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07/04/2013

Colloque du Laboratoire Régional d'Archéologie!: 15-17 novembre 2013

http://elizabethpardon.hautetfort.com/media/00/02/882143410.jpgJe relaie cette information à diffuser: 

L'annonce par Hélène Paolini-Saez du 2° colloque du LRA (Laboratoire Régional d'Archéologie) cet automne, du 15 au 17 novembre 2013.
 
 



> Message du 05/04/13 11:24
> De : "Hélène Paolini-Saez"


> Objet : Colloque LRA 15-17 novembre 2013
>
>

Madame, Monsieur,


 


C’est avec plaisir que le bureau du Laboratoire régional d’archéologie (LRA) vous informe de l’organisation de son second colloque qui se déroulera du 15 au 17 novembre 2013 à l’espace Diamant à Ajaccio, portant sur le territoire centre ouest (Cinarca, Cruzzini, Sevi, Sorru) et qui concerne l’archéologie, l’histoire, l’architecture et la toponymie dans une démarche diachronique et pluridisciplinaire.


 

Nous vous relayerons prochainement les informations relatives au déroulement de cette manifestation.

 

Dans cette attente, nous vous serions reconnaissants de bien vouloir diffuser cette information le plus largement possible à vos contacts afin d’assurer la réussite de ce colloque, dont vous trouverez ci-joint l’affiche de présentation et le formulaire d’inscription.


 Avec nos plus cordiales salutations,

 

Pour le bureau du LRA,


Hélène Paolini-Saez directrice du LRA


 


 


Inscription colloque 2013 LRA.doc

05/03/2012

à Silvareccio, deux autres stèles ésotériques de l'Ampugnani

(Je reprends cette note)

Balade dans l'environnement de Silvareccio:

Samedi 3 mars, rencontre en compagnie amicale du maire de Silvareccio, Monsieur Straforelli, et de Toussaint Quilici de deux nouvelles stèles gravées énigmatiques:

voir les notes précédentes sur les stèles ésotériques de Truchinacce, sur le territoire de Casalta, et les interrogations sur leur origine (protohistoire?) et leur iconographie récente (19°s - liée au carbonarisme?)

Silvareccio et paysage blog.jpg

Silvareccio, dans son environnement escarpé, limitrophe de Truchinacce, sur le territoire de Casalta.

Silvareccio stèle cimentée village blog.jpg

cette stèle a été déplacée de son lieu d'origine (Truchinacce? tout proche) et cimentée au pied d'une maison du village.

Silvareccio village stèle détail haut blog.jpg

le haut de la stèle, on reconnait le pentacle, et une sorte de compas à l'envers ...

A 4 kilomètres de là, sur le territoire de Porri:

Porri stèle recto blog.jpg

à l'entrée d'un chemin - profondément enfoncée dans le sol, cette partie visible d'une autre stèle, cimentée, elle aussi. Le "recto" présente cette sorte d'ostensoir-soleil, surmonté d'une croix et de G et F

Porri stèle verso blog.jpg

tandis que le "verso" s'orne d'une grande croix pointue: un discours qui s'apparente clairement aux trois stèles de Truchinacce.

Porri bas du recto de la stèle blog.jpg

le bas du "verso" de la stèle de Porri:

l'énigme continue ...

 

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Au sommet de la crête qui sépare les pieve de Casinca et d'Ampugnani, dominant Silvareccio et Porri, le col de sant' Agostino,

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et sa chapelle Sant Agostino

 

Citons Geneviève Moracchini -Mazel, dans:  Les églises romanes de Corse, p. 291:

La vue y est magnifique sur la plaine orientale et le Fiumalto. On y célèbre encore la messe une fois l'an le jour de la fête, le 28 août. Elle (...) figure en plan sur l'ancien cadastre de Silvareccio en 1876 à la section C feuille 4 de Fungaja

C'est un édifice de plan rectangulaire orienté d'Est en Ouest, ne comportant plus son abside."

Cette chapelle a fait l'objet de nombreuses réfections,

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 " reconstruite" en 1864.

" (...) mais il n'est pas douteux  que sa fondation soit bien ancienne. L'examen de quelques pierres  (en particulier celles aui sont réemployées dans la partie inférieure de l'angle N6O.) montre que la taille en est ancienne; la trace laissée par les outils est identique à celle que l'on remarque dans l'architecture  dite de Monte-Cristo au IX°-X°s.

(...) La porte occidentale remploie des architraves monolithes en arc de tracé plein cintre qui proviennent d'une porte primitive.

 

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Une maisonnette est accolée au flanc Sud de la chapelle. (...)

Déjà en 1646, au temps de Mgr Marliani, les fonctions paroissiales ne s'exerçaient plus à Sant'Agostino, jugée trop éloignée de Silvareccio."

(Idem, G.Moracchini-Mazel)

 

Toujours est-il que le site est magnifique, et les morts enterrés dans le petit cimetière tout proche jouissent d'une paix que j'imagine à peine animée du beuglement des taureaux au printemps. Et d'une vue imprenable sur cette vaste région ouverte sur la mer. 

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Le chaos rocheux des falaises, sous la crête, mériterait sans doute une étude.

 

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 Le lieu-dit: "i Castelli",  en est prometteur:

(à suivre)

 

 

 
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25/02/2012

Ampugnani: les stèles ésotériques de Truchinacce (suite à suivre)

 

Entre Casalta et Silvareccio, ce site onirique de Truchinacce dans l'Ampugnani continue de nous interroger.

DSC00971.jpg

et chacun y peut apporter ses analyses et chacun peut y nourrir ses rêves les plus poétiques: le langage symbolique est constitutif de l'homme.

 Pour le moment, en attendant la connaissance du site avant son pillage avéré (voir les notes précédentes du 2/1 et du 10/1/2012), et l'analyse du lieu par les amis préhistoriens qui pourrait confirmer ou infirmer que nous sommes bien en présence d'une expression mégalithique, nous tentons d'explorer son  univers symbolique le plus récent.

Premier constat, les trois stèles gravées qui nous restent sont alignées face à l'est. Ce "recto" comporte de très nombreux symboles qu'il conviendrait d'analyser dans un contexte historique  précis. Le verso comporte toujours - entre autres signes - une grande croix. Beaucoup d'éléments nous incitent de plus en plus à penser que nous sommes devant un discours gravé lié au monde de la carboneria (carbonarisme), bien ancrée dans l'Ampugnani du XIX° siècle .

