29/04/2012
en Corse, les mazzeri et le destin
Je retransmets ce lien adressé par Anne de Giafferi qui intéressera sans doute beaucoup les amis:
" De toutes les vieilles croyances insulaires, celle des mazzeri est sans doute la plus mystérieuse. Ces héritiers d’un savoir occulte font partie de la mémoire collective corse. Les mazzeri, homme ou femme sont dotés de pouvoirs et de facultés de voyance en état de transe, d’extases ou de sommeil lors desquels ils fréquentent l’au-delà. Comme vision de la mort, le mazzerisme subsiste dans certaines régions du centre et du Sud de la Corse. Les mazzeri sont les derniers témoins d’une religion du destin, ce fatum romain qui hante le bassin méditerranéen. Anne de Giafferi est allée dans les villages enclavés de la vallée du Cruzini où elle a rencontré Pierrot puis son ami Marius ; pour elle et pour la première fois, ils lui racontent leur don de vision et leur histoire avec les morts."
http://www.rtbf.be/lapremiere/emission/programme_par-oui-dire?id=999&scope=past
15:16 Publié dans corse, la mort, patrimoine populaire de Corse, spiritualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marreri, regards sur la mort en corse, religion du destin en méditerranée | Facebook |
13/03/2012
Arts Sacrés mars 2012
Le nouveau numéro d'Art Sacrés (mars-avril) sort ce mois-ci:
il concernera aussi la Corse, avec un article sur les décors peints de la Semaine Sainte en Corse, que les responsables de la rédaction m'ont chargée de rédiger, un plaisir et un honneur dont je les remercie ici! Ce thème m'est cher, on le sait: j'espère pouvoir, cette année encore, emmener ceux qui le souhaitent à la rencontre des sepolcri de la Semaine Sainte en Castagniccia - je vous en tiendrai informés.
Description du numéro Arts Sacrés n° 16
Lumière de Pâques
Pâques est l’occasion d’admirer les reflets multiples que prend le thème de la lumière dans la tradition chrétienne. L’art sacré majeur des chrétiens, l’église, en est sans cesse renouvelé. Comment éclairait-on une église au Moyen Âge ? Et aujourd’hui ? Cette lumière, thème central de deux mille ans d’art sacré, continue d’inspirer les artistes contemporains. Il suffit d’évoquer deux des plus grands : Dan Flavin et James Turrell. À Pâques, la lumière jaillit du tombeau, comme dans les incroyables architectures éphémères des sepolcri de la Semaine sainte en Corse ; et de la terre, comme dans les sculptures inspirées de Georges Jeanclos. Mais elle semble engloutie lorsqu’Olivier Py met magistralement en scène le massacre de la Saint-Barthélemy. Une exposition à Paris nous permet, en observant de simples rochers, de comprendre la spiritualité chinoise, tandis qu’une autre à Londres, consacrée au Hajj, est l’occasion pour notre revue de dénoncer la catastrophe que subit actuellement le patrimoine de La Mecque, dans l’indifférence la plus totale.
Dossier
- DOSSIER La lumière dans l'architecture Lumière créatrice
- La lumière dans l'architecture chrétienne
- Fiat Lux. Eclairer les églises avant l'électricité
- La liturgie des Heures
- Sur l'éclairage des églises. Entretien avec Didier Repellin
- Lumières de Pâques
- Dan Flavin à la Chiesa Rossa
- James Turrell. Le constructeur de « temples »
Articles
- Paysages du sacré. Racines de nuages. Les pierres étranges et la quête d'absolu en Chine
- Portrait d'artiste. Georges Jeanclos. Portrait d'un art messianique
- Images du réel. Décors de la Semaine sainte en Corse
- L'œil instruit. Les croix de consécration
- Paroles et musique. Les Huguenots à l'opéra. Entretien avec Olivier Py
- Moment de création. La Mecque bouleversée
Actualités
- Les drones de Céleste
- Hommage à Dom Angelico Surchamp, peintre
- Trois générations et un agneau
- Un Guernica chrétien. Arcabas
- Spiritualité de l'eau
( le sepolcru de Quenza: la Déréliction du Christ au Jardin des Oliviers )
10:38 Publié dans civilisation, corse, découverte du patrimoine en Corse, semaine sainte en corse, sepolcri de Corse, spiritualité | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : arts sacrés, sepolcri peints de la semaine sainte | Facebook |
02/01/2012
l'énigme des stèles ésotériques de Casalta, pieve d'Ampugnani
L'univers symbolique des stèles de "Truchinacce"
entre Casalta et Silvarecciu,
dans cet espace perdu quelque part au milieu de la chênaie dans la montagne: un lieu puissant, visité mercredi 28 décembre 2011 ...
