22/02/2013
Montemaggiore - l'église Saint Augustin de Montemaggiore
Sant'Agustinu, église paroissiale de Montemaiò -
Pieve de Pino, Diocèse de Sagone -
a ghjesgia Sant'Agustinu chjama à l'aiutu!
A l'aide!
Façade tournée vers la plaine, l'église Sant'Agustinu a fière allure, se détachant du village sur fond de montagne enneigée ...
Une silhouette qu'elle n'a pas toujours eu:
" (...) la description de Mgr Mascardi * montre que l'édifice se présentrait en son temps comme une église romane; déjà alors elle avait remplacé la piévanie et servait de paroisse :
" ... Elle est assez grande ... les murs sont peints et blanchis ... le maître-autel est placé sous une abside ... il possède une croix peinte ert dorée ... du côté de l'Evangile se trouve un siège épiscopal ... le vase d'eau bénite du baptistère est de forme ronde ..."
( Geneviève Moracchini-Mazel, Les églises romanes de Corse, 1967, p. 265)
* Petit rappel: Mgr Nicolao Mascardi, originaire de Sarzana, fut évêque de Mariana de 1584 à 1599. Nommé par le Pape Sixte V visiteur apostolique de toute l'île, il visita tous les diocèses de Corse et laissa de ses visites des descriptions très précises et fort précieuses pour les chercheurs.
La piévanie de Pino dont il est question est l'église romane San Raniero : nous reviendrons une autre fois sur cette église pisane du XII° s., qui se trouve entre les deux villages de Montemaiò et Lunghignanu.
L'église Saint Augustin de Montemaggiore, classée Monument historique depuis 1992, se signale de loin par son campanile, érigé en 1651, sa sobre façade baroque au fronton surélevé et par la présence harmonieuse de sa grande coupole centrée, sur un plan en croix grecque très proche de la cathédrale St Jean-Baptiste de Calvi. La lumière ruisselle à l'intérieur sur les murs blanchis à la chaux, jouant sur les stucs et les marbres : une très belle église, fortement remaniée à la période baroque, entre 1750 et 1760, victime un siècle plus tard d'un incendie (le 12 octobre 1875), et qui aujourd'hui souffre de nombreux maux liés à l'humidité, l'impécuniosité, la désaffection du culte, etc ... litanie trop bien connue et qui navre ceux qui s'investissent comme ils peuvent dans leur patrimoine ( en particulier, la responsable du patrimoine à la mairie, Valérie Berti, qui se bat depuis des années pour faire connaître ce patrimoine, organisant des visites guidées) .
Il reste, malgré les dégradations, une impression de lumineuse élégance rythmée par un langage très élaboré de pilastres, de stucs, et par la présence remarquable de marbres polychromes, une richesse insoupçonnable de l'extérieur.
Quelques images:
l
Dans le choeur, le maître-autel du premier tiers XVIII° s. apporte une touche colorée, avec le choix de ses différents marbres chaleureux, le diaspro di Sicilia, le giallo da Siena ...
et accueille avec grâce la belle statue de l'Immaculée Conception et ses compagnons les angelots. Un ensemble anonyme d'une bien belle facture.
La Vierge écrase de ses pieds nus le Serpent et le croissant de lune ...
l'angelot cariatide de droite, à la base de l'autel:
de son index il invite à contempler la Vierge de l'Immaculée Conception.
Les marbres tiennent mieux le temps que la structure de maçonnerie sur laquelle ils sont plaqués...
l'angelot de gauche, en symétrie du précédent
et les deux anges en adoration sur leur petit nuage:
Une autre oeuvre inattendue dans cette église de village:
la magnifique chaire de prêche en marbres polychromes, de la même époque que le maître-autel.
Elle ne déparerait pas une riche église de ville: comme l'autel, elle évoque un passé insigne révolu.
