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06/08/2012

la Balagne et la Castagniccia, avec la Montagne des Orgues

 

Association Saladini de Speloncato

 

« LA MONTAGNE DES  ORGUES »

à la découverte du PATRIMOINE

 

Des parcours initiatiques et festifs pour rencontrer la Corse autrement, vous immerger dans ses paysages et ses communautés, découvrir son histoire, son  patrimoine,  ses traditions rurales : des clefs pour vous ouvrir les églises, vous faire comprendre leur sens caché et entendre leurs orgues historiques que l’on vous joue.

 

Belgodère vu de haut.jpg

(Belgodère, vu depuis a Torra  a la Cima)

 

MARDI 7 AOÛT :  en Balagne

Accueil à Belgodère à 9h place de l’église : église St Thomas ( orgue Lazari , 1761), puis découverte de Costa (San Salvatore, orgue anonyme début XIX° s.), Muro (Sta Nunziata, orgue Pagnini 1796/Agati Tronci 1878), Cateri (Ste Marie, orgue Domini 1902).

 

fronton autel servites blog.jpg

(les petits monstres du fronton du premier autel des Servites)

JEUDI 9 AOÛT :  en CASTAGNICCIA

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maisons de Castagniccia et terrasses


Accueil à Ponte Leccia à 9h sur le parking du Super U. Découverte des fresques de la chapelle San Tumasgiu à Castellu di Rustinu, des églises baroques de Piedicroce ( St Pierre et St Paul, et l’orgue le plus ancien de Corse, 1619), Verdèse (St Sébastien, orgue 1896 Stoppia Nova (Notre Dame du Carmel), La Porta ( St Jean-Baptiste, orgue 1780), enfin du site archéologique paléochrétien et roman de Santa Maria di Rescamone à Valle di Rustinu. 

 

La Porta clavier de l'orgue.jpg

(le clavier de l'orgue de La Porta)

Ces parcours reposent sur le bénévolat et les fonds récoltés lors de ces journées contribuent à la restauration et à la valorisation du patrimoine. Ils sont recommandés par les guides : Routard, Bleu, Michelin, Geo , Arthaud, Balado, Petit Futé… et ont fait l’objet de nombreux reportages ( journaux, radios, télévisions nationales et européennes )  

 

Renseignements et réservations au :

TEL/FAX : 04 95 61 34 85 - Portable : 06 17 94 70 72

Participation aux frais : 30 € par adulte. Gratuit pour les moins de 12 ans.

 

e mail : elizabethpardon@orange.fr

Site : www.montagnedesorgues.com/ 


 

 


 

 

 

16/12/2011

Brève du Purgatoire: vergogna!

 

la mort programmée hier soir:

rien à voir avec les feux de Noël de la semaine prochaine ...

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le vent violent

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attisait la boulimie du feu

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condamnant à mort les derniers arbres de ce pan de montagne, entre Occhiatana et Belgodère (comme ailleurs en Corse) :

honte à ceux qui mettent le feu ces temps-ci. Véritables assassinats, en vérité, puisqu'au travers de la mort de la végétation qui ancre le sol sur les montagnes, c'est la mort des générations d'enfants à venir sur ce sol que les pyromanes inconscients continuent de programmer. Rien à voir avec un écobuage traditionnel maîtrisé: si l'on veut préserver le patrimoine des générations futures il faut (réellement!) interdire pacage, chasse et surtout ... spéculation immobiliaire sur ces terrains incendiés sauvagement les jours de vent.

Une violence qui s'exerce contre un pays que l'on dit aimer.


A propos de violence, je veux signaler ici l'un des ouvrages les plus intéressants publiés cette année par l'éditeur Alain Piazzola dans le paysage littéraire de la Corse, étude remarquable d'Antoine-Marie Grazziani :

 

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Une période où les Corses vivent essentiellement dans et de leurs campagnes, contrairement à aujourd'hui:

"Nous privilégierons donc dans cette étude la pratique et l'étude des réalités politiques "hétérogènes et multiformes" du terrain au détriment de ce qui a le plus souvent été présenté comme clef de lecture et d'interprétation privilégiée, c'est à dire les normes et les institutions."

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Pour tous ceux qui font profession d'aimer la Corse en la submergeant sous des clichés angéliques, autant revoir leur copie. La lucidité, me semble-t-il, me semble nécessaire pour nourrir un amour pérenne ...

27/09/2011

les journées du Patrimoine, la semaine dernière

 

Bref compte rendu de ces journées...

Samedi 16 Septembre, Edouard Flach nous a présenté un exposé très complet des voyages du patrimoine illustré de nombreux documents dont certains étaient tout-à-fait inédits - En particulier cette référence dans un manuscrit du XV°s.,  à l'appontement de Losari qui desservait la pieve de Tuani (de Belgodère à Speloncato) - ce qui confirmait ce que nous savions par ailleurs mais de sources plus récentes.

 

L'après-midi fut consacrée, comme prévu, à la présentation du monde des sepolcri en Corse: je vous rédigerai un de ces jours une note longue sur ce patrimoine qui dit beaucoup sur la Corse et les Corses au coeur de la Méditerranée dans les siècles passés.

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Dimanche, balade dans la pieve de Tuani.

Tout d'abord, du haut du rocher sommital de Belgodère, ( "e Teghje"), la vue sur toute la pieve à 360 degrés:

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en compagnie de Louis Belgodère, infatiguable chercheur et compteur, découverte de la première implantation du village, sous l'impulsion (selon la légende rapportée par Colonna di Giovellina) du marquis André II de Massa qui choisit ce site stratégique pour défier son ennemi de l'époque (XIème siècle), le turbulent Marovello de Speluncato: "Sarebbe ub bel godere per essere noi fronte del nimico" ("Ce sera un bon plaisir d'être face à l'ennemi" ). Cette histoire est reliée à la terrible légende de la Biscia, mi -serpent mi -dragon, dévoreuse de chair humaine, créature démoniaque s'il en fut ... mais ceci est une autre histoire ...

