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26/02/2013

Comment on s'accapare le bien public - U Levante

Pour information, diffusons cette brève écologique du Purgatoire!




 


U Levante
Association de protection de l’environnement en Corse


  LE DON CÉSAR, UN CINQ ÉTOILES à PORTIVECHJU
Comment on s'accapare le bien public.
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22/02/2013

Montemaggiore - l'église Saint Augustin de Montemaggiore

Sant'Agustinu, église paroissiale de Montemaiò -

Pieve de Pino, Diocèse de Sagone -

a ghjesgia  Sant'Agustinu chjama à l'aiutu!

A l'aide!

 

Montemaiò blog.jpg

Façade tournée vers la plaine, l'église Sant'Agustinu a fière allure, se détachant du village sur fond de montagne enneigée ...

Une silhouette qu'elle n'a pas toujours eu:

 

" (...) la description de Mgr Mascardi * montre que l'édifice se présentrait en son temps comme une église romane; déjà alors elle avait remplacé la piévanie et servait de paroisse :

" ... Elle est assez grande ... les murs sont peints et blanchis ... le maître-autel est placé sous une abside ... il possède une croix peinte ert dorée ... du côté de l'Evangile se trouve un siège épiscopal ... le vase d'eau bénite du baptistère est de forme ronde ..."

( Geneviève Moracchini-Mazel,   Les églises romanes de Corse, 1967, p. 265)

* Petit rappel: Mgr Nicolao Mascardi, originaire de Sarzana, fut évêque de Mariana de 1584 à 1599. Nommé par le Pape Sixte V visiteur apostolique de toute l'île, il visita tous les diocèses de Corse et laissa de ses visites des descriptions très précises et fort précieuses pour les chercheurs. 

San Rainiero Piévanie de Pino copie.jpg 

La piévanie de Pino dont il est question est l'église romane San Raniero : nous reviendrons une autre fois sur cette église pisane du XII° s., qui se trouve entre les deux villages de Montemaiò et Lunghignanu.

 

Sant'Agustinu.jpg


L'église Saint Augustin de Montemaggiore, classée Monument historique depuis 1992 se signale de loin par son campanile, érigé en 1651, sa sobre façade baroque au fronton surélevé et par la présence harmonieuse de sa grande coupole centrée, sur un plan en croix grecque très proche de la cathédrale St Jean-Baptiste de Calvi.  La lumière ruisselle à l'intérieur sur les murs blanchis à la chaux, jouant sur les stucs et les marbres : une très belle église, fortement remaniée à la période baroque, entre 1750 et 1760, victime un siècle plus tard d'un incendie (le 12 octobre 1875), et qui aujourd'hui souffre de nombreux maux liés à l'humidité,  l'impécuniosité, la désaffection du culte,  etc ... litanie trop bien connue et qui navre ceux qui s'investissent comme ils peuvent dans leur patrimoine ( en particulier, la responsable du patrimoine à la mairie,  Valérie Berti, qui se bat depuis des années pour faire connaître ce patrimoine, organisant des visites guidées) .

Il reste, malgré les dégradations, une impression de lumineuse élégance rythmée par un langage très élaboré de pilastres, de stucs, et par la présence remarquable de marbres polychromes, une richesse insoupçonnable de l'extérieur.

Quelques images:

Maître-Autel -Montemaggiore blog.jpgl

Dans le choeur, le maître-autel du premier tiers XVIII° s. apporte une touche colorée, avec le choix de ses différents marbres chaleureux, le diaspro di Sicilia, le  giallo da Siena ...

Montemaggiomarbres maître-autel.jpg

 

et accueille avec grâce la belle statue de  l'Immaculée Conception et ses compagnons les angelots. Un ensemble anonyme d'une bien belle facture. 

 

Montemaggiore Vierge de face.jpg

Monteggiore Immaculée Conception blog.jpg

Montemaggiore pieds nus.jpg

 La Vierge écrase de ses pieds nus le Serpent et le croissant de lune ...

 

ange de gauche autel Montemaggiore blog.jpg

l'angelot cariatide de droite, à la base de l'autel:

de son index il invite à contempler la Vierge de l'Immaculée Conception.

Les marbres tiennent mieux le temps que la structure de maçonnerie sur laquelle ils sont plaqués...

ange de gauche.jpg

l'angelot de gauche, en symétrie du précédent

angelot 1.jpg

et les deux anges en adoration sur leur  petit nuage:

angelot 2.jpg

Une autre oeuvre inattendue dans cette église de village:

Chaire - Montemaio blog.jpg

la magnifique chaire de prêche en marbres polychromes, de la même époque que le maître-autel.

