12/02/2012
la mort du héron cendré
Le beau héron cendré qui volait encore
l'an dernier en janvier
du côté du ruisseau, sous Belgodère,
a redu son âme d'oiseau, ce matin, au ruisseau:
hier soir il était encore en vie, grelottant sur la berge
est-il mort de froid (glacial cette nuit) ou de faim, ou des deux conjugués ?
si léger ... l'hiver est impitoyable cette année..
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11/02/2012
Février
Février neigeux
éloge du doux éphémère
éloge du silence
du dedans où se taire
en regardant dehors
voleter
blanche
l'éphémère pensée
éloge du dehors
des mots vagabonds
légers
comme neige
à peine
audibles
où se recueillir avant de fondre
et du petit garçon qui fait pipi entre deux sur le pas de sa porte
(Miniature du Bréviaire Grimani, XV° siècle, Bibliothèque Nationale de Venise)
(au col de Battaglia: merci Carole et Marie-Laure!)
(à Castellu di Rustinu: merci Toussaint!)
Légèreté des flocons, mais quelle chappe au fil des heures!
17:28 Publié dans corse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bréviaire grimani venise, neige en corse | Facebook |
04/02/2012
le sepolcru de Castellu sort de l'ombre
Ce 31 janvier, à Castellu di Rustinu,
peu avant la neige ...
Bien sûr, ce n'est pas encore la saison, mais ... un grand merci , Richard!
A l'occasion de la rédaction d'un article sur les sepolcri peints de la Semaine Sainte en Corse pour la belle revue "Art Sacrés", et reprenant contact avec les amis de Castellu di Rustinu pour éclairer ce sujet, j'ai eu le grand plaisir de voir sortir de sa cachette et monté, tant bien que mal, pour la première fois depuis environ 80 ans, le magnifique sepolcru peint de Castellu. Son état actuel - chassis vermoulu, toiles très fragilisées ... n'a pas permis de le dresser totalement comme il le devrait, les deux panneaux latéraux épousant normalement exactement la forme trapézoïdale du" plafond" de la Résurrexion. Mais tel que (merci, Richard!) cet ensemble parle comme jamais jusqu'ici je ne l'avais entendu: la colline du Golgotha faisant le lien entre les trois panneaux. Ce remontage , très éphémère (il ne peut rester ainsi dans l'église) signe la prise de conscience de la communauté de Castellu qu'elle possède ici un héritage précieux et rare de la dévotion de ses ancêtres, et qui aboutira, j'en suis certaine, à une restauration: la municipalité est impliquée dans la restauration de son patrimoine: outre celle de la chapelle san Tumasgiu et de ses fresques, qui devrait débuter très prochainement, il est prévu de continuer l'effort de restauration dans la très belle église paroissiale : l'ensemble des autels et de leurs toiles dans un temps relativement proche également ... Le sepolcru suivra, je n'en doute pas, dans la foulée, et ... espérons-le aussi, l'orgue de Saladini retrouvera sa voix ...
Quelques détails du sepolcru
le Jugement de Ponce Pilate en compagnie de Caïphe (reconnaissable à son vêtement jaune, signe distinctif longtemps imposé aux Juifs ...)
Jésus chargé de sa croix: le trou dans la toile a probablement, comme les autres du sepolcru, été fait par la flamme des bougies ...
un premier groupe de cavaliers
Jésus tombe sous le poids de la croix, et Simon de Cyrène est appelé à la rescousse
En haut du panneau central, la scène de la Crucifixion
le groupe de soldats de la crucifixion. A noter les armes, très codifiées de ces messieurs (on les retrouve dans les sepolcri et les chemins de croix du XVIII° siècle) et leurs casques pointus. Le cavalier porte a baretta misgia, cette sorte de bonnet phrygien qui faisait partie du costume des montagnards corses, et un cimeterre tout-à-fait turc ou barbaresque. Une armée qui va pieds-nus ...
... les solutions techniques de la crucifixion ...
pas facile, mais nos gens ont de la ressource!
chorégraphie de la Déposition de croix
le groupe douloureux de la Déploration du Christ: la Vierge, Mater Dolorosa, a reçu sur ses genoux le corps supplicié de son fils et l'expose à,la compassion de tous, tandis que Marie-Madeleine - en robe jaune et cheveux dénoués,- pleure en saisissant la main de Jésus.
la Mise au tombeau. Je propose cette lecture: Joseph d'Arimathie à la tête du Christ et Nicomède à ses pieds, et le groupe de Marie-Madeleine et de saint Jean entourant la Vierge
détail: Marie-Madeleine soutient la Vierge
... et le tombeau du Christ (partie basse du panneau central): oups! les anges sont assez effrayants. De mauvaises langues en déduiraient que le Christ leur a faussé compagnie dès qu'Il a pu ...
le panneau de la Résurrection formant plafond:
ce thème de la Résurrection est suffisamment rare dans les sepolcri de Corse pour être signalé: un Christ triomphant, dans toute sa gloire. Généralement les sepolcri s'arrêtent à la Déploration de la mort du Christ et le message de Pâques reste à venir... ...
