21/03/2015
William Shakespeare à Corte
A l'attention des étudiants de littératures comparées de l'Université de Corse Pasquale Paoli
(et des autres! ):
William Shakespeare en musique
"If music be the food of love, play on!"
(William Shakespeare, la Nuit des Rois)
(Portrait de Shakespeare par Martin Droeshout, 1623)
Notre ami Jean-Dominique Poli qui enseigne cette discipline à Corte nous a récemment parlé avec enthousiasme de son travail auprès de ses étudiants cortenais, et en particulier de leur approche de William Shakespeare, dont on fêtait en 2014 le quatre cent cinquantième anniversaire de la naissance. L'occasion, pour les plus curieux, de découvrir l'immense postérité musicale du XVII° siècle à nos jours de cet écrivain génial et dramaturge protéiforme à travers la très belle série d'émissions des Variations Shakespeare que lui a consacré François -Xavier Szymczak sur France-Musique cet été:
Variations Shakespeare - Radio France Musique
11:36 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : shakespeare et la musique, université de corse pasquale paoli, variations shakespeare | Facebook |
18/03/2015
le Laboratoire régional d'archéologie retenu pour le Trophée des Associations de la Fondation EDF
Je diffuse volontiers ce message du Laboratoire Régional d'Archéologie (LRA):
Chers amis et collègues,
Le Laboratoire régional d'archéologie a été retenu dans le cadre du Trophée
des Associations de la Fondation EDF.
Vous trouverez notre projet en ligne ci-dessous.http://tropheesfondation.edf.com/associations/laboratoire-regional-d-archeologie
Ne reste qu'à voter massivement et à partager auprès de tous vos contact
pour remporter le prix !!!
C'est très simple :
vous voter en indiquant votre adresse mail, vous recevez un mail afin de
confirmer votre vote, c'est terminé !
Merci de transférer à vos contacts afin d'avoir le maximum de supporters !!!
Bien archéologiquement,
Pour le bureau
Hélène Paolini-Saez
10:22 Publié dans archéologie corse | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook |
11/03/2015
Soutenons la FAGEC
SOUTENONS LA FAGEC
... et faisons vivre l'héritage de Geneviève Moracchini-Mazel
Je transmets ce message de la Fagec:
Chers amis Facebookiens,
Nous faisons appel à vous car la FAGEC – malgré son bilan de 45 années d’activité et l’intérêt de ses travaux – n’est pas épargnée par les conséquences de la raréfaction des aides publiques. La diversité de ses ressources et le fait qu’elle n’a jamais été sous perfusion de subventions ne suffisent plus, ce qui fait craindre pour sa pérennité. Aujourd'hui, la fédération se trouve dans une situation délicate pouvant compromettre jusqu’à son existence. C...’est pourquoi, le concours de tous est absolument indispensable, soit sous forme de don (que vous pourrez déduire de vos impôts) soit sous forme d’acquisition de publications dont vous trouverez la liste et les tarifs dans les documents ci-joints.
Les « Cahiers CORSICA » de la FAGEC représentent – dans leur domaine et pour beaucoup d’entre nous – un espace de connaissance, d’échange et de liberté d’expression. Par les temps actuels, c’est un privilège que nous ne voudrions pas voir disparaitre. Cette collection aux séries variées a permis et, nous l’espérons, permettra encore à des contributeurs (jeunes chercheurs, érudits ou scientifiques de renom) de publier les résultats de leurs travaux et à des amateurs comme à des spécialistes, en Corse et ailleurs, de les lire. Ces « Cahiers CORSICA » doivent donc continuer à permettre la diffusion de la culture insulaire et la sensibilisation aux richesses de notre patrimoine auprès de tous les publics.
Nous vous remercions par avance de votre soutien qui est aussi une manière de faire vivre et perdurer l’esprit de l’œuvre de Geneviève Moracchini-Mazel et des cofondateurs de la FAGEC en faveur de la protection, de l’étude et de la valorisation du patrimoine de la Corse.
Pour tout renseignement complémentaire, contacter fagec@wanadoo.fr
11:33 Publié dans archéologie corse, art roman, fagec, Geneviève Moracchini-Mazel, patrimoine de corse | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
"Bastia, des origines à 1900, naissance et croissance d'une ville" conférence de Michel-Edouard Nigaglioni
Je diffuse volontiers cette information de la Direction du Patrimoine de Bastia
Lundi 16 mars à BASTIA
"Bastia, des origines à 1900, naissance et croissance d'une ville"
conférence historique de Michel-Edouard Nigaglioni en partenariat avec la Ligue contre le Cancer
à 18 heures, à la salle polyvalente de Lupino.
affiche 2015-03-ligue-16mars-web.pdf
Cette fois-ci il s’agit d’une opération menée en partenariat avec une association généreuse et méritante. En effet, à la demande de madame Florence Santini-Gomez, présidente de la Ligue contre le Cancer, la Ville de Bastia a décidé d’organiser une conférence historique :
Bonjour à tous les amateurs d'art et d'histoire de notre réseau,
Voici un mail circulaire d'information, comme vous en recevez de notre part pour les grandes occasions (journées du patrimoine, expositions, conférences).
Cette fois-ci il s'agit d'une opération menée en partenariat avec une association généreuse et méritante. En effet, à la demande de madame Florence Santini-Gomez, présidente de la Ligue contre le Cancer, la Ville de Bastia a décidé dorganiser une conférence historique :
lundi prochain(16 mars 2015), à 18 heures, à la salle polyvalente de Lupino.