Je reprends brièvement cette première note sur le sujet de la fin décembre 2011, car, entre temps, nous avons eu quelques informations complémentaires sur ce sujet: il est clair que ce lieu pose quantité d'énigmes toutes aussi passionnantes les unes que les autres.
La première information, et de taille! est que ce site comportait beaucoup plus de stèles qu'aujourd'hui, une vingtaine selon la mémoire orale. Ce qui signifie que ce lieu a été pillé par des gens qui ont jugé ces stèles dignes d'être volées (pour en faire quoi ???) . La deuxième information nous signale qu'il existe ... et qu'il a existé ailleurs dans cette même région d'autres stèles gravées, elles aussi menacées de disparition. Le fait que ce site a comporté un aussi grand nombre de pierres levées nous inciterait à interroger les amis préhistoriens sur l'éventualité d'une occupation très ancienne. Enfin la densité des signes et des symboles sculptés ici (gravés probablement au 19° siècle: les visiteurs éclairés d'il y a une vingtaine d'années confirment avoir lu sur ces stèles disparues des dates de ce siècle) , entre signes religieux (calices, ostensoirs, croix...) et symboles ésotériques (pentacles, compas ...) nous pousse également à solliciter l'avis éclairé des uns et des autres de quelque famille qu'il soient ... Notre sculpteur appartenait-il à une loge maçonnique ou une société secrète du style des Carbonari, présents en Corse et dans l'Ampugnani en particulier?
ce "cimetière" ancien - du moins nous semble-t-il - ( il est dit, toujours dans la tradition orale, qu'ici étaient enterrés des ecclésiastiques liés à la piévanie de l'Ampugnani de l'ancien évêché d'Accia: l'église piévane, Santa Maria, se trouve plus bas dans la plaine au nord, sur le territoire de Casalta).
l'église santa Maria de Casalta, piévanie de l'Ampugnani.
J'y consacrerai prochainement une note. Faut-il rappeler ici que le petit diocèse d'Accia, avec sa minuscule cathédrale plantée au sommet du San Pedrone, comportait seulement deux pieve: l'Ampugnani et le Rustinu, et que dans ces deux pieve l'on trouve des pierres gravées, et des manifestations "magico-religieuses" pré-chrétiennes fort dérangeantes pour l'Eglise, et qu'elle cherchera toujours à rechristianiser ...
un "cimetière, donc, où veillent trois stèles énigmatiques comme sentinelles
ce mercredi dernier, en la bonne compagnie des amis Toussaint Quilici et Jean-Pierre Mannoni, les infatigables arpenteurs/défenseurs de leur région, auteurs du livre " Pieve di Rustinu" (Editions Anima Corsa), nous découvrons ce monde étrange: trois pierres dressées tels de petits menhirs, gravées recto-verso de signes et d'inscriptions qui nous laissent perplexes,
difficilement datables : ici, est-ce vraiment une date, 1853 ? Ou bien une référence à Isaïe ?
messages symboliques : au sommet, une forme solaire irradiante d'où s'écoule une profonde rigole, surmonte une sorte de coeur,
un coeur qui m'évoque fortement le coeur qui orne les cetere,
comme ici la cetera de Salvadore Saladini
à moins qu'il ne s'agisse d'une feuille de peuplier, auquel cas la symbolique est doublement funéraire, le peuplier noir signant les enfers et la douleur, le peuplier blanc, "consacré à Héraclès qui l'avait découvert près du fleuve Achéron lorsqu'il était descendu aux enfers" (Encyclopédie des symboles) annonçant la régénérescence et le salut ...