Ce que l'on sait:
"Après la ruine du diocèse calvais, il y a quatorze siècles, Monte-Maxiore accueillit une partie de la population du littoral fuyant l'insécurité. En 1574, Mgr Girolamo Leoni d'Ancona, évêque de Sagone, organise ici un synode, avant de devenir archevêque de Chieti. En 1612, Mge Dom Pierre Lomellino installe un séminaire diocésain jusqu'alors situé à Vico." (Cursichella n°3, Montegrosso, p.88)
Cette belle église de Montemaggiore est donc consacrée à Saint Augustin, ainsi que le signale le cartouche central au-dessus du choeur:
Dessous, la toile représentant Saint Augustin d'Hippone (350/430), faisant l'offrande au Christ, d'une main, de son coeur embrasé d'amour et de l'autre, de sa plume avec laquelle il écrit ... la Cité de Dieu?
Il a déposé sa mitre et sa crosse au pied du crucifix et semble suspendu dans son inspiration. Sa chappe, richement décorée de fleurettes dorées, fait reconnaître à Michel-Edouard Nigaglioni la main du peintre: il s'agit de Salvatore ANGELI , peintre actif en Corse en 1727 (cf. l'Encyclopédie des peintres actifs en Corse, de M.E. Nigaglioni). Cette peinture pourrait être contemporaine de l'ensemble du maître-autel de marbre. La toile a beaucoup souffert.
Dessous, dans sa châsse, une belle statue de St Augustin en bois polychrome:
Deux autres toiles mériteraient largement notre sollicitude et nos soins, toutes deux de la main de Giovan Battista MORO*:
Cette Assomption est signée et datée, Gio. Battista Moro 1706:
(Merci, Michel-Edouard!)
L'autre, malheureusement beaucoup plus abîmée, représente la Sainte Famille:
Ici Moro nous tient sous le charme des personnages encore visibles.
Plutôt que la Sainte Famille, il faudrait nommer cette toile les deux Trinités car il s'agit bien de cela: au premier plan, à l'horizontale, la Trinité terrestre avec Marie et Joseph (le malheureux a perdu la tête ...) encadrant l'Enfant Jésus;
puis au centre et à la verticale, croisant la Trinité terrestre par la personne de Jésus, la Trinité Céleste, avec la colombe de l'Esprit Saint, surmontée de Dieu le Père. Il émane une grande douceur de cette toile:
Jésus marche vers son destin, donnant la main comme tout jeune enfant à sa mère.
Les visages de Jésus et de Marie sont empreints d'une certaine mélancolie et d'humanité,
comme si Giovan Battista Moro avait fait là de véritables portraits d'après nature. L'Enfant Jésus, le regard grave, lèvres serrées, s'avance; Marie, toute jeune et sérieuse, nous dévisage. Dommage que le bon Joseph ait été effacé de cette Trinité terrestre !
* " Giovan Battista MORO: peintre corse, domicilié à Bastia où sa longue activité picturale est attestée de 1699 à 1761. (...) Giovan Battista Moro est l'un des meilleurs peintres de l'école bastiaise du XVIII° siècle." (M.E. Nigaglioni, Encyclopédie des peintres actifs en Corse)
***
Nous avions évoqué, dans une note précédente le très bel autel baroque d'Antonio ou Giuseppe Cagliata, dédié au Rosaire:
surmonté du cartouche contenant sa dédicace,
pieusement et très tardivement
réécrite en français ...
Sous ce cartouche l'on pourra se régaler du discours exubérant et baroquissime qui accompagne le Rosaire: une foule céleste d'angelots bruissent tout autour de la gloire rayonnante de la colombe de l'Esprit Saint, toujours proche de la Vierge,
et , s'apprêtant à couronner Marie, deux anges tiennent la couronne au-dessus de sa tête ...