L'entrée sera libre mais une urne pour recueillir des fonds sera disposée à l'entrée.
Michel-Edouard Nigaglioni, directeur du Patrimoine, a été chargé de concevoir cette conférence, intitulée :
"Bastia, des origines à 1900, naissance et croissance d'une ville"
Celle-ci sera très documentée tout en restant accessible à tous car destinée au public le plus large.
Les propos du conférencier seront illustrés de plus de 200 images. Le but de l'exposé est de permettre au public d'imaginer ce à quoi ressemblait le Bastia des origines (vers 1380), puis de suivre son évolution, siècle après siècle.
Les métamorphoses successives de la ville seront expliquées et illustrées à l'aide de nombreuses reproductions de tableaux anciens, de gravures, de plans aquarellés et de dessins. Ces précieuses images du temps passé proviennent des réserves de divers Musées ainsi que de différents fonds d'archives, de Corse, de France continentale, d'Angleterre ou d'Italie. Le National Maritime Museum de Londres, la Bibliothèque de Florence et l'Archivio di Stato de Gênes ont livré d'inestimables trésors.
Le public verra beaucoup de choses étonnantes sur le Bastia d'autrefois. Il y verra par exemple d'impressionnants clichés datant des débuts de la photographie, sous le règne de Napoléon III. À cette époque, les Bastiaises circulaient dans les rues de la ville affublées de volumineuses crinolines, si jolies mais tellement inconfortables
Les auditeurs prendront progressivement conscience qu'une ville n'est pas un ensemble architectural figé et immuable, mais qu'au contraire, elle est un être vivant en constante évolution.
Quand l'église Saint Jean-Baptiste n'avait qu'un seul clocher (avant 1864)
Au premier plan, la tour des Jésuites, aujourd'hui démolie (photographie de 1855)
La place Saint Nicolas inachevée, et sans ses palmiers
Les Bastiaises en crinoline, sous le Second Empire
Pour un complément dinformation :
http://www.bastia.fr/rubrique.php?id_article=24002&id...
http://www.corsenetinfos.fr/Bastia-La-ville-se-ligue-cont...
Voir également les 3 affiches éditées pour loccasion en pièce jointe.
Venite numarosi !
08:14 Publié dans Bastia, conférence sur la Corse | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
08/03/2015
Balade autour du Bestiaire fantastique de Speluncatu: le Basilic et le Griffon
Une balade hors du temps
autour du Bestiaire fantastique de Speluncatu,
sous le sceau de la dualité
le Basilic et le Griffon
"A qui lui demandait : "Si un incendie était en train de détruire ta maison, qu'est-ce que tu te hâterais de sauver ? " Jean Cocteau répondit : "Le feu. "
le tympan (début XII°s.?) de feu l'église San Stefano de l'antique village de Giustiniani: il orne aujourd'hui le portail de la Collégiale Santa Maria Assunta de Speloncato.
Un bref rappel: le village de Speloncato s'est développé à cheval sur deux pièves distinctes, celle de Tuani (vallées des affluents de la rive droite du Regino) et celle de Sant'Andrea (haute vallée du Regino et ses affluents), un cas de figure rarissime. Ecoutons ce qu'en dit, dans sa Description de la Corse au XVI° s., Agostino Giustiniani (1470- 1536) : la Pieve de Tuani comprend " les ensembles habités de Quercioli, Belgodère, Occhiatana, Ville, Costa, Cavalleragie et Speloncato. Et Speloncato, quant à la juridiction ecclésiastique, appartient moitié à la pieve de Tuani et moitié à celle de Sant'Andrea. " De l'autre côté, la Pieve de Sant'Andrea, "qui renferme les villages de Nessa, Feliceto, Casenove, Muro et Giustiniani" (Avapessa n'est pas alors mentionné).
Sur le chemin muletier entre Speloncato et le site antique de Giustiniani,
la petite chapelle baroque de San Filippu (de Neri): une chapelle "récente" au regard de l'antiquité de l'occupation humaine dans cette région bénie ... Un peu plus loin se trouve le site de San Martinu, l'église annexe de San Stefano, elle aussi aujourd'hui disparue , et que viendra par la suite remplacer dans le rôle de paroisse l'église Santa Catarina au village.
(Summarium : merci Edouard!)
A propos de l'occupation de la communauté de Giustiniani dans la plaine de Speloncato : elle fait donc partie de la pieve de Sant'Andrea : "On rencontre Giustiniani ou Yustignano, Iustignano dans les documents du XIII° siècle (G. Pistarino, Le carte, pp.14 et sq.). Les ruines éparses de ce village et de son église (San Stefano) se trouvent aujourd'hui sur le territoire de la communauté de Speloncato (rouleau du Plan Terrier n°8 - lieu-dit Santo Stefano)" (in: Description de la Corse, par Agostino Giustiniani, préface, notes et traduction d'Antoine-Marie Graziani, éd. Piazzola, p.89).
En résumé pour diverses raisons (en particulier d'insécurité ) , les familles de Giustiniani vont donc peu à peu délaisser leur habitat de la plaine, leur antique église San Stefano, migrer vers les hauteurs et s'installer à Speloncato (versant pieve de Sant'Andrea), autour de leur oratoire Santa Catalina qui prendra par la suite le titre d'église paroissiale après l'abandon progressif de San Stefano et San Martino.
e Torre de Giustiniani, entre X° et XVI ° s. ...
