret. Derrière lui, la foule des spectateurs...
Cette entreprise (nourricière pour les artistes de l'époque!) a enflammé l’imagination des peintres locaux qui ont su traduire avec force la dramaturgie de ces stations. Avec force, certes, mais aussi avec quelques fantaisies et quelques règlements de compte avec « l’autre », celui du mauvais côté du miroir, de la mer, celui qui razzie les villages, massacre, pirate, dont on garde des souvenirs douloureux au point aujourd'hui encore de traiter les enfants non baptisés de … « petits turcs » ! Et on force le trait des « méchants », délit de "sales gueules" basannées, grimaçants comme des diables, comme des turcs, des sarrasins, des maures, comme l’autre, quoi ! La règle étant que, comme dans toute bonne bande dessinée, l’on distingue du premier coup d’oeïl les bons (nous) des méchants (les autres).
Jésus se doit d’être paisible malgré la souffrance. Son visage reste humain en toute occasion, voire souriant : car il s’agit bien là d’exprimer son humanité face à la barbarie. Sa mère et les saintes femmes, elles aussi, gardent un maintien d’une grande dignité malgré la douleur. Leur gestuelle théâtralisée ne fait qu’exprimer des sentiments nobles et partagés par tous (nous) . En revanche les bourreaux se doivent d'être bestiaux et manifestement cruels...
XIIIème Station: Jésus est déposé de la Croix.
Ici il n’y a plus de place pour les méchants : voyez comme Joseph d’Arimathie retient dans ses dents le suaire… Saint Jean reçoit les jambes du Christ. Marie Madeleine baise ses pieds. La Vierge souffre et prie… Les visages sont graves et enfantins, signature particulière de ce bon peintre local d'origine toscane (né en 1735 à Lucques) qui fit en Corse sa carrière d'artiste et sa vie ( marié à une corse de de San Lorenzo, en Castagniccia, il y finira ses jours en 1821). Il a beaucoup oeuvré dans les églises et "produit" de nombreux Chemins de Croix de cette facture efficace et populaire... Et quand je parle de produire, c'est qu'il fut particulièrement productif!

XIV ème Station: Jésus est mis au tombeau.
A nouveau Giacomo Grandi, et ses drapés tourbillonnants. Tout le poids du Christ plombant le linceul porté par les hommes. Aux femmes, les langes du nouveau-né, aux hommes les langes de la mort drap. Aux hommes, l'action, aux femmes, la compassion? N'est-ce pas un peu vite dit? Je reviendrai là-dessus.
(à suivre)
08:52 Publié dans patrimoine populaire de Corse, semaine sainte en corse | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : corse, chemins de croix, patrimoine populaire, giacomo grandi, francescu carli | Facebook |
29/03/2011
L a planète Terre, patrimoine de nos enfants ?
La Terre, patrimoine de nos enfants:
le Japon, deux semaines après ...
l'effroi et la compassion devant l'indicible:
ce site d'images saisissantes nous a été adressé par une amie d'enfance qui vit à Tokyo.
> http://www.theatlantic.com/infocus/2011/03/japan-earthquake-two-weeks-later/100034/
Fukushima: une catastrophe naturelle conjuguée à l'imprudence des hommes. Prévisible désastre pour démiurges pervers et myopes : de quel prix les générations futures des enfants de nos enfants devront-elles payer nos choix frénétiques?
"Nous n'avons pas de calendrier concret nous permettant, actuellement, de dire dans combien de mois ou d'années la crise sera terminée." ( Sakae Muto, vice-président de Tepko) . Il aurait pu ajouter "ni si cette crise aura un jour une fin " : à qui le tour ? Bulgarie? France? Nous voici, bon gré mal gré, solidaires dans cette course infernale: pour ceux qui aiment les frontières étanches, mauvaise pioche!
"Ad mortem festinamus"
Douce petite planète des hommes, vers quel destin te hâtes-tu ?