La toile représente, comme d'usage, les quinze mystères du Rosaire encadrant la remise du Rosaire par la Vierge à l'Enfant à St Dominique et Ste Catherine de Sienne. En prédelle, les Âmes du Purgatoire:
à retrouver sur la note précédente:
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2013/02/10/montemaggiore.html
***
Un autre chef-d'oeuvre monumental trône au fond de l'église, dialoguant par-dessus le transept avec le maître-autel:
L'orgue construit par Luigi De FERRARI en 1831.
Rappelons que cet organaro est né à Santa Margherita Ligure en 1807. Luiggi arrive en Corse probablement en 1830 (âgé donc d'à peine 23 ans) par la Balagne où il intervient pour refaire une grande partie de la tuyauterie de l'orgue de son oncle Ciurlo à la cathédrale St Jean-Baptiste de Calvi. Il signe entre 1830 et 1831 ses trois premiers instruments en Corse, à Sainte Marie de Calvi, à Montemaggiore et à Lumio. Luiggi De Ferrari est un facteur d'orgue important pour la Corse de cette première moitié du XIX° siècle : Luiggi construira treize orgues sur l'île entre 1830 et 1845, répondant, comme son collègue et concurrent direct Anton Pietro Saladini, l'organaro de Speloncato, à une forte demande de la part de communautés rurales soucieuses d'affirmer leur réussite et leur foi à travers ce majestueux instrument.
Le soin apporté à la construction et au décor des tribunes et des buffets de l'époque contribue grandement à la beauté de l'église. Même muet, l'orgue est une oeuvre belle à regarder.
L'orgue de St Augustin est seulement signé sur l'une des portes latérales du buffet à la peinture: 1831, Luiggi.
Modestie oblige!
Cet orgue est protégé par les Monuments historiques. Malheureusement ce magnifique instrument reste sans voix, faute de subsides ...
***
L'on ne peut qu'espérer que la communauté trouve l'énergie et les moyens de sauver son église et qu'un riche mécène se penche sur la qualité de ce patrimoine remarquable de Sant' Agustinu et la sorte de son état actuel de dégradation : c'est certainement l'une des plus belles de Balagne.
27/10/2012
Agriate: la ferme d'Ifana
Dans l'Agriate en cet automne 2012
une (chaude!) balade
à la rencontre de la ferme génoise d'Ifana
avec les fidèles amies Colette, Chantal et Hélène ...
Tout d'abord, je signale ce petit ouvrage précieux et charmant , écrit par un amoureux des Agriate, Jean-Michel CASTA et accompagné de bien jolies illustrations de Fabien SEIGNOBOS - publié par le Conservatoire du Littoral, Actes Dud/ Dexia Editions. Le Conservatoire du littoral a acquis depuis 1979 5.514 hectares, dont 35 Kilomètres de côtes qui sont désormais protégées et surveillées.
Je vous renvoie, pour la présentation de l'Agriate, improprement nommé " Désert des Agriates", à quelques sites . Le premier, daté de 2007, établit le diagnostic de cette région et c'est certainement l'approche la plus pertinente pour quiconque souhaîte découvrir et comprendre en profondeur cette magnifique région et la politique difficile de sauvegarde d'un patrimoine exemplaire :
www.agriate.org/documents/diagnostic_agriate0307.pdf -
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2009/06/19/monte-revincu-et-chiesa-nera-14-juin-avec-colette-chantal-et.html
Ce jour-là, nous avions décidé d'aller visiter ou revisiter la ferme d'Ifana, en partant du Domaine de l'Ostriconi sur la N 1197 ...
En ce mois d'octobre, les pluies ont eu le temps de réveiller la nature de sa torpeur estivale. Journée chaude, en dépit de ce milieu d'automne : le ciel un peu voilé fait chanter les verts dans ce vaste paysage de collines et de montagnes.