 

église st augustin de montemaggiore,giovan battista moro,luigi de ferrari

Elle ne déparerait pas une riche église de ville:  comme l'autel, elle évoque un passé insigne révolu. 

Ce que l'on sait:

"Après la ruine du diocèse calvais, il y a quatorze siècles, Monte-Maxiore accueillit une partie de la population du littoral fuyant l'insécurité. En 1574, Mgr Girolamo Leoni d'Ancona, évêque de Sagone, organise ici un synode, avant de devenir archevêque de Chieti. En 1612, Mge Dom Pierre Lomellino installe un séminaire diocésain jusqu'alors situé à Vico." (Cursichella n°3, Montegrosso, p.88)

Cette belle église de Montemaggiore est donc consacrée à Saint Augustin, ainsi que le signale le cartouche central au-dessus du choeur:

 

dédicace St Augustin copie.jpg

St Augustin Salvatore Angeli.jpg

Dessous, la toile représentant  Saint Augustin d'Hippone (350/430), faisant l'offrande au Christ, d'une main, de son coeur embrasé d'amour et de l'autre, de sa plume avec laquelle il écrit ...  la Cité de Dieu?

St Augustin détail copie.jpg

Il a déposé sa mitre et sa crosse au pied du crucifix et semble suspendu dans son inspiration. Sa chappe, richement décorée de fleurettes dorées, fait reconnaître à Michel-Edouard Nigaglioni la main du peintre: il s'agit de Salvatore ANGELI ,  peintre actif en Corse en 1727 (cf. l'Encyclopédie des peintres actifs en Corse, de M.E. Nigaglioni). Cette peinture pourrait être contemporaine de l'ensemble du maître-autel de marbre. La toile a beaucoup souffert.

Dessous, dans sa châsse, une belle statue de St Augustin en bois polychrome:

 

église st augustin de montemaggiore,giovan battista moro,luigi de ferrari


Deux autres toiles mériteraient largement notre sollicitude et nos soins, toutes deux de la main de Giovan Battista MORO*:

 

l'Assomption Moro 1746.jpg

Cette Assomption est signée et datée, Gio. Battista Moro 1706:

Signature Moro 1706 - Assomption.jpg

 (Merci, Michel-Edouard!)

L'autre, malheureusement beaucoup plus abîmée, représente la Sainte Famille: 

Montemaggiore Sainte Famille copie.jpg

Ici Moro  nous tient sous le charme des personnages encore visibles.

Plutôt que la Sainte Famille, il faudrait nommer cette toile les deux Trinités car il s'agit bien de cela: au  premier plan, à l'horizontale,  la Trinité terrestre avec Marie et Joseph (le malheureux a perdu la tête ...)  encadrant l'Enfant Jésus;

Trinité céleste.jpg

puis au centre et à la verticale,  croisant la Trinité terrestre par la personne de Jésus, la Trinité Céleste, avec la colombe de l'Esprit Saint, surmontée de Dieu le Père. Il émane une grande douceur de cette toile:

St Famille la Vierge.jpg

Jésus marche vers son destin, donnant la main comme tout jeune enfant à sa mère.

Les visages de Jésus et de Marie sont empreints d'une certaine mélancolie et d'humanité,

 

visage Vierge Moro.jpg


visage Jésus.jpg

 



 



 



 comme si Giovan Battista Moro avait fait là de véritables portraits d'après nature. L'Enfant Jésus, le regard grave, lèvres serrées, s'avance; Marie, toute jeune et sérieuse, nous dévisage. Dommage que le bon Joseph ait été effacé de cette Trinité terrestre !


* " Giovan Battista MORO: peintre corse, domicilié à Bastia où sa longue activité picturale est attestée de 1699 à 1761. (...) Giovan Battista Moro est l'un des meilleurs peintres de l'école bastiaise du XVIII° siècle." (M.E. Nigaglioni, Encyclopédie des peintres actifs en Corse)

***

Nous avions évoqué, dans une note précédente le très  bel autel baroque d'Antonio ou Giuseppe Cagliata, dédié au Rosaire:

 

 

 

Rosaire ensemble copie.jpg

 

dédicace Rosaire.jpg

surmonté du cartouche contenant sa dédicace,

pieusement et très tardivement

réécrite en français ...