Voir la note du site de Speluncatu Noi Tutti sur le sujet: http://www.noitutti.com/articles.php?lng=fr&pg=518
Toute cette région intéressait grandement Geneviève Moracchini Mazel qui est venue l'interroger à plusieurs reprises en compagnie des anciens . Saluons ici la mémoire de cette grande dame de l'archéologie médiévale insulaire qui nous a quittés il y a déjà maintenant un an, mais qui continue d'habiter tous ces sites pour lesquels elle a donné toute l'énergie et les intuitions de sa vie.
sous e Torre, des maisons anciennes du village abandonné au XVII° s. de Giustiniani
un riche territoire rural occupé depuis le néolithique et investi par le monde romain:
ici, les fameux "Bagni", thermes romains.
Voir à ce sujet la note de Noi Tutti:
http://www.noitutti.com/articles.php?lng=fr&pg=536
Mais avant d'arriver à I Bagni et e Torre, l'on rencontre au bord du chemin le site de San Stefano, l'église de Giustiniani, aujourd'hui disparue . "En 1646, lors de la visite pastorale de Mgr Marliani, l'église S.Stefano était déjà détruite et le curé de Speloncato touchait les revenus du "benefizio semplice di S. Stefano ... chiesa distrutta alla spiaggia" (G. Moracchini-Mazel , Les églises romanes de Corse, p.236 )
Sur le site de San Stefano:
l'on aperçoit en hauteur les maisons de Speloncato et
au premier plan, une aire de battage et un pagliaghju.
On a comme souvent par le passé ailleurs , réutilisé de belles pierres de l'église romane San Stefano pour le pavage de l'aghja,
ainsi que pour construire le pailler, taillées dans des granits de différentes couleurs : San Stefano devait avoir fière allure, avec son harmonie polychrome et son tympan sculpté .
C'est dans le mur de cette maisonnette ...
que se sont trouvés piégés pour de longues décennies nos deux animaux fabuleux après la ruine de l' église.
Délogés une seconde fois de leur habitat champêtre, contraints d'abandonner San Stefano et suivant la migration des anciens habitants de Giustiniani vers les hauteurs, ils trouvent refuge dans la crypte de l'église St Michel/ Sta Maria Assunta de Speloncato (versant pieve de Tuani). Là ils subissent quelques longues années de purgation avant de retrouver enfin une place digne de leur statut, au-dessus du linteau de la porte d'entrée de la collégiale.
Mais qui sont ces étranges gardiens du sanctuaire,?
Nulle part ailleurs en Corse, à ma connaissance, nous ne voyons semblable tympan où je choisis de lire la lutte d'un Basilic et d'un Griffon .
A gauche un étrange volatile à la tête surmontée d'une aigrette ou plutôt d'une crête, le corps me semble-t-il terminé par une queue de serpent enroulée, à moins qu'il ne s'agisse d'un vulgaire croupion et d'une paire d'aile - (le bas-relief a souffert par le passé d'un excès de zèle et reste difficile à interpréter) s'attaque à un quadrupède puissant, un corps de fauve et une tête d'aigle au large bec crochu , la queue fouettant l'air, et deux grandes ailes déployées comme pour défendre un passage : une vision dramatique, ardente, de combat entre deux bêtes fantastiques nées des premiers temps de l'humanité, chargée d'un message pour ces hommes du Moyen-Âge et qu'il nous faut tenter d'approcher en déposant notre carapace raisonnable de gens du XXI°s. En nous laissant conduire par notre imaginaire le plus archaïque, le plus instinctif , celui-là même qui surgit à l'improviste dans nos rêves, peuplant parfois nos nuits de créatures inquiétantes ou bienfaisantes dans les situations les plus anodines.
Deux animaux tout droit sortis des "Bestiaires" médiévaux (issus de l'antique premier Bestiaire chrétien, le Physiologos, entre le II° et le IV° s. qui a inspiré durablement tous les Bestiaires médiévaux ) après un long temps d'adaptation au christianisme:
"Les Bestiaires sont des livres qui nous racontent et nous font voir les rêves du Moyen Âge.
(...) Leur éclairage résulte d'un discours idéologique. (...) Nous voilà donc devant les monuments d'un faux savoir zoologique. La logique du vivant n'y est qu'en apparence naturelle. Rien de plus arbitraire que ce système culturel qui va enfermer la pensée occidentale dans une ménagerie orientale. Il est vrai qu'il s'agit , en fin de compte, de prêcher le christianisme, religion née au Moyen-Orient, en figurant le dogme par des légendes animalières là-bas plus familières. L'implantation des idées se fait par bouturage en jardin d'acclimatation exotique. Bel exemple d'acculturation, illustrant la construction d'un système de pensée sur des schémas venus de l'étranger. Les traditions gauloises, romaines et germaniques sont broyées par une machine gréco-orientale, fabriquant encore, dix siècles après son invention, des thèmes religieux et des motifs esthétiques pour séduire l'Europe médiévale." ( Daniel Poirion , dans Le Bestiaire, Histoires dites naturelles, p. 13- Ed. Philippe Lebaud)
A quels archétypes venus du fond des âges appartiennent ces créatures fantastiques qui peuplent l'univers de nos chapelles, églises et cathédrales romanes ? Comme souvent, ces animaux fabuleux s'avèrent singulièrement polyvalents, évoluant au fil du temps, tantôt fastes, tantôt néfastes, tour à tour protecteurs ou destructeurs ...
