19/11/2012
Jugement dernier : le poème eschatologique d'Autun
le Jugement dernier d'Autun
avec Olivier Messiaen et le Quatuor pour la fin du Temps (1941):
http://youtu.be/DjZ3HAIfGwo
http://youtu.be/hybAbTbh5wY
en ces temps inquiets et troublés,
où les anges de l'Apocalypse embouchent leurs terribles trompettes pour annoncer la Fin des Temps,
je réédite cette note de novembre 2010 sur le tympan de la cathédrale Saint Lazare d'Autun, d'autant plus volontiers que nous lui avons dernièrement à nouveau rendu visite et dévotion en ce mois de novembre.
J'en profite pour signaler la parution du dernier numéro d'Arts Sacrés
(n° 20) et en particulier de son dossier sur "la fin des temps":
passionnant!
"En ces temps-là, après une terrible détresse, le soleil s'obscurcira et la lune perdra son éclat. Les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées. Alors on verra le Fils de l'homme venir sur les nuées avec grande puissance et grande gloire. Il enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde, de l'extrémité de la terre à l'extrémité du ciel" (Evangile selon Saint Marc, 13, 24-32)
avec notre frère Gislebertus,
le tympan de la cathédrale Saint Lazare d'Autun:
quelques images du Jugement Dernier
Autun, cathédrale Saint Lazare,
l'ensemble du porche qui, à l'origine, jouxtait un cimetière.
Le trumeau, refait au XIX° siècle, porte les sraues de Saint Lazare, au centre, et de ses soeurs. La première voussure intérieure, aujourd'hui vide, accueillait à l'origine les vingt-quatre vieillards de l'Apocalypse (on a retrouvé quelques-unes des têtes). Sur la voussure extérieure, on reconnait les signes du Zodiaque ainsi que les Travaux des mois (de janvier à décembre en partant de la gauche ).
Au centre du tympan, la figure lumineuse du Christ en majesté dans sa mandorle. A sa droite le Ciel, la Jérusalem Céleste, la Vierge, le Soleil (le Nouveau Testament); à sa gauche, la pesée des âmes, l'Enfer, les prophètes Enoch et Elie, la Lune (l'Ancien Testament).
Voici venu le moment de la Parousie: la seconde venue du Christ dans sa gloire à la fin des temps et le Jugement dernier :
"Quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire, escorté de tous les anges, alors il prendra place sur son trône de gloire. Devant lui seront rassemblées toutes les nations, et il séparera les gens les uns des autres, tout comme le berger sépare les brebis des chèvres." (Evangile selon Saint Matthieu, 25, 31- 32)
Tout autour, que de monde!
à sa droite - coté Nouveau Testament, au plus haut des cieux, Notre-Dame assise sur un trône, paumes levées pour l'adoration . A son côté, un ange de l'Apocalypse sonne de sa trompe.
et, faisant pendant, à sa gauche, côté Ancien Testament, les prophètes Enoch et Elie, les deux Témoins de la Fin des Temps
au son de la trompette:
DEBOUT LES MORTS!
Voici venue l'heure du Jugement dernier,
la main de Dieu tient la balance: c'est la "Psychostasie",
la pesée des âmes :
d'un côté la douceur, l'harmonie des formes,
de l'autre le chaos, la monstruosité des corps hybrides.
Saint Michel Archange fait pencher la balance du côté des élus : c'est que, dans ce contexte, l'âme des élus pèse plus lourd que celle des damnés -
"Tu as du poids à mes yeux" [Isaïe 43-4], cité dans l'excellent article du frère Philippe Markiewicz sur "Les jugements derniers dans les églises" (Arts Sacrés, n° 20)
à la droite du Christ,
les Elus et les Réprouvés ...