En chemin, cette occupation forte:
un oriu,
habitation troglodyte aménagée dans un abri sous roche,
utilisée par les anciens agriculteurs venus de Balagne ou du Cap Corse de la fin du printemps jusqu'à l'automne (après labours et semailles), puis par les bergers en transhumance d'hiver. Elle nous raconte la vie ancienne dans l'Agriate, une vie rude sur des sols souvent pierreux et revêches , un peuplement nomade, riche d'activités qu'il nous faut à présent imaginer: s'il reste encore quelques bergers, les nombreux petits cultivateurs d'autrefois ont disparu. Les incendies cataclysmiques ont détruit une partie de cette région autrefois si cultivée qu'elle avait reçu ce nom d'Agriate (ager, le terrain cultivé ou cultivable): à partir du moment où la nécessité vitale ne maintient plus les hommes sur leur territoire, la désertification commence et les jours de grand vent, les feux peuvent déferler à leur aise ... Ce qui fut le cas du dernier grand incendie de 1992, massacrant faune et végétation . Depuis la vie a repris, mais les arbres cultivés ne se sont pas renés de leurs cendres,
laissant désormais la place aux oliastres, au maquis,
aux chasseurs et aux randonneurs ...
festin de couleurs : les arbousiers fleurissent et fructifient
deux pagliaghji ( pailliers) au bord de la piste, avec le toît arrondi, caractéristique de la région.
après deux petites heures de marche à travers la solitude du maquis, des cystes, des arbousiers, des oliastres, d'une végétation opiniâtre et généreuse resurgie au lendemain du feu, saine, sobre, libre, cavalcadant sur la pierraille, ô combien odorante ...
et soudain, au loin,
la voilà, imposante, orgueilleusement dressée en son vallon, sur son territoire organisé, maîtrisé, scandé de murs, d'enclos, de jardins, planté d'oliviers, de fruitiers ...
la ferme génoise d'Ifana et ses dépendances,
Construite au XVII° siècle pour répondre à la politique génoise de développement de l'agriculture, la ferme d'Ifana sera tout d'abord gérée par la famille aristocratique génoise des Spinola: " Ceux-ci s'engageaient à développer la culture du blé, de la vigne et de l'olivier, ainsi qu'à bâtir ou à consolider les tours littorales" ((J.M. Casta, " Les Agriate", opus cité plus haut). L'histoire du domaine d'Ifana suit l'histoire de la Corse: après 1769, confisqué sous l'Ancien Régime, balloté entre bien national ( sous la Révolution) et propriété privée, il finit, et cela est heureux, par être acquis par le Conservatoire du littoral,
qui a déjà mis la toîture des deux principaux bâtiments hors d'eau, la grande maison de maître et la bergerie.
la somptueuse bergerie, surmontée d'un étage où logeait le berger,
longue de ses 25 m, avec ses arcades et sa voûte basse dit assez l'opulence du domaine.
Devant la façade de la grande demeure, un vieil orme, miraculé des feux,
distille sa lumière à travers un feuillage encore bien vivace,
résiste et veille sur le vallon : oliviers eux aussi rescapés des flammes... murs, douceur d'un paysage travaillé au long des siècles.
près de la maison,
le four à pain, prêt à reprendre du service.
Au rez-de-chaussée de la maison, les pièces réservées à l'exploitation:
comme ce palmentu (pressoir),
portant sur son reste de crépi d'énigmatiques incisions ... Un compte ? oui, peut-être, mais de quoi?
puis à l'étage , l'abandon des anciennes et nobles pièces d'habitation...
avec cette cheminée aménagée de la cuisine
et sur une cloison, ces extraordinaires graffiti historiques :
" Souvenir inoubliable de joie 8 mai 1945",
accompagné de croix de Lorraine,
et de drapeaux tricolores : témoins de l'histoire contemporaine, échos émouvants et inattendus de la Seconde Guerre mondiale en Corse * ...
Nous en sommes réduits à imaginer les auteurs de ces inscriptions: des résistants, ou de simples habitants de la vallée libérés des contraintes de cette époque troublée?