Je vais devoir prendre parti, sans certitude aucune ...
Et pour commencer, je déciderai donc de voir dans mon petit volatile de gauche un Basilic, plutôt qu'une huppe ou une quelconque gallinacée. Il faut dire que ça m'arrange. Voyez plutôt:
Le Basilic ( Basileus, le petit roi)
"Le Basilic, antithèse du Coq emblématique
De même que le Coq fut souvent l'image du Sauveur, le Basilic fut celle de Satan, l'Adversaire, l'Anté-Christ, après avoir été, dans les cultes préchrétiens, l'emblème du Mal et de la Mort" ( Le Bestiaire du Christ, Louis Charbonneau-Lassay p. 641, éd. Albin Michel)
(merci Leo!)
le basilic de la Cathédrale de Metz s'apparente assez au nôtre :
une créature hybride, redoutable malgré sa petite taille, entre une quinzaine et une cinquantaine de centimètres et qui appartient au monde rampant des serpents, mais aussi à celui des oiseaux .
Un basilic qui a de nombreux ancêtres lointains,
dont ce terrible serpent à trois têtes à crêtes de coq, gardant la tombe étrusque dite "du Quadrige infernal" (fin IV° s. a. J.C.), dans la nécropole des Pianacce à Sarteano.
On le trouve mentionné à plusieurs reprises dans l'Ancien Testament: Isaïe menaçant les Philistins leur prédit que " de la race de la couleuvre sortiront le basilic et son fruit, qui est un serpent ailé et de feu". Pline l'ancien, dans sa description du basilic, signale que son sang aurait des vertus plutôt inattendues venant de ce petit monstre meurtrier , lui attribuant "le pouvoir de faire réussir l'homme près des puissances dans les demandes, près des dieux dans les prières, de guérir les maladies et de prévenir les maléfices. Certains l'appellent Sang de Saturne" (Pline , Histoire naturelle, XXIX, 19) . Bon, tout n'est pas perdu!
Son apparence se modifie au Moyen-Age, il est doté de pattes et son apparence hybride mi-coq, mi-serpent révèle une symbolique complexe et contradictoire:
- coq, courageux et vaillant, il a le pouvoir de capturer avant l'aube et d'annoncer par son chant le retour de la lumière, et , pourvu d'ailes, il appartient au monde du Ciel ; mais son regard tue, irradiant comme le soleil qu'on ne peut regarder en face.
- serpent, intelligent et patient, il rampe à la surface de la Terre, communique avec le monde souterrain (et les morts) qu'il affectionne particulièrement ; mais son haleine fétide empoisonne l'eau des sources et des puits.
" Une femelle crapaud, alors qu'elle se sentait fécondée, vit un œuf de serpent, s'assit dessus pour le couver jusqu'à ce que ses petits viennent au monde. Ils moururent, mais elle continua de couver l'œuf du serpent jusqu'à ce que s'y manifeste une vie nouvelle, et cette vie fut placée dès lors sous le signe du serpent de l'Eden ... Le petit brisa la coquille, se glissa hors de l'œuf mais exhala aussitôt de puissantes flammes... Il tue tout ce qu'il rencontre."
(Hildegarde de Bingen , 1098- 1179)
Son seul regard tue et son haleine épouvantable condamne à mort celui qui la respire ... Il semble que seule la belette puisse l'affronter sans crainte .
St Augustin qui le considère comme le roi des serpents ne tient guère en estime . Parmi les péchés capitaux, le Basilic représente la Luxure. *
On trouve également une variante du Basilic avec une tête de chien ou de loup:
comme ici sculpté sur
le Baptistère roman de Parme
ou comme ici sur ce chapiteau de la Cathédrale de Reims
Un petit monstre peu fréquentable, puant, tueur invétéré , et que l'on ne peut vaincre qu'en le forçant à se regarder lui-même dans un miroir. A chacun son basilic intérieur qu'il convient d'affronter avec lucidité et prudence, tout un programme, me semble-t-il. En tous cas, nettement une créature plutôt diabolique, un emblème ou, à tout le moins, un serviteur de l'Esprit du Mal.
"Dans la Kabbale, le Basilic est la monture de l'ange infernal Azagel, parce que ce monstre ne tue pas seulement par le regard, mais par les germes de la peste et des maladies contagieuses qu'il porte avec lui" (ibid. Le Bestiaire du Christ, Louis Charbonneau-Lassay, p. 646, )
En somme une créature sans âge qui fut, est et sera , continuant d'empoisonner à sa source l'eau de la vie, et à qui j'attribuerai volontiers aussi les innombrables fléaux de notre temps , égoïsmes, intolérances, obscurantismes, fanatismes de tous poils, écailles et plumes, avec leurs lugubres cortèges de guerres, assassinats, viols, désespoirs, folies, exodes, désastres écologiques et pollutions définitives ...
***
Face au Basilic
le Griffon déploie ses ailes aquilines
le Griffon de San Stefano
Parmi les animaux hybrides venus du fond des âges la symbolique chrétienne a souvent choisi le griffon "pour figurer la nature et l'excellence du Christ divin" (Charbonneau, le Bestiaire du Christ).