21:56 Publié dans la mort, nature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : japon, fukushima, ad mortem festinamus, le nucléaire | Facebook |
27/03/2011
La Lybie, résonnance avec le poète Mohammed al Faytouri
La "MARE NOSTRUM, la Méditerranée aux mille et un destins entremêlés n'en finit pas de résonner au coeur de tous ceux qui la vivent depuis toujours ou qui l'ont un jour choisie, de quelque rive que l'on soit et quelque langue que l'on y parle. Méditerranée polyglotte où se disent dans une lumière éclatante "l'intime correspondance des cieux, de l'ombre effroyable des dieux et celle prégnante des morts, de la toute-puissance et noueuse humilité des mères, des guerres, de la résistance à la tyrannie dans les maquis et par les mots du poème, d'une maison bien-aimée conservée ou perdue, de l'extrême plaisir des sens que le soleil allume (...) (Eglal Errera: introduction à l'Anthologie des Poètes de la Méditerranée, Poésie/ Gallimard)
Tandis que la Corse s'apprête à célébrer selon l'usage la Semaine Sainte, dressant ses sepolcri, tressant bientôt ses palmes, répétant ses chants, le Perdonno, le Stabbat Mater, la Via Crucis, ses Lamentations, préparant ses processions ... voici quelques passages de ce poème de Mohammed al Faytouri ( né en 1930), sur l'autre rive, évoquant d'autres cortèges, d'autres souffrances, d'autres révoltes, d'autres mères orphelines de leurs enfants.
En résonnance avec les "évènements" actuels de Lybie, et d'une façon générale avec toutes les révoltes en cours.
(Méditerranée minérale, du côté de la Scala)
"IL EST MORT DEMAIN
Il est mort
Aucune goutte de pluie ne s'est attristée
Aucun visage humain ne s'est assombri
La lune n'a pas survolé sa tombe de nuit
Aucun ver paresseux n'y a déployé son corps
Aucune pierre ne s'est fendue
Il est mort demain
cadavre sali
linceul oublié
tel un rêve ...
le peuple s'est réveillé
et a traversé le champ des roses au crépuscule
comme un ouragan
il est mort
dans son âme noircie incendiée un passé de sang et de gibets suspendus
des cris de révolte dans les prisons
visages douloureux et fendillés des vieilles
bras tordus dressés comme des faucilles
yeux où plonge l'ombre des potences
(Rencontre avec la Mère, Chemin de Croix de Carcheto)
ô mon fils
en quel lieu les soldats ont-ils emmené ton visage
pourquoi m'ont-ils privé de l'odeur de ta chemise?
mon fils si beau dans l'éclat de sa jeunesse
marchait sur les élans des coeurs
le geôlier a cadenassé la porte de sa grande prison
une chaîne a rampé
et le fouet a enveloppé la nuit de lamentations
(la soldatesque du sepolcru à Ficaja)
et toi mon père
reviendras-tu avant l'hiver?
tu nous trouveras en pleurs
reviens-nous
ma mère mes soeurs et moi
nous bruissons de pleurs
(...)
(compassion des femmes du sepolcru à Castiglione)
ils ont cogné de nuit à la porte et sont entrés
qui êtes-vous?
Que voulez-vous?
Que portez-vous?
Une fois son cadavre posé auprès du mur
J'ai scruté le visage des souvenirs
Et sèché mes pleurs avec les larmes des autres
demain le cortège de la faim passera par notre rue
verdissez les années de la disette
tombez ô pluie
noyez les champs de blé et de riz
noyez le fleuve
essuyez de votre main de cendre la tristesse des arbres
viendra un jour où les moissons seront à moi
à moi le ciel le monde le cours du ruisseau
quand prendra fin la famine de la terre
et celle des humains"
(...)
Ce poème (accompagné de quelques images populaires de la Passion en Corse) fait donc partie de cette très belle Anthologie des Poètes de la Méditerranée ( poètes contemporains), chez Poésie Gallimard, préfacée par Yves Bonnefoy qui commence par ce tître: " Moins une mer que des rives" ... Un beau livre en bilingue, qui "donnera à lire et à entendre dix-sept langues telles qu'on les écrit ou qu'on les parle aujourd'hui", avec chaque fois le poème dans sa langue et son alphabet original ... Un enrichissement et une évidence pour tous ceux qui refusent d'être enfermés dans des frontières étroites.
Et encore ceci, du poète macédonien Vlada Urosevic:
" DEI OTIOSI
C'est le temps maintenant de la chute des dieux,
Dans les villes partout s'abattent les statues.
Quelque part une foule enragée en criant
Les abat, les traîne quelque part dans la nuit
Comme on le fait avec les morts en temps de peste.
Aucune statue ne va rester.
Si vous vous promenez, il faut y prendre garde,
Il pourrait bien en choir une sur votre tête.
L'histoire ressemble à un dépot d'ordures
Où viennent s'entasser des têtes en bronze.
On constate après coup
Qu'elles étaient creuses.
Ne nous berçons pas d'illusions.
Le ciel ne restera pas longtemps vide
Ni les places sans statues.
Il y a quelqu'un qui invente en silence déjà
Un usage nouveau pour d'anciens piédestaux."
avis!
15:34 Publié dans corse, Méditerranée, poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : anthologie des poètes de la méditerranée, lybie, corse, mohammed al-faytouri, vlada urosevic | Facebook |