Tout autour, scandés de murs de perres sèches, de beaux champs et leurs oliviers préservés, où s'entend encore le travail de ces générations d'hommes et de femmes pour qui sait écouter ce que murmurent les pierres et les arbres
et un peu plus haut, bien ventée, l'aghja:
par ses dimensions, cette très grande aire de battage signe elle aussi la richesse du domaine d'Ifana.
à côté, ce pommier sauvage
Il est temps de laisser - à regret - derrière nous cet ensemble encore façonné par tant de témoignages du labeur humain et de la volonté politique d'une mise en valeur programmée de la Corse par ses divers "gestionnaires". Gageons que le Conservatoire du littoral saura trouver les subsides nécessaires à la restauration et la sauvegarde de ce patrimoine si particulier et charhé d'histoire, et qu'il saura dégager une politique efficace pour le transmettre et le gérer au mieux des intérêts de la collectivité.
* A lire au sujet de cette période tourmentée de la Seconde Guerre en Corse l'excellent livre d'Hélène CHAUVIN: " La Corse à l'épreuve de la guerre, 1939-1943" , dans la collection Chroniques, Vendémiaire Editions.
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15/10/2012
Castirla: Cappella San Michele, Pieve de Talcini
Visite ce jeudi 11 Octobre 2012
de la chapelle San Michele de Castirla
Pieve de Talcini
après sa récente restauration et son inauguration,
le 29 septembre dernier, jour de la Saint Michel
Voici ce que disait Mgr MASCARDI de cette petite chapelle après sa visite en 1589 (fol 244) _ cité par Geneviève Moracchini Mazel, p. 329 de son ouvrage (hélas épuisé) sur les églises romanes de Corse:
" ... Eglise paroissiale San Michele, annexe de Sant'Andrea d'Omessa ... elle se trouveà un tiers de mille des habitations ... son toit laisse passer la pluie ... il y a deux portes ... les murs sont pleins de trous et comportent une fenêtre en mauvais état ... il y a une cloche pendue à un arbre ... l'autel est placé sous une abside peinte ... il y a 21 feux et 80 âmes".
J'avais mis une "Brève du Purgatoire" (sic!) en Août 2008 pour signaler l'état inquiétant de cette petite chapelle en son cimetière ( une première fois sauvée de la ruine en 1963, première restauration des fresques en 1964, puis toiture refaite en 1984 ...)
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2008/08/16/breve-du-purgatoire-castirla-aout-2008.html
Entre temps les volontés conjuguées de la Municipalité de Castirla et de la Collectivité Territoriale de Corse (engagée dans son ambitieux programme de restauration de l'ensemble des chapelles à fresques de Corse - voir la note: http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2011/02/17/ou-en-sont-les-projets-de-restauration-des-chapelles-a-fresq.html ) ont permis de restituer l'intégrité et tout le charme de cette modeste chapelle. La charpente (qui s'était effondrée sous l'action des intempéries et de la mérule) a été à nouveau refaite, elle a reçu une nouvelle couverture de teghje, l'extérieur et l'intérieur nous accueillent aujourd'hui à nouveau avec grâce et simplicité.
Ce que l'on découvre en entrant, vers l'abside, côté est
et vers la porte ouest
Les fresques restaurées ( fin XV° siècle):
(par l'atelier Paillard Boyer de Montpellier)
l'ensemble des fresques:
Dans l'abside en cul de four, au registre inférieur, le niveau des hommes, la série des douze apôtres dont on peut encore lire certains noms; au-dessus, pieds nus en dedans le personnage central du Christ en majesté, entouré du Tétramorphe (les quatre Evangélistes), Dans l'arc triomphal, la traditionnelle représentation de l'Annonciation; sous l'Ange Gabriel, Marie tient l'Enfant Jésus sur ses genoux; sous la Vierge de l'Annonciation, Saint Michel, le saint patron de la chapelle.
au centre, le "Christ Pantocrator" : le Christ en majesté
bénissant de sa main droite, pouce, index et majeur levés - le geste de la bénédiction "latine". Dans cette représentation du Christ en majesté, telle qu'on le retrouve habituellement peint au centre des absides de nos chapelles à fresques en Corse, ce geste de bénédiction semble délivrer en outre le message trinitaire : une même bénédiction donnée par le Père, le Fils et l'Esprit Saint.
dans sa main gauche, le Livre divin ouvert:
" EGO SUM LUX MUNDI ET VIA VERITAS ET VITA"
" Jésus leur parla de nouveau, et dit : Je suis la lumière du monde; celui qui me suit ne marche pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie."