Un corps de lion , des ailes et une tête d'aigle, souvent du reste pourvue d'oreilles de cheval. Un héritage qui nous vient de loin:
ici à Cnossos (capitale Minoenne de la Crète, Age du bronze,),
la salle du Trône, bien gardée par la frise de ces magnifiques griffons
ou ce chapiteau de colonne portant ces deux griffons achéménides de Persépolis (la Ville des Perses), gardiens de l'Allée des processions (V° s. a. J.C.).
Symbole de la Perse et de son antique religion le Mazdéisme où s'affrontent les deux Esprits primordiaux - pour faire simple - du Bien et du Mal, le Griffon apparait comme le symbole du dualisme entre ces deux principes fondamentaux, développés par la doctrine du Zoroastrisme : au sein d'un monothéisme, le dualisme du Bien et du Mal, de la Lumière et des Ténèbres, de la Vie et de la Mort ... jamais l'un sans l'autre, mais, à la fin des temps, la victoire annoncée de la Lumière sur les Ténèbres.
Une vision qui séduit toujours autant : sans oublier le Manichéisme et les hérésies cathares, "Le Seigneur des Anneaux", "Harry Potter" vous connaissez ?
Dualisme ou gémellité ? Tout homme, en tous cas, a toujours le choix d'affirmer, par ses actes, sa préférence.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Zoroastrisme
http://www.clio.fr/bibliotheque/le_mazdeisme_la_religion_des_mages.asp
Une religion qui sans doute imprègnera durablement le Judaïsme et le peuple des Hébreux lors de leur déportation à Babylone, lorsque les Perses prendront la ville au VI° s. a. J.C. ... Et dont héritera peu ou prou le Christianisme, qui aura à lutter, entre autres, contre les tentations des dérives manichéennes .
Là encore le Griffon apparait dans toute sa complexité hybride , doté d'une abondante parentèle ailée, lié au pouvoir, à la vie et à la mort, au bien et au Mal, tantôt démon, tantôt génie protecteur, et toujours représenté avec une tête de rapace: une puissance "hiéracocéphale" (comme le dieu Horus des Egyptiens) qui aura beaucoup d'avatars:
comme dans cette représentation du griffon "fertilisant " l'Arbre de Vie (à l'aide d'une pomme de pin) , mi-homme, mi-aigle: un génie serviteur de Nergal, dieu des Enfers, à l'origine maléfique puis protecteur - Palais du Roi Assurnasipal II ( Assyrie, IX° s. A. J.C.) - Musée du Louvre.
Gardiens des trésors, du sacré, de l'arbre de vie et de l'arbre de la connaissance, n'hésitant pas à anéantir du bec et des griffes les téméraires qui violent les frontières du mystère, nos griffons font partie de la grande fratrie de ces êtres hybrides nés à l'aube des âges: ils assurent leur service solaire auprès des dynasties puissantes et des dieux dans ce Moyen-Orient fertile, dans la Crète du Roi Minos, à Mycènes ou en Egypte ...
tel ce griffon sculpté dans l'ivoire (datant de 1300 a.J.C.) et qui provient du site de Megiddo (à 90 km de Jérusalem)
- ou ce cousin proche, lion/griffon de la frise du Palais des Achéménides à Suse, 510 a. J. C. (Musée du Louvre)
- ou ce puissant "Lamassu", taureau ailé, génie protecteur posté de part et d'autre des portes du palais de Sargon II à Dur-Sharrukin ( 713 a. J.C.)- Musée du Louvre.
(petite, ces personnages colossaux et énigmatiques m'impressionnaient terriblement )
[un patrimoine humain mondial pré-islamiste aujourd'hui dramatiquement menacé de destruction définitive par les intégristes islamistes - il faut dire qu'avant eux, Alexandre le Grand s'était chargé de l'anéantissement de Persépolis ...]
http://www.france24.com/fr/20141224-images-onu-liste-tres...
http://blogs.mediapart.fr/blog/jean-paul-baquiast/090315/...
http://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-moyen-orien...
[ mais même les incendies et bombardements ne pourront détruire le feu de la spiritualité]
- ou ces "Keroubim"- Chérubins (créatures de sainteté, "ceux qui communiquent", "qui prient", terme et concept empruntés directement de l'imagerie babylonienne) dont nous parle l'Ancien Testament :
- après la chute d'Adam et Eve , Yahvé les chasse du jardin d'Eden: " Il bannit l'homme et il posta devant le jardin d'Eden les chérubins et la flamme du glaive fulgurant pour garder le chemin de l'arbre de vie." (Genèse 3-24)
- ou les immenses statues de Chérubins aux ailes déployées du Temple de Salomon
- ou l'extraordinaire vision d'Ezéchiel dont héritera la chrétienté à travers la représentation du Tétramorphe (les quatre Evangélistes et leurs symboles ailés: l'Homme de St Matthieu, le Taureau de St Luc, le Lion de St Marc, et l'Aigle de St Jean):
(gravure tirée de la Bible de l'Ours, 1569)
10:1 Je regardai : sur la voûte céleste qui était au-dessus de la tête des keroubim il y avait comme du lapis-lazuli; on voyait au-dessus d'eux quelque chose dont l'aspect ressemblait à un trône.
10:2 Il dit à l'homme vêtu de lin : Entre à l'intérieur du tourbillon sous les keroubim, remplis tes mains de braises que tu prendras entre les keroubim, et jette-les sur la ville ! Et il y alla sous mes yeux.