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D'où l'on aperçoit les villages d'Ochjatana, Costa, Ville di Paraso, enfin Speluncato ...

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et de l'autre côté les ruines du couvent des servites (et le cimetière) ... Les maisons du village médiéval s'enroulaient étroitement autour du rocher, communiquant par des passages voûtés, dans un souci défensif comme dans de nombreux villages anciens de Corse (cf. Speluncatu, Sant'Antoninu ... pour ne citer que les plus connus)

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le couvent, tout d'abord fondé par les Franciscains en 1540, accueille très rapidement (dès 1560) l'ordre des Servites

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Plus près de nous, le château de la Costa, construit en 1892 par le député Toussaint Malaspina, ami de Georges Clémenceau. Aujourd'hui transformé en école intercommunale, il accueille tous les enfants de la région. A proximité du château, Madame Malaspina fait construire en 1914-1915 une chapelle (  Sainte Croix) parée de marbre blanc de Carrare qui servira de sépulture aux membres de la famille. Il y a quelques années l'on a déplacé une statue du Christ Sauveur depuis cette chapelle au sommet des Teghje:

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Pierre avait été chargé de ce transfert délicat. La question épineuse était de savoir si le Christ serait tourné vers le village ou vers la plaine (ses cultures, ses troupeaux) et fut l'objet pour les villageois  de débats passionnés - et pour finir il fut décidé qu'elle protègerait le village et ses habitants ...

 

Visite à l'église paroissiale saint Thomas - riche d'oeuvres et d'histoires ...

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avec son petit orgue ( Lazari 1761, construit pour l'église du couvent des Servites et transféré à l'église paroissiale après la Révolution)

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et le premier maître-autel "à ailes" de l'église des Servites (son fronton porte l'emblème des Servites), oeuvre du maître ébéniste local Marcangiole, aux environs de 1663. Il accueillit à son arrivée au couvent la magnifique statue de Notre-Dame des Sept Douleurs, la grande dévotion du village, aujourd'hui transférée à la Chapelle St Jean. Dans le  fronton interrompu, l'emblème des Servites ...

 

... que nous allons découvrir ... à suivre!

 

12/09/2011

Les Journées du Patrimoine, cuvée 2011

 

 

 

 

Comme chaque année l'Association Saladini de Speloncato apporte sa contribution aux Journées européennes du Patrimoine.

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(l'ancien tympan -XI°s - de l'église santu Stefano de Giustiniani, transféré à la Collégiale de Speluncatu)

Voici donc le programme proposé pour les 17 et 18 septembre 2011 sur le thème :

« Le voyage du Patrimoine »

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(Collégiale Sta Maria Assunta, l'autel de San Filippu Neri: Ignaziu SaveriuRaffali artiste stuccateur venu de Piedicroce d'Orezza (Castagniccia)  1767, et toile attribuée à l'espagnol Vicente Suarez, vers 1789, représentant l'apparition de la Vierge à saint Jean Népomucène ( né en Bohême) et saint Philippe Néri (né à Florence) .

 

Samedi 17 septembre :

9 h 30 – 12 h, conférences/débats dans la Collégiale Santa Maria Assunta.

 

9 h 30 – 11 h : Le patrimoine évolue et n’est pas créé ex nihilo sur un lieu donné,  il nait le plus souvent de la conjonction d’efforts locaux et d’apports extérieurs autour d’une même nécessité.

Ces apports extérieurs impliquent toujours une délocalisation matérielle ou immatérielle.

- La christianisation

- La situation politique et les échanges commerciaux qui en découlent

- Les échanges commerciaux

- Les moyens de communication (évocation en particulier du « port » de Lozari, d’Algajola et de la pratique du cabotage)

- La transmission des savoir-faire

Nous évoquerons les apports d’œuvres d’art à l’intérieur des différents édifices du village de Speloncato.

11 h – 12 h : Visite de la Collégiale.

(prévoir son repas, restaurants à proximité)

 

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(Speluncatu, élément de sepolcru: le Christ à la colonne)

 

Samedi 17 : 14 h 30 – Conférence à la Casazza, anciennement église sainte Catherine : « Regard sur les sepolcri de Corse, un patrimoine cyclique, éphémère et caché à redécouvrir »  .

 

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(le sepolcru de santa Lucia di Moriani: merci Michel Edouard!)


Suivie de la  visite de la Casazza et du Palais du Cardinal Savelli .

 

Dimanche 18 : à la recherche du patrimoine conventuel de la région.

 Au moment de la Révolution française les couvents de Speloncato, Tuani, Belgodère subissent le sort de tous les couvents de Corse et sont démantelés , vidés, le mobilier et les œuvres d’art vont être en partie récupérés par les paroisses voisines.

 Circuit (prévoir son repas): de Belgodère à Speloncato en passant par Costa, Occhiatana et Ville di Paraso. Cette journée est consacrée en particulier à la recherche du patrimoine des couvents de Speloncato, Tuani, Belgodère à travers les villages avoisinants (Belgodère, Occhiatana, Costa, Ville di Paraso , Speloncato ) .

Les orgues de Belgodère, Costa et Speloncato seront joués lors de ces visites . Signalons que cette deuxième journée se terminera en fiesta musicale, grâce à la présence d'Hubert Scotto et de sa clarinette aux environs de 17h.

 

Rendez-vous à 9h 30 à l’église de Belgodère.

 


 

Voici, pour information,  l'annonce officielle des Journées européennes du patrimoine

 

 

 

Journées européennes du patrimoine

17 et 18 septembre 2011

 

 

 

le  30 mars  2011

 

 

 

Le voyage du patrimoine

 

Objectifs et orientations thématiques

 

 

 

Le patrimoine pâtit parfois d’une image figée qui en dissimule les aspects les plus complexes : le poids des siècles et celui des pierres, la permanence sur un sol chargé d’histoire, le hiératisme de sites mémoriels majeurs. Alors qu’il déplace les foules, il est toujours pensé comme immobile, situé, transmis, propriété d’une personne, d’une communauté, d’une nation.