Puis, sous une inscription, vient un pentacle: une étoile à cinq branches riche de significations symboliques ... pour Pythagore, harmonie du corps et de l'âme, pour les gnostiques, figure centrale du "Néant suressentiel", pour les amulettes "ABRAXAS", protection magique, pour les chrétiens, témoignage des cinq plaies du Christ ... pentacle présent dans les tombes égyptiennes comme sur les céramiques étrusques, signe des cinq éléments pour les alchimistes comme pour les gnostiques manichéens (la lumière, l'air, le vent, le feu, l'eau), cher à la Franc-Maçonnerie ... enfin, une figure - telle un talisman - bien propre à chasser Satan et ses démons ...
et sous les nombres, un A campé sur ses jambes comme le compas du Grand Architecte? bref, notre sculpteur inconnu a des messages codés à faire passer ... et de bons outils pour travailler, creuser, percer (... ces nombreux "trous" qui ponctuent le discours)
autre stèle: "ostensoir", "calice" ...
pentacle, nombres, chandelier (?) ...
le chêne a poussé entre temps.
grande croix, cercles ...
INRI: l'acronyme de Iesus Nazarenus Rex Iudaeorum
(Jésus le Nazaréen Roi des Juifs: version habituelle)
notre homme illuminé est un lettré, un initié?
... d'autres choix:
Igne Natura Renovatur Integra
( la Nature Intègre est Régénérée par le Feu )
Ineffabile Nomen Rerum Initium
(le Nom ineffable est le commencement de toutes choses)
Intra Nobis Regnum Ieovah
(au dedans de nous le règne de Jehovah)
Iesus Nazareth Raphael Iudas
etc ...
coeur, croissant de lune inversé, croix, soleil rayonnant ...
écriture ... pour le plaisir du geste ?
ou message crypté pour les initiés?
" J'enfouis ce témoignage,
Je scelle cette révélation
au coeur de mes disciples"
(Isaïe 8 - 16)
Ici, l'inscription IHS (Iesus Hominum Salvator)
et PAX VOBIS (du moins me semble-t-il: ou nobis ?)
grande croix et sommet de la stèle percé de part en part
Selon certains informateurs, le soleil passant à travers ce trou viendrait désigner le site de Santa Maria de Casalta (il faudrait vérifier ...)
et sous cette croix, le mystère du triangle inversé contenant à nouveau un pentacle: image féminine? triangle alchimique ? Quelle inspiration secrète a guidé le ciseau initié de ce sculpteur original (quelle date? probablement XIX° siècle - les arbres ont poussé depuis ces inscriptions, semble-t-il) pour célébrer la mémoire des siens ? ou bien pour les protéger ? ...
et quelle origine pour ces stèles dressées comme stantare ?
Toujours est-il que nous sommes ici dans un univers symbolique qui nous interroge: dans toute la région l'on retrouve des gravures rupestres remontant à la préhistoire, signes dont on recherche encore le sens (cf "la Pieve di Rustinu" citée plus haut). Notre mystérieux sculpteur s'inscrit en tous cas dans cette nécessité de laisser une trace durable et visible par tous, sinon lisible. Stèles.
Cette stèle, en particulier, évoquerait bien une figure anthropomorphe: le coeur représentant alors en fait un visage. Ces stèles auraient-elles, dans un passé très ancien, été déjà primitivement gravées, et notre ou nos sculpteurs plus récents n'auraient-ils pas réutilisé l'existant ?
"Religion lumineuse
L'Empereur, -- père de toutes les croyances, et estimant en chacune d'entre elles la Raison qui est une, -- veut que ceci, prêt à s'effacer par négligence, soit reporté sur une table neuve et marqué du sceau de son règne :
L'Être admirable, n'est-ce pas l'Unité-Trine, le Seigneur sans origine, Oloho ? Il a divisé en croix les parties du monde ; décomposé l'air primordial ; suscité le Ciel et la terre ; lancé le soleil et la lune ; créé le premier homme dans une parfaite harmonie.