On lira avec grand profit l'écrit consacré à ce sujet par Francis POMPONI : "La voie corse du passage du carbonarisme napolitain à la Charbonnerie française sous la Restauration (1818-1823)", dans  "Secret et République (1775-1840)" par Bernard GAINOT, publié aux Presses Univ. Blaise Pascal en 2004.

Je vous invite aussi à découvrir dans l'Encyclopédie Imago Mundi le long article qui traite du carbonarisme :

http://www.cosmovisions.com/$Carbonari.htm

En voici un extrait, témoignant d'un rituel chargé de symboles:

 

"On a souvent confondu le Carbonarisme avec la Franc-maçonnerie, dont il n'est, en réalité, qu'un dérivé. Comme la Franc-maçonnerie, ou l'ordre des Illuminati (Illuminisme), dont on a parfois dit que les Carbonari avaient pu s'inspirer, le Carbonarisme a son cérémonial particulier, son langage symbolique, dont les termes sont empruntés au commerce du charbon. C'est ainsi que le lieu d'assemblée s'appelle hutte, en italien baracca; le pays où se tient l'assemblée, la forêt; la réunion elle-même, - ce qu'en langage maçonnique on nomme la tenue, - la vente, en italien vendita. Une réunion de huttes est une république. Purger la forêt des loups signifie délivrer la patrie des tyrans et des oppresseurs. De là, le cri de ralliement du Carbonarisme : Vengeance au mouton opprimé par le loup. Les statuts et règlements sont particulièrement sévères contre les parjures et les traîtres. L'indiscrétion, même involontaire, a son châtiment.

Chaque associé jurait de garder le secret sur l'existence du Carbonarisme, sur ses signes, son règlement et ses mots de passe; d'obéir aveuglément et sans réserve aux ordres intimés par la vente suprême, les choses commandées cessant d'être injustes dès qu'elles deviennent un moyen d'arriver au bonheur commun et, d'obtenir le but général; de dévouer sa fortune et même sa vie à la cause de la liberté et de la patrie.

En outre, pour être prêt à résister à l'oppression, à secourir ses « frères », appelés ici ses bons cousins, tout Carbonaro devait se munir, à ses frais, d'un fusil de munition et de cinquante cartouches à balle. Le parjure était puni de mort. Les grades par lesquels devait passer successivement le « bon cousin » étaient ceux d'apprenti, de maître et de grand-élu.

Un rituel d'initiation.
Voici, d'après Saint-Edme (Constitution et organisation des Carbonari), les détails du cérémonial usité pour une initiation au troisième grade : la vente se tient loin des profanes, dans une grotte obscure, cachée et connue seulement des Carbonari déjà reçus grands élus. La salle est triangulaire, tronquée aux trois pointes. Le grand maître, grand élu, qui préside la réunion, est placé sur un trône, à l'orient, dans l'angle tronqué supérieur. En face de lui, à l'occident, au milieu de la base même du triangle, se trouve la porte de la grotte. Elle est défendue par deux gardiens nommés flammes ou porte-épée, tenant à la main des sabres faits comme des flammes de feu. Les assistants sont rangés en deux files, à droite et à gauche du président. Ils ont la face tournée vers lui pour se conformer à tous ses mouvements, quand il fera des avantages ou autres cérémonies et solennités. Deux des assistants, ceux qui sont placés à l'extrémité des files, se nomment premier et second éclaireur; un troisième qui sert d'orateur est appelé étoile. Trois lumières en forme de soleil, de lune et d'étoile sont suspendues aux trois angles pour la clarté de la vendita. Le trône et les bancs sont couverts de drap rouge parsemé de flammes nombreuses. Le grand élu est en costume de l'ordre, ainsi que les autres assistants. Il a le front enveloppé d'un long mouchoir rouge enroulé en forme de turban, Il porte des sandales bleues, une tunique de même couleur et, au-dessus de la tunique, une longue robe noire serrée par une ceinture de laine rouge à laquelle sont suspendus une hachette et un poignard. Outre le costume ci-dessus, commun à tous les assistants, le grand élu président porte en sautoir un large ruban moiré tricolore, bleu céleste, jaune et vert, où sont attachés trois bijoux, marques de sa dignité : un triangle azur, image du ciel et de la divinité, un soleil d'or et un globe terrestre d'un vert pâle.

« LE GRAND ÉLU. - Bon cousin, premier éclaireur, quelle heure est-il?

LE PREMIER ECLAIREUR . - Respectable grand élu, le tocsin sonne de toutes parts et retentit jusque dans les profondeurs de notre grotte. Je pense que c'est le signal du réveil général des hommes libres.

LE GRAND ÉLU. - Bon cousin, second éclaireur, à quelle heure doivent s'ouvrir nos travaux secrets?

LE SECOND ÉCLAIREUR. - A minuit, respectable grand élu, lorsque les masses populaires, conduites par nos affidés, les bons cousins directeurs, sont rassemblées, organisées, marchent contre la tyrannie et sont prêtes à frapper les grands coups.

LE GRAND ÉLU. - Bons cousins, flammes et gardiens de la sûreté de notre asile, êtes-vous sûrs qu'il ne s'est glissé parmi nous aucun profane et que tous les carbonari réunis dans cette vendita sont bien grands maîtres, grands élus?

UNE DES FLAMMES. - Oui, vénérable grand élu, les Introducteurs ont fait leur devoir. Il n'existe ici ni profane, ni Carbonaro subalterne.

LE GRAND ÉLU. - Tous les directeurs des divers grades carboniques, destinés au mouvement général qui va s'opérer, sont-ils à leur poste, bien armés, mes bons cousins, premier et second éclaireurs?

LES DEUX ÉCLAIREURS en même temps. - Oui, vénérable grand élu; tous sont partis après avoir réitéré le serment sacré de périr ou de vaincre.

LE GRAND ÉLU. - Puisque tout est si bien disposé, mes bons cousins, je vous invite à m'aider dans l'ouverture de nos travaux nocturnes en célébrant le septuple avantage que je commence à l'instant. A moi, mes bons cousins.

