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23/07/2009

Nouvelle brève du Purgatoire, San Giovanni de Corté

Le 22 Août 2007, je publiais une brève du Purgatoire un peu désespérée:

Avis de recherche du « cheval psychopompe » ….

 

 
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Depuis tous ces siècles, immobilisé (et "christianisé" ?) sous l’antique abside en cul de four d’une importante église pievane  de Corse, le cheval passeur des âmes du fond des âges a-t-il  rompu ses entraves pour reprendre librement son errance nocturne dans notre inconscient archaïque?

Trop de visiteurs incontrôlés ou pas assez d’engagement responsable ? On nous a répondu récemment qu'il valait mieux que le patrimoine ancien retourne sous les ronces pour y être préservé. Voilà une bonne solution pour ne pas s'embarrasser avec toutes ces vieilleries qui polluent notre espace et freinent le PROGRES!

Hier, en fin de journée lors de notre parcours dans la Vallée de l'Asco, Ghjuvellina et Cortenais, nous avons terminé ici, sur le site de San Giovanni, sur la commune de Corté:

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En cette fin d'après-midi, dans le calme et la lumière, le baptistère et la grande église piévane en deshérance...

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Hier je n'avais pas l'appareil photo, je le regrette! L'état général du site s'est dégradé depuis ces photos (2007). La porte cadenassée du baptistère a été défoncée, des poubelles gisent au sol, une colonne brisée a été déplacée. Un tel vandalisme imbécile dépasse l'entendement et l'inertie des autorités en charge de ce haut lieu historique de la Corse est incompréhensible.
Rappelons tout de même ce qu'est ce site de San Giovanni Battista de Corté, classé M.H. en 1968:

Dans la vallée du Tavignano, dans un espace majestueux et largement ouvert sur les montagnes environnantes, peut-être sur l'emplacement de l'antique ville romaine de Venicium, à quelques mètres  à peine du Palazzu ( maison forte) du semi mythique Comte Ugo della Colonna, le héros de la Reconquista de la Corse lors de la croisade contre les Maures au début du IX° siècle, ce site fut probablement déjà occupé dès la préhistoire:  la colline du Poggio dello Palazzo (dont Madame Moracchini Mazel pense que le sommet est couronné d'une triple enceinte mégalithique)  disparait aujourd'hui sous la végétation et l'on ne peut même plus distinguer les vestiges du Palazzo. Voici, juxtaposés,  l'église-mère et le baptistère de la Piève de Venaco : fouillée en 1956/58 par Mme Moracchini Mazel, l'église préromane dont il reste la belle abside en cul de four et la base des murs, des piliers séparant les trois nefs, et le baptistère de plan tréflé, recouvert d'une charpente et d'un toit de lauzes. Notre ami Etienne Jacquemin, hier, rappelait que le relevage du baptistère fut l'oeuvre de l'Armée, alors propriétaire des lieux ... Ces deux édifices, leur appareil archaïque (pierres cassées au marteau, utilisation d'un mortier  de chaux, de tuffeau)  et leur décor de bandes murales à la façon des églises lombardes permettent d'estimer leur construction du début du IX° siècle... Comme souvent on retrouve là la permanence de l'occupation humaine sur un site sacré, vestiges mégalithiques, nombreux éléments de tuiles et poteries romaines réemployés dans la maçonnerie des deux édifices...

Le petit "cheval psychopompe" disparu, c'est désormais un peu de l'âme du lieu qui  qui nous manque.

 

 

 

                                                                                                                                  

 

 

18/08/2008

Castirla Août 2008:Brève du Purgatoire

 CASTIRLA Cappella San Michele

 

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  Faut-il sauver San Michele di CASTIRLA ? ( Pieve de Talcini)

 

Le cimetière de CASTIRLA et la petite chapelle San Michele, chère à mon coeur, à taille humaine, évidente et fragile sous ses teghje dérangées, sa charpente ruinée par la mérule et les insectes xylophages...  Dans son environnement un peu trop paisible, un peu trop silencieux, un peu trop loin de la communauté des vivants.

 

 

 

 

Chronique:

 

"Mgr Mascardi a visité cette chapelle en 1589 (fol. 244): "... Eglise paroissiale San Michele, annexe de Sant'Andrea d'Omessa... elle se trouve à un tiers de mille des habitations... son toit laisse passer la pluie... il y a deux portes... les murs sont pleins de trous et comportent une fenêtre en mauvais état... il y a une cloche pendue à un arbre... l'autel est placé sous une abside peinte... il y a 21 feux et 80 âmes" (cité par Geneviève MORACCHINI MAZEL dans "Les Eglises Romanes de Corse", publié avec le concours du C.N.R.S. en 1967).

"Nous supposons que la chapelle San Michele pourrait appartenir au groupe préroman le plus ancien, entre le VIIe s. et le IXe s. ( idem)

A cette époque, bien évidemment, il n'y avait pas de cimetière autour de la chapelle.