Mais Sa-Than répandit le mensonge, proclama l'égalité des grandeurs et mit la créature dans le lieu de l'Éternel. L'homme perdit la voie et ne put la retrouver.
Viennent ensuite des promesses : une incarnation ; un supplice ; une mort ; une résurrection. Or cela n'est pas bon à faire trop savoir aux hommes.
Que nul n'ose donc ajouter de commentaires ici. Que nul ne cherche un enseignement ici. Afin que sans fruits ni disciples la Croyance Lumineuse meure en paix, obscurément."
(Victor Segalen: Stèles, Face au Midi)
et, un peu plus loin du côté de Silvarecciu, ce rocher gravé par le même (dirait-on) et mangé par le lichen ...
Merci à Colette pour ses photos et aux amis Quilici et Mannoni pour cette troublante rencontre lors de cette riche journée!
En attendant, bonne préparation de réveillon!
(à suivre pour cette enquête à mener et pour l'église piévane Santa Maria de Casalta et les gravures rupestres de Petricaghju, sous Castellu di Rustinu ... qui firent l'objet de cette journée ).
12:15 Publié dans corse, les pierres qui signent, les stèles de Trucchinacce, racines de pierre, spiritualité | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : inri, symbolique du pentacle, abraxas, franc-maçonnerie en corse, carbonari, gnostiques, le triangle, le compas, le chandelier, pianu, casalta, silvarecciu, pierres gravées, campiestru, victor segalen | Facebook |
23/12/2011
Bon Natale!
BON NATALE, PACE E SALUTE !
(avec J.S. Bach, Oratorio de Noël)
le Noël mystique de Sandro Botticelli (1500) - National Gallery, Londres
comme les anges, rameaux d'olivier à la main pour la paix, embrassons-nous:
je crois que même les diablotins ratatinés n'y peuvent plus rien!
et ... pour le partage de Noël...
pour ceux qui ne le connaitraient pas,
l'adresse de ce site fantastique d'où sont extraites ces photos:
http://www.wga.hu/index1.html
09:47 Publié dans regards sur l'art, spiritualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : noël, botticelli, oratorio de noël, bach, bereite dich zion | Facebook |
19/12/2011
Annonciation
variations sur l'Annonciation
(avec Monteverdi)
http://www.youtube.com/watch?v=YUTJE4F5IYY&feature=colike
(pour écouter sans regarder la video, sélectionner puis clic droit et ouvrir le lien dans un nouvel onglet)
(Sandro Botticelli 1481- Galerie des Offices à Florence)
le dehors et le dedans
Cranach 1526 Adam et Eve - Courtauld Institute Galleries - Londres
dedans
la paix luxuriante du Jardin
notre bon père Adam se gratte la tête
indécis
devant la hardiesse de sa gracieuse moitié
Mosaïque de la chapelle palatine à Palerme - XII° siècle
dehors
tout a commencé ainsi après le péché originel
ils se sont fait avoir par le premier margoulin venu
un serpent futé qui prétend qu'ils n'y connaissent rien
qu'ils ne savent rien
qu'il va leur ouvrir le chemin de la connaissance
imaginez
Adam et Eve à qui l'on propose pour rien
le forfait illimité de la connaissance
le seul contrat à signer
croquer le fruit défendu
à dire vrai ils n'avaient pas même besoin de penser
ils se sentaient un en deux moitiés
comme toutes les créatures vivantes du Jardin
mais à présent l'autre est autre
et le monde reste à découvrir
dans la défiance dans l'inquiétude
dans la curiosité
jetés hors du Jardin
curieux et courageux
mais à cet instant ils ne le savent pas encore
ils savent seulement qu'ils sont
séparés
ils ont perdu la grâce de leur innocente nudité
eux qui ne désiraient rien car ils étaient comblés
ils doivent désormais assumer
l'humaine destinée
désir sexualité mort
survie et au-delà
progrès génocides
paix éphémères guerres fratricides
consumérisme charité
art fertile stérile pollution
béatitude auto-destruction
bref le grand bazard
et voilà que
de nombreux millénaires plus tard
c'est l'Annonciation
Cathédrale d'Autun dans la proximité du chapiteau de l'Annonciation
la Vierge lève les mains pour l'écoute
l'étonnement et l'acceptation
l'ange Gabriel l'index dressé
intime son message
Psautier St Alban- Hildesheim 1100
Le récit de saint Luc, 1,26-38 : Annonciation et Incarnation
L’ange Gabriel fut envoyé par Dieu
dans une ville de Galilée, appelée Nazareth,
à une jeune fille, une vierge,
accordée en mariage à un homme de la maison de David,
appelé Joseph ;
et le nom de la jeune fille était Marie.