"Alors le Roi dira à ceux de droite: "Venez les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume qui vous a été préparé depuis les origines du monde. Car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger; j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire, j'étais un étranger et vous m'avez accueilli, nu et vous m'avez vêtu, malade et vous m'avez visité, prisonnier et vous êtes venus me voir." (...)( St Matthieu, 25, 34-36)
les petites âmes ont cherché et trouvé refuge et sécurité dans les vagues de sa robe, ...
en marche dans l'attente du jugement, tête levée vers le ciel et toute la tendresse du monde:
le père et la mère se tiennent par la main. Elle le retient et le force à se retourner: "Eh! regarde le petit, il s'est réveillé lui aussi!"
Venez, les enfants, c'est par ici! L'ange indique le bon chemin
Répondant à l'appel des trompettes des anges, tous, nus ou habillés, ont le visage tendu vers la lumière: dame, enfant, évêque ...
... moinillon, croisé ...
Si menus, si fragiles, il faut les aider: regardez l'ange qui hisse à bout de bras cette petite âme pour la faire entrer dans la Jérusalem céleste, tandis qu'un petit enfant s'accroche à ses jambes ... Et à côté voilà que saint Pierre, bienveillant, saisit les mains d'un autre marmot: gestes de compassion, de douceur ...
Pour ce faire, il s'est détourné quelques instants du groupe des saints en adoration ...
... devant le Christ revenu à la fin des temps et qui accueille, mains et bras ouverts, l'humanité entière. Révélé dans sa mandorle soutenue par les anges, il est la porte, la voie, la lumière pour toutes les créatures ("EGO SUM LUX MUNDI ET VIA VERITAS", comme on pourrait lire sur le livre tenu par le Christ Pantocrator de nos petites chapelles à fresques de Corse - et d'ailleurs ...). Sur le pourtour de sa mandorle on peut lire:
" OMNIA DISPONO SOLUS MERITOSQUE CORONO; QUOS SCELUS EXERCET ME JUCICE POENA COERCET" ( Seul, Je dispose de tout et couronne les mérites. La peine que j'inflige comme juge retient ceux qu'entraîne le vice.)
Et sous Ses pieds, une longue inscription:
à sa droite, côté Elus:
"QUISQUE RESURGET ITA QUEM NON TRAHIT IMPIA VITA ET LUCEBIT EI SINE FINE LUCERNA DIEI" (Ainsi ressucitera quiconque ne sera pas victime d'une vie impie)
Et à sa gauche, côté Damnés:
"TERREAT HIC TERROR QUOS TERREUS ALLIGAT ERROR NAM FORE SIC VERUM NOTAT HIC HORROR SPECIERUM" ( Que cette terreur terrifie ceux que détient l'erreur terrestre car l'horreur de ces images montre ce qui les attend)
A Sa gauche, côté damnés, cuirassés comme des insectes, les affreux grimaçants à longues pattes hurlent leur fureur de voir échapper leurs proies ... Le petit monstre dans la balance a l'air de grogner: "si j'avais su !".
Tandis que l'ange de l'Apocalypse souffle, souffle , souffle dans son énorme trompette pour réveiller les morts, déjà le grand jugement a commencé: la gueule du Léviathan avale, avale, avale les damnés crochetés...
(avec Saint Matthieu, 25, 41-44:)
"Puis il dira encore à ceux de gauche: "Allez loin de moi, maudits, dans le feu éternel qui a été préparé pour le Diable et ses anges. Car j'ai eu faim et vous ne m'avez pas donné à manger, j'ai eu soif et vous ne m'avez pas donné à boire, j'étais un étranger et vous ne m'avez pas accueilli, nu et vous ne m'avez pas vêtu, malade ou prisonnier et vous ne m'avez pas visité." Et ceux-ci lui demanderont à leur tour:" Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé ou assoiffé, sans gîte ou sans vêtement, malade ou prisonnier, et de ne point te secourir ?"
Dessous, la grande solitude des Damnés: toute cette souffrance longuement ruminée qui alourdit les têtes, fléchit les genoux, effondre les âmes, isole:
définitivement condamnés, chassés , exilés sans espoir de retour ...
les exclus de la lumière "sont reconduits à la frontière" manu militari
trop tard: deux serpents lui mordent les mamelles
l'avare
l'ivrogne et son tonneau: en ce pays béni de vignobles, il avait pourtant des circonstances atténuantes, non?
et celui là , les genoux immobilisés entre ses mains - faute d'avoir marché vers la lumière - crie sa terreur entre les griffes de Satan ...