10:3 Les keroubim se tenaient à droite de la Maison quand l'homme arriva, et la nuée remplit la cour intérieure.
10:4 La gloire du SEIGNEUR s'éleva de dessus le keroub sur le seuil de la Maison; la Maison fut remplie de la nuée, et la cour fut remplie de la clarté de la gloire du SEIGNEUR.
10:5 Le bruit des ailes des keroubim se fit entendre jusque dans la cour extérieure, pareil à la voix du Dieu-Puissant lorsqu'il parle.
10:6 Ainsi, quand il ordonna à l'homme vêtu de lin : « Prends du feu à l'intérieur du tourbillon, entre les keroubim ! », il alla se placer près de la roue.
10:7 Alors le keroub étendit la main entre les keroubim vers le feu qui était entre les keroubim; il en prit et le mit dans les mains de celui qui était vêtu de lin. Il le prit et sortit.
10:8 Quant aux keroubim, une forme de main humaine apparaissait sous leurs ailes.
10:9 Je regardai : il y avait quatre roues près des keroubim, une roue près de chaque keroub; l'aspect de ces roues avait l'éclat d'une pierre de chrysolithe.
10:10 Par leur aspect, toutes les quatre se ressemblaient; chaque roue paraissait être au milieu d'une autre roue.
10:11 Quand elles se déplaçaient, elles allaient sur chacun de leurs quatre côtés; elles ne viraient pas en se déplaçant; elles allaient dans la direction de la tête, sans virer en se déplaçant.
10:12 Tout le corps des keroubim, leur dos, leurs mains et leurs ailes, étaient remplis d'yeux tout autour, de même que les roues, leurs roues à eux quatre.
10:13 J'entendis qu'on appelait les roues « Tourbillon ».
10:14 Chacun avait quatre faces; les faces du premier étaient des faces de keroub, les faces du deuxième des faces d'homme, pour le troisième des faces de lion, et pour le quatrième des faces d'aigle.
10:15 Et les keroubim montèrent. C'était le vivant que j'avais vu près du Kebar.
10:16 Quand les keroubim se déplaçaient, les roues allaient à côté d'eux; quand les keroubim déployaient leurs ailes pour s'élever de terre, les roues, à leur côté, ne viraient pas.
10:17 Quand ils s'arrêtaient, elles s'arrêtaient; quand ils s'élevaient, elles s'élevaient avec eux, car le souffle du vivant était en elles.
10:18 La gloire du SEIGNEUR se retira du seuil de la Maison et se plaça sur les keroubim.
10:19 Les keroubim déployèrent leurs ailes et montèrent de terre sous mes yeux quand ils partirent avec les roues. Ils s'arrêtèrent à l'entrée de la porte de la maison du SEIGNEUR, côté est; et la gloire du Dieu d'Israël était sur eux, en haut.
10:20 C'était le vivant que j'avais vu sous le Dieu d'Israël près du Kebar, et je sus que c'étaient des keroubim.
10:21 Chacun avait quatre faces et quatre ailes et, sous leurs ailes, ce qui ressemblait à des mains humaines.
10:22 Leurs faces ressemblaient à celles que j'avais vues près du Kebar; c'était le même aspect, c'était eux-mêmes. Chacun allait droit devant lui.
(EZ. 10)
autre gravure de 1573: la vision d'Ezechiel, façon OVNI
... des Keroubim/Chérubins redoutables, ardentes antennes du Verbe .
Rien à voir avec les charmants chérubins putti qui suivront!
Le monde ancien des griffons étant d'une richesse inépuisable, pas question ici d'en faire le tour exhaustif. Toujours est-il qu'il ne cesse d'être présent, traversant les âges, survolant les déserts, les montagnes et les mers, sortant ici ses griffes redoutables, perdant là quelques plumes, atteignant le grand nord, les monts de l'Hyperborée, et même au-delà, la Scythie, pays des Arimaspes :
Scène de Grypomachie:
lutte de griffons contre les légendaires Arimaspes., peuple cyclope.
(autour de 370 a. J. C. - Musée du Louvre)
Dans l'univers des Grecs, il est consacré à Apollon, dieu de lumière et de beauté, dont il garde les trésors (Hérodote).
Apollon chevauchant un griffon. Coupe attique - 380 a. J. C. Kunsthistoriche Museum de Vienne.
"Et, conception plus haute, ils [les Grecs] le considéraient comme "le gardien, aussi, des voies du salut" (le Bestiaire du Christ, ibid.) : il lutte alors contre les êtres malfaisants ... rampants comme le serpent et le basilic en particulier.
Animal "psychopompe" (ou "psychagogue"), de ses ailes puissantes il élève au ciel les âmes des défunts: c'était le rôle, dans l'Egypte ancienne, du griffon Sefer " qui se transformait , s'identifiait avec les offrandes brûlées des sacrifices, et, par leurs fumées, portait vers le ciel les âmes des morts pour lesquels elles avaient été offertes".
Un rôle que l'on va retrouver dévolu à St Michel Archange à l'époque médiévale, lui qui d'une main armée d'une lance ou d'une épée maîtrise le Malin- dragon-serpent et de l'autre pèse les âmes, permettant aux justes de s'élever au ciel ...
Aregno, église de la Trinité, fresque de St Michel (1448).
