10/06/2007
orgues: Olmi Cappella
La vie d’un petit orgue de montagne au milieu des siens…
Aujourd’hui installé à Olmi Cappella dans le silence d’une église qui subit l’exode rural et l’inévitable évolution du monde moderne, le petit orgue a vécu dans sa jeunesse une existence certainement plus mouvementée : l’absence de pupitre porte-partitions nous indique clairement que nos anciens organistes n’avaient pas besoin de notes pour musiquer, qu’ils avaient un rapport instinctif avec leur instrument, le même qu’avaient les violoneux lorsqu’ils empoignaient leur violon pour faire danser les villageois lors des fêtes ou des veillées, accompagner les sérénades ou rythmer la mauresque …
L’orgue avait été construit pour magnifier les fêtes religieuses : l’église d’alors était vécue comme le lieu festif et unificateur de la communauté qui se reconnaissait dans les manifestations de sa confrérie, de ses chants, de son orgue… comme dans le choix de ses maîtres-maçons et de ses peintres. A la polyphonie des chants répondait celle de l’orgue, l’organiste ayant appris à jouer l’instrument pour le service de la liturgie, l’accompagnement des cantiques, et chacun selon ses talents et son tempérament se donnait à sa charge. S’il le fallait, il attaquait une vigoureuse ouverture d’opéra en entrée de messe ou improvisait « assai pietoso » pour l’offertoire quelque valse à la mode . Le grand Bach n’a pas agi autrement en réutilisant ses compositions profanes dans ses cantates religieuses. Je me souviens d’une grande messe patronale en Espagne, à Viana, sur le chemin de St Jacques en 1989, dans une église bondée de fidèles, où l’organiste emmena la foule fervente vers la table de communion au son d’un tango… Et aussi, en Corse, à Monticello, cet organiste des années trente, qui, après avoir joué une valse à l’offertoire, avait tenté la java à la communion : là, le prêtre s’était rebellé, arguant que la java faisait trop lever la jambe aux jeunes filles…
Nous sommes là bien loin de Frescobaldi et l’écriture polyphonique de l’époque serait sans doute paru une bizarrerie d’extraterrestre aux organistes du XIXème siècle. Et pourtant ! Le petit orgue d’Olmi Cappella, avec sa fraîcheur et sa vaillance retrouvées grâce à J.F.Muno, chante avec justesse cette musique intérieure qui ne demande pas des effets spectaculaires. Non seulement lors de concerts, mais aussi lors des messes : il apporte alors cette poésie intemporelle et méditative où il n’est pas besoin de connaître la grammaire pour ressentir l’émotion… La pratique de l’alternance du chant et de l’orgue dans la messe de Frescobaldi, commune à tous les musiciens de cette époque prend sa source dans le chant responsorial des premiers chrétiens : le dialogue d’un soliste avec le chœur, représentant la communauté des fidèles. Elle est proche également de l’usage traditionnel du chant religieux de nos villages, où alternent la chjama (« l’appel » d’une seule voix) et le chant en paghjella (« réponse » polyphonique à trois voix), comme on peut l’entendre à Olmi Cappella. La fonction est la même : ainsi recréé et sacralisé dans ce dialogue qui pourrait évoquer le dogme de la Trinité , l’espace sonore de l’église resserre la communauté, un pour tous, tous pour un . Le rôle du chant et de l’orgue dépasse alors largement le pur plaisir musical ou la réplétion ethno-touristico-musicologique.
C’est à Olmi-Cappella et sur la tribune de l’orgue que j’ai commencé à comprendre de l’intérieur la réalité et l’enjeu du chant religieux d ‘un village mais aussi la relation des villageois avec leur orgue. Le dernier chantre d’Olmi Cappella, Ceccu Saladini transmettait alors de sa voix nerveuse et ténue cet héritage direct, suspendu à la frontière de deux mondes. Passage, lumière et paix d’un crépuscule éphémère où tout devient possible avant l’assaut de la nuit. L’intensité de son chant n’avait rien à voir avec les décibels médiatisés : elle était nourrie de cette vie âpre mais idéalement structurée de naguère où rien n’était donné sans peine mais où tout était objet de partage. Je peux témoigner qu’il était aussi très fier de ce petit orgue, conscient de la volonté des anciens qui avaient souhaité sa présence dans l’église.
Il était heureux de l’entendre à nouveau parler, dialoguer avec la polyphonie des chantres et accompagner les cantiques que chantait si bien sa femme : cloches, chants, orgue … lui redonnaient sa jeunesse . Je sais qu’il se réjouit là où il est de savoir que les chants et l’orgue revivent. Merci à Marie-Hélène Guespieler qui a voulu et rendu possible par sa ténacité et son talent la réalisation de ce témoignage.