A l’inverse, le voyage évoque l’ailleurs, la frontière, l’horizon, le dépaysement. Il fait émerger des figures mythiques (le découvreur, l’aventurier, l’explorateur) et naître des rêves de vitesse, de liberté et de partage.

 

A l'occasion de cette 28e édition des Journées européennes du patrimoine, le thème du « voyage du patrimoine » a pour objectif de révéler une dimension souvent mésestimée : l’extraordinaire vitalité d’un patrimoine national qui s’est toujours constitué grâce aux circulations des œuvres et des artistes, aux contacts entre des courants et des cultures esthétiques différentes, aux influences qui ont permis de faire se croiser les regards et d’inventer de nouvelles formes.

 

Reflet de mutations, de métissages et d’emprunts successifs, support de création, le patrimoine a toujours été « en mouvement ». Parler du voyage du patrimoine, c’est aussi faire état de sa modernité en (dé)montrant qu’il est en perpétuelle actualisation, dans un mouvement continu d’ouverture et d’échange.

 

Le « voyage du patrimoine » est une invitation à un périple dans le temps comme dans l’espace. Au moment même de sa construction, un édifice religieux, militaire, industriel ou culturel est le fruit d’une composition éclectique entre les influences de son architecte, les modes ou les techniques d’une époque, les savoir-faire hérités des régions voisines ou des pays frontaliers. Depuis l’Antiquité, l’art de bâtir s’inspire et se nourrit d’influences diverses à échelle européenne ou mondiale, traversé par de multiples courants artistiques qui ont façonné nos paysages actuels.

 

L’architecture religieuse gothique, par exemple, présente une apparente homogénéité stylistique, mais résulte d’expérimentations développées en Île-de-France et en Picardie, mais aussi en Angleterre, en Espagne, dans le Saint-Empire romain germanique. La basilique-cathédrale de Saint-Denis, les cathédrales de Saint-Etienne de Sens, de Chartres ou de Rouen se sont ainsi constituées sur un modèle européen, grâce à un mouvement de circulation des idées qui a permis l’invention de formes nouvelles, avec des appropriations spécifiques selon les pays.

Le style Renaissance, lui, fait un voyage qui part de l’Italie pour trouver un terrain d’expression privilégié en France, comme en attestent les châteaux de la Loire, le château d’Ecouen, la Cour du Louvre mais aussi de nombreuses riches habitations ou fontaines sur l’ensemble du territoire français.

 

Le voyage du patrimoine est aussi celui de l’histoire des régions françaises, qui ont chacune développé des savoir-faire propres. Certains éléments patrimoniaux ont trouvé des expressions originales selon les lieux où elles s’implantaient (choix des matériaux, traditions architecturales, contextes religieux ou politiques, proximité culturelle comme l’illustre le cas du patrimoine monumental alsacien).

 

 

La technique du colombage, par exemple, répond aux mêmes plans, mais a connu des spécificités champenoises, alsaciennes ou encore bretonnes. De la même manière, coïncidant avec le développement de l’industrialisation au XIXe siècle, la structure métallique fait son apparition, inspirée par les créations anglaises et belges, et marque encore aujourd’hui de nombreux bâtiments dans le Nord-Est de la France, comme à Paris, Roubaix ou Nancy. Chaque courant artistique et architectural voyage en France et trouve des interprétations différentes, de l’influence du baroque italien à Nice à l’Art nouveau présent dans le patrimoine balnéaire français.

 

Comment ne pas également penser à la circulation de principes architecturaux « officiels » qui, entre enjeux politiques, nécessités pratiques et effets de mode, ont trouvé leur place dans chaque ville française et ont diffusé une certaine image du pouvoir : les places royales du XVIIe siècle (Paris, Dijon, Lyon, Montpellier), les citadelles et places fortes construites sur le modèle conçu par Vauban (Besançon, Saint-Martin de Ré, Lille, Mont-Louis, Villefranche-de-Conflent) ou encore les immeubles de style haussmannien.

 

L’évolution chronologique et esthétique du patrimoine national, chacun peut l’apprécier en levant le regard, au gré d’une promenade, sur les façades des immeubles, des églises, des théâtres, des châteaux. L’un des objectifs de cette édition 2011 des Journées européennes du patrimoine est aussi d’apprendre à regarder autrement notre patrimoine quotidien pour y déceler et y comprendre les influences de l’« ailleurs » ou les signes d’un dialogue permanent au sein et au-delà des frontières françaises.

 

A cette occasion, l’intérêt et la cohérence du patrimoine européen pourraient être réaffirmés et valorisés, à travers notamment le « Label du patrimoine européen » ou l’encouragement d’initiatives transfrontalières pour les régions concernées.

 

Les réseaux patrimoniaux (CAUE, Villes et Pays d’art et d’histoire), ainsi que les associations dont la connaissance de l’histoire locale et de ses bâtisseurs est précieuse, détiennent les clés d’une interprétation pédagogique et stimulante du thème, à travers des parcours didactiques qui chercheront à introduire des notions essentielles d’histoire de l’art auprès du jeune public ou à approfondir la connaissance des amateurs sur le jeu des influences et des circulations qui innerve le patrimoine national.

 

La richesse du thème du voyage du patrimoine permet également d’envisager des thématiques variées, propices à l’ouverture des horizons et à la diversification des animations  sur la notion de patrimoine en mouvement : 

 

§  Les voyageurs du patrimoine

 

Les architectes, artistes, artisans ou conservateurs qui ont marqué de leur empreinte les sites et les monuments sont souvent eux-mêmes de grands voyageurs. Leurs périples ont souvent enrichi l’histoire locale et le patrimoine régional, tout comme l’accueil d’étrangers qui ont apporté ou importé leurs visions et leurs techniques.