Il y a une quinzaine d’années, les hasards d’une recherche sur les orgues de Corse m’avaient conduite à Castellu di Rustinu, un village de montagne proche de la Castagniccia : seules quelques fumées paresseuses s’élevant des toits de lauze dans la lumière de janvier et au passage, une télé tonitruante mariée à une bonne odeur de soupe témoignaient encore de la vie au milieu de ces hautes maisons de schiste aux volets trop souvent clos. La délicieuse vieille dame qu’on m’avait indiquée m’accompagna pour me faire les honneurs de son église – elle venait de finir son déjeuner, me dit-elle avec un sourire serein, et n’avait rien d’autre à faire - Malgré l’état un peu dégradé des lieux, à l’époque, j’avais été frappée par la joyeuse propreté qui régnait ici, nappes impeccables soigneusement repassées, profusion attendrissante d’angelots joufflus et de fleurs artificielles, et par la qualité et la richesse du patrimoine : datant en majorité du XVIII° siècle, décors muraux, chaire de prêche et élégants autels de stuc baroques, retables, quatorze tableautins peints d’un intéressant chemin de croix populaire,
(ici le Christ mis en croix: chemin de croix peint par Giacomo Grandi pour Castellu au milieu du XVIII° siècle)
et, un peu plus tardif, un orgue hélas muet, bref … c’était ici l’une de ces surprenantes églises de la région qui racontent à foison une communauté dynamique à une époque où la majorité des Corses vivaient dans leurs villages, et où l’expression d’une religiosité dramatique et festive resserrait les liens.
Puis, passant derrière le maître-autel, ce fut pour moi un choc imprévu : contre le mur s’entassaient, abandonnées en vrac, plusieurs toiles rectangulaires, grossières et en mauvais état, de très grande taille, clouées sur des châssis vermoulus. Peintes à la détrempe, elles n’avaient rien à voir avec l’art savant des retables de l’église, mais s’apparentaient plus à l’esprit vernaculaire du chemin de croix – j’y reviendrai : elles disaient d’une façon immédiate et émouvante la Passion du Christ. Sur un premier panneau, du haut du perron de son prétoire, Pilate, enturbanné comme un oriental, prononçait son jugement, puis Jésus se trouvait chargé de la croix , gravissait un Golgotha où se tordaient de grands arbres, trébuchait, martyrisé par des soldats bigarrés, barbus, moustaches retroussées, une soldatesque disparate aux pieds nus, coiffés de casques ronds, de la barreta misghia (une sorte de bonnet phrygien, coiffure traditionnelle des corses jusqu’à la fin du XIX° siècle), armée de cimeterres, de lances et de hallebardes, montée sur de magnifiques chevaux, le tout dans un paysage abrupt de montagne … Sur un deuxième, c’était la crucifixion et la douleur de la Vierge, de saint Jean et des saintes femmes, et sur un autre, la déposition de croix, la déploration du Christ, la mise au tombeau efficacement racontées dans l’émotion, et enfin une dernière toile en forme de trapèze exaltait la Résurrection du Christ …
Comme je m’étonnais de la présence et de l’importance de ces décors, Laurence M. m’expliqua qu’il s’agissait du « Sepolcru », qu’on ne le sortait plus depuis longtemps, que lorsqu’elle était petite on le dressait dans l’église dès le jeudi saint pour accueillir le Christ mort, que chaque famille était chargée d’apporter un litre d’huile d’olive pour entretenir la flamme des lampes qui veilleraient sur le Crucifié en compagnie des fidèles : « c’est qu’ ici, on ne laisse jamais le mort seul » … et elle se souvenait de sa terreur, petite fille, lorsqu’il s’agissait de pénétrer la nuit dans cet espace étrange peuplé de ces silhouettes inhabituelles dansant à la lueur des cierges et des lampes… Par la suite, j’ai appris que ces grandes toiles servaient aussi autrefois de décor pour une Passion jouée par les villageois de Castellu - dramaturgie évoquée par les derniers anciens, et dont Laurence est désormais le dernier témoin vivant. Il semble que ce sepolcru anonyme du début XIX° siècle ne soit plus ressorti en situation depuis 1930 … Telle fut ma première rencontre avec ce monde si attachant des sepolcri peints de la Corse et elle a le visage rond et souriant d’une vieille dame optimiste née en 1917 …
le fronton triomphal que l'on n'a pas pu replacer sur le "plafond", faute de solidité
20/01/2012
Santa Maria di Casalta, Piebania d'Ampugnani: brève du purgatoire ...