"Alors il leur répondra:" En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous n'avez rien fait pour l'un de ces tout petits, pour moi non plus vous n'avez rien fait." Et ils s'en iront, ceux-ci à une peine éternelle, et les justes à une vie éternelle."
Celui, du moins le pense-t-on, qui a insufflé la vie à ce monde de pierre, dégageant amoureusement chaque corps de sa gangue minérale, l'inscrivant dans cette chorégraphie spontanée, chaleureuse, charitable, tendre pour les élus, compatissante pour les damnés, c'est Gislebertus d'Autun, ce génial sculpteur du XII°siècle .
Voyez, il a signé (du moins on peut le penser) sous les pieds du Christ:
" GISLEBERTUS HOC FECIT"
... tout ça à cause de notre petite mère Eve!
et à nouveau Messiaen, et dans le texte s'il vous plait!:
http://youtu.be/UeSVu1zbF94
23:07 Publié dans apocalypse, art roman, la mort | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : autun, eschatologie, jugement dernier, parousie, apocalypse, psychostasie, gislebertus, olivier messiaen, quatuor pour la fin du temps, enoch et elie | Facebook |
15/11/2012
Flore de l'Agriate: annonce de la 5ème journée de l'Agriate
5 ème journée de l'Agriate consacrée à la flore
Je relaie bien volontiers cette information transmise par Isabelle
Guyot, chargée de Mission pour l'Agriate:
" Le Département de la Haute-Corse, le Conservatoire du littoral et l'association 'les amis des Agriate' ont le plaisir de vous annoncer que la 5ème journée de l'Agriate se déroulera le 24.11.2012 à partir de 10h30 au camping de l'Ostriconi et sera consacrée à la flore du territoire (voir affiche en pièce jointe).
Seront abordées :
- les plantes aromatiques et leurs principaux usages, avec Stéphanie Orsini de l'Association "Fior' di vita", et Stan Leclercq et Julien Fauconnier de l'Association balanine d'agroécologie "Una Lenza da annacquà", qui feront sur place une distillation d'huile essentielle de lentisque,
- les espèces endémiques, les plantes protégées, la flore d'intérêt patrimonial et les plantes introduites (et invasives) du site avec Alain Delage du Conservatoire Botanique National de Corse (Office de l'Environnement).
Une petite randonnée est prévue à partir de 13h30 pour découvrir la flore des dunes et des zones humides du site.
Pour les personnes souhaitant participer à l'intégralité de la journée, il faut prévoir un pique nique, des chaussures confortables et si possible des bottes pour la traversée des cours d'eau."
Isabelle Guyot me confirme par ailleurs, suite à la récente note sur la ferme d'Ifana, que " le Conservatoire du littoral a l'intention de remettre en valeur ce beau site, avec l'installation sur place d'un agriculteur (...), et pour cela actuellement un groupe d'architectes et dingénieurs travaillent au projet de restauration des bâtiments."
Voici des informations réconfortantes!
(à suivre)
10:52 Publié dans corse, environnement en Corse, fleurs, patrimoine de corse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : agriate, flore corse, ifana, conservatoire du littoral | Facebook |
12/11/2012
la prochaine exposition du Musée de la Corse, à Corte.
Une programmation du Musée de la Corse qui nous intéresse tout particulièrement pour l'année à venir:
" La Corse et la musique. Entre tradition et modernité "
( décor du petit orgue Saladini de la maison Giuliani: cetera et clavier)
Extrait de la présentation à retrouver sur le site du Musée:
http://www.musee-corse.com/index.php/fre/Nos-expositions/Les-expositions-en-preparation/La-Corse-et-la-musique.-Entre-tradition-et-modernite
" L'exposition ouvrira ses portes en juin 2013 ...