 

Léonard de Vinci, dont l’influence lors de son voyage en Touraine a été déterminante pour le développement d’une architecture Renaissance en France.

 

Pierre Loti, écrivain-marin, grand voyageur et amoureux de la Turquie, qui a laissé une demeure insolite et colorée dans laquelle se côtoient ses souvenirs de périples à travers le monde.

 

Prosper Mérimée, infatigable voyageur dont les tours de France ont permis la réalisation d’un premier recensement des richesses patrimoniales sur le territoire national.

 

Léonard Foujita, artiste complet qui a partagé sa vie entre le Japon et la France et qui a introduit à travers une œuvre profondément influencée par les maîtres occidentaux une esthétique japonaise d’une grande originalité.

 

 

 

Certains corps de métier ont également participé à la diffusion d’un savoir-faire architectural qui a marqué le paysage patrimonial français.

Les maçons de la Creuse (parmi lesquels l’ouvrier-député Martin Nadaud) ont, au XIXe siècle, participé à la plupart des grands chantiers de travaux publics dans la capitale parisienne, réaménagée sous l’impulsion du Baron Haussmann.

Le compagnonnage, inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité depuis 2010, a marqué par la pratique rituelle du Tour de France le patrimoine national et contribué à la transmission d’un savoir-faire français d’excellence.

 

 

§  Les chemins du patrimoine et le patrimoine des transports

 

Le « voyage du patrimoine » induit des déclinaisons naturelles comme celle des voies, réseaux et carrefours culturels majeurs qui ont favorisé la mobilité des hommes et des courants artistiques.

 

Le Rhin et le Rhône

Les estuaires (Gironde, Loire)

Les routes maritimes

Le Canal du Midi

Les chemins de pèlerinage (Saint-Jacques de Compostelle)

Les réseaux de routes patrimoniales : Itinéraires culturels du Conseil de l’’Europe, Routes européenne du patrimoine industriel, les Routes du Pays Cathare, la Route des Maisons d’écrivains, etc…

 

Il existe aussi, par extension, un patrimoine du voyage, que peuvent illustrer les moyens de transport d’intérêt historique : les collections de véhicules anciens, les navires et les ports, les gares sont à même d’être mobilisés et valorisés lors de cette édition.

 

L’archéologie constitue, de la même manière, un révélateur fondamental des chemins d’échanges disparus : mithraeum d’Angers, Voie Domitienne, villes de Lyon, Marseille, Arles, Nîmes ou Orange.

 

 

§  Les échanges et les œuvres

 

Les musées tiennent une place essentielle dans le voyage du patrimoine puisqu’ils représentent des étapes ou des destinations finales dans le cadre d’échanges ou de prêt d’œuvres. Du cabinet de curiosités aux musées de France, en passant par les collections royales, l’acquisition et la préservation d’objets ou d’œuvres venues d’ailleurs ont toujours démontré la valeur accordée à des cultures différentes, capables d’enrichir la notion de patrimoine.

 

Musée du Louvre

Musée Guimet

Obélisque de la Concorde

Murakami au Château de Versailles

 

 

§  Le patrimoine virtuel

 

Le voyage du patrimoine se conjugue au futur. La révolution informatique et numérique a permis la multiplication et la massification des échanges sur le patrimoine. Sa connaissance comme sa valorisation s’en sont trouvées profondément transformées.

Les outils multimédias de valorisation ainsi que les base de données patrimoniales développés par le ministère et mis à disposition du public pourraient dans ce cadre faire l’objet d’une attention spécifique.

28/08/2011

le petit orgue Lazari (1761) de Belgodère - de la déontologie de la restauration des orgues historiques

Belgudè et ses orgues ...

(Je réédite cette note à l'usage des amis organistes qui ont eu l'occasion de visiter et de jouer le petit orgue Lazari de Belgodère cet été)

Belgodère village blog.jpg

 

En Corse la Balagne, on ne le dira jamais assez, est, avec le Cap Corse, la région la plus riche en orgues historiques ... rares sont ses villages qui n'ont pas réussi par le passé à se doter d'un orgue.

Belgodère nous réserve quelques surprises ...

 

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Farouchement gardée par le Poilu du Monument aux Morts

( encore une fois  si chargé de noms!),

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l'église paroissiale dédiée à san Tumasgiu n'accueille pas moins de trois orgues ... enfin presque...

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Le plus visible, en tribune au-dessus de la porte d'entrée, est aussi le plus moderne, puisque signé  Joseph Abbey, en 1909. C'est un modeste orgue  "à la française" de l'époque, une rareté  dans le paysage organistique de notre Balagne qui acueille uniquement des orgues de facture italo-corse  ...

En 1980 Jean-Claude Galtier fait un relevage de l'orgue et en profite pour installer un ventilateur électrique.

Un clavier (56 touches de do1 à sol 5), un pédalier de 27 touches (Do 1 à Ré 3), avec une composition classique pour ce genre d'instrument: 

une montre  8', un bourdon   8' basses et dessus, un prestant  4' basses et dessus, une voix céleste  8' à partir du do2, une trompette 8' basses et dessus, et un tremblant par cuillère.

Il accompagne les offices depuis de nombreuses années sous les doigts de sa fidèle organiste, notre amie Georgette Orsolani.

Cet orgue Abbey fut offert par la famille Malaspina qui dota alors l'église de ce nouvel instrument en remplacement du petit orgue installé dans le choeur depuis 1798 ... et sans doute quelque peu fatigué en ce début de XX° siècle ... C'était le progrès à la française !

***

Venons-en au petit orgue campé sur sa minuscule tribune dans le choeur:

 

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Côté épître, la canturia ornée  d'instruments de musique et son orgue Lazari  ... 

 

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et en face, côté évangile ... une autre canturia et son décor peint en trompe l'oeïl: le troisième orgue de Belgodère! Cette canturia servait probablement aux chantres du village.