1° Au Créateur de l'Univers; 2° au Christ, son envoyé sur la terre, pour y rétablir la philosophie, la liberté, l'égalité; 3° à ses apôtres et prédicateurs; 4° à saint Tibaldo, fondateur des Carbonari; 5° à François Ier, comme notre protecteur et l'exterminateur de nos anciens oppresseurs; 6° à la chute éternelle de toutes les tyrannies; 7° à l'établissement d'une liberté sage et sans fin, sur la ruine éternelle des ennemis des peuples. »

Les sept avantages étant célébrés par les acclamations d'usage, lecture est faite aux assistants du procès-verbal de la dernière séance; puis, le procès-verbal adopté, le grand élu donne la parole à l'orateur appelé Etoile. Celui-ci explique et développe le but de la réunion. Après avoir fait une description de l'âge d'or, où les humains, obéissant aux lois de la nature, étaient bons et vertueux, l'orateur décrivait la situation malheureuse de la belle Ausonie et présentait le tableau navrant de son affreuse destinée.
« Elle obéit maintenant, disait-il, à trente soi-disant souverains, qui, rétrécis dans ce qu'ils appellent leurs domaines, n'en tyrannisent qu'avec plus d'impudence les peuples infortunés soumis à leur autorité dure, mais chancelante. C'est pour en débarrasser le sol que nos aïeux, les premiers bons cousins, ont établi la respectable Carboneria. Exilées du monde, n'osant se montrer au grand jour, la liberté, l'égalité, se réfugièrent dans les rand se cachèrent dans les ventes, dans les grottes les plus reculées, et là, reprenant la robe virile dont nous sommes revêtus, aiguisèrent leurs hachettes et leurs poignards et jurèrent de renverser en un seul jour tous les oppresseurs de ces belles contrées. Nous avons tous fait, sur le signe éclatant de la rédemption du Sauveur du monde, le serment sacré de rétablir sa sainte philosophie. Le moment est arrivé, mes bons cousins ; le tocsin de l'insurrection générale a sonné, les peuples armés sont en marche. Au lever de l'astre du jour, les tyrans auront vécu, la liberté sera triomphante. Employons le peu d'heures qui vont s'écouler avant d'arriver aux moments d'une courte et terrible vengeance, à relire et proclamer les nouvelles lois qui vont régir la belle Ausonie, la réunir en un seul peuple dans ses limites naturelles et la rendre libre, heureuse, florissante à l'exemple du reste de l'univers. »
Ce discours achevé, le grand élu président prononçait à haute voix la formule du serment :
« Moi, citoyen libre de l'Ausonie, réuni avec mes frères sous le même gouvernement et les mêmes lois populaires que je me dévoue à établir, dût-il m'en coûter tout mon sang, je jure, en présence du grand maître de l'univers et du grand élu, bon cousin, d'employer tous les moments de mon existence à faire triompher les principes de liberté, d'égalité, de haine à la tyrannie, qui sont l'âme de toutes les actions publiques et secrètes de la Carboneria. Je promets de propager l'amour de l'égalité dans toutes les âmes sur lesquelles il me sera possible d'exercer quelque ascendant. Je promets, s'il n'est possible de rétablir le régime de la liberté sans combattre, de lutter jusqu'à la mort. Je consens, si j'ai le malheur de devenir parjure à mes serments, à être immolé par mes bons cousins les grands élus, de la manière la plus douloureuse. Je me dévoue à être mis en croix au sein d'une vendita, nu, couronné d'épines et de la manière que le fut le Christ, notre rédempteur et notre modèle. Je consens de plus à ce que mon ventre soit ouvert de mon vivant, que mon coeur et mes entrailles soient arrachés et brûlés, que mes membres soient coupés et dispersés et mon corps privé de sépulture. Telles sont nos obligations à tous, mes bons cousins, jurez-vous de vous y conformer?

TOUS LES ASSISTANTS à la fois. - Nous le jurons.

LE GRAND ÉLU. - Dieu vous entend, mes bons cousins! son tonnerre gronde; vos serments sont agréés. Le peuple est prêt à combattre, il triomphera! Malheur à vous si vous le trahissiez! »

L'orateur donnait ensuite lecture du pacte constitutionnel de l'Ausonie, qui devait être soumis à la sanction de la nation libre et unie."
 
Comme on peut le voir, les bons cousins ne plaisantent pas!
 Voici une première grille de lecture de ces trois stèles proposée par un jeune chercheur féru d'ésotérisme en Corse:

 

   

élément 1 blog.jpg

(la face nord de la stèle centrale)

Je cite:

" Cœur (placé au sommet):  N'est pas sans rappeler l'anthropomorphisme dont étaient dotées certaines « stantare ». Le coeur tient lieu de visage et s'apparente par la forme à la feuille de peuplier (arbre initiatique tenu pour sacré dans l'antiquité, lié à la résurrection).  

Croix celtique écourtée (gauche) :

Symbole solaire apparenté à la roue solaire. Cycle (saison, course du temps …).

Symbole apparaissant dès le néolithique ou, si plus tardif, chrétien (signaculum domini = plaies du Christ).

Soleil (droite): Symbole solaire classique.

Croissant de lune vers le bas :

Symbole de minuit (passage du soleil à l’antipode).

Obscurité=secret=occulte

Croix : Se rapporter à la symbolique chrétienne et solaire.

Deux cercles concentriques radiants :

Couronne – Œil de la Providence – Soleil

Symbole surmonté par une croix.

Course du soleil (croix + astre) ou suprématie du «Christ-Roi» (couronne + croix + radiance)

Niveau (Figure centrale): Figure maçonnique (essentiellement celle du grade de surveillant) = équilibre ou harmonie, l'œuvre est réalisé et équilibré.

Figures pointues avec point au centre (sur les côtés du niveau): symbole inconnu. Possibilité d'être la lettre « D » dans l'alphabet maçonnique.

Eventuellement une allégorie des deux colonnes du temple (J et B)

Soleil et lune (gauche et droite) : Symboles maçonniques classiques.

Les gravures circulaires et rectangulaires, voire carrées, semblent être en rapport avec les degrés dans la hiérarchie des maçons ou compagnons ayant œuvré sur le site.

verso de la stèle 3.jpg

(la face ouest de cette stèle centrale et son percement au sommet, qui disait-on, laissait passer un rayon de soleil qui illuminait l'église pievane de Casalta)

 

stèle 2.jpg

(la face ouest de la stèle de droite)

 

INRI : Igne Natura Renovatur Integra (la nature est intégralement renouvelée par le feu).

Parole du rituel de Chevalier Rose+Croix (REAA) héritée de l’alchimie.

Croix à pointe aiguisée : Symbole héraldique (tranchant, aiguisé). Certainement un rapport avec l’arme (poignard rituel du Carbonaro ou Pinatu du Topu Pinutu).

Deux soleils : Symbole maçonnique typique. Saint Jean de l’Apocalypse (Solstice d’hiver)  et Saint Jean le Baptiste (Solstice d’été), similitudes avec le dieu Janus aux deux visages.