 

 


ensemble au-dessus Rosaire.jpg

Sous ce cartouche l'on pourra se régaler du discours exubérant et baroquissime qui accompagne le Rosaire: une foule céleste d'angelots bruissent tout autour de la gloire rayonnante de la colombe de l'Esprit Saint, toujours proche de la Vierge,  

 

détail stucs Rosaire.jpg

et , s'apprêtant à couronner Marie, deux anges tiennent la couronne au-dessus de sa tête ...

 

Rosaire toile.jpg

La toile représente, comme d'usage, les quinze mystères du Rosaire encadrant la remise du Rosaire par la Vierge à l'Enfant à St Dominique  et Ste Catherine de Sienne. En prédelle, les Âmes du Purgatoire:

à retrouver sur la note précédente:  

http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2013/02/10/montemaggiore.html

***

 

Un autre chef-d'oeuvre monumental trône au fond de l'église, dialoguant par-dessus le transept avec le maître-autel:

Orgue L De Ferrari 1831 copie.jpg

L'orgue construit par Luigi De FERRARI en 1831

Rappelons que cet organaro est né à Santa Margherita Ligure en 1807. Luiggi arrive en Corse probablement en 1830 (âgé donc d'à peine 23 ans) par la Balagne où il intervient pour refaire une grande partie de la tuyauterie de l'orgue de son oncle Ciurlo à la cathédrale St Jean-Baptiste de Calvi. Il signe entre 1830 et 1831 ses trois premiers instruments en Corse, à Sainte Marie de Calvi, à Montemaggiore et à Lumio. Luiggi De Ferrari est un facteur  d'orgue important pour la Corse de cette première moitié du XIX° siècle : Luiggi construira treize orgues sur l'île entre 1830 et 1845, répondant, comme son collègue et concurrent direct Anton Pietro Saladini, l'organaro de Speloncato, à une forte demande de la part de communautés rurales soucieuses d'affirmer leur réussite et leur foi à travers ce majestueux instrument.

Le soin apporté à la construction et au décor des tribunes et des buffets de l'époque contribue grandement à la beauté de l'église. Même muet, l'orgue est une oeuvre belle à regarder.Montemaio tribune et orgue.jpg


L'orgue de St Augustin est seulement signé sur l'une des portes latérales du buffet à la peinture: 1831, Luiggi.

Modestie oblige!

 

Cet orgue est protégé par les Monuments historiques. Malheureusement ce magnifique instrument reste sans voix, faute de subsides ...

***

L'on ne peut qu'espérer que la communauté trouve  l'énergie et les moyens de sauver son église et qu'un riche mécène se penche sur la qualité de ce patrimoine remarquable  de Sant' Agustinu et la sorte de son état actuel de dégradation : c'est certainement l'une des plus belles de Balagne.


  


 

 

 



 

 


 

 

17/02/2013

Montemaggiore - éléments d'histoire

 

Monte-Maxiore , Montemaiò , Montemaggiore ...

l'un des trois villages de Montegrosso,

Pieve de Pino, région Balagne

montemaiò,hugolone,corduvella

un peu d'histoire

 

En 1999, était publié sous la direction de Joseph Santana, ce précieux ouvrage collectif, dans la série trop vite disparue de "CURSICHELLA, la Corse au microscope", le Cursichella n° 3, sur la région de l'Ostriconi, Ghjunsani, Balagne, Calvi, Falasorma ... Cet ouvrage avait la volonté, dans un cadre réduit et dans une publication modeste dans ses moyens, , de proposer à  la curiosité du lecteur et de l'éventuel touriste, un grand nombre d'informations sur chaque village de cette région élargie, en s'appuyant sur les compétences des érudits locaux. Comme toujours on peut relever ça et là d'éventuelles erreurs, mais il faut bien dire que rien à ce jour n'a encore remplacé ce travail important et chaleureux, en dépit de l'économie de la publication.

Je  citerai donc, concernant Montemaiò, la partie historique de la page qui lui est consacré. Mes éventuels commentaires seront en rouge.

 

" A l'est de Crispignanu, la D 451 franchit le Fiume Seccu [ qui à cette saison, et compte tenu d'une météo généreuse en neige, bouillonne et n'a plus rien de sec!] par le Ponte-Vecchiu, remplaçant un médiéval Ponte allo Lataccio. A 800 m au nord, on situe les vestiges d'une église San Martinu, élevée au 11° siècle en remplacement d'un sanctuaire paléochrétien entouré d'une nécropole, situé à proximité d'un village antique."