Lors de cette belle restauration du petit instrument montagnard d'Olmi Cappella par Jean-François MUNO, le décor du buffet avait été confié à la verve créatrice de Pierre SIBIEUDE, grand Prix de Rome de peinture: il avait signé là une oeuvre délicate mais non dénuée de malice... Pierre nous a quittés en juillet 2006, alors qu'il venait en Corse pour l'inauguration du très bel orgue de COSTA, où il avait assuré avec beaucoup d'amour la restauration du décor exceptionnel du buffet et de la tribune... Lui aussi revit à chaque fois que chantent ces instruments sur lesquels il improvisait du reste avec grand talent et qu'il aimait tant!
Elizabeth .
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08/06/2007
remerciements publogs à l'ami Olivier!
Oui, merci à l’ami Olivier de m’avoir supportée, souris-coupe-coupe à la main, alors que nous tentions de nous frayer un chemin à travers la jungle inextricable de mes neurones antédiluviens…
Coups de cœur et coups de gueule seront au programme du blog, mais aussi, des informations sur l’identité de ce patrimoine rural de la Corse que nous ne souhaiterions surtout pas voir disparaître dans une soupe insipide, lyophilisée, aseptisée.
J'en profite pour annoncer le travail en cours et à venir avec plusieurs écoles primaires de Balagne en vue d'enfin réaliser avec les enfants leur "CHARTE DU PATRIMOINE RURAL DE LA CORSE"
Au menu, la sensibilisation au patrimoine sous toutes ses formes: lecture de paysage, bâti, chemins, églises ... et leurs orgues historiques, histoire et préhistoire, botanique, cuisine, écologie ( ah! les ruisseaux, et les fous criminels qui y balancent batteries de voiture, javel et autres produits détergeants!), et ... non des moindres, langue, toponymie, contes...
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03/06/2007
Orgues: La Porta
L'orgue historique de l'église Saint Jean-Baptiste de La Porta : clavier, tirage des jeux et tuyauterie…
Au-dessus du clavier, une inscription dit en latin : « si tu ne me vois pas, au moins écoute ma voix » … Les frontons de touches, délicatement sculptés à la façon des clavecins italiens de l’époque et le tirage des jeux, présenté sur la droite du clavier dans un élégant ovale tout à fait inhabituel, indique une facture raffinée.
Cet orgue est doublement historique car il a été le premier à être restauré « à l’identique », en 1963, par le facteur d’orgue italien Bartholémy FORMENTELLI , qui a su lui restituer toute son âme en réemployant au maximum le matériau ancien et en refaisant à l’identique ce qui n’avait pas pu être sauvé. C’est là, malgré sa petite taille, l’un des orgues les plus raffinés et les plus chantants de Corse.
Bien qu’aucune archive n’ait été retrouvée sur l’histoire de l’instrument, on sait que ce petit orgue a été construit à Rogliano en 1780 par un Franciscain lucquois, le père Benedetto MARRACCI pour le couvent franciscain San Antonio della Casabianca (à 8 km de La Porta ), qui avait reçu dans ses murs la célèbre Consulta au cours de laquelle Pascal PAOLI fut élu Général des Corses. Lors de la Révolution française, le conventionnel SALICETI, en lutte contre les insurgés réfractaires du mouvement de la Crucetta né d’une assemblée générale au couvent de Casabianca, aurait sauvé l’orgue avant la destruction du couvent, en 1793, le faisant transférer à l’église Saint Jean-Baptiste de LA PORTA , village natal de sa femme… Depuis sa restauration, l’orgue ne cesse d’être joué en concert par les meilleurs organistes qui expriment toujours un grand plaisir dans cette rencontre musicale.
COMPOSITION :
Clavier : 45 notes avec octave courte.
Pédalier : 8 notes et tamburo.
Principale primo et secundo (soprani) couplés et « obligés », Ottava, Decima Quinta, Decima Nona et Vigesima secunda, Vigesima sesta et Vigesima nona, Flauto Nazardo, Voce Umana , Cornetto.
18:10 Publié dans orgues historiques de Corse | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
02/06/2007
double CD orgues corses
Double CD, avec textes en Français, Corse et Anglais
Disponible à l'adresse de:
Mme GEISPIELER Marie-Hélène
12 Chemin des Eglantiers - 34830 JACOU
Les chantres d’Olmi Cappella témoignent de la diversité des messes chantées traditionnellement en Corse : chaque communauté a généré une façon profondément originale de chanter « sa » messe.
La transmission orale, largement fragilisée en son temps par l’abandon progressive de la vie rurale de naguère - pour cause de guerres, et d’évolution inéluctable du monde moderne, entraînant le dépeuplement des villages de l’intérieur au bénéfice des villes côtières, n’a cependant pas fini de nous offrir ses témoignages : les confréries actuelles relèvent le défi, non seulement en reconstituant l’existant, mais aussi en montrant leur capacité à renouer avec l’esprit ancien dans des créations contemporaines.