 

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(la face est de cette même stèle: le chêne qui a poussé entre temps ne permet pas de faire une photo d'ensemble)

 

 

stèle 1 bis.jpg

(la face nord de la stèle de gauche)

 

Œil de la providence : Elément courant dans la symbolique maçonnique.

2 : Symbole évident de la dualité. En rapport certainement avec les deux colonnes du temples, les deux surveillants et le damier initiatique (noir et blanc).

S : Certainement symbole du serpent (symbole compagnonnique du tailleur de pierre).

Pentagramme : Elément maçonnique du grade de compagnon.  5 éléments (eau, terre, air, feu, éther) ou 5 sens.

Humain accompli et achevé.

Deux lunes superposées au dessus de l’horizon : Apogée et périgée.

4 : Chiffre de la matière. Croix dont l’axe horizontal et l’axe vertical sont reliés. Chiffre du carré.

3 : Trinité. Peut être même Troïka (organisation de cellules de 3 personnes). Chiffre du triangle.

(Peut-être le Chapitre 4 verset 3 des Corinthiens: « Si notre Evangile est encore voilé, il est voilé pour ceux qui périssent »)

Compas : Sert à tracer le cercle, qui garde en lui les secrets de l’initié. Symbole de l’esprit et composante des 3 grandes lumières.

Les trois dernières figures sont un rappel évident de la géométrie et sa symbolique ésotérique.

Cette stèle est certainement celle d’un compagnon devenu maitre. Elle a du être gravée progressivement du bas vers le haut

stèle 1 verso blog.jpg

(la face ouest de cette stèle)

 
... et enfin, sa première conclusion:

Les monolithes sont certainement très anciens.

Il est essentiel de pratiquer un relevé topographique de la disposition des monuments ainsi qu’une analyse géologique des pierres.

Les éléments disparus ont de toute évidence, de façon coutumière en Corse, été certainement récupérés et insérés dans le paysage architectural (probablement dans les environs proches du site), que ce soit dans une bergerie ou dans les parois d’une maison.

Nous pouvons, aux vues des symboles et « styles » de gravures, qu’il s’agit d’une œuvre collective. Les gravures ont du se succéder au fur et à mesure du temps.

L’iconographie religieuse et maçonnique est quasiment classique mais la présence conjointe de celle-ci avec des éléments chrétiens nous laisse à penser qu’une société secrète du XVIIIème  ou XIXème siècle a utilisé ces éléments en vue de rituels.

La maçonnerie dite « du bois », les Pinnuti ou Carbonari sont effectivement à l'origine des gravures. Des références au Compagnonnage sont évidentes. "

 

(à suivre ...)

 
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03/12/2011

Découvrir la Pieve du Rustinu avec Toussaint Quilici

Lorsque les enfants du pays s'attellent à leur patrimoine

et partagent plus de quarante ans de passion éclairée et de découvertes:

livre sur le la pieve du rustinu,toussaint quilici,législation sur l'archéologie,législation sur les découvertes fortuites en archéologie

 

Le samedi 17 décembre 2011, à partir de 16 h 30 à la salle des Fêtes de Valle di Rustinu (village)

présentation de l’ouvrage (746pages)


« A Pieve di Rustinu des origines aux temps modernes, patrimoine et culture »

de Toussaint Quilici et Jean-Pierre Mannoni (avec la collaboration d’Alain Polifroni et Jean - Pascal Braccini)

découverte.jpg

Toussaint Quilici en compagnie de son ami Jean-Pascal Braccini lors d'une toute récente découverte fortuite d'un nouveau site préhistorique de gravures rupestres ... à retrouver lors de la parution du livre : je peux témoigner que l'émotion était au rendez-vous !

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Pour tous ceux qui, amoureux de leur territoire comme Toussaint Quilici et ses amis, arpentent leur sol et font des découvertes fortuites, et nul n'étant censé ignorer la loi, voici une notice précieuse à lire et à connaître sur toutes les questions que l'on peut se poser sur l'archéologie:

archeologie-questions2007.pdf

 

livre sur le la pieve du rustinu,toussaint quilici,législation sur l'archéologie,législation sur les découvertes fortuites en archéologie

gravure anthropomorphe, cupules ...

à découvrir dans l'ouvrage de Toussaint Quilici et de ses amis.

Avis: ce livre sera aussi distribué à la Fnac.

 

(à suivre!)

01/11/2011

En Corse: La Mort transfigurée 1ère partie

Toussaint : comme chaque année,  
je réédite ce texte de "la Mort transfigurée"
 
C'est la période où les communautés des vivants et des morts se rendent visite, les confréries chantent soir après soir l'Office des Morts, bercent leurs morts au cimetière par ces cantilènes aux paroles immuables et solidaires: Requiem aeternam, Libera me...
La revue corse FORA n° 3 avait traité de ce sujet, en comparant les pratiques corses avec celles du Mexique: à relire!

 

LE MIROIR DE LA MORT

 

(Les plus belles photos qui illustrent cet article sont de mon ami Tomas HEUER . Nous avions, Tomas et moi, réalisé cet article pour le catalogue d'une exposition collective sur le thème de la Mort Transfigurée, le 2 novembre 2006, à la Galerie l'Arche de Morphée, 6 rue Etienne Dolet- 75020 PARIS.  S'il leur reste des catalogues, vous pouvez sans doute en acquérir en les contactant: contact@archedemorphee.com)

 

Le sacré est toujours plus ou moins «  ce dont on n’approche pas sans mourir » (Roger Caillois, l’homme et le sacré, 1950)

8 mai 2006.                                                                                                                     

4d89bffbc43606e2e056883e09981c4c.jpg Photo de Tomas Heuer
Lorsque Tomas m’a proposé d’accompagner ses photos sur «   la Mort transfigurée  en Corse », j’ai accepté sans hésiter, sans chercher à savoir où me conduirait le sujet: quelque part dans mon paysage intérieur, on avait sonné la cloche à l’improviste, mis en branle des harmoniques fondamentaux et vagabonds… Je ne peux approcher ce thème que par rêveries successives, au gré de mes rencontres. Les gens que je côtoie ici évoquent aussi bien leurs souvenirs que leurs convictions profondes dans un contact spontané, un échange de chaleur humaine avant le grand froid, main dans la main.
 

