11/11/2013
11 novembre: à la mémoire de tous les poilus et du grand-père Marcel
le 11 novembre,
la mémoire de la grande Guerre de 1914- 1918
sur les monuments aux morts de la Corse
(Occhiatana, le monument aux morts de Damasu Maestracci)
On le sait, des monuments aux morts incroyablement
chargés de noms ...
à retrouver sur ce site formidable en gestation:
Monuments aux Morts Corses 14-18
Afin que nul n'oublie, d'où qu'il vienne...
Nous avons tous, dans chaque famille, perdu l'un des nôtres dans
cette tragique boucherie: ici notre grand-père Sarthois Marcel,
mort le 19 février 1915 en Champagne dans la terrible bataille
de Perthes-les Hurlus:
600 hommes de son 124° régiment d'infanterie perdent la vie au cours
de ces jours dont plus de cent le 19 février .
Une bien pauvre consolation , ce laconique communiqué:
,
la petite Madeleine n'avait que 9 mois. Marcel, partant à la guerre
en août 1914 -comme le plus grand nombre, la fleur au fusil- ,
écrivait quasiment chaque jour à Berthe, sa jeune épouse,
lui donnant au passage des conseils pour gérer la ferme familiale
et bien persuadé que cette guerre serait vite gagnée,
qu'on repousserait rapidement ces "cochons de Boches" à l'intérieur
de leurs frontières et qu'il serait bientôt de retour pour les travaux
de la ferme.
Au fil des lettres, bien vite l'horreur surgit, le doute ("mais on ne
nous dit pas tout"), l'inquiétude aussi de ne pas recevoir assez
de courrier de la maisonnée ...
Cet homme de la campagne avait reçu une bonne instruction,
il détenait son Brevet Supérieur: sa belle écriture aisée court serrée
sans aucune rature ni faute d'orthographe sur ces feuillets pliés
en quatre, pieusement conservés dans une modeste boîte de bonbons.
Sept mois de lettres. Ecrire pour survivre.
Longtemps, avant la découverte récente de ces lettres,
mon grand-père maternel fut pour moi une image désincarnée,
une histoire familiale qui avait fait de ma mère une pupille
de la Nation: ce « mort à la guerre » avait donné à ma grand-mère
devenue veuve un nouveau statut. Ma mère répétait à l’envie
qu’à cette époque les femmes étaient devenues des maîtresses,
non seulement chefs de famille, mais aussi, dans le cadre de
cette vie rurale, chef d’entreprise si l’on peut dire.
Pour moi, l’ouverture de la petit sépulture en fer-blanc des lettres
a redonné chair et cohérence à ce grand-père éparpillé, réduit en
bouillie, l’a exhumé de cet anonymat sanglant partagé par ces
milliers de jeunes victimes de l’absurdité de la grande Guerre.
Et l’on peut continuer de dire si l’on veut « mort pour la France »,
« mort sur le champ d’honneur": il importe surtout de ne jamais
oublier qu'avant d'être de la chair à canons ce furent des hommes.
Les restes inidentifiables de "mon" Marcel reposent sans doute
dans l'un des ossuaires de la nécropole de la Crouée,
à Souain-Perthes-les Hurlus, en compagnie de milliers d'autres
soldats français morts dans ce secteur de Champagne:
- sur une superficie de 60.384 m2, 30.734 sépultures,
dont seulement 9.050 identifiées -
21.688 soldats reposent dans 8 ossuaires ...
Signalons que le cimetière allemand du même lieu accueille
13.786 soldats allemands ...
(le poilu d'Occhiatana)
Enfin, j'ajoute que Marcel avait un frère, Louis, "tué à l'ennemi" aussi
dès le 26 septembre1914 sur un autre champ de bataille de cette
maudite guerre.
Une histoire banale, en somme, dont est mort de chagrin mon arrière-
grand-père.