[ Ecoutons Geneviève Moracchini-Mazel en 1967 dans Les églises romanes de Corse, vol. 2, p.265":

Le lieu-dit San Martino se trouve dans la plaine de Montemaggiore au pied de la colline de Cordovella et est planté d'une magnifique oliveraie. La chapelle a quasiment disparu lors de l'établissement de la maison de campagne de M. Giudicelli. Celui-ci y a vu autrefois l'arase des murs, un sarcophage de granit placé le long d'un mur de la nef, et à l'Est de l'abside la pierre de l'arringo sur laquelle juraient les témoins dans les séances qu'y tenaient un tribunal régional. Cette dalle surélevée de 0,80m au-dessus du sol, recouvrait des ossements effrités; elle était longue de 2m, large de 0,90m et épaisse de 0,15 à 0,20m.

M. Giudicelli pense que la chapelle avait été bâtie au XI° S. et suppose qu'elle a recouvert un sanctuaire plus ancien, ce qui est très probable en raison de l'importance de la nécropole païenne et paléochrétienne située autour de San Martino - dont maints vestiges intéressants ont été mis à jour au cours de travaux de culture."]

Corduvella.jpg

le site de Corduvella

Reprenons le récit du Cursichella:

"On a retrouvé ici une pierre dite de l'Arringu (visible en l'oratoire  Sant'Antone de Calvi), autour de laquelle les Anciens se réunissaient pour prendre les décisions importantes. Selon les chroniques, un site voisin aurait été choisi vers l'an 950 par le dernier des six rois maures de Corse, Hugolone ou Nugolone, comme capitale de son royaume. Son nom de Corduvella, comme la Cordoue espagnole, issu de l'antique Corduba romaine, signifie petit mont. Vers l'an 995, après la Reconquête, Nugolone se réfugie chez son ami Saoud, roi des Baléares, et marie son fils Solim à la soeur du sultan du Maroc. Dotée d'une tour défensive, cette hauteur, qui a livré des vestiges préhistoriques, sera saccagée, puis à nouveau habitée jusqu'au 14° siècle.  A 2 km à l'ouest du Ponte-Vecchiu, la D.451 dessert un lieu-dit San Paolu, du nom d'un sanctuaire fondé dit-on par Saint Paul? A 500 m au nord se San Paolu, sur une hauteur, le château de Castiglione était le centre du fief de Pino, distinct du fief de Crispignanu. A l'abri de son château, le village abtritait une église San Buccariu [?] fêté le 8 avril. Victime au 17° siècle d'une terrible épidémie de peste, il sera brûlé par les gens de Montemaiò. "

[ "La colline de Cordovella, qui domine San Martino est concernée par maintes traditions orales relatives aux guerres relatives aux guerres de la reconquista contre les Musulmans au IX° s.; déjà au XV° s. le récit du chroniqueur Giovanni della Grossa* indique que les Sarrasins y avaient établi leur camp, ce qui est vraisemblable. Car cette colline - dite localement Capo ai Mori est une position stratégique de premier ordre qu'ont dû occuper toutes les civilisations; à l'époque romaine, il se pourrait qu'un camp fortifié, destiné à surveiller les riches plaines de la Balagne, y ait été installé. 

* Grossa (della G.) in Chronique dite de Filippini, T I, pp. 108 et 111: " Hugolone partit secrètement pendant la nuit et passa à Cordovella qui était un château situé près de l'endroit où se trouve aujourd'hui Calvi ..."

(après sa défaite): "Hugolone découragé s'enfuit à Corovella".

Il brûla cette place et ayant rappelé des vaisseaux qui avaient échappé, il s'y embarqua avec tous ses trésors et passa en Afrique ...".]


- idem, G. Moracchini-Mazel, dans  les Eglises romanes de Corse, p. 265.



 

 

église st Augustin Montemaggiore blog.jpg

La prochaine note sera consacrée à l'église Sant'Agustinu

(à suivre)

11/02/2013

tr: Bunifaziu. Construction sans permis

Je partage bien volontiers cette information de U Levante.