 Ceci sera donc seulement un dialogue intime avec cette île que j’aime, discontinu, peu cohérent, comme peut l’être le parfum de la mort : fluide, il navigue en ondes paresseuses, indisciplinées, tenaces et, passés les miasmes de la putréfaction, s’achève en une fragrance douceâtre de  violette, peut-être cette fameuse odeur de sainteté.

 


Sous le vol royal des grands milans fossoyeurs, la rencontre fortuite des carcasses de vaches, de chèvres, de brebis crevées dans les champs fleuris de mai. Au milieu des trèfles, des hauts chardons violets où s’embusquent de minuscules araignées vert émeraude, des asphodèles dressées comme des candélabres ou entre les murs d’un pailler abandonné, ces charognes m’enseignent, mieux que les rues de la ville,  notre commune destinée : « HODIE MIHI, CRAS TIBI » (aujourd’hui, c’est à moi, demain c’est à toi !). Ainsi l’affirme pensivement, peinte  sur la bannière de procession des Morts dans une confrérie de Balagne, a Falcina ( la Faucheuse ) accoudée devant son sablier flamboyant où s’égrène le temps.

En Corse comme ailleurs, avant la nôtre, c’est la mort des autres qui nous est donnée à voir : miroir, fidèle miroir de la mort, dis nous la brièveté de ce que nous étions, l’inéluctable de ce que nous serons : puisque, dans cette énigme, il nous faut solitairement traverser la frontière vers l’inconnu, la communauté des vivants, dans cet instant décisif, saura-t-elle encore montrer quelque fraternité? Et la dramaturgie de ce passage aura-t-elle encore  la force de transcender le grésillement aléatoire de nos vies ?

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photo Tomas Heuer: Bannière de procession


Un rien aguicheuse, souriante et mondaine, "a Falcina" se repose un instant de sa moisson meurtrière. Assise sur une urne brûlante, piétinant les insignes des grands de ce monde, pourpre, tiare, mitre etc, elle brandit d'une main sa faux-étendard indiquant qu'elle n'épargne personne (" NEMINI PARCO") et de l'autre, comme un verre de bon vin, le sablier ailé du temps qui fuit.

Ces bannières de confrérie, portées en procession par les confrères de chaque communauté, délivrent le plus souvent un double message: d'un côté le Christ en Croix au pied duquel veillent et prient deux confrères, de l'autre le personnage redoutable de la Mort ... d'un côté la Peur, de l'autre l'Espoir de la Rédemption par la vie chrétienne...

La mort dans un espace ouvert, sauvage mais humanisé par la vie des gens, peuplé de hameaux, de chemins dallés, de murs, d’arbres cultivés, de hauts campaniles lancés vers le ciel et greffés sur le sacré, la mort signée par le glas voyage sur son aile de bronze, enfle  ses ondes de compassion sur montagnes et vallons, et d’un village à l’autre nous interpelle: qui?   connaissance? ami ? famille ? L’on prend les nouvelles, les confrères se raclent la voix, se préparent, la communauté toute entière s’organise et déjà accompagne celui qui la quitte aujourd’hui, mais aussi la parenté qui endure la souffrance de la séparation: ainsi va le destin, et pour ce peuple de Corse si longuement façonné par l’oralité, cela était écrit là-haut, ce qui devait arriver est arrivé.

L’indicible souffrance de la séparation. Qui peut prétendre communiquer l’indicible ? La souffrance d’une mère brutalement, définitivement séparée de son enfant ? Crier l’indicible injustice de cet  inversement du sens, la géhenne solitaire et sans fond où l’on est alors jeté ?  Reprocher au mort son abandon, injurier le Destin, transformer les spectateurs impuissants du drame en chœur antique ?

 
 

Ici, comme dans toute la Méditerranée , la souffrance se crie, se chante : lamenti, voceri, abbadatte  en témoignent, expression spontanée, improvisée le plus souvent par les femmes sous l’inspiration de la douleur, à propos d’un mort ou en sa présence. Soit par une femme de la famille : l’épouse, la mère, la fille, soit par une femme reconnue,  estimée et rétribuée pour ses dons de voceratrice. Ces chants nous parviennent « du fond des âges », ce qui est une façon de parler car on connaît parfois précisément les circonstances de l’improvisation, mais qui témoigne surtout de la valeur mythique acquise au fil du temps par ces poèmes chantés. Ardemment écoutés, pieusement recueillis par l’assemblée, souvent recomposés par la voceratrice et réacquis par les filles, certains nous sont restitués lors des premiers enregistrements à la fin des années quarante…

Imaginons la scène.

La jeune fille se meurt. Le tintement des cloches  accompagne son agonie,  l’aide à passer au travers des embuscades tendues par les esprits mauvais. Elle meurt. On voile les miroirs de crainte que son double,  u spirdu, ne se retrouve piégé dans les reflets de la glace et  reste prisonnier de la maison. Pour la même raison, l’on a ouvert quelques instants en grand   portes et fenêtres pour l’inciter à sortir. Puis on a refermé les volets, éteint le foyer. On ne cuisine plus. La vie s’absente. La maison devient sombre et froide comme une tombe.

Elle gît, étendue dans sa raideur cadavérique sur une table, au centre de la salle principale. De quoi est-elle morte : malaria ? tuberculose ? nous ne le savons pas, mais elle a souffert … Les femmes lui ont fait sa toilette funèbre, elles lui ont noué un tissu blanc autour de la mâchoire, serré les chevilles, l’ont parée de son meilleur vêtement : c’est qu’aujourd’hui elle épouse le Christ , sa dot sera de cierges  et de chandelles («  Nous allons descendre à la messe/Maintenant que l’autel est décoré/De cierges et de chandelles/Et de noir enveloppé/Car ce matin son père/A fait l’estimation de sa dot « , dit un voceru).

L’assemblée des femmes se presse pour la veiller et réciter le Rosaire, cette longue prière psalmodiée qui soutient  les âmes dans leur transhumance et anesthésie la souffrance de ceux qui restent .On ne laisse jamais seul un mort avant sa sépulture, on l’entoure de cercles concentriques d’émotion:  comme une matrice, les femmes à l’intérieur,  les hommes à l’extérieur,  remparts contre l’espace sauvage.

 Les femmes demeurent les passeuses de la vie et de la mort. Nourrices, mères ou grand- mères, elles ont chanté dans l’intimité la nanna, la berceuse.