(sur la place de l'église, le monument aux morts de Souligné)
09:27 Publié dans famille, les Monuments aux morts | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : perthes-les-hurlus, les poilus, guerre de 191461918 | Facebook |
06/01/2013
Temps d'enfance à Valle d'Orezza
A Valle d'Orezza,
Pieve d'Orezza, en Castagniccia
la Sainte Parenté
Dans cette surprenante et belle église de Castagniccia -récemment restaurée par l'atelier de J.C. Torre ( en compagnie de J.Sanguinetti , Loïc Corcuff, J.C. Desrues, Giovanni Pelloso ), parmi les autels baroques de stucs créés par la célèbre famille des RAFFALI au début du XVIII° siècle, voici l'autel dédié à la Sainte Parenté,
surmonté par le médaillon de Saint Joseph, armé de son bâton fleuri. Je salue au passage le joli travail de restauration, car le personnage était fort dégradé et difficilement identifiable , ayant perdu le bâton, son attribut essentiel. La cohésion du discours a guidé le restaurateur...
la fuite en Egypte
tandis que, sur la cuve l'autel, G. Raffali représente dans un médaillon charmant la Fuite en Egypte: Marie et Jésus, juchés sur un âne conduit par le bon Joseph, fuient le Massacre des Innocents, décrété par Hérode.
L'autel accueille une belle toile de la Sainte Parenté peinte par Giuseppe Maria CASALTA, ce peintre corse domicilié à Prunelli di Casaconi, dont on rencontre les oeuvres entre 1687 et 1713 (cf. l'Encyclopédie des peintres actifs en Corse, de Michel-Edouard Nigaglioni). Restauration d'Ewa Poli.
Au centre de la composition Marie présente l'Enfant Jésus sur ses genoux tout en maintenant le jeune Jean-Baptiste,
tendu vers son cousin et porté par sa vieille mère, Elisabeth.
L'Enfant Jésus souriant à Joseph prend une rose parmi la jonchée fraîchement cueillie par son père adoptif. C'est la Trinité terrestre : une tendre "famille recomposée", dirait-on aujourd'hui. Joseph s'incline vers la mère et le fils avec amour et respect.
De l'autre côté de la Vierge, veillant sur le groupe, Sainte Anne (du moins je le suppose) et Joachim, les parents de Marie, les yeux baissés.
Au-dessus de Saint Joseph, un personnage n'appartenant pas à la Sainte Parenté, s'intègre pourtant en douceur dans l'ensemble, s'apprêtant à offrir un fruit à l'Enfant: il s'agit de Saint Simon, portant sur son dos la scie de son martyre - St Simon est vénéré dans cette région de la Pieve d'Orezza .
Un ange vole au-dessus de la courbe des visages, tenant d'une main le bâton fleuri de St Joseph et de l'autre la couronne de la Vierge.
Seule Marie, le visage gracieux, rond et doux,
nous regarde, les yeux bienveillants, un léger sourire sur les lèvres.
Tous les autres personnages couvent du regard l'Enfant Jésus
Ailleurs, le thème de la Sainte Parenté peint par Simon de Chalons en 1543
au Musée Calvet à Avignon
Il s'agit là d'humaniser le mystère de la naissance de Jésus en l'inscrivant dans une famille élargie dotée d'ancêtres, de cousins multiples, bref un tissu familial rassurant qui renforce l'humanité de Jésus.
Sur le thème de la Sainte Parenté ou de la Sainte Famille élargie, je vous renvoie à une note intéressante de ce site:
Les trois maris de Sainte Anne, les sœurs - Biblioweb - Hypotheses
Leonard de Vinci, National Gallery, c. 1507-08: la Vierge avec Ste Anne, Jésus et St Jean-Baptiste
Raphaël, Canigiani Madonna, 1507, Alte Pinacothekde Munich:
Giulio Romano, la Vierge à l' Enfant avec Ste Elisabeth et St Jean-Baptiste, dite "La Petite Sainte Famille" - c.1517-18. Cette peinture est actuellement présentée dans la belle exposition consacrée aux dernières années de Raphaël, au Musée du Louvre.
En Corse à nouveau, le tableau miraculeux de Notre-Dame de Lavasina ( anonyme, XVI° siècle): la Vierge à l'Enfant avec Ste Elisabeth, St Jean-Baptiste et St Joseph ( merci M.E. Nigaglioni!). Cette peinture est à l'origine d'un grand pélerinage très populaire en Corse et de la propagation de cette dévotion sur l'îlecomme
(photo M.E. Nigaglioni)
comme ici à Bastia, église St Charles, cette peinture de Gilbert Bouchez (peintre et professeur de dessin à Bastia entre 1858 et 1874) inspirée de la toile de Notre-Dame de Lavasina.
10:52 Publié dans corse, famille, iconographie des saints, l'art baroque en corse, patrimoine de corse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : valle d'orezza, sainte parenté, giuseppe maria casalta, giovanni raffali, sainte anne, saint joseph, sainte elizabeth, saint joachim, fuite en egypte, giulio romano, leonard de vinci, raphaël, notre-dame delavasina | Facebook |
02/09/2012
Entre chagrin et joie: maman a largué les amarres ...