Et voici ce qu'en dit Joseph ORSOLINI, pionnier sensible et passionné dans son ouvrage " L'Art de la Fresque en Corse de 1450 à 1520" publié en 1989:

"Sauvée une première fois de la ruine en 1963 (couverture en tôles, charpente effondrée...) la toiture de la chapelle a été refaite en 1983 par l'entreprise Piacentini de Furiani, à la demande des Bâtiments de France. Son toît de "teghje" est surmonté d'un clocheton de construction tardive (XVIIIe s.) ... Les fresques (fin XVe S.) sérieusement décollées par les intempéries furent restaurées en 1964 par les Monuments Historiques (...) Aujourd'hui protégées, elles sont le symbole par excellence de la tradition picturale populaire. (...)"

 

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 Ensemble des peintures de l’abside en cul de four et de son arc triomphal, datables de la fin XVe siècle. Une iconographie bien établie dans nos "chapelles à fresques": au centre de l'abside, le Christ Bénissant, entouré du Tétramorphe. Sous ses pieds, les douze apôtres. De part et d'autre, sur l'Arc triomphal, la scène de l' Annonciation. Sur les pieds de l'Arc, à gauche, la Vierge à l'Enfant, à droite, St Michel.

 

 L’histoire bégaye trop souvent et  25 ans après la réfection de la toiture, voici l’état effrayant de la chapelle : ce lieu où se vit encore, mais pour combien de temps ? le divin dans une expression touchante, appliquée, un peu maladroite, est à nouveau proche de la ruine. Ces dernières années, avant 2004, lors de mes visites de "la Montagne des Orgues", j'avais pris l'habitude, aussi souvent que possible, de faire découvrir ce petit sanctuaire intime, son abside peinte à hauteur d'homme où l'on tutoie sans crainte le Christ en Majesté tant son visage est proche et son humanité évidente.

 

 

 

 

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Le Christ en majesté, bénissant de sa main droite, et tenant de sa gauche le traditionnel livre ouvert: "EGO SUM LUX MUNDI ET VIA VERITAS ET VITA". Il est encadré comme de juste par la représentation du tétramorphe et l'on voit derrière sa tête la Jérusalem Céleste.

Ces fresques ont déjà beaucoup souffert, lessivées par les intempéries, certaines parties se sont effacées comme le visage de Saint Michel, les orbites des yeux de certains  saints personnages se sont vidées depuis longtemps de leurs prunelles, mais il reste un ensemble plein de vie qui résiste encore, mais pour combien de temps? à la dégradation générale de l'édifice.

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                           ... l'Archange Gabriel, dans la scène de l'Annonciation, écoinçon de gauche de l'Arc triomphal....

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... et dans l'écoinçon de droite, la Vierge en prière reçoit la Colombe de l'Esprit Saint.

Les tentures pourpres de sa chambre close évoquent peut-être l'intimité inviolable de son ventre maternel. Le bleu de son manteau, couleur céleste, a bientôt disparu, seul reste le rouge-humanité de sa robe.

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...sous les pieds de la Vierge, l'Archange St Michel, le Saint Patron de cette chapelle.

Selon l'usage, il pèse les âmes et maintient Satan sous sa lance.

Dans la partie basse de l'abside l'on peut détailler les douze apôtres, comme autant de piliers solides de l'église.

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 ...parmi eux, Saint Barthélémy, sa peau d'écorché sur l'épaule et le couteau de son supplice à la main...

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... le tétramorphe, comme toujours, est représenté.
De part et d'autre de la figure majestueuse du Christ: ici, les pattes sur le livre, voici le Taureau ailé symbolisant l'Evangéliste Luc..
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L'Ange du Tétramorphe, symbole de l'Evangéliste Mathieu.
 

 

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...  à gauche de l'abside, sous Gabriel, la Vierge présente sur ses genoux l'Enfant Jésus à l'adoration des fidèles...

Mère de Dieu, Mère de l'Eglise. Là encore, les couleurs se sont estompées... A sa droite, la frise des apôtres en grande conversation et tenant le Livre à la main. Au-dessus de leurs têtes, on aperçoit le Lion de l'Evangéliste Marc.

 
 
 
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Et maintenant, voici l'état actuel de la charpente, vue lors de mon dernier passage à la chapelle, le 13 AOÜT 2008. La chapelle est bien entendue fermée au public: les risques d'effondrement de la toiture sont malheureusement aujourd'hui confirmés.

La partie de droite de la charpente a déjà cédé et l'on voit le jour à de nombreux endroits. Sous l'action de la mérule ( ce champignon qui ôte toute cohésion aux fibres du bois, une véritable peste), les poutres ne peuvent plus soutenir le poids des teghje (dalles de pierre couvrant traditionnellement le toit, très lourdes). La mérule s'est installée insidieusement, profitant du glissement incontrôlé de certaines teghje, de l'absence de surveillance régulière de ce lieu, du lessivage des pluies pénétrant en force, de l'obscurité ambiante, un vrai régal pour tous les prédateurs du bois, de quel ordre qu'ils soient... Les taches blanchâtres sur les poutres signent la présence de la mérule, que j'ai appris à reconnaître grâce à un ami architecte qui faisait cette visite avec moi en 2004... Nous avions alerté alors la municipalité de Castirla qui se bat depuis pour tenter de trouver une solution à cette situation d'urgence.