 De : "Newsletter Levante" 

Objet : Bunifaziu. Construction sans permis
 
U Levante
 Association de protection de l’environnement en Corse
 
• C'EST EN COURS
 Deux constructions nouvelles sur un site inconstructible à Bunifaziu. Le tout sans permis. Lire 
 (http://www.ulevante.fr/cest-en-cours-deux-constructions-nouvelles-sur-site-inconstructible-a-bunifaziu/ )
 
• C‘est l’État qui est en échec en Corse... Explique Manuel Valls. À Voir ( http://www.ulevante.fr/ )
 
U Levante : moi aussi j'agis. Lire
 ( http://www.ulevante.fr/adherer/ )
 
( http://www.ulevante.fr/ )
 

10/02/2013

Montemaggiore et les Âmes du Purgatoire

Où l'ombre de Don Miguel Mañara Vincentello de Leca y Colona (1627 - 1679) s'égare bien malgré lui à Montemaggiore et  rencontre son avatar Don Juan 

Montemaggiore village blog.jpg

Ces jours-ci, le village de Montemaggiore, tout voisin de Cassano, commune de Montegrosso, Pieve de Pino. Balagne.

Tout d'abord, je vous engage à une lecture passionnante, celle du long article écrit par notre ami Alfredo ORTEGA: " La Corse et Don Juan: la légende noire de Miguel Mañara" pour l'Adecec, à retrouver sur le site:

La Corse et Don Juan: la légende noire de Miguel Mañara

 
 
et je vous invite également à revisiter le documentaire réalisé par Paul Rognoni pour FR3 (Mareterraniu ): "Miguel Mañara, Ange ou Dom Juan"  - 
 
 Miguel Manara, Ange ou Dom Juan - Mareterraniu Productions
mareterraniu.com/?p=Documentaires&i...Miguel-Manara.
 
 
 
Si Prosper Mérimée ne mentionne pas l'épisode corse de Montemaggiore dans sa version de son Don Juan, il n'en reste pas moins à l'origine de la légende noire du don Juan corse lorsqu'il rédige "Les Âmes du Purgatoire" en 1834 : il connaissait bien  l'Espagne où il séjourne pour la première fois en 1830,  et où il fait la connaissance de la famille des Montijo, dont il deviendra un ami proche: Eugénie de Montijo, la future Impératrice des français, épouse de Napoléon III, n'a alors que quatre ans .
Dans sa nouvelle, il transforme le nom de Mañara en Maraña, et comme le signale l'ami Ortega, " Mérimée n'ignore pas que maraña en espagnol, veut dire embrouillamini, tout comme enmarañar, c'est embrouiller".
 
 Nous voilà avertis.
 
Je suis moi-même partie sur la trame d'une maraña aux fils embrouillés en regardant la copie du Don Rodrigo de Cordoba de Murillo. Dans cette enquête j'ai fait la rencontre imprévue de Esteban Bartolomé Murillo et de son cher ami Don Miguel Mañara, deux personnages de la Séville du XVII° siècle,  tout-à-fait historiques, remarquables et bien documentés. En ce qui concerne le vrai Don Miguel Mañara, je renvoie à nouveau, en résumé,  à l'excellent article d'Alfredo Ortega,  mais aussi au livre d'Enriqueta Vila Vilar: "LES CORZO ET LES MAÑARA , les Corses de Séville dans le commerce des Indes", Editions Alain Piazzola - 2004. Histoire de ces familles corses partant à l'aventure pour  réaliser leur destin sur des terres étrangères parfois si lointaines, suivant le sillage de Christophe Colomb, courageux, commerçants surdoués,  ambitieux, en quête de reconnaissance et d'ascension sociale et qui trouvent à Séville le creuset idéal de leur anoblissement ...
L' on apprendra, entre autres, que , construisant l'église (inaugurée en 1674) de la Caridad , institution hospitalière et charitable créée par Don Miguel Mañara, il va faire appel aux meilleurs artistes de l'époque pour enflammer la dévotion des Sévillans, et parmi eux, au plus sévillan des artistes de l'époque, à son ami Murillo, "qui fut le parrain de deux de ses fils" (A. Ortega). L'histoire ne dit pas si mon Santo Rodrigo de Cordoba faisait partie de cette aventure ...
 
Bref, le véritable Don Miguel Mañara est déjà un personnage d'une telle étoffe baroque et charismatique  qu'il n'était sans doute pas besoin de le charger d' un double mythique... Cela dit, revenons à Montemaggiore, lieu du forfait incestueux prêté par Esther Van Loo à son Don Juan lorsqu'elle rédige en 1950 son fantasque  "Le vrai Don Juan, Don Miguel de Mañara" .
 