Le facteur d'orgue lombard Giuseppe Lazari - très actif dans la Corse  des années 1747 à 1761, mais aussi en Sardaigne et à Capraia -  construit en 1761 pour le couvent des Servites de Marie de Belgodère ce petit instrument d'une taille suffisante pour accompagner la liturgie des moines. Il en coûtera 800 lires aux Pères du couvent. ( deux ans auparavant, en 1759,  Giuseppe Lazari avait construit un autre petit orgue - un "organetto" de 900 lires -  pour le couvent voisin de Tuani , à Costa - malheureusement cet instrument  a disparu )

 

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Un peu à l'extérieur de Belgodère, les ruines de l'église conventuelle des Servites et le cimetière du village.

C'était dans cette église que le petit orgue Lazari fut tout d'abord installé, très certainement derrière le maître autel, au fond du choeur, selon l'usage des couvents .

 

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détail du premier maître-autel de l'église du couvent de Belgudè,

 dédié à Santa Maria delle Grazie (1663), oeuvre du menuisier-ébéniste du village Marangiole q Arcangiole : dans le cartouche cental du fronton, le monogramme des Servites. A chacun sa signature.

 

Après la Révolution, l'orgue, selon la tradition orale , aurait d'abord été récupéré par les habitants de Palasca, village proche de Belgodère et du couvent,  qui l'avaient en partie payé , puis repris par les paroissiens de Belgodère et transféré dans l'église San Tumasgiu en 1798 : enfin placé dans le choeur côté épître, dans un espace fort exigu . Combien de temps l'orgue sonnera-t-il avant son total abandon? Nul ne le sait, mais sa dégradation doit être bien avancée lorsque la munificente famille Malaspina offre à la paroisse le nouvel orgue Abbey, plus au goût du jour. 

Commence un long oubli sur la petite tribune obscure, un festin pour les bestioles xylophages et les rats ... En 1963 une première tentative pour le soustraire à la ruine, conduit Renaissance de l'Orgue Corse à démonter l'orgue, qui restera ainsi en pièces détachées de nombreuses années.

Enfin, en 2005 la municipalité s'attelle à la restauration de l'orgue Lazari - sans demander la protection des Monuments Historiques, ce qui laisse le facteur d'orgue seul juge des choix à opérer sur ce précieux patrimoine -  et en confie le chantier au facteur d'orgue Jean-Louis Loriaut, installé à Cervione.

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les tuyaux de façade reconstruits à neuf

On peut seulement regretter que ces tuyaux de façade, tout-à-fait bien construits, ne présentent pas cet aspect artisanal qui les rendrait vivants - comme à l'identique : rabotage, raclage, brunissage à la main ... 

J.L. Loriaut confie le travail de tous les tuyaux, fabrication des tuyaux neufs  et restauration des tuyaux anciens à l'atelier de Jean-Paul Villechange ( voir le site http://Villa Tuyaux d'orgues) .

"En 2005 et 2006, Jean-Louis LORIAUT nous a apporté 183 tuyaux divers, complètement écrasés (voir photos avant restauration dans l'album). Nous avons donc restauré ces  tuyaux et construit les 118 tuyaux manquants en copie. La façade (25 tuyaux) est également neuve. Cela fait au total, 326 tuyaux de métal. Il s'agit d'un petit orgue que le facteur est en train de restaurer."

(On peut visualiser  sur le site de Villa l'album des photos concernant la restauration des tuyaux de Belgodère)

tuyaux  derrière façade orgue lazari belgodere blog.jpg

à l'intérieur les tuyaux anciens restaurés

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à l'arrière du buffet, les anches

JL Loriaut choisit d'ajouter un sommier de 5 anches (8')  - non d'origine - qu'il place à l'arrière du buffet et qui sont commandées par les cinq dernières notes (donnant do, ré, fa, sol, la ) du pédalier. Il choisit donc de reconstruire à neuf le pédalier. On aperçoit sur la photo une partie du faux-sommier original, non réutilisé.

le pédalier neuf blog.jpg

le pédalier reconstruit à neuf

... pour permettre la commande des anches rajoutées:

8 touches de do1 à si1, plus les 5 touches pour les anches .

 

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le pédalier ancien, non réintégré lors de la restauration.

un accessoire, la Cornamusa (anche en métal) était commandé par une touche du pédalier.

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le clavier ancien, non réintégré lors de la restauration.

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une bien curieuse étiquette (XIX°)

trône au centre, au-dessus du vieux clavier, portant dans une graphie anachronique une date et un nom qui nous intriguent: l'orgue étant construit par Giuseppe LAZARI en 1761 et non par Giuseppe CRUDELI ...  né seulement en 1765 ! Crudeli y gagne un L supplémentaire , Lucca y perd un C ... et Giuseppe devient Joseph ...  En revanche il parait possible que  Giuseppe Crudeli ait pu faire le transfert de l'orgue en 1798.

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un détail du clavier ancien:

les touches naturelles sont plaquées  en buis et les feintes en ébène

 

 

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le clavier refait à neuf:

45 touches de do1 à do5 avec première octave courte.

 

tirarage des jeux blog.jpg

 

le tirage des jeux, vers soi

Composition du manuel -

c'est une composition classique pour un petit orgue de couvent:

Principale 8'

Ottava 4'

Decimaquinta 2'

Decimanona 1'1/3

Vigesimaseconda 1'

Vigesimanona 1/2'

Flauto in quinta 2' 2/3

Voce Umana 8'

***

Coupure en basses et dessus : si2-do3

***

Production du vent par 2 soufflets cunéiformes actionnés par des leviers, et ventilateur électrique: vue l'exiguité de la tribune, on imagine la difficulté d'actionner à la main les soufflets:

souffleurs et organistes  trop corpulents, s'abstenir!

***

Tempérament mésotonique.