(Jean, 8, 12)
Le Christ est entouré du Tétramorphe, la personnification zoomorphe, ailée, symbolique des quatre Evangélistes . Un peu de révision, en passant par les traditions ésotériques, de ces quatre éléments qui apparaissent dans l'Apocalypse de Saint Jean, hérités des civilisations égyptiennes et mésopotamienne, et de la vision d'Ezechiel dans la Bible :
L'Ange (ou l'Homme ailé), Saint Matthieu:
l'Ange de la Naissance, l'intuition de la vérité
Saint Luc: Le Taureau (ou le Boeuf)
le sacrifice et la Mort, la terre, la résistance
Le Lion, Saint Marc:
la Résurrection, le feu, la force, le mouvement
L'Aigle, Saint Jean:
l'Ascension, l'air, l'intelligence, l'action
Au registre inférieur, sous le Christ, et derrière l'autel, alternant sur fond ocre rouge ou blanc, les douze apôtres, représentés en pied et curieusement proportionnés, racourcis, espace oblige. Leurs visages, de trois quart, semblent suspendus à leur vision intérieure, et leurs mains prêchent et dialoguent:
certains portent leur nom au-dessus de leur tête, comme ici Saint Philippe et Saint Matthieu
Saint André et Saint Taddée,
Saint Jacques le Mineur
Saint Jacques le Majeur et un autre apôtre
Saint Pierre et ses clefs sous le pied nu du Christ
un autre apôtre, enseignant
et encore celui-ci: le juvénile Saint Jean, il me semble, l'apôtre bien aimé sous l'autre pied du Christ ...
Saint Barthélémy, impressionnant écorché, armé du couteau de son supplice,
et portant sur son épaule son double: sa peau ...
Les prunelles se sont parfois effacées, sans doute initialement peintes "a secco" , comme ici:
(avec Josquin Desprez: Gaude Virgo, Mater Christi)
http://youtu.be/NGwZnvfqRCY
- les couleurs sont très altérées -
sur de pied-droit à gauche de l'arc triomphal, la Vierge présente l'Enfant à l'adoration des fidèles: à la fois Mater Christi (Mère du Christ) et Mater Ecclesiae (Mère de l'Eglise).
(avec Jacky Micaelli, Tota pulchra es Maria, d'après un manuscrit franciscain du XVIII° s.de Corse, revu par Marcel Perez)
http://youtu.be/jJhLAND4gc0
et de l'autre côté, armé et cuirassé, Saint Michel pèse les âmes et maîtrise de sa lance le Diable
... qui ronronne comme un gentil dragon apprivoisé, fouettant l'air de sa queue: méfiance! je crois qu'il tente d'attraper la petite âme vacillante qui glisse par-dessus bord du plateau de la balance ...
silence!
Certes le peintre de Castirla n'est sans doute pas un fresquiste virtuose, mais il sait donner toute leur intériorité à ses visages et transmettre avec sincérité les messages essentiels, sans gloses superflues ...
Une petite chapelle paisible
où il fait bon revenir
et se retrouver.
Elle est située le long d'un chemin de transhumance autrefois très fréquenté, reliant la vallée du Golo à la région du Niolo, en passant par la saignée minérale de la Scala di Santa Regina...