Bref, dans cet embrouillamini don-juanesque, nous retiendrons de Mérimée qu'il fait démarrer sa nouvelle avec la contemplation par le petit Juan Maraña d'un tableau des Âmes du Purgatoire qui l'impressionne fortement et l'accompagne au fil de l'histoire,  entraînant in fine sa spectaculaire conversion.
 
Dans la très belle et souffrante église Saint Augustin de Montemaggiore, parmi les oeuvres les plus intéressantes,  il y a une toile  ...  qui n'a certainement pas inspiré le Don Juan de Mérimée! mais que je veux évoquer ici:

Montemaggiore - autel du Rosaire.jpg

l'autel du Rosaire et ses stucs raffinés datables, d'après notre amie Caroline Paoli,  des années 1770/1780 et "attribuables à l'un des frères Cagliata, Antonio ou Giuseppe, très actifs entre ces deux dates et originaire de Lunigiana.

 

Montemaggiore - Rosaire et Âmes du Purgatoire blog.jpg

accueille cette toile peinte et repeinte par des auteurs anonymes :

Remise du Rosaire Montemaggiore blog.jpg

au centre du tableau,. le sujet de la donation du Rosaire par la Vierge et l'Enfant à St Dominique et Ste Catherine de Sienne est tout-à-fait conforme à la norme. 

Tout autour du motif central, les quinze mystères du Rosaire déroulent leur efficace catéchisme:
 
Annonciation Rosaire Montemaggiore blog.jpgmystères douloureux Rosaire Montemaggiore.jpg

mystères glorieux blog.jpg

Tandis que sous cet ensemble habituel l'on découvre la raison de cette dévotion: il s'agit bien d'aider à la délivrance de ces  pauvres âmes du Purgatoire par la récitation du Rosaire. Je vous laisse découvrir le récit savoureux qu'en fait notre peintre anonyme de Montemaggiore:

Montemaggiore Âmes du Purgatoire -Rosaire copy.jpg

 

 Ne dirait-on pas une plaisante publicité pour quelque chaude station balnéaire?

bain de flammes blog.jpg

Rien de très terrifiant dans ce bain de flammes ... on est bien loin de la description fantasmée de Mérimée:

" Il y avait dans l’oratoire de la comtesse de Maraña un tableau dans le style dur et sec de Moralès, qui représentait les tourments du purgatoire. Tous les genres de supplices dont le peintre avait pu s’aviser s’y trouvaient représentés avec tant d’exactitude, que le tortionnaire de l’Inquisition n’y aurait rien trouvé à reprendre. Les âmes en purgatoire étaient dans une espèce de grande caverne au haut de laquelle on voyait un soupirail. Placé sur le bord de cette ouverture, un ange tendait la main à une âme qui sortait du séjour de douleurs, tandis qu’à côté de lui un homme âgé, tenant un chapelet dans ses mains jointes, paraissait prier avec beaucoup de ferveur. Cet homme, c’était le donataire du tableau, qui l’avait fait faire pour une église de Huesca. Dans leur révolte, les Morisques mirent le feu à la ville ; l’église fut détruite ; mais, par miracle, le tableau fut conservé. Le comte de Maraña l’avait rapporté et en avait décoré l’oratoire de sa femme. D’ordinaire, le petit Juan, toutes les fois qu’il entrait chez sa mère, demeurait longtemps immobile en contemplation devant ce tableau, qui l’effrayait et le captivait à la fois. Surtout il ne pouvait détacher ses yeux d’un homme dont un serpent paraissait ronger les entrailles pendant qu’il était suspendu au-dessus d’un brasier ardent au moyen d’hameçons de fer qui l’accrochaient par les côtes. Tournant les yeux avec anxiété du côté du soupirail, le patient semblait demander au donataire des prières qui l’arrachassent à tant de souffrances. La comtesse ne manquait jamais d’expliquer à son fils que ce malheureux subissait ce supplice parce qu’il n’avait pas bien su son catéchisme, parce qu’il s’était moqué d’un prêtre, ou qu’il avait été distrait à l’église. L’âme qui s’envolait vers le paradis, c’était l’âme d’un parent de la famille de Maraña, qui avait sans doute quelques peccadilles à se reprocher ; mais le comte de Maraña avait prié pour lui, il avait beaucoup donné au clergé pour le racheter du feu et des tourments, et il avait eu la satisfaction d’envoyer au paradis l’âme de son parent sans lui laisser le temps de beaucoup s’ennuyer en purgatoire."

 

à suivre!