***

Diapason 435,7 hz à 24 °C

***

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et la signature engagée du facteur d'orgues J.L. Loriaut, dans le secret au fond de la laye.

 

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A propos des restaurations des orgues historiques:

En annexe, à titre d'exemple et parmi d'autres, voici la réflexion sur les problèmes posés lors d'une restauration d'orgue historique de Laurent Plet, facteur d'orgues :

 

 


Est-il souhaitable d'améliorer
un orgue Monument Historique ?

Article paru dans la Revue des facteurs d'orgues francais
numéro 26 -   Printemps 2005

 

Laurent PLET

 

Facteur d'orgues



Une réflexion de principe :

Nous sommes souvent confrontés à un dilemme entre la fidélité à l'œuvre du créateur et la tentation de l'amélioration que l'on pense pouvoir y apporter. L'argument le plus souvent employé est celui selon lequel, si l'auteur avait pu connaître ce que nous connaissons maintenant de son œuvre, ou s'il avait pu disposer des moyens techniques qui sont apparus après la livraison de son orgue, il aurait certainement agi différemment et appliqué cette nouvelle méthode, amélioration etc...

L'inconvénient de ce type de raisonnement est au moins double :

Il permet d'imaginer que l'œuvre historique peut être améliorée, or cette notion de « mieux » est trop personnelle, liée à notre propre évolution, notre formation, notre culture.

Il ouvre la porte à la notion de perfection ou de qualité de l'œuvre historique alors que la première qualité d'un orgue classé est son homogénéité ou son authenticité quel que soit son style. Tel facteur historiquement reconnu (Cavaillé-Coll, Clicquot ou autres) ne risquera pas trop d'être « amélioré » mais tel « petit facteur » (et le xixe en a compté beaucoup) verra son œuvre perfectionnée sans remords à chaque intervention ou « restauration ». Que restera-t-il de l'immense diversité de notre art après deux ou trois siècles et les inévitables travaux subis ?

Nos descendants du xxiie siècle auront-ils plus de témoins authentiques de l'évolution formidable de la facture d'orgues au milieu du xixe que nous n'en avons aujourd'hui de l'orgue du xviie ?.

C'est là une de nos responsabilités de restaurateurs !

Je pense personnellement qu'il devrait être interdit d'apporter quelque amélioration que ce soit dans les cas de restauration suivants :

A. - La conservation de type muséologique.

Instrument très précieux, quel que soit son état de conservation, devant absolument être transmis aux générations futures sans aucune modification. Cet instrument fera l'objet de mesures conservatoires et d'études précises permettant éventuellement d'en effectuer une copie si on veut avoir une idée de ses possibilités musicales.

Le but des travaux est uniquement la conservation sans recherche de fonctionnalité.

B. - La restauration historique

Instrument ayant connu une ou plusieurs époques stylistiques dont la qualité de conservation des éléments permet un retour à un état organologiquement et musicalement cohérent.

Le but de la restauration est de revenir intégralement à un état ayant existé dans le passé, sans aucune modification par rapport à cet état.

Ces définitions font référence à un essai de classification des travaux de restauration d'orgues que vous trouverez dans cette même revue. On sait qu'il y a actuellement environ 10% des orgues français qui jouissent d'une protection comme Monuments Historiques (classement ou inscription à l'Inventaire Supplémentaire). Les instruments français susceptibles de répondre à cette classe A ne doivent guère être plus d'une dizaine, et j'estime que la moitié des instruments protégés, soit environ 5% des orgues français sont encore dans un état de conservation leur permettant une restauration historique (classe B).

Cette interdiction de toute amélioration ne concerne donc que très peu d'instruments mais je la crois importante pour notre devoir de mémoire.

 

À propos du rôle musical de l'orgue historique

Cependant la restauration historique doit permettre de rendre un instrument jouable, utilisable dans son rôle liturgique pour lequel il a été créé, éventuellement dans le rôle concertiste qui lui échoit maintenant systématiquement. Encore est-il souhaitable que l'on impose pas à l'instrument un répertoire pour lequel il n'a pas été conçu.

Il ne peut donc y avoir de tentative de correction ou d'amélioration du restaurateur que dans le cas d'un défaut qui rendrait l'instrument inutilisable en tout ou partie.

La lecture attentive du dernier numéro de notre Revue des facteurs d'orgues français, m'a donné l'occasion de réfléchir à cette notion d'amélioration d'orgues historiques et je me suis remémoré les différentes situations rencontrées au cours de ma courte carrière de facteur d'orgues restaurateur (en principe non encore achevée). Je me permets donc de donner ici quelques exemples de défauts rencontrés durant les différentes restaurations que j'ai pu mener à bien depuis la création de mon entreprise en 1983.

 

Exemples d'améliorations admissibles sur des orgues non classés

1) Instrument construit par Déjardin à Villers Allerand (51) en 1852, restauré en 1988. Toutes les traces et vestiges de cet orgue nous prouvaient que l'unique clavier était très court (comme un clavier d'harmonium) et que les touches appuyaient directement sur les soupapes par l'intermédiaire d'un pilotin fileté situé à l'aplomb des dièses. Il n'y avait donc aucune démultiplication de l'effort et le toucher était si dur qu'il était vraiment injouable. Sans faire disparaître aucune trace ni preuve, nous avons donc fabriqué un clavier plus long, placé en saillie par rapport à la console et avec une démultiplication normale. Cet orgue est toujours à l'heure actuelle, le seul témoin en bon état de fonctionnement de l'art de ce facteur rémois du milieu xixe siècle.

2) Instrument construit par A. Chaxel en 1824 à La-Croix-aux-Mines (88), restauré en 1993.

Nous nous trouvions devant un orgue en ruine, œuvre presque unique d'un petit facteur vosgien. Beaucoup d'éléments paraissaient hors normes ou atypiques. Je ne détaillerai pas l'ensemble de la restauration mais nous avons d'abord été obligés de reconstituer tout l'instrument tel qu'il avait été construit. Puis, nous avons, un à un, corrigé tous les défauts qui, à l'époque de sa construction, avaient entraîné une mise hors service très rapide (13 ans). Nous n'avons modifié que les défauts rendant l'orgue injouable :

Les aplombs n'ont été que partiellement repris dans la mécanique des notes.