L’Ange entra chez elle et dit :
« Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi. »
A cette parole, elle fut toute bouleversée,
et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation.
L’Ange lui dit alors :
« Sois sans crainte, Marie,
car tu as trouvé grâce auprès de Dieu.
Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils,
et tu lui donneras le nom de Jésus.
Il sera grand,
il sera appelé Fils du Très- Haut ;
le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ;
il régnera pour toujours sur la maison de Jacob,
et son règne n’aura pas de fin. »
Marie dit à l’Ange : « Comment cela va-t-il se faire,
puisque je suis vierge ? »
L’Ange lui répondit :
« L’Esprit Saint viendra sur toi,
et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ;
c’est pourquoi celui qui va naître sera saint,
et il sera appelé Fils de Dieu.
Et voici qu’Elisabeth, ta cousine,
a conçu, elle aussi, un fils dans sa vieillesse,
et elle en est à son sixième mois,
alors qu’on l’appelait : ‘la femme stérile’.
Car rien n’est impossible à Dieu. »
Marie dit alors :
« Voici la servante du Seigneur ;
que tout se passe pour moi
selon ta parole. »
Alors l’Ange la quitta.
(Lc 1,26-38)
Simone Martini 1333 Galerie des Offices, Florence
dedans
l'or mystique de sa chambre close
surprise par l'archange dans sa méditation
sur le livre entr'ouvert de la prédiction d'Isaïe
" Ecce Virgo concipiet "
la Vierge frissonne apeurée
drapée dans son manteau bleu de nuit
reçoit la parole de l'archange
les mots entre eux deux traversant l'espace
de la bouche de l'un à l'oreille de l'autre
le rameau vigoureux dans la main de Gabriel
bâton du messager du ciel
répond au bouquet de lys de la pureté de Marie
(avec Heinrich Ignaz von Biber)
http://youtu.be/HdwKledgv_o
dans la pénombre de la cathédrale de Carrare
le silence des Casarelle
(avec Guillaume Dufaye)
http://youtu.be/O-25R_SaDao
dans le vide d'un espace muet
Gabriel déroule le phylactère divin
Marie surprise et attentive
suspend sa pensée
accepte l'inconcevable
Fra Angelico 1433 Musée diocésain de Cortone
(dans la prédelle , les scènes de la vie de la Vierge)
là-haut à gauche en prélude
se joue le drame d'Adam et Eve chassés du Paradis
tandis que déjà dans cet espace ouvert
l'échange des paroles
les mains croisées sur la poitrine presque déjà creusée
pour se protéger
ou pour se soumettre
la Vierge écoute
l'Annonciateur qui avance
annonce d'un geste oratoire
les index dressés pour convaincre
l'un pour le ciel
l'autre pour la terre
Fra Angelico 1425 Musée du Prado - Madrid
à nouveau et cette fois-ci toute proche l'expulsion d'Adam et Eve du paradis tandis que roulent sous leurs pieds nus les fruits défendus
il s'agit bien de cela:
" Sumens illud Ave
Gabrielis ore,
Funda nos in pace,
Mutans Hevae nomen"
( Faites que pour jamais
au doux Ave de l'ange
le nom d'Eve se change
en présage de paix)
(Ave maris stella)
comme toujours Marie porte sa robe rouge
signe de son humanité
recouverte du manteau bleu
signe de son appartenance céleste
ici Gabriel et Marie dialoguent en silence
les mains croisées dans un mutuel respect
dans le rayon déjà à l'oeuvre
la colombe de l'Esprit Saint
la parole divine s'incarne le Verbe se fait chair
le temps de l'incarnation n'existe pas
seul celui de la gestation humaine
Fra Angelico, 1442, couvent San Marco, Florence
dedans