Le sujet choisi, permet d’aborder le phénomène de la musique, perçu comme une entité identitaire que le peuple corse ressent, transmet et a su alimenter depuis des siècles.
La période historiquement abordée de cette exposition, se déroule du dernier quart du XIXème siècle jusqu’à nos jours et embrasse toutes les formes d’expression musicale répertoriables, allant de l’opéra à la chanson corse, de la danse aux musiques instrumentales, des chants polyphoniques emprunts du sacré et du profane, tout en tenant compte des précieux rouages nécessaires à leurs transmissions.
Une sémantique poétique entre une spécificité d’expression artistique et verbale est liée à la langue corse et à la musique. Cette fusion est impliquée dans la vie de tous les jours ainsi qu’aux différents lieux de son territoire et cela au rythme des saisons. Elle en est un symbole permanent.
Cette symbiose unique implique une étude descriptive des moyens mis en œuvre par la communication, la diffusion et l’apprentissage de la pratique et de la création musicale.
Ce pouvoir musical alimente un mouvement ininterrompu, intensifié de toutes ses particularités en exprimant sa propre ontologie par une force de cohérence et de cohésion exceptionnelles.
L’éternelle jeunesse de la musique corse tient en elle son passé, son présent et son avenir. De sa tradition populaire, de son oralité depuis toujours, de sa musique écrite et celle dite savante depuis le XXème siècle, sont enrichies années après années, des particularités de sa typologie originelle.
La musique corse permet de définir les éléments immanents d’une richesse humaine et sociale au-delà du temps.
Commissaire général d'exposition :
Joseph-François KREMER-MARIETTI, Directeur de la culture et du patrimoine de la Collectivité territoriale de Corse.
Commissaire d'exposition :
Philippe SALORT, ethnomusicologue, chargé du secteur de musicologie générale au musée de la Corse.
Commissaire associé d'exposition :
Bernard PAZZONI, ethnomusicologue, responsable de la Phonothèque du musée de la Corse."
Vaste et riche programme ! Ne doutons pas que que toutes les pratiques musicales seront abordées, qu'elles soient populaires ou plus bourgeoises, qu'elles soient collectives ou individuelles, pratiques qui reflètent fidèlement le tissu humain de chaque village ou des villes.
Nul doute que les musiques traditionnelles seront à l'honneur, après l'oeuvre pionnière de Felix Quilici sillonnant la Corse au lendemain de la guerre, riche de ces kilomètres d'enregistrement (dont a hérité le Musée de la Corse) qui mettaient en lumière l'incroyable diversité de la musique et des musiciens sur l'île, mais aussi sa cohésion profonde.
Il est également vrai que la musique se jouait aussi dans les demeures des notables, une musique écrite, celle-là, et au goût du jour: il m'est arrivé de rencontrer dans les maisons des Sgiò (notables villageois) un piano ancien, voire un piano-forte, près duquel dormait encore toute une littérature jouée autrefois par les jeunes filles "de bonne famille" : entre deux chansons mélancoliques, toutes ces réductions d'opéras à la mode dont on était friand à l'époque.
Ces mêmes opéras qui pouvaient également alimenter l'inspiration de l'organiste* en quête d'une bonne ouverture solennelle pour la messe, parfois vigoureusement ponctuée par la " Banda Militari" ,
(la Banda Militari de l'orgue de Muro)
quitte à jouer par la suite une petite valse sentimentale à l'offertoire ou quelque polka guillerette pour le retour de la communion ... Il suffit de lire certaines méthodes d'harmonium et d'orgue de la seconde moitié du XIX° siècle ( comme celle d'Alexandre Bruneau qu'avait eu entre les mains au petit séminaire l'ancien curé de Belgodère) pour comprendre combien les frontières entre profane et sacré sont perméables. Dans le nord de la Corse en particulier, l'esthétique orchestrale, influencée par l'opéra, s'épanouit en cette fin du XIX° siècle avec les orgues de la firme Agati-Tronci (de Pistoia) et offre aux villageois les plus modestes comme aux notables le partage des joies d'une musique plutôt populaire, variée dans ses sonorités et ses émotions ...