" Et nul ne me retient
De rire à tous les vents, légère.
Plume sans nid, graine sans aire ..."
http://youtu.be/h9309TuH9UM
Faire-part deces Madeleine Bastien.pdf
avec le Magnificat de Bach:
http://youtu.be/HlBeShifhbE
Elle aimait la vie, la rencontre, le partage, elle aimait l'amour, elle n'aimait pas la langue de bois, elle aimait danser, elle n'aimait pas son fauteuil roulant, elle n'aimait pas la solitude, elle aimait les fleurs minuscules, celles que personne ne remarque, les plumes d'oiseaux, les feuilles mortes, les nuages légers, elle n'aimait pas devenir aveugle, sourde, perdre la mémoire et ses jambes, elle aimait le voyage, l'imprévu, la chanson, le champagne, elle n'aimait pas la guerre, le malheur, l'injustice, la séparation, elle aimait les gens, elle aimait ...
... et avec Monteverdi:
http://youtu.be/iw0nJddA-JU
avec MARIE-NOEL
"Ce moi-même si las, si lourd
Que j'avais la nuit et le jour, ...
Je l'ai par terre abandonné
Et je vire et je vole, gaie
Comme un papillon nouveau-né.
Rien n'ai, rien ne veux, rien ne suis.
De n'être plus, de n'être rien,
Je ris! Et nul ne me retient
De rire à tous les vents, légère.
Plume sans nid, graine sans aire ...
O Père, je ris d'être morte."
09:49 Publié dans famille | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : magnificat, marie-noël, magnificat bach, magnificat monteverdi | Facebook |
29/04/2012
"cartulaire de mon coeur"
à la mémoire en déshérence
avec Nicolas BOUVIER
Hommage à la géographie ancienne
Cartulaire de mon coeur
paroles du monde ancien
vieux mots usés et sages
qui pour un temps m'aviez fait compagnie
et si souvent porté secours
d'où me revenez-vous ce soir?
bourdonnants, suspendus à mon cou
flammèches ou abeilles
sur l'étole du prélat défroqué
Mots du secret, du souci et de l'ombre
murmures, portée de rats, fourrure du souvenir
frileusement nichés sur mes genoux
que d'anxiété dans ces pétillantes prunelles
qu'attendez-vous encore de moi?
voilà si longtemps que nous nous sommes quittés
Il fait noir dans la cuisine
un peu d'alcool brille au fond du verre
tu te tais alors qu'il faudrait que tu hurles
Judas des mots
et tu n'as pas fini de payer ton silence
(Nicolas Bouvier, Genève, hiver 1977, dans: "le dehors et le dedans", éditions Zoé, 1998 )
09:44 Publié dans famille, poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nicolas bouvier | Facebook |
03/01/2011
Gaspard et Muriel à Occjatana
Ce mardi 28 décembre 2010
à OCCHJATANA, patrie du poète u Magiurellu
Gaspard et Muriel ont choisi de se marier, en présence de leurs trois enfants: Martin, Noé et Alice,
dans ce qui fut la salle de classe où Gasparu le petit sauvage avait appris à lire et écrire sous la férule de son bon maître, Santu MASSIANI ...
Santu pour l'occasion nous a offert ce poème plein d'émotion, pour ce village d'Occhjatana , où il passa ses premières années d'instituteur et où sont nées tant de promesses tenues (c'est ici , dans les années 70 du riacquistu, que i Muvrini - les enfants Bernardini et leur père - sont "nés", ) et pour nos enfants Gaspard et Muriel:
(Santu)
" Ci sarà un locu sceltu
Fattu à strette è pughjaline
Una sala una corte
Colm’à rise zitelline
Issi ricordi tramandati
Di canzone casaline
Issi ricordi d’un dulciore
D’un paese l’addunita
Ochjatana la so ghjente
Da tanti usi ammanita
A so scola a palesa
In sapienza imbillita
A so scola è u scularu
A famiglia ellu fonda
Incù l’anni è po l’amore
Ci hè la vita chì feconda
Martinu, Noè , Alissia
In ste grazie ella abonda
Cari amici festighjemu
In stu locu aggarbatu
Di Muriel è di Gasparu
Quell’annellu alburiatu
Hè la gioa sò l’abbracci
D’un maestru furtunatu"
Merci, o Sa!
... et merci à tous d'être venus partager cette joie!
19:11 Publié dans famille | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : occhjatana | Facebook |