In Palleca di Pumonte         A Palneca de Pumonti

Un ziteddu s’addivaia          S’élevait un petit garçon

È la so cara mammoni         Et sa chère grand-mère    

Sempri trinnichendu staia.   Toujours restait à le bercer

Fenduli la nannareda           Tandis qu’elle l’endormait

È stu fattu li pricaia.(…)      Elle lui prédisait ainsi son destin (…)

Aujourd’hui, drapées dans leur vêtement sombre,  transformées en prêtresses de la mort, elles improvisent le voceru, la mélopée poétique de la douleur.

 D’abord la mise au monde : l’enfant à sa naissance est cueilli comme un fruit mûr  par la cuglidora, la « cueilleuse », et l’on enterre son placenta, son double, au pied d’un arbre, fruitier de préférence. Première mort qui ensemence la vie. Au terme de l’existence, encore les femmes pour libérer la douleur, cette fois avec l’aide de la communauté. La douleur est une cage dont il faut écarter les barreaux avec des paroles justes, chantées et piétinées dans une sorte de balancement communicatif : ce lamentu funèbre, voceru, ou ballata, imprime son bercement à l’ensemble de la communauté. Comme un seul corps l’assemblée résonne, vibre à l’unisson, porte son mort dans la nacelle du chant, l’aide à passer vers les rivages inconnus d’où l’on ne revient pas.

La mère, toute à sa peine, exhale ce chant :

Or eccu la moi figliola   Zitella di sedeci anni    Eccula sopra la tola    Dopu cusi longhi affanni  Or eccula qui vestuta        Cu li so piu belli panni  

     Cu li so panni più belli  Si ne vole parte avà  Perchè lu Signore qui, Nun la vole più lascià. Chi nasci pè u Paradisu     À stu mondu ùn pò invechjà. 

O figliola lu to visu  Cusi biancu è rusulatu  Fattu pè lu Paradisu  Morte cumu l’hà cambiatu !  Quand’eo lu vecu cusì   Mi pare un sole oscuratu 

Ere tù frà le migliori  È le più belle zitelle  Cum’è rosa frà le fiori  Cum’è luna trà le stelle  Tantu eri più bella tù  Ancu in mezu à le più bella

I giovani di lu paese Quandu t’eranu in presenza  Parianu fiaccule accese  Ma pieni di riverenza.  Tu cun tutti eri curtese Ma cun nimu in cunfidenza (…)

Chi mi cunsulera mai  O speranza di a to mamma !  Ava ch’è tu ti ne vai  Duve u Signore t i chjama ?  Oh ! Perchè u Signore anchellu  Ebbe di tè tanta brama ?(…)

Ma quantu pienu d’affanni  Sera lu mundu per mene   Un ghjornu solu mill’anni   Mi serà pensendu à tene   Dumandendu sempre à tutti  La moi figliola duvè hè ?(…)

La voici donc ma fille Jeune fille de seize ans, La voilà étendue sur la table, Après de si longues souffrances ,La voilà revêtue De ses plus beaux habits ,

Avec ses plus beaux habits, Elle veut partir maintenant , Car ici le Seigneur ne veut plus la laisser.  Celui qui naquit pour le Paradis , Ne peut vieillir en ce monde

O ma fille ton visage , Si blanc et si rose , Fait pour le Paradis , Comme la mort l’a changé ! Quand je te vois ainsi , Je crois voir un soleil obscurci.

Tu étais parmi les meilleures , Et les plus belles jeunes filles, Comme la rose au milieu des fleurs, Comme la lune au milieu des étoiles, Tu étais la plus belle, Même parmi les plus belles !

Les jeunes gens du pays, Lorsqu’ils étaient en ta présence, Paraissaient des brandons ardents, Mais pleins de respect., Avec tous tu restais polie, Mais familière avec aucun(…)

 Qui me consolera jamais O l’espérance de ta mère ! Tu t’en vas maintenant Là où t’appelle le Seigneur ? Hélas ! Pourquoi le Seigneur lui-même A-t-il montré un désir si ardent ?

  Mais combien ce monde, Va me sembler plein de douleurs ! Un seul jour me semblera mille ans, Sans cesse pensant à toi , Demandant sans répit à tous: Ma fille ! où est ma fille ?


Voceru  improvisé par sa mère pour la mort de sa fille, Rumana, et publié en 1843 par le poète corse Salvatore Viale.

 L’air est pietoso,  pieux et doux. Le ton de la poésie en est tissé de la même étoffe que la faldetta, cette jupe de deuil bleu foncé que les femmes rabattaient sur leur tête et leurs épaules, s’encadrant le visage de gravité : de ce tissu sombre on revêt la Vierge dans les sepolcri de la semaine sainte tandis que l’on chante le Stabat Mater Dolorosa… Ces voceri s’accompagnent d’une attitude tragique, on se frappe la poitrine, on se tord de douleur ainsi qu’on peut le voir souvent représenté dans la dernière station  des Chemins de Croix populaires qui peuplent nos églises : les saintes femmes entourent la Vierge et le Christ dans sa mise au tombeau et prennent dans leur gestuelle toute la souffrance du monde, les bras écartés pour laisser déborder le cœur dans la poitrine, levés au ciel pour nous prendre à témoin…
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photo Tomas Heuer
 le Sepolcru de Castiglione
Marie et les Saintes femmes en pleureuses du Christ. La robe rouge de la Vierge dit son humanité, le réceptacle de son ventre maternel, et fait écho à l'humanité des blessures sanglantes du Christ.
La gestuelle ample, déclamée de la douleur de la Mère, saisit celui qui contemple la scène,
non pour en tirer une quelconque jouissance esthétique,
mais pour communiquer dans une émotion universelle

 

Le sacré, dit-on, se définit par rapport au profane. Pourtant ici tant d’attitudes évoquent  la  perméabilité des mondes religieux et humains : ainsi les cérémonies de la Semaine Sainte , prises en charge en grande partie par les laïcs, les confréries,sans la présence du clergé, fêtent de façon collective le passage de la vie à la mort, des ténèbres à la lumière. Là encore, dans ses déplacements ritualisés, la communauté se reconnaît et se resserre. Sous la conduite de ses  confrères, parfois appelés mazzeri ( massiers), parce qu’ils portent le bâton ( a mazza) de confrérie, c’est la granitula, cette procession préchrétienne qui s’enroule et se déroule autour d’un axe : un arbre, une croix, le Monument au Morts (après l’hécatombe de 14/18…) marquant le cycle cosmique de la nature et le mystère de la résurrection du Christ après sa mort sur la Croix. Ce rituel de mort et de renaissance souligne la conviction enfouie au fond des anciens que les morts, après un temps indéterminé aspirent à renaître. Les chants collectifs de contrition, comme celui du Perdonno mio Dio, qui accompagnent Chemins de Croix et processions, la lueur des cierges, la réalisation des sepolcri, ces reposoirs où l’on veille nuit et jour le Christ comme l’un des siens, voire la création de véritables décors peints éphémères, tout tend à transfigurer la mort dans une dramaturgie exacerbée.