Les sections et les rapports de tirage ont été modifiés dans la mécanique des jeux.

Les sommiers nous ont donné plus de mal. Il n'en restait que la laye et la grille avec une double table (flipots dans le sens des barrages, plus une table, collée par-dessus, dans le sens des registres). Dans un premier temps, nous avons reconstitué les chapes et les règles, avec tous les faux-équerrages existants, et restauré les parties anciennes avec trois réencollages à la colle de peau. Malgré tous nos efforts, il n'a pas été possible d'éliminer les sources d'emprunts entre les deux tables à fil croisé ; aussi, nous avons dû reconstituer une nouvelle grille, avec une seule table, en recréant tous les faux-équerrages copiés sur les chapes ! La laye ancienne est toujours à sa place, avec ses soupapes très particulières, plates et très larges.

Les tuyaux de façades, en métal très fin et très mal soudé, aplatis sur un coin de tribune, avaient été déclarés généralement irrécupérables par mes collègues. Les biseaux de plomb étaient extraordinairement fin (environ 2 mm d'épaisseur pour les tuyaux de 8 pieds). Nous les avons tous dessoudés pour permettre la remise en forme des corps et des pieds, et nous avons renforcé les plus fragiles par des cordons de soudure. Ils sont tous en place et, en douze ans, je crois n'avoir qu'une fois été obligé de soulever un tuyaux pour remonter un peu un biseau affaissé.

Cet orgue très intéressant est devenu un élément important du patrimoine organistique vosgien.

3) Instrument construit par Beaucourt et Voegeli en 1854, pour le temple de Saint-Hippolyte-du-Fort (30). Cet orgue avait du être repris environ douze ans après sa livraison, nous avons donc cherché les raisons de ce peu de fiabilité et avons supposé que les désordres mécaniques devaient provenir de la ceinture du buffet. En cette période charnière où les buffets passent de leur rôle de « porteur » à un rôle de décor (avec une charpente indépendante pour soutenir l'instrument). Beaucourt avait fait le choix de conserver le rôle porteur à son buffet, tout en ayant des sections de bois plus conformes à un rôle de décor. La résistance étant alors donnée par la largeur des planches. Ainsi, la ceinture de cet orgue, soutenant les sommiers et toute la mécanique, est composée d'une simple planche sur champ de 500 mm de large par 30 mm d'épaisseur. Nous avons donc simplement suspendu une barre d'équerres sur chaque trajet mécanique pour compenser les inévitables mouvements de la structure et cet orgue fonctionne correctement depuis.

Dans chacun de ces intruments, (comme dans tous les orgues), nous avons été confrontés à beaucoup d'autres variétés de facture, de tracés mécaniques, de tailles, de principes d'harmonie qui constitueraient des anomalies, des malfaçons, voire des défauts à corriger absolument pour rendre à nos clients un instrument de qualité irréprochable.

 

Corrections très ponctuelles admissibles dans les orgues classés

Il est à noter que les trois instruments cités plus haut ne sont pas classés comme Monuments Historiques. Seul l'orgue de La-Croix-Aux-Mines est inscrit à l'Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques, les deux autres mériteraient tout à fait cette protection, mais ne l'ont pas encore. En vingt deux ans de restauration, je n'ai jamais rencontré un orgue classé Monuments Historiques qui présente un défaut de fonctionnement si important qu'il nécessite une amélioration ou transformation. Il est probable que les instruments anciens présentant ce type de défauts (et il y en a...) n'arrivent pas à susciter suffisamment d'intéret pour obtenir leur protection au titre des Monuments Historiques.

Bien sûr, il se peut que nous trouvions un détail qui fonctionne mal et que nous apportions une solution. Je pense par exemple :

  • À des petites soupapes anti-retour pour des tuyaux communs à deux jeux dans l'orgue Cavaillé-Coll de Saint Paul de Nîmes (30) (orgue de 1849, restauré en 1999) qui ne remplissaient plus leur fonction car elles avaient trop de course et restaient ouvertes en permanence. Une simple vis comme limiteur de mouvement suffit à pallier à ce petit défaut.
  • Dans le même orgue, la basse du Cor Anglais (première appellation du Hautbois, lorsque celui-ci est présent dès le C 4 pieds) présentait de telles irrégularités d'origine dans la longueur des tiges qu'il m'était impossible de le faire fonctionner. J'ai donc laissé ouvertes les entailles de timbre pratiquées par mes prédecesseurs pour les sept ou huit premiers tuyaux, les autres ayant pu être ressoudées.
  • Un dernier exemple avec l'aigu de l'octavin du Récit de l'orgue de l'église Saint Jacques de Lunéville (54) (plan sonore ajouté par N. Jeanpierre en 1852). La position des trous harmoniques n'étaient pas encore définies de façon précise et Jeanpierre avait procédé par essais successifs, comme en témoignaient les nombreux trous rebouchés sur chaque tuyau ; puis il avait (lui ou un successeur) fini par couper la dernière octave sur le ton. Nous avons d'abord reconstitué les longueurs d'origine et replacé les trous harmoniques dans la logique de Jeanpierre. Nous nous sommes donc retrouvés dans les mêmes conditions que le facteur d'origine, avec les mêmes défauts sonores. Nous avons alors décidé avec Bertrand Cattiaux (attributaire du marché de restauration) et Christian Lutz (technicien conseil, maître d'œuvre) de reboucher ces trous et de repercer les tuyaux à la bonne place, pratiquée par Cavaillé-Coll à peu près à la même époque.