espace dépouillé d'une cellule silencieuse pour cette ultime Annonciation
sous le regard de saint Dominique
la Vierge frêle pliée en avant
en équilibre
du bout des genoux
"Elle plia les genoux et joignit les mains en disant
"Ecce ancilla Domini"
interrompue dans sa lecture pieuse
la servante du Seigneur reçoit son visiteur
plus légère que son ombre humaine
aile sombre déposée sur le mur
devant elle Gabriel le messager ailé
bien droit
sans poids presque sans ombre
mais non sans la douceur
d'une bien humaine tendresse
Botticelli 1489 Galerie des Offices à Florence
à nouveau la parole qui déséquilibre la Vierge
elle vacille
déjà un évanouissement comme au pied de la croix
cette fois c'est l'archange qui s'agenouille
le lys à la main
comme intitimidé par sa mission
à la tension dans la chambre
répond au loin le calme d'un paysage maîtrisé par l'homme
et se dresse entre terre et ciel
l'Arbre
Leonard de Vinci 1472-75 Galerie des Offices à Florence
(avec Biber : la passacaille- l'Ange gardien)
http://youtu.be/JS8tnac9ad0
dehors
Ici la Vierge n'est plus dans une pièce close
elle interrompt sa prière
assise devant son prie-Dieu sur les fleurettes du jardin
comme femme à la quenouille aux beaux jours
l'ange Gabriel lui adresse son angélique salutation
d'un profil très pur
Marie reçoit le message une main sur les écritures
l'autre ouverte pour l'accueil
sereine
la tranquillité du jardin
l'aide à respirer
ce doit être la fin de l'après-midi
car l'ombre de Gabriel s'allonge entre eux
(avec Heinrich Ignaz von Biber: les mystères du Rosaire)
http://youtu.be/JS8tnac9ad0
Lorenzo Lotto 1534 - Pinacoteca Civica de Recanati
"La puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre"
le geste impérieux du Père
l'intrusion de l'archange décoiffé
j'allais dire l'effraction
projetant son ombre inquiétante dans une chambre bien rangée
au fait est-ce vraiment l'ombre de l'ange
n'est-ce pas plutôt celle du très-Haut
tandis qu'au sol le chat noir au poil hérissé
s'enfuit en poussant un miaulement diabolique
tout cela a bien de quoi pétrifier la Vierge
El Greco 1596-1600, Musée du Prado à Madrid
passage
le dialogue véhément de l'archange vert aux ailes déployées
et de la Vierge éclairée par la colombe de l'Esprit Saint
transperçant les nuages
entre eux montent les flammes d'un buisson ardent
et résonne la baroque musique des anges
nous voilà bien loin du silence de Fra Angelico
mais quelle divine promesse!
(à nouveau l'Ave Maris Stella des Vêpres de Monteverdi, autre version)
http://youtu.be/cim9oZd8N7Y
un peu plus tard Nicolas Poussin en 1657 peint à Rome cette merveilleuse Annonciation minimaliste - National Gallery à Londres
dedans
à nouveau le silence d'un temps suspendu
sous le vol immobile de la colombe
la Vierge offerte
pieds nus sur sa petite estrade
les bras ouverts comme son livre
les yeux fermés pour mieux recevoir
le message de l'ange aux index indicatifs
elle porte le vêtement jaune des femmes juives de l'époque à Rome
( avec Marc-Antoine Charpentier)
http://youtu.be/Hu_5p400SeQ
"Alors l'ange la quitta"
(à suivre pour d'autres variations de l'Annonciation en Corse)
00:57 Publié dans regards sur l'art, spiritualité | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : annonciation, ave maris stella, autun, simone martini, monteverdi, fra angelico, botticelli, lorenzo lotto, leonard de vinci, el greco, poussin | Facebook |