22:05 Publié dans orgues historiques de Corse | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook |
orgues:Composition de quelques orgues significatifs de Balagne
COMPOSITION DE QUELQUES ORGUES SIGNIFICATIFS DE BALAGNE
MONTICELLO – Confrérie St Charles – Anonyme 1733 Restauration Formentelli 1976
Clavier : 45 notes avec octave courte- coupure au Do 3
Pédalier : 8 touches d’octave courte et 1 touche sonnant a cornemusa
Tirage des jeux : vers soi
Diapason 441, tempérament mésotonique.
Principale Vigesima sesta (XXVIa)
Ottava Flauto in duodecima
Quinta Decima (XVa) Cornetto a due canne
Decima nona (XIXa) Voce umana ( soprani)
Vicesima secunda (XXIIa)
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BELGODERE- église - orgue de chœur – 1761 ? Lazari ? Restauration Loriaut 2006
Clavier : 45 notes , octave courte – coupure au Do 3
Pédalier : 13 touches dont une octave courte
Tirage de jeux : vers soi
Principale XXIIa
Ottava XXIXa
XVa Flauto in quinta
XIXa Voce umana (soprani)
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CALVI – église ST Jean Baptiste – G.B. Ciurlo - 1774 Restauration Formentelli 1993
Clavier : 45 notes, octave courte, coupure au Do 3
Pédalier : 8 touches, octave courte
Principale Cornetto (3 file, soprani)
Ottava Flauto in ottava
XVa Flagioletto
XIXa Sesquialtera
XXIIa Contrabassi
XXVIa Tamburo
XXIXa Trombe (2 : sol et ré)
Uccelleti
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SPELONCATO- Anonyme 1746- Giovanni Crudeli - 1810
Restauration Massoni 1992
Clavier : 45 notes, octave courte, coupure au Do 3
Pédalier : 8 touches, octave courte + 2 touches pour les trombe dell’angelo ( sol et la) et 1 tamburo
Accessoire : Rosignoli
Tirage des jeux : vers soi
Diapason 437 ; tempérament mésotonique.
Principale Flauto dolce
Ottava Nazardo
Quintina Cornetta nei soprani (3file)
XVa Cornetta nei bassi (2 file)
XIXa Tromba soprani
XXIIa Tromba bassi
XXVIa Voce umana (soprani)
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CALVI – Ste Marie- Luigi De Ferrari- 1830
Restauration Formentelli 1993
Clavier : 50 notes , octave courte.
Pédalier : 14 touches, octave courte. Contrabassi 16’
Tirage des jeux : latéral
Tiratutti
Principale primo Voce umana (soprani)
Principale secondo, Bassi Flauto in ottava
Principale secondo, Soprani Cornetto (3 file)
Ottava Flagioletto nei Bassi
XVa Flauto in selva Soprani
XIXa Tromba Bassi
XXIIa Tromba Soprani
XXVIa
XXIXa
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PIOGGIOLA- Sta Maria ANTON PIETRO SALADINI 1844
Restauration Alain Sals 1994
Clavier : 50 notes, octave courte
Pédalier : 13 touches, octave courte
Tirage des jeux : vers soi
Tira-ripieno
Principale Flauto in ottava
Principale 2 Cornetto (3 file)
Ottava Tromba Soprani
XVa Tromba Bassi
XIXa Ottavino Bassi
XXIIa Voce umana (soprani)
XXVIa
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MURO – Sta Annunziata – PAGNINI 1796 puis AGATI-TRONCI- 1878
Restauration Jean-François Muno 1982
Clavier : 54 notes, octave courte, coupure entre Mi 3 et Fa 3.
Pédalier : 17 touches, octave courte. 1 touche pour la Terza mano
Tirage des jeux latéral.
Principale nei Bassi Campanette soprani (25 timbres)
Principale nei Soprani Trombe Bassi
Ottava nei Bassi Trombe Soprani
Ottava nei Soprani Clarone nei Bassi
XVa Corno inglese 16’ Soprani
Ripieno di 3 cane per tasto (4 nei Bassi) Cornetto Soprani (3 file)
Flauto in ottava Bassi Ottavino nei Soprani
Flauto in ottava Soprani Voce Angelica nei Soprani
Viola Bassi Contrabassi (16’+8’)
Accessoires et combinaisons :
Tamburo ,Terza mano , Tira Ripieno , Polisire (double-registration)
Banda militare (percussions) : gran cassa, piatta turco, cappello cinese
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CATTERI- Ste Marie- Gaspard Domini- 1902/1903 Restauration Alain Sals 1994
Clavier 50 notes, octave courte
Pédalier : 8 touches, jeu de 8’ouvert
Tirage des jeux latéral
Principale Bassi Flauto in ottava soprani
Principale Soprani Cornetto nasardo
Ottava Bassi Cornetto ottavino
Ottava Soprani Cornetto terza
XVa Tromba Bassi
XIXa e XXIIa Tromba Soprani
Voce umana (soprani)
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