Santa Maria di Casalta, Pievanie d'Ampugnani, Castagniccia
Le 28 décembre 2011,
visite à Santa Maria di Casalta,
en bonne compagnie ... et en quelques images
Cette église pievane de l' Ampugnani a fait l'objet d'une publication dans les cahiers CORSICA de la F.A.G.E.C., n° 158/159, éditée en 1993. Ce cahier qui comporte une première partie sur la Piévanie d'Ostricone, fait, dans la seconde partie, le point sur cette Piebania d' Ampugnani après que l'équipe de jeunes sous la direction de monsieur Simonin ait réalisé en 1993 le sauvetage de ce sanctuaire menacé d'une ruine inexorable.
Parenthèse: en cette fin décembre, la belle lumière d'hiver vibre et joue dans les oliviers: l'appareil photo a fixé un rayon fort communiquant dans ce lieu habité ... (je rappelle que non loin de là en amont se trouvent les stèles gravées énigmatiques, dont l'une, dit-on, désigne par un rayon du soleil à travers un trou l'emplacement de Sta Maria ... ( voir la note : l'énigme des stèles ésotériques de Casalta).
... digne d'une Annonciation ...(Calenzana, collégiale st Blaise)
ou d'une adoration mystique ... telle celle de St Pascal Baylon (bannière, Francescu Carli, Alesani)
Revenons à Santa Maria. Cette église, classée Monument Historique en 1980, n'avait jusqu'alors bénéficié d'aucune intervention, et fissurée de toutes parts, pillée de quelques-unes de ses dalles de parement en calschiste gris, sournoisement éventrée par les lierres, elle risquait de sombrer définitivement dans la ruine. Je vous renvoie au cahier Corsica où vous trouverez le descriptif détaillé de ce sauvetage ainsi que les riches notes en pièce annexe qui, comme toujours, éclairent ce dossier. Hélas, depuis 1993, les choses en sont restées là, et faute d'investissement suffisant cette église romane du XI° siècle n'a pas bénéficié de la restauration qu'elle mériterait largement.
Aujourd'hui abandonnée des fidèles, elle n'est plus guère visitée que par les chasseurs et les bergers ... "On se souvient, à Casalta, que c'est à partir de 1939 que la procession annuelle à S. Maria a cessé de se pratiquer; auparavant, chaque année, le 25 mars, le curé bénissait les branches de lierre cuillies la veille sur les murs par les jeunes gens du village, et chacun en prenait une pour la mettre dans sa maison." (in Cahier Corsica 159) -
Curieuse, presque païenne, cette bénédiction du lierre : à la fois plante bénéfique et poison, tour à tour symbole d'immortalité et d'amour fidèle ou plante démoniaque... d'un vert insolent, sa force vitale ici s'agrippant vigoureusement aux murs ruinés de Santa Maria comme autour du tronc d'un arbre mort, échappant aux cycles habituels de la végétation perpétue la vie: " non meis viribus "...
La consolidation "provisoire" du mur nord en bois de pin remplit toujours tant bien que mal son office ...
mais jusqu'à quand tiendra-t-elle ?
l'abside, bien orientée à l'est et son beau parement de dalles de calschiste gris clair, attaquée par la végétation.
Le mur Sud avec le campanile et, construite contre cette façade, les ruines de la maison du piévan (1658): "On voit aussi dans un acte de 1468 que le piévan était dénommé " vesco de Ampugnani" et que le chroniqueur de la Corse Montemaggiani (...) emploie à son sujet le terme d'évêque d'Ampugnani" (cahier Corsica 159) . Rappelons à ce sujet que la Pieve d'Ampugnani constituait avec la Pieve du Rustinu le petit diocèse d'Accia, dont la petite cathédrale avait été plantée au XII° siècle au sommet du San Pedrone ... Ne la cherchez plus ...
une pierre sculptée dégagée lors des travaux en 1993
l'angle nord-ouest et son parement lumineux
la façade ouest reconstituée, avec son beau linteau replacé,
orné d'un décor en feuilles d'eau stylisées...
au revers de la façade ouest ...
hélas, la porte a perdu ses piédroits, arc et linteau, et le lierre est reparti à l'attaque ...