Le magnifique et redoutable Archange St Michel dans sa dualité : tout comme le griffon, à la fois gardien impitoyable au bras armé d'une épée ou d'une lance terrassant Satan, et passeur d'âme (psychopompe), pesant les défunts et conduisant ceux qui le méritent vers le ciel.
Une constante dans l'iconographie de nos chapelles à fresques de Corse.
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Un autre épisode significatif se trouve dans les légendes d'Alexandre le Grand restituées au XII° s. , récits aussi populaires et largement diffusés que la Bible elle même :
le grand roi Alexandre, lors de ses voyages, aurait capturé deux griffons dans une contrée étrange et sauvage, puis, les ayant fait jeûner trois jours, les attache à une sorte de nacelle de bois et de cuir (voire, à son trône) , qu'il fait s'envoler en leur tendant sous le bec un morceau de viande du bout de sa lance ... " Il monte jusqu'au ciel de feu. La chaleur excessive le contraint enfin à descendre, ce qu'il fit en abaissant sa lance." (ibid. Le Bestiaire du Christ)
gravure d' Hans Scäufelein (1480/1539)
Jean Wauquelin, Alexandre emporté par les griffons -
Flandre ( XV° s.) -BNF, Manuscrits, Français 9342 fol. 180v
Pour l'historien de l'art Emile Mâle "Alexandre , c'est l'orgueil humain, c'est la science qui veut arracher à Dieu ses secrets. L'homme monte, il entre avec audace dans la région des mystères, mais c'est une région sans limite, et il faut qu'enfin il s'arrête devant de nouveaux mystères" (cité par Charonneau-Lassay, ibid, dans le Bestiaire du Christ p. 371).
Je crois entendre s'interroger tout haut nos astrophysiciens et autres fous de l'infiniment petit ...
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Revenons-en au Moyen-Âge , un temps où l'on ne doute pas de la réalité du griffon, au même titre que de celle du lion, de la hyène, du basilic, du hérisson ou de la salamandre, et dont on tire des leçons morales tout-à-fait édifiantes à défaut d'une connaissance scientifique infaillible.
Voici ce qu'en dit le Physiologos (cf .plus haut) dont se sont inspirés les Bestiaires médiévaux :
" LE GRIFFON
Le griffon est un oiseau qui est d’une taille supérieure à celle de tous les oiseaux du ciel. Il se dresse en Orient, dans le port du fleuve Océan ; et lorsque le soleil se lève, surgissant des profondeurs des eaux, et qu’il inonde le monde de ses rayons, le griffon, justement, déploie ses ailes et capte l’incandescence du soleil pour éviter que la terre habitée ne soit entièrement brûlée. Un second griffon les accompagne jusqu’au crépuscule, selon ce qui est écrit sur ses ailes : « avance, toi qui donnes la lumière, donne au monde la lumière ».
De la même façon la divinité est accompagnée de deux griffons en marche, autrement dit l’archange Michaël et la sainte Mère de Dieu, et ils captent l’incandescence du soleil, autrement dit la colère de Dieu, pour éviter qu’il ne dise à tous les hommes : « je ne vous connais pas », et que sa colère ne les brûle entièrement."
Le Griffon, après quelque temps de disgrâce et de mauvaise réputation dans les tout premiers temps du christianisme où on le soupçonne de servir les forces du Mal, va se trouver réhabilité et son symbolisme va s'enrichir de nouveaux attributs qui finiront par en faire l'emblème du Christ :
alliant la puissance solaire du lion à l'action céleste de l'aigle, faisant communiquer la terre et le ciel, reliant la matière à l'esprit, le monde tellurique au monde cosmique, celui des morts et celui des esprits célestes entre lesquels vivent les hommes, il va symboliser la double nature du Christ, humaine (lion) et divine (aigle), et sa double royauté : le lion, roi des animaux terrestres, et l'aigle roi des créatures célestes.
Dante Alighieri, dans sa Divine Comédie, met en scène dans ses Chants du Purgatoire le symbolisme christique du Griffon, "l'animal à la double nature" ("ch'è sola una persona in due nature"), aux ailes immenses, tirant le char symbolique de la vision d'Ezechiel sur lequel descend Béatrice à la rencontre de Dante:
Sandro Botticelli, entre 1480 et 1500, Purgatoire: le char mystique tiré par le Griffon
Le Griffon, c'est à dire l'Homme-Dieu, le Christ, attache le char à l'arbre de la connaissance du bien et du mal desséché, dévitalisé par le péché originel d'Adam et Eve, et le faisant reverdir et fleurir:
" Bienheureux es-tu, Griffon, qui de ton bec ne détache rien de cet arbre agréable au goût, puisque se tordent dans la douleur les entrailles qui s'en nourrissent" ( Purgatoire, Chant XXXII )
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Là encore, pour les alchimistes, le Griffon est un emblème important:
Aurora Consurgens-1410
le combat du soleil et de la lune:
"Dans le combat que se livrent l'aigle (volatil) et le lion ( fixe), il faut que les deux protagonistes soient réciproquement confondus pour constituer finalement le griffon, c'est-à-dire un seul et même corps parfaitement fixe et indivisible (...)"