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Les instances sollicitées par le maire pour tenter de sauver cet édifice classé par les Monuments historiques le 22 septembre 1958, demandent à ce que soient réalisées des fouilles archéologiques avant de s'atteler à la restauration de la chapelle. L'archéologue pressentie pour ces fouilles a exprimé le désir somme toute assez humain de rester en vie, et remet son intervention à une date indéterminée, lorsque la toiture sera hors de danger... de nuire. A la suite de quoi, l'architecte en chef des M.H. demande à la mairie de Castirla de déposer le toit et de construire une charpente provisoire recouverte de tôles (retour à la case départ! ), ce qui engendre des dépenses très importantes pour cette petite commune proche de Corte. Ce qui  signifie aussi que l'on devra, pour la énième fois, payer une nouvelle toiture... éphémère, celle-là, en attendant d'engager à nouveau de futures dépenses pour la reconstruction de ce toit dont rien, décidément, ne nous garantit le caractère définitif...

Il est dommage que cette chapelle n'ait pas fait l'objet d'une surveillance, après la réfection du toit en 1983. On aurait évité le pire, et allégé d'autant les dépenses de la Mairie et de l'Etat.

Ces toits de lauzes étaient autrefois régulièrement surveillés, entretenus comme l'on entretenait le toit de sa propre maison. On savait que le moindre glissement de teghje entraine forcément et rapidement des dégats, et l'on n'attendait pas pour agir, la chapelle ou l'église paroissiale étant alors vécue au quotidien. Notre problème vient de ce que ces chapelles sont éloignés "physiquement et moralement" des communautés dont elles dépendent. Toutes n'ont pas, comme à Cambia, un ange gardien qui les surveille amoureusement ...

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                                                                     ... éparpillés au sol, des débris de la charpente...

J'ai été profondément surprise de découvrir que cette chapelle si menacée d'effondrement prochain ne faisait pas partie de la première tranche de travaux engagés par la Collectivité Territoriale de Corse: ce projet magnifique des restaurations de nos chapelles à fresques est porteur d'espoir, mais je me demande si nos responsables du Comité scientifique créé au sein de la C.T.C. pour étudier ces projets de restauration  sont venus récemment sur le site de Castirla et s'ils ont connaissance de l'état aujourd'hui désespéré de cette chapelle. Castirla mérite bien autant d'amour et de soins, malgré sa modestie et sa naïveté, que celles de Sermanu, Cambia, E Valle di Campuloru, Brandu (les quatre chapelles sélectionnées pour cette première tranche)... L'urgence absolue d'une intervention saute aux yeux, et si, par malheur, la charpente vient à s'écrouler avant qu'on intervienne, il est probable que les murs suivront de près cette ruine. Ce qui serait traiter le problème par le vide.

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...
 
 

Ceci était "une brève du Purgatoire", pavé, comme l'Enfer de bonnes intentions....

 (à suivre)

11/07/2007

Brève du Purgatoire: Nessa. 11 juillet 2007

 La chapelle San Petru à NESSA. Pieve di Sant’Andrea.

 

fa9d5e9c92951ed7dc19e427def1a31f.jpgNouvelle brève de la chapelle San Petru di Nessa. Pieve di Sant'Andrea

Dans un coin du cimetière, mangée par les tombes,  il ne reste plus de cette petite chapelle romane que l’abside, lessivée par les eaux de pluie et les infiltrations. Lentement ici s’efface un témoignage unique dans l’iconographie des fresques en Corse : la représentation d’une confrérie de femmes, sans doute à l’origine protégée par le manteau de la Vierge   en Majesté, au centre de l’abside et portant sur ses genoux l’Enfant Jésus, dont on aperçoit encore un joli pied nu…. Les visages des femmes sont tendus dans la prière, les mains jointes, les silhouettes dessinées d’un trait sûr et évoquent un univers proche de la petite fresque de la chapelle Sainte Restituta de Calenzana.

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Voici aujourd’hui l’état des lieux :

 

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encore un petit effort ... voire avec du ciment ...

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et TOUT, ENFIN ! aura disparu…même le pied du petit Jésus!

 

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SI VOUS NE L'AVEZ PAS ENCORE, ALLEZ ACHETER LE BEAU LIVRE DE JOSEPH ORSOLINI PARU EN 1989: "L'ART DE LA FRESQUE EN CORSE DE 1450 A 1520", EDITE PAR LE PARC REGIONAL DE LA CORSE ( SAGEP). C'EST L'OUVRAGE DIDACTIQUE D'UN AMOUREUX FOU (ET DECHIRE) DU PATRIMOINE DE LA CORSE...