                         

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photo Elizabeth

 

Les vieilles personnes qui s’en souviennent encore m’ont dit leur terreur, enfants, de pénétrer dans l’église de nuit, vers l’espace de prière délimité par ces grandes toiles peintes des sepolcri, représentant des moments de la Passion du Christ , et  la déploration de la Vierge-Mère  :  fleurie de blanc et de rouge, agrémentée de coupelles  où pousse depuis quarante jours le blé nouveau, surveillée par d’impressionnants gardiens du sépulcre à la moustache hirsute et au regard menaçant à la mode barbaresque, la chapelle ardente s’anime du feu des lampes à huile et des bougies.

 

  

 

On prie avec compassion la Mère devant le corps supplicié de son Fils, exposé gisant et sanglant dans son  catalettu, (le banc d’exposition des morts) , les bras articulés ramenés contre le corps, souvent grandeur nature. Comme en d’autres temps on aurait prié devant le corps d’un fils, d’un époux, d’un frère, d’un père assassiné…

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                                                          Photo Elizabeth:  Sepolcri

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Dans le nord de la Corse ,  c’est aussi  le rite de la cerca (circà : chercher) qui continue de déplacer en rond les processions des communautés voisines, portant la  croix ornée du grand palme tressé, la pullezzula,  et visitant les différents sepolcri des uns et des autres, comme en « recherche » du corps du Christ… Dans chaque village on rivalise de créativité pour tresser les palmes en motifs harmonieux, savants et chargés de symbolisme. L’année suivante, on les brûlera le Mercredi des Cendres, et l’on se servira de leurs cendres pour signer le front des fidèles : « Homme, souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras à la poussière ». Ce même jour, cindarellu, clôt le temps du Carnaval où dans de nombreux villages les jeunes gens se « défoulaient » en jetant sur les passants des sacs de cendres…

 Ou encore, ailleurs, c’est la parata pasquale : les villages se rendent visite à tour de rôle, parfois même se rencontrent pour partager un repas frugal près des tombes du cimetière… A Bonifacio, ( voir le très beau témoignage: "la passion à Bonifacio, un mystère pascal en Corse", des frères ANDREANI - )  les cinq confréries déploient leurs processions dès l’aube du Vendredi Saint dans les rues de la ville selon un protocole rigoureux et complexe , puis sortent le soir i casci, les grandes châsses de leurs saints. A Sartène, comme dans d’autres régions de l’île, c’est le célèbre catenacciu revivant la dramaturgie du Chemin de Croix : le porteur de la lourde croix, anonyme, pieds nus, cagoulé de rouge, enchaîné,  expie dans la douleur une faute très grave…
 
e1a8bc297aec2888f509cccbc48a6c81.jpgChaque ville et chaque village personnalise son rapport au sacré, mais tous le célèbrent avec autant de ferveur, en particulier lors de l’Office des Ténèbres, où les confréries chantent psaumes et lamentations autour du grand chandelier aux quinze cierges : peu à peu, les cierges sont éteints jusqu’à plonger le monde des vivants dans l’angoisse des Ténèbres . C’est alors le grand vacarme à coups de crécelles, claquoirs, branches de palmier, sifflets, chaises… pour mettre en fuite le Diable et les ennemis du genre humain… J’en reviens au voceru de Rumana . Le thème de la lamentation sur la mort de la jeune fille et ses épousailles divines rencontre le mythe antique : l’évocation des  mystères d’Eleusis, l’enlèvement de Perséphone, fille de Déméter, par Hadès le dieu des Enfers,  l’errance douloureuse de Déméter - Terre maternelle, toute à la quête douloureuse de sa fille, l’appelant sans relâche et dans son exil frappant de stérilité le sol nourricier : « dumandendu sempre à tutti : la moi figliola duvè hè ? »

Et que dire du paroxysme de la passion exaltée par les voceri lors des situations de vindetta, de la malamorte, la male mort, la mort violente ? L’âme romantique en a fait ses horrifiques délices, Mérimée, comme l’on sait, en a largement exploité la veine dans Colomba, et le touriste en mal d’émotions fortes trouve son compte dans cette imagerie archaïsante qui le comble, le formate dans son appréhension de l’âme corse. Vision différée, tronquée et brutale… 

L’insularité, la longue histoire heurtée de la Corse , la nature elle-même de l’île cernée par une mer souvent hostile, avec ses hautes montagnes habitées de rocs nus aux formes fantasmagoriques, de forêts denses et sombres propices à l’embuscade des vivants et des morts, de ravins où grondent torrents, tonnerre, trahisons et tambours incertains,  façonnent un peuple fortement identitaire, même si la diversité s’installe d’un vallon à l’autre.  Liés au sol et en marge de l’Histoire, les rituels funèbres plongent profondément leurs racines dans l’inconscient collectif ...Depuis la préhistoire, la Corse est à la croisée des chemins et de la mer viennent tous ces « visiteurs » du monde extérieur, casqués, enturbannés, armés de leur savoir guerrier, de leurs cultes initiatiques…  Peuples de navigateurs, Phocéens, Grecs, Carthaginois, Etrusques, Romains, Vandales, Ostrogoths, Lombards, Byzantins, Maures et Sarrasins, Barbaresques et Ottomans, Pisans, Génois, Aragonais, Anglais, Français, la litanie s’allonge depuis tant de siècles et elle n’est pas exhaustive…

 

 De la mer viennent aussi de grands fléaux, peste et choléra, malaria, pollutions, ogres et magiciens… Et puis encore, et très tôt, les premiers chrétiens (même peut-être, dit-on, Saint Paul), les premiers martyres, les premiers franciscains… Cristiani, chrétiens, les Corses le sont depuis les premiers siècles de la chrétienté. Mais leur christianisme fervent s’irrigue en permanence de croyances immémoriales et païennes  qui refont surface à la moindre occasion. Le Destin, le  fatum des anciens, régit la vie et la mort de chacun. Là aussi le cours de la vie  croise souvent la présence de tous ceux qui, volontairement ou non, peuvent jeter le mauvais œil, l’ochju : la maladie qui s’ensuit et les techniques de guérison employés par la signadora (l’initiée qui a le pouvoir de « signer » le mal)  dès lors relèvent de la magie religieuse, puisqu’il s’agit de lutter par des gestes et des formules teintées de christianisme contre les puissances occultes néfastes :

 

 In barca Santu Diu per mare venia          Dieu venait en barque par la mer
Una lancia in oru in manu tenia                Il tenait dans sa main une lance en or
San Francescu tagliava è cusgia                Saint François coupait et cousait

I panni di u nostru Signore                         Les habits de notre Seigneur               

San Salvatore cacciatemi sta pena             Saint Sauveur ôtez-moi la douleur

Di Stu capu è di stu core !                           De cette tête et de ce cœur !
 Ce monde  parallèle n’a pas de frontières étanches et dans un certain nombre de pratiques, comme celles de la vendetta, les valeurs chrétiennes de la vie et de la mort sont comme aspirées dans un champ magnétique autrement puissant. La notion d’honneur offensé et lavé dans le sang, à l’origine de chaque vendetta, entraîne dans son sillage un déchaînement sans fin de violences, d’assassinats où le pardon devient impossible. La pulsion de mort s’installe, l’embuscade devient la règle, la vengeance, une autre religion ritualisée.50c69b6a1e9f4b977245f6b2c3dd1c10.jpg
photo Tomas Heuer:
l' église du Couvent St François de Caccia
  Que le meurtre et son corollaire, l’obligation de vengeance, avec ses cycles sanglants aient pu émouvoir les religieux en charge de la Corse , je peux le comprendre. L’Eglise post-tridentine, elle qui œuvre avec mérite et succès pour « civiliser » ce peuple agropastoral des campagnes et des montagnes, a bien du mal à faire passer ses messages d’amour et de rédemption, et  elle n’a pas trop de tous ses couvents (en majorité franciscains), de tous les murs de ses nombreux sanctuaires pour tenter d’exorciser, par une iconographie explicite, ces résurgences préchrétiennes.  D’abord faire peur ...
en promettant , une fois franchi le seuil, la rencontre fatidique avec le  peseur d’âmes, le grand Saint Michel Archange, l'archange Chef des milices célestes, victorieux de Satan...
  
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Aregno, Eglise de la Trinité  (photo Elizabeth)
 
et les flammes de l’Enfer ou du Purgatoire  pour les âmes obscurcies par le péché (quasiment chaque église se dote de ces Autels de la Mort , peintures et stucs illustrant le thème des Ames du Purgatoire , avec une faconde plus ou moins populaire). Puis rassurer, protéger grâce à  l’intercession  de la Vierge et des nombreux Saints du Paradis … la Vierge Marie qui jouit depuis longtemps d’une grande vénération sur l’île, comme en témoigne la Constitution pour une Corse indépendante adoptée en 1731 et qui commence en ces termes :

« Le royaume choisit pour sa protectrice l’Immaculée Conception de la Vierge Marie dont l’image sera peinte sur ses armes et ses étendards. On en célèbrera la fête dans tous les villages avec des salves de mousqueterie et de canon. ».

 

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Catteri, la Vierge magnifique qui provient du Couvent de Marcasso.

Les saints protecteurs et  prophylactiques sont à l’honneur dans la moindre chapelle, ils paraissent un rempart plus efficace contre les maladies et les épidémies que le savoir médical ancien… Une mention spéciale pour Saint Joseph, patron de «  la Bonne Mort  » : mourir dans son lit, entouré de l’amour des siens et muni des saints sacrements… un luxe ! Si la communauté est assez riche, l’acquisition d’une belle relique, somptueusement habillée, fera l’orgueil du village et l’envie des voisins… Les évêques fulminent donc de multiples menaces d’excommunication contre ceux et celles qui, par la vendetta, commettent l’irréparable et pratiquent les rites funéraires les plus violents. J’imagine ce qui, dans les attitudes traditionnelles pouvait heurter la sensibilité du clergé et entraver sérieusement la paix…

 

On a déposé sur le tréteau funèbre la dépouille sanglante de Matteo, assassiné . Les femmes forment une haie circulaire près du corps déposé sur la tola, les hommes à l’extérieur frappent le sol de la crosse de leur fusil. Les femmes, gémissant, s’arrachant les cheveux, se griffant la poitrine et le visage, commencent à tourner en rond dans un piétinement balancé (la gestuelle d'une véritable danse, de u ballu: ballata, baddata) qui s’enivre et s’enroule autour du corps : c’est la spirale funèbre du caracolu (le colimaçon),  le pendant « profane » de la granitula, le mouvement qui lutte contre l'immobilité cadavérique du mort. ( J'ai entendu quelque part ce témoignage troublant d'une compagnie de grands corbeaux tournoyant au ras du sol pour tenterde faire  voler à nouveau Dans l’étourdissement de la danse, sa sœur improvise ce voceru (la déploration portée par la voix - vox : voceru, vuciàru, vuceratu, vuciarata ...)

O Mattè di la surella  Di u to sangue preziosu   N’anu lavatu la piazza  N’anu bagnatu lu chjosu  Un hè piu tempu di sonnu Un hè tempu di riposu  Or chè tardi, o Ceccantò ?  Ordili trippa è budelli   Di Ricciottu è Mascarone  Tendila tutta l’acelli  O ! Chi un nuvulu di corbi  Li spolpi carne è nudelli.(…)                                                                                        

O Matteo, aimé de ta soeur - De ton sang précieux  -Ils ont lavé la place -Ils ont baigné l’enclos- Il n’est plus temps de dormir- Il n’est plus temps de se reposer-     Que tardes-tu ô Ceccanton ? Arrache tripes et boyaux  -De Ricciotto et de Mascarone-  Jette-les aux oiseaux  Et puisse une nuée de corbeaux  Déchirer leurs chairs,dénuder leurs os  ...

  etc...
     
En situation de vendetta, dans la pratique du vocero, si longuement improvisé et vociféré par ces « érinyes », comme lors du caracolu funéraire, cette danse tournoyante à la frontière de la vie et de la mort, on atteint une sorte d’extase paroxysmique qui pulvérise l’éducation chrétienne des participants. Caracoler se dit des chevaux et de leurs voltes. Je laisse aller ma rêverie et la poétique « langue des oiseaux » : le cheval caracolant incarne la vitalité, il a naguère joué son rôle de guide de l’âme,  de psychopompe, sacrifié au héros mort pour qu’il l’emporte dans l’au-delà . ..
(à suivre)