Ajoutons que nos organistes de village, bons musiciens d'oreille et rendant service à l'église, abordaient à la messe le clavier de l'orgue avec autant de spontanéité que, pour leurs sérénades ou leurs contre-danses, les boutons de leur accordéon diatonique ou que le manche de leur violon. Le répertoire favori de l'ancien organiste d'Aregno pour ses sorties de messe, (et qui a laissé des souvenirs émus chez les anciens du village) était : " Etoile des neiges" , de quoi affronter sereinement le restant de la semaine !
( Nous évoquons un temps où les distractions n'étaient pas, comme aujourd'hui, pléthoriques)
Bref, j'espère que les orgues de Corse, qu'ils soient joués par des organistes confirmés ou "de routine", trouveront aussi la place qu'ils méritent dans cette exposition, d'autant plus qu'ils ont baigné à cette époque, comme les chants, le quotidien de la communauté ou du moins participé chaque dimanche à la fête liturgique.
Je rappelle aussi à ce sujet que les orgues, sortant de l'espace liturgique, ont parfois trouvé place dans les salons de musique des Sgio du XIX° siècle, comme le petit orgue d'Anton Giuseppe Saladini ( début XIX° s.) construit pour la maison Giuliani, à Muro, et acquis par le Musée de la Corse ou comme celui que le facteur d'orgue Gaspard Domini construisit en 1876 à Feliceto dans sa maison familiale pour enseigner la musique à ses nombreux enfants:
À ce propos, vous pouvez visiter la note concernant notre cher Gaspard Domini, auteur de cinq orgues en Corse entre 1867 et 1902 :
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2008/08/06/gaspard-domini1.html
Ajoutons enfin que la facture d'orgue insulaire a engendré l'éclosion de cet art monumental des tribunes qui faisait encore la fierté des villageois des décennies après la mort de leur créateur. Citons, (extrait du livre de Sébastien Rubellin: L'Orgue Corse de 1557 à 1963, éditions Piazzola, page 161) cet article du Bastia-Journal daté du 9 Janvier 1905, sous le titre
"Les vieilles orgues de la Collégiale Insigne de Speloncato"
"Parmi les monuments remarquables, et ils sont nombreux, de cette église, nous signalerons à ses visiteurs, amateurs de sculpture, peinture, musique, la tribune ou l'orchestre, d'où émerge le buffet contenant l'orgue.
Que l'on se figure une admirable coquille marine ailée, semblant s'élancer dans l'espace, aux sons entraînants, sublimes, d'une musique religieuse.
Ce monument est l'oeuvre, non, le chef-d'oeuvre d'un enfant de Speloncato, Anton, Giuseppe, Domenico, Saladini, célèbre ébéniste, sculpteur du premier Empire dont les meilleurs meubles datent de 1806 à 1840.
Aux descendants de cet homme de génie, qui habitent Speloncato, Bastia, et le Cap Corse, nous souhaitons de s'illustrer en ébénisterie comme leur ancêtre [...]"
( la cetera de Salvatore Saladini )
Enfin, entre autres ouvrages sur le sujet, signalons à nouveau ce beau livre posthume d'Antoine Massoni paru en 2006 (après sa disparition en 2003) chez Piazzola et consacré aux musiques de Corse:
qui succède à des années d'étude menées par "E voce di u cumune", concrétisées par des publications comme: " Etat des recherches sur les instruments traditionnels en Corse ( Accademia d'Ivagabondi, 1981), ou " Contributions aux recherches sur le chant corse" (Centre d'ethnologie française, Musée national des arts et traditions populaires, Associu e voce di u cumune, 1992).
Voir également l'ouvrage de Dominique Salini ( professeur à l'Università di Corsica): Musiques traditionnelles de Corse (publié en 1996 : A Messagera/ Squadra di u Finusellu).
* Comme en témoignage le livre d'orgue manuscrit des Stacchino, père et fils organistes à Bonifacio à la fin du XIX° siècle et au XX° siècle: je garde un très beau souvenir de notre rencontre avec J.B. Stacchino, alors très âgé, en compagnie du tout jeune Bernardu Pazzoni dans les années 1980.