(Les clés secrètes de l'alchimie -Fabrice Bardeau, édit. Lanore)
Mais il faut bien reconnaître que dans l'iconographie du Moyen-Age on rencontre parfois aussi l'autre versant du Griffon, alors emblème de Satan: il porte alors souvent de monstrueuses ailes de chauve-souris, un arrière-train dragonné avec une queue reptilienne ... iconographie que l'on retrouve également dans certains blasons,
Comme ici, les armoiries d' Hérimoncourt, au griffon rampant et lampassé, et aux ailes de chauve-souris.
La figure du griffon se retrouve dans d'innombrables armoiries,
comme ici dans ce Blason de la République de Gênes, vues par le Père Accinelli au XVIII° s. :
on peut reconnaître en haut du blason soutenu par deux griffons la tête de Maure de la Corse ...
et, toujours à Gênes,
ce poids pour le Doppia de Gênes,
(1792- 97)
et ici à Volterra:
sur ce blason, le noble Griffon règle son compte à l'infâme Basilic ...
Une remarque : ici l'identité du Bien (Griffon) n'existe pas en soi, elle ne peut se manifester que dans la relation au Mal (Basilic) ... Nous voilà revenus au dualisme du temps de Zoroastre et cette image nous rapproche du tympan de Speluncatu
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Revenons enfin en Corse :
qu'en est-il du Griffon et du Basilic de Speluncatu?
Au mieux, c'est un dialogue, comme diraient certains chefs d'état dans l'impasse, entre deux principes fondamentaux, opposés ... voire complémentaires. Bref un gentil petit couple.
Au plus réaliste c'est un combat sans merci, et notre Griffon de Speloncato (anciennement de San Stefano) ouvre largement ses ailes immenses pour protéger nos gens du Basilic tueur : je ne doute pas qu'il arrive, comme à Volterra, à maîtriser l'Adversaire.
Car j'ai définitivement choisi : pour les besoins de ma lecture, je décide de voir à Speloncato la queue serpentine du Basilic et non le croupion déplumé d'une Poule ou d'un Coq. Parce que si c'était une Poule, tout mon scénario tomberait à l'eau car elle serait alors l'emblème de la bonté vigilante du Sauveur et il faudrait revoir en négatif le rôle de son adversaire, le Griffon ... Ainsi en est-il du monde complexe des symboles, à chacun sa lecture.
Enfin, depuis que ce tympan a élu domicile au-dessus de la porte de l'église Saint Michel - devenue Collégiale Santa Maria Assunta en 1749 - notre Griffon se voit en outre symboliquement investi de la mission du passeur d'âmes, du "psychopompe" attribuée à St Michel.
Où retrouver d'autres Basilics et d'autres Griffons en Corse ? Pour ma part je connais deux tympans qui évoquent le même univers:
Le décor de la porte occidentale de la Cathédrale de Mariana:
au-dessus du linteau et du tympan sculptés en plat-relief, les six claveaux de l'archivolte forment une frise d'animaux. De gauche à droite :
- une sorte de lion
- puis deux griffons ailés à tête d'aigle s'affrontent bec à bec
- vient ensuite au centre de la frise l' Agneau mystique, agenouillé et portant sa croix
- sur sa droite un loup bondit vers lui, la gueule ouverte sur des crocs menaçants, prêt à le déchiqueter
- le cinquième claveau montre un cerf atteint dans sa course par un chien portant un collier et qui lui mord déjà le flanc
- enfin le sixième claveau porte deux basilics affrontés à tête de loup ...
à Piedicorte di Gaggio :
l'archivolte, le linteau et le tympan semi-circulaire romans réemployés à la base du clocher de l'église paroissiale actuelle Sta Maria Assunta .
" Le style de ces entrelacs et de ces sculptures rappelle celui de la porte occidentale de l'église Santa Maria Assunta, ancienne cathédrale de Mariana, dite la Canonica; c'est pourquoi nous avons pensé que ces œuvres pouvaient être contemporaines, c'est-à-dire dater des environs de 1100 " (ibid. G.Moracchini-Mazel, Les églises romanes de Corse p. 334)
De gauche à droite:
- deux bêtes féroces affrontées,
- puis un griffon, bien centré,
- qui combat sur sa droite, un basilic à tête de loup.
le Griffon de Piedicorte
et "son" Basilic
Enfin, il faut signaler le monde perdu de la cathédrale San Marcello d'Aleria, évoqué par Geneviève Moracchini-Mazel:
Aléria - Bas-relief publié par Mérimée en 1840 et provenant vraisemblablement de la cathédrale San Marcello (début XII°s.).
"(...) Mérimée a publié une sculpture qu'il a vue en 1840 remployée sur le mur d'une maison qu'on venait de construire dans le petit hameau d'Aleria, et qui lui semblait "provenir de quelque église détruite aujourd'hui";
Pour G. Moracchini-Mazel, " il est probable en effet que ce bas-relief provient bien de la cathédrale San Marcello, en raison de son style" ( Les églises romanes de Corse, p. 104)
Ce bas-relief n'a malheureusement pas été retrouvé . Il s'inscrit nettement dans le même dualisme qu'à Speloncato ...
Ouvrez l'oeïl !
A suivre ...
A faire, une lecture intéressante sur le voyage iconographique au Haut Moyen-Âge et qui concerne le sujet:
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cr...
18:40 Publié dans griffon et basilic, symbolique romane | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mésopotamie, dualisme, speloncato, cathédrale de mariana, piedicorte, symbolisme du griffon et du basilic, zoroastrisme, dualité | Facebook |