Il s'agit là d'exemples d'interventions ponctuelles pour remédier à un défaut entraînant le mauvais fonctionnement d'une pièce d'origine, mais il ne faut certainement pas aller plus loin dans les corrections, et toujours laisser dans l'instrument les traces qui permettront à nos successeurs de comprendre quel était le problème rencontré et d'effacer éventuellement notre intervention.

 

Les risques du métier de restaurateur

Il est vrai que le fait de défendre l'œuvre originale avec ses éventuelles imperfections présentent des risques non négligeables pour le facteur d'orgues restaurateur. Je vais prendre deux autres exemples dans la production du plus célèbre des facteurs français Aristide Cavaillé-Coll, connu pour l'excellence du savoir-faire de son entreprise.

1 - L'orgue de l'église Saint Jean-Baptiste de Long (80) construit en 1877 et que nous avons restauré en 1989, présente depuis sa construction une faiblesse dans l'alimentation, ce qui est plutôt rare chez Cavaillé-Coll. En fait, la taille de la soufflerie sur trois niveaux est trop juste par rapport à la consommation effective de l'instrument, au point que très rapidement, il a été nécessaire de placer sur la console un cadran à aiguille qui indique à l'organiste le niveau de remplissage des réservoirs et l'autonomie de vent encore disponible. Lors de la restauration, qui n'était en fait qu'un gros relevage, avec démontage complet de la mécanique et des postages mais maintien en place des sommiers, boîte expressive, circuit d'alimentation et buffet, nous avons conservé le ventilateur Meidinger posé dans les années 1960. En effet, nous avons constaté et prouvé qu'il fournissait déjà plus de vent que ne pouvait le faire deux jeunes souffleurs dans la force de l'âge (nous !) avec les pompes d'origine. Il suffisait donc que l'organiste ne surcharge pas sa registration et surveille son indicateur de réserve d'air et tout se passait bien. Mais c'est là une contrainte à laquelle nous ne sommes plus habitués, et il ne s'est pas passé trois années avant qu'un organiste de passage, fort mécontent de cette limite et persuadé que le restaurateur n'avait pas su régler l'alimentation, ne réussisse à forcer les panneaux du soubassement et pénétrer dans l'instrument. Là, fort de sa science, il modifia le réglage de la boîte à rideau et les soufflets ne furent plus arrêtés dans leur course ascendante que par la tension des aisnes de peau.

L'orgue fonctionna donc en surpression jusqu'à ce qu'un des fonds antisecousses (tous d'origine) ne se déchirent sous cette sollicitation extrême. L'orgue ne pouvant plus fonctionner, nous fumes appelés en dépannage, et constatâmes les dégâts. Un devis de réparation fut envoyé à la DRAC immédiatement, soulevant l'urgence du problème rencontré et ses causes, j'attends toujours la réponse...douze ans après.

Il est bien évident que je ne pouvais laisser injouable un orgue récemment restauré par mon entreprise, j'ai donc assumé la réparation, entièrement à mes frais.

On peut consulter la description technique de cet orgue dans le numéro double 55/56 de la revue « La Flûte Harmonique ».

2 - Nous restaurons en ce moment l'orgue de l'Abbaye de Royaumont (94), construit par Cavaillé-Coll pour Monsieur Marracci en 1864 ; grand-orgue de 44 jeux sur trois claviers pédalier pour grand salon (!), basé sur Montre 16 au manuel et Bourdon 32 à la pédale. Lors du déplacement à Royaumont par Gonzalès, les sommiers de Récit et Positif ont perdu leurs doubles layes, et pour rendre le toucher de ces deux plans sonores plus compatibles avec les exigences du modernisme, des petits soufflets d'assistance au décollement de soupape, ont été placés à l'intérieur des layes conservées, complètement modifiées en conséquence. La restauration historique que nous menons actuellement en collaboration avec Yves Kœnig entraîne bien évidemment la reconstitution des doubles layes disparues ; ce qui signifie que l'organiste devra à nouveau ouvrir deux à quatre soupapes pour chaque note d'un de ces claviers, par l'intermédiaire d'une bonne dizaine de mètres de vergettes et de cinq à six équerres, sans l'aide d'aucune Barker, puisqu'il n'y en a qu'une pour le Grand-Orgue et les accouplements, comme très souvent chez A. Cavaillé-Coll.

Le toucher sera lourd, c'est évident, et, dans l'esprit de certains organistes, ce sera probablement de la faute des restaurateurs (!).

 

Notre devoir de transmission

Je crois vraiment que le fait même de rechercher une amélioration du fonctionnement d'un orgue historique pour des raisons de confort, de toucher léger, de puissance sonore &c... met en danger l'historicité de l'instrument.

Si, à l'issue d'une restauration encadrée par les experts désignés par l'Etat, nous laissons dans nos instruments restaurés des traces de modification, des éléments étrangers à la facture d'origine (bien entendu toutes actions réversibles pour notre bonne conscience) sous prétexte d'amélioration, ne prenons-nous pas le risque de voir un jour dans dix, vingt, trente ans des facteurs d'orgues se sentir encore plus libres vis-à-vis de l'œuvre originelle ?

Si nous nous permettons de modifier, de « bricoler » l'œuvre originelle, quels que soient nos motifs, nous ouvrons la porte à des modifications ultérieures, peut-être plus dommageables, et en portons une part de responsabilité.

Si, au contraire, nous laissons une œuvre la plus homogène, la plus authentique possible, avec ses qualités et ses menus défauts, nous rendons beaucoup plus difficile toute modification ultérieure car toute intervention, si mineure soit-elle deviendra plus apparente.

Alors appliquons-nous à laisser des orgues authentiquement historiques, sans concession à la mode ou aux désirs de l'organiste titulaire du moment, c'est la seule voie qui nous permettra de laisser à nos descendants les quelques cinq pour cent d'orgues témoins importants de l'évolution de notre métier et de notre art.

 

 

Laurent Plet.
Facteur d'orgues restaurateur.

 

 

 

(à suivre!)