Voir la note:
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2010/11/05/cimetiere-bonifaziu-avec-jean-tardieu.html
00:20 Publié dans corse, livres sur la corse, musique traditionnelle corse, orgues historiques de Corse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : museu di a corsica, la corse et la musique, antoine massoni | Facebook |
27/10/2012
Agriate: la ferme d'Ifana
Dans l'Agriate en cet automne 2012
une (chaude!) balade
à la rencontre de la ferme génoise d'Ifana
avec les fidèles amies Colette, Chantal et Hélène ...
Tout d'abord, je signale ce petit ouvrage précieux et charmant , écrit par un amoureux des Agriate, Jean-Michel CASTA et accompagné de bien jolies illustrations de Fabien SEIGNOBOS - publié par le Conservatoire du Littoral, Actes Dud/ Dexia Editions. Le Conservatoire du littoral a acquis depuis 1979 5.514 hectares, dont 35 Kilomètres de côtes qui sont désormais protégées et surveillées.
Je vous renvoie, pour la présentation de l'Agriate, improprement nommé " Désert des Agriates", à quelques sites . Le premier, daté de 2007, établit le diagnostic de cette région et c'est certainement l'approche la plus pertinente pour quiconque souhaîte découvrir et comprendre en profondeur cette magnifique région et la politique difficile de sauvegarde d'un patrimoine exemplaire :
www.agriate.org/documents/diagnostic_agriate0307.pdf -
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2009/06/19/monte-revincu-et-chiesa-nera-14-juin-avec-colette-chantal-et.html
Ce jour-là, nous avions décidé d'aller visiter ou revisiter la ferme d'Ifana, en partant du Domaine de l'Ostriconi sur la N 1197 ...
En ce mois d'octobre, les pluies ont eu le temps de réveiller la nature de sa torpeur estivale. Journée chaude, en dépit de ce milieu d'automne : le ciel un peu voilé fait chanter les verts dans ce vaste paysage de collines et de montagnes.
En chemin, cette occupation forte:
un oriu,
habitation troglodyte aménagée dans un abri sous roche,
utilisée par les anciens agriculteurs venus de Balagne ou du Cap Corse de la fin du printemps jusqu'à l'automne (après labours et semailles), puis par les bergers en transhumance d'hiver. Elle nous raconte la vie ancienne dans l'Agriate, une vie rude sur des sols souvent pierreux et revêches , un peuplement nomade, riche d'activités qu'il nous faut à présent imaginer: s'il reste encore quelques bergers, les nombreux petits cultivateurs d'autrefois ont disparu. Les incendies cataclysmiques ont détruit une partie de cette région autrefois si cultivée qu'elle avait reçu ce nom d'Agriate (ager, le terrain cultivé ou cultivable): à partir du moment où la nécessité vitale ne maintient plus les hommes sur leur territoire, la désertification commence et les jours de grand vent, les feux peuvent déferler à leur aise ... Ce qui fut le cas du dernier grand incendie de 1992, massacrant faune et végétation . Depuis la vie a repris, mais les arbres cultivés ne se sont pas renés de leurs cendres,
laissant désormais la place aux oliastres, au maquis,
aux chasseurs et aux randonneurs ...
festin de couleurs : les arbousiers fleurissent et fructifient
deux pagliaghji ( pailliers) au bord de la piste, avec le toît arrondi, caractéristique de la région.
après deux petites heures de marche à travers la solitude du maquis, des cystes, des arbousiers, des oliastres, d'une végétation opiniâtre et généreuse resurgie au lendemain du feu, saine, sobre, libre, cavalcadant sur la pierraille, ô combien odorante ...
et soudain, au loin,
la voilà, imposante, orgueilleusement dressée en son vallon, sur son territoire organisé, maîtrisé, scandé de murs, d'enclos, de jardins, planté d'oliviers, de fruitiers ...