un sol illisible sous les ronces, qui abritait deux grandes fosses communes, arche, et au fond ...
l'abside et l'emplacement des deux autels latéraux: au-dessus de ces autels, aujourd'hui disparus, " se trouvaient des petits voûtains reposant sur des arcs engagés prenant appui sur trois consoles moulurées visibles (...) mais ayant perdu leur quatrième appui; c'était un pilier carré sans doute, du type de ceux qui existent encore à San Parteo de Mariana, à Lucciana, puisque le choeur de ce dernier sanctuaire offrait une disposition du même genre sur ses deus autels latéraux (...)" ( Cahier Corsica n°158/159, p. 169).
celui de gauche, déjà envahi par le lierre
et celui de droite
... qui laisse encore voir encore quelques traces d'enduits et fragments de peintures à fresque : quel pouvait bien être le programme iconographique de cet ensemble ?
l'abside en cul de four,
sauvée in extremis de l'éclatement:
fissures colmatées au-dessus de la fenêtre ...
Le linteau intérieur de la porte sud.
Le linteau extérieur de cette même porte a été réemployé depuis longtemps dans la fontaine du village.
... et, dans l'angle Nord ouest, la vision de la petite chapelle (funéraire?) de San Ghjorghju (Silvarecciu) sur sa falaise abrupte ...
A quand le réveil de cette église piévane de l'Ampugnani, gelée ou protégée par les Monuments Historiques ? Le constat de la dégradation de ces monuments témoins de la spiritualité et de l'histoire de la Corse fait mal au visiteur .
Il serait urgent sans doute de voir réunies toutes les bonnes volontés de cette pieve d'Ampugnani pour sauver et mettre en valeur ce qui peut encore l'être ... Il faudrait prendre exemple sur le travail opiniâtre mené par la petite association Camà in Altiani" qui a su dynamiser son projet fou de restauration de sa chapelle romane San Michele
(voir la note: ALTIANI, chapelle San MICHELE :
elizabethpardon.hautetfort.com/.../altiani-chapelle-san-michele.html)
restauration qui va prochainement connaître sa réalisation, grâce à la volonté sans faille d'une poignée de volontaires obstinés et inventifs! Je salue bien ici les amis d'Altiani! Ils nous donnent une belle leçon d'optimisme pour cette nouvelle année 2012 ...
(San Michele, Altiani: la chapelle en piteux état, dévorée par la végétation, toîture écroulée ... bientôt sauvée de la ruine! )
Pour gagner le village de Casalta et visiter l'église Santa Maria :
le plus facile, lorsqu'on n'est pas dans la région, est de partir de Folelli, sur la côte orientale, en empruntant la D 506, soit de quitter la N 193 à Barchetta en direction du col st Antoine. Le site se trouve sous le village de Casalta, à environ 1 km, facilement accessible par un beau sentier qui prend sur la D 205 au milieu d'un virage et qui nous mène rapidement à Sta Maria.
15:43 Publié dans brèves du purgatoire, chapelles romanes corses, corse, découverte du patrimoine en Corse | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : castagniccia, sta maria di casalta, pivanie d'ampugnani, diocèse d'accia, fagec, art roman corse | Facebook |
19/01/2012
la Montagne des orgues vous présente ses meilleurs voeux!
" la Montagne des Orgues"
vous présente
ses meilleurs voeux ...
(Corbara, l'orgue restauré et relevé en 2011: tribune et buffet Saladini- restauration E. Poli, orgue Saladini/Agati -Tronci/P.Hartmann/ relevage A.Faye et A.Sals)
... avant que ce mois de janvier ne s'achève, pour que vivent nos orgues de Corse, qu'ils soient joués, qu'ils soient restaurés ou relevés avec autant de grâce que ce magnifique orgue de Corbara qui a retrouvé depuis cette fin 2011 toute sa splendeur visuelle et sonore grâce au talent d'Ewa Poli (redécouverte du décor initial de la tribune et du buffet Saladini) et des facteurs d'orgues Alain Sals et Alain Faye. Ajoutons aussi la belle restauration par André Fabre de la grosse caisse de la Banda Militari ...
installée en décembre avec succès et quelques péripéties, désormais prête à officier avec fracas sous le pied énergique des organistes.
Au fait, tous nos voeux, décidément, pour que les organistes en Corse fassent des petits, c'est urgent! ou, à défaut, pour que l'on accélère la recherche sur le clonage des dits organistes ...
10:51 Publié dans corse, la montagne des orgues, orgues historiques de Corse, restauration du patrimoine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : orgue de corbara | Facebook |