Renseignements à la mairie de Castirla : 04 95 47 41 40
22:33 Publié dans découverte du patrimoine en Corse, fresques de corse, iconographie des saints, restauration du patrimoine | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : castirla, fresques de san michele de castirla, tétramorphe, christ pantocrator, mater ecclesiae, tota pulchra es maria, jacky micaelli | Facebook |
06/08/2012
la Balagne et la Castagniccia, avec la Montagne des Orgues
Association Saladini de Speloncato
« LA MONTAGNE DES ORGUES »
à la découverte du PATRIMOINE
Des parcours initiatiques et festifs pour rencontrer la Corse autrement, vous immerger dans ses paysages et ses communautés, découvrir son histoire, son patrimoine, ses traditions rurales : des clefs pour vous ouvrir les églises, vous faire comprendre leur sens caché et entendre leurs orgues historiques que l’on vous joue.
(Belgodère, vu depuis a Torra a la Cima)
MARDI 7 AOÛT : en Balagne
Accueil à Belgodère à 9h place de l’église : église St Thomas ( orgue Lazari , 1761), puis découverte de Costa (San Salvatore, orgue anonyme début XIX° s.), Muro (Sta Nunziata, orgue Pagnini 1796/Agati Tronci 1878), Cateri (Ste Marie, orgue Domini 1902).
(les petits monstres du fronton du premier autel des Servites)
JEUDI 9 AOÛT : en CASTAGNICCIA
maisons de Castagniccia et terrasses
Accueil à Ponte Leccia à 9h sur le parking du Super U. Découverte des fresques de la chapelle San Tumasgiu à Castellu di Rustinu, des églises baroques de Piedicroce ( St Pierre et St Paul, et l’orgue le plus ancien de Corse, 1619), Verdèse (St Sébastien, orgue 1896 Stoppia Nova (Notre Dame du Carmel), La Porta ( St Jean-Baptiste, orgue 1780), enfin du site archéologique paléochrétien et roman de Santa Maria di Rescamone à Valle di Rustinu.
(le clavier de l'orgue de La Porta)
Ces parcours reposent sur le bénévolat et les fonds récoltés lors de ces journées contribuent à la restauration et à la valorisation du patrimoine. Ils sont recommandés par les guides : Routard, Bleu, Michelin, Geo , Arthaud, Balado, Petit Futé… et ont fait l’objet de nombreux reportages ( journaux, radios, télévisions nationales et européennes )
Renseignements et réservations au :
TEL/FAX : 04 95 61 34 85 - Portable : 06 17 94 70 72
Participation aux frais : 30 € par adulte. Gratuit pour les moins de 12 ans.
e mail : elizabethpardon@orange.fr
Site : www.montagnedesorgues.com/
12:17 Publié dans actualité des parcours de la Montagne des orgues, découverte du patrimoine en Corse, orgues historiques de Corse, patrimoine des chapelles à fresques en Corse | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : balagne, belgodère, servites de marie à belgodère, costa, muro, castagniccia, castellu di rustinu, la porta, piedicroce | Facebook |
28/07/2012
la balade d'hier 27 juillet 2012: San Chirgu, Aiti ...
comme promis!
hier, malgré quelques imprévus - l'un gai (un mariage), l'autre triste ( un enterrement) - qui nous ne nous ont pas permis de jouer les orgues de Piedigrisgiu et de Corte, une bonne journée de partage:
débutée sur le territoire de Cambia, du côté des gravures rupestres de a Petra Frisgiata,
avec Raphaël et Pauline ...
tout d'abord, dans la Pieve de Vallerustie, le charme de San Chirgu (alias: San Quilicu, St Cyr ...)
à retrouver dans les notes:
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2010/10/18/la-chapelle-san-quilicu-a-cambia.html
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2010/10/22/san-quilicu-di-cambia-les-fresques.html
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2010/10/26/3-la-chapelle-san-quilicu.html
Petit rappel: entourant ici le thème de Saint Michel pesant les âmes, ainsi que bordant l'arc triomphal, le fresquiste a utilisé le discours des mosaïques de style cosmatesque, à découvrir sur ce site:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Cosmatesque
Suivi de la rencontre du village d'Aiti, dans son paysage vertigineux en compagnie de notre ami René Casematta
qui a créé ce joli site sur le village, à retrouver à cette adresse:
aitipaese.canalblog.com
Il règne dans cette petite église, allègrement repeinte par J.C. Torre, un charme certain, né de ses jolies proportions à taille humaine.
elle abrite un patrimoine bien intéressant, en particulier des oeuvres de notre cher Giacomo Grandi ( peintre originaire de Milan et actif en Corse entre 1742 et 1772, date de sa mort)
comme cette "Mort de St Joseph", patron de "la bonne Mort" : l'espoir de mourir, comme lui, dans son lit, entouré de l'amour des siens et muni de l'Extrême Onction ...
ou comme cette belle série du Chemin de Croix, avec ses personnages mauresques: ici le jugement de Pilate,
un étrange prêteur romain bigrement orientalisé, arborant moustaches à la turque et portant cafetan et turban surmonté d'une aigrette et d'un croissant ...
Ici la XII° station: la mort du Christ entre le Bon Larron à gauche et le Mauvais Larron à droite -derrière eux, l'architecture phantasmée de la ville antique de Jérusalem, et au-dessus d'eux, le Soleil (Nouveau Testament) et la Lune (Ancien Testament)
Et puis cette toile très intéressante évoquant la dévotion du Rosaire et les héros de la Bataille de Lépante. A retrouver dans la note:
http://elizabethpardon.hautetfort.com/archive/2011/10/07/...
Un peu plus tard dans l'après-midi, le site archéologique de San Giovanni di Corte: ici la belle abside à bande lombardes de l'église pievane:
Rappelons tout de même ce qu'est ce site de San Giovanni Battista de Corté, classé M.H. en 1968:
Dans la vallée du Tavignano, dans un espace majestueux et largement ouvert sur les montagnes environnantes, peut-être sur l'emplacement de l'antique ville romaine de Venicium, à quelques mètres à peine du Palazzu ( maison forte) du semi mythique Comte Ugo della Colonna, le héros de la Reconquista de la Corse lors de la croisade contre les Maures au début du IX° siècle, ce site fut probablement déjà occupé dès la préhistoire: la colline du Poggio dello Palazzo (dont Madame Moracchini Mazel pense que le sommet ést couronné d'une triple enceinte mégalithique) disparait aujourd'hui sous la végétation et l'on ne peut même plus distinguer les vestiges du Palazzo. Voici, juxtaposés, l'église-mère et le baptistère de la Piève de Venaco : fouillée en 1956/58 par Mme Moracchini Mazel, l'église préromane dont il reste la belle abside en cul de four et la base des murs, des piliers séparant les trois nefs, et le baptistère de plan tréflé, recouvert d'une charpente et d'un toit de lauzes. Notre ami Etienne Jacquemin, hier, rappelait que le relevage du baptistère fut l'oeuvre de l'Armée, alors propriétaire des lieux ... Ces deux édifices, leur appareil archaïque (pierres cassées au marteau, utilisation d'un mortier de chaux, de tuffeau) et leur décor de bandes murales à la façon des églises lombardes permettent d'estimer leur construction du début du IX° siècle... Comme souvent on retrouve là la permanence de l'occupation humaine sur un site sacré, vestiges mégalithiques, nombreux éléments de tuiles et poteries romaines réemployés dans la maçonnerie des deux édifices...
Et enfin ... à Castiglione ...
notre chère Sainte Cécile
en compagnie des gardiens
du sepolcru ...
à bientôt!
18:54 Publié dans découverte du patrimoine en Corse, fresques de corse, l'art baroque en corse, patrimoine des chapelles à fresques en Corse, sepolcri de Corse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cambia, san chirgu, aiti, corte, castiglione, bataille de lépante | Facebook |