la ferme génoise d'Ifana et ses dépendances,
Construite au XVII° siècle pour répondre à la politique génoise de développement de l'agriculture, la ferme d'Ifana sera tout d'abord gérée par la famille aristocratique génoise des Spinola: " Ceux-ci s'engageaient à développer la culture du blé, de la vigne et de l'olivier, ainsi qu'à bâtir ou à consolider les tours littorales" ((J.M. Casta, " Les Agriate", opus cité plus haut). L'histoire du domaine d'Ifana suit l'histoire de la Corse: après 1769, confisqué sous l'Ancien Régime, balloté entre bien national ( sous la Révolution) et propriété privée, il finit, et cela est heureux, par être acquis par le Conservatoire du littoral,
qui a déjà mis la toîture des deux principaux bâtiments hors d'eau, la grande maison de maître et la bergerie.
la somptueuse bergerie, surmontée d'un étage où logeait le berger,
longue de ses 25 m, avec ses arcades et sa voûte basse dit assez l'opulence du domaine.
Devant la façade de la grande demeure, un vieil orme, miraculé des feux,
distille sa lumière à travers un feuillage encore bien vivace,
résiste et veille sur le vallon : oliviers eux aussi rescapés des flammes... murs, douceur d'un paysage travaillé au long des siècles.
près de la maison,
le four à pain, prêt à reprendre du service.
Au rez-de-chaussée de la maison, les pièces réservées à l'exploitation:
comme ce palmentu (pressoir),
portant sur son reste de crépi d'énigmatiques incisions ... Un compte ? oui, peut-être, mais de quoi?
puis à l'étage , l'abandon des anciennes et nobles pièces d'habitation...
avec cette cheminée aménagée de la cuisine
et sur une cloison, ces extraordinaires graffiti historiques :
" Souvenir inoubliable de joie 8 mai 1945",
accompagné de croix de Lorraine,
et de drapeaux tricolores : témoins de l'histoire contemporaine, échos émouvants et inattendus de la Seconde Guerre mondiale en Corse * ...
Nous en sommes réduits à imaginer les auteurs de ces inscriptions: des résistants, ou de simples habitants de la vallée libérés des contraintes de cette époque troublée?
Tout autour, scandés de murs de perres sèches, de beaux champs et leurs oliviers préservés, où s'entend encore le travail de ces générations d'hommes et de femmes pour qui sait écouter ce que murmurent les pierres et les arbres
et un peu plus haut, bien ventée, l'aghja:
par ses dimensions, cette très grande aire de battage signe elle aussi la richesse du domaine d'Ifana.
à côté, ce pommier sauvage
Il est temps de laisser - à regret - derrière nous cet ensemble encore façonné par tant de témoignages du labeur humain et de la volonté politique d'une mise en valeur programmée de la Corse par ses divers "gestionnaires". Gageons que le Conservatoire du littoral saura trouver les subsides nécessaires à la restauration et la sauvegarde de ce patrimoine si particulier et charhé d'histoire, et qu'il saura dégager une politique efficace pour le transmettre et le gérer au mieux des intérêts de la collectivité.
* A lire au sujet de cette période tourmentée de la Seconde Guerre en Corse l'excellent livre d'Hélène CHAUVIN: " La Corse à l'épreuve de la guerre, 1939-1943" , dans la collection Chroniques, Vendémiaire Editions.
18:11 Publié dans balades en Corse, corse, découverte du patrimoine en Corse, livres sur la corse | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : agriate, ostriconi, ferme génoise d'ifana, oriu, seconde guerre mondiale en corse | Facebook |
21/10/2012
petite offrande de la paix du jardin
Menue actualité de la paix au jardin,
en cette fin d'après-midi tranquille
reverdie après les pluies dernières
paix lumineuse pleine de grâce
comme prière d'angelus
cyclamens, pâquerettes, herbelettes bien tendres de l'automne:
bonne nouvelle avant la fin des temps
et en son territoire, non pas dévoré, mais camouflé
le petit dieu du jardin
accueille en souriant le lierre du temps
06:42 Publié dans corse, nature | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook |