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31/01/2010

Chartes de Conservation et de restauration du Patrimoine ...

Une pensée pour les amis restaurateurs qui, avec beaucoup d'humilité et de bon sens, acceptent en ce moment de grelotter pour retrouver au plus juste les décors peints de leurs églises - glacières  ...

Valle d'Orezza Maître Autel.jpg
(Valle d'Orezza, en cours de restauration)

 

 

Un rappel de ces réflexions, chartes, principes qui  accompagnent nos artistes conservateurs / restaurateurs : ils oeuvrent le mieux qu'ils peuvent -  souvent dans des conditions peu confortables physiquement ... et financièrement ... - pour tenter  de préserver, conserver, restaurer ce patrimoine "vernaculaire " de nos églises . Ces préconisations (à retrouver sur le site du Centre de Documentation UNESCO - ICOMOS), qui entre autres complètent la Charte de Venise de 1964 , ne pourront jamais répondre d'une façon uniforme à tous les questionnements que l'on est amené à se poser en cours de travail.

Les surprises sont nombreuses, et entre la règle et la pratique se glisse le ressenti aléatoire des uns et des autres. Quel maire de village accepte facilement que ces travaux de restauration - qui coûtent une fortune à la communauté - s'en tiennent scrupuleusement à un dégagement minutieux des décors peints ... sans raviver les couleurs, sans redonner un petit coup de jeunesse au vieil existant ... ?

Restauration ou lifting ?

Je connais des lieux, hélas, où le lifting prévaut, plus rapide à réaliser, donc de meilleur rendement ... Et à force de tirer sur les prix, on condamne souvent les églises à ces repeints dérangeants et tape-à-l'oeïl qui, à défaut de témoigner d'un état de grâce, du moins flattent le porte-monnaie du consommateur et lui donnent un sentiment euphorisant d'efficacité :  rassurant de voir "que ça se voit" , tout de même, ces travaux onéreux, que ça fait plus gai, plus propre, moins à l'abandon, qu'on s'y mariera d'autant plus joyeusement , qu'on s'y fera plus volontiers enterrer ... et tant pis pour  "l'authenticité picturale" ...

 Aujourd'hui, certes,  nous restaurons le patrimoine pour en  transmettre le témoignage (glosé) avec le plus de fidélité possible aux générations futures : mais les gens d'autrefois créaient ce même patrimoine, avec amour, fantaisie et conviction ...  pour leur usage quotidien et ne se posaient certainement pas la question de ce qu'en feraient leurs arrières-arrières petits- enfants .

Du reste, quand les choses se dégradaient dans les églises, on ne "restaurait" pas , on recréait du neuf et avec quel plaisir ! En témoignent, dans nos églises baroques de Corse ces couches successives de décors peints, sous le 19ème siècle, le 18 ème , et même parfois le 17ème ... avec un pincement au coeur  pour le restaurateur, lorsque le décor le plus ancien manifeste un goût qui surpasse bien souvent en délicatesse le décor de l'époque suivante:

" Les apports valables de toutes les époques à l'édification d'un monument doivent être respectés, l'unité de style n'étant pas un but à atteindre au cours d'une restauration. Lorsqu'un édifice comporte plusieurs états superposés, le dégagement d'un état sous-jacent ne se justifie qu'exceptionnellement et àcondition que les éléments enlevés ne présentent que peu d'intérêt, que la composition mise à jour constitue un témoignage de haute valeur historique, archéologique ou esthétique; et que son état de conservation soit jugé suffisant. Le jugement des éléments en question et la décision sur les éliminations à opérer ne peuvent dépendre du seul auteur du projet. (Art 11 de la CHARTE DE VENISE, 1964)"

(Ce jugement reste faillible, sujet à variations, car c'est un jugement humain, inscrit dans une époque, avec ses modes, ses tabous, ses compromissions, ses engagements sincères ou ses petits arrangements lucratifs ... Les chartes préconisent avec prudence, proposent des garde-fous : puis les décideurs décident et engagent l'argent public dans leurs décision ... )

 

Et nous, quel usage aurons-nous de ces églises?

Sommes nous arrivés aujourd'hui, à bout  de force ou faute d'usage, à l'époque de la conservation et du commentaire?

 

En attendant, deux chartes intéressantes à retrouver sur le site d'ICOMOS :


CHARTE DU PATRIMOINE BÂTI VERNACULAIRE
(1999)


Ratifiée par la 12è Assemblée Générale de ICOMOS, au Mexique, octobre 1999

INTRODUCTION

Le patrimoine bâti vernaculaire suscite à juste titre la fierté de tous les peuples. Reconnu comme une création caractéristique et pittoresque de la société, il se manifeste de façon informelle, et pourtant organisée; utilitaire, il possède néanmoins un intérêt et une beauté. C'est à la fois un reflet de la vie contemporaine et un témoin de l'histoire de la société. Bien qu'il soit oeuvre humaine, il est aussi le produit du temps. Il serait indigne de l'héritage de l'humanité de ne pas chercher à conserver et à promouvoir ces harmonies traditionnelles qui sont au coeur même de son existence et de son avenir.


Le patrimoine bâti vernaculaire est important car il est l'expression fondamentale de la culture d'une collectivité, de ses relations avec son territoire et, en même temps, l'expression de la diversité culturelle du monde.

La construction vernaculaire est le moyen traditionnel et naturel par lequel les communautés créent leur habitat. C'est un processus en évolution nécessitant des changements et une adaptation constante en réponse aux contraintes sociales et environnementales. Partout dans le monde, l'uniformisation économique, culturelle et architecturale menace la survie de cette tradition. La question de savoir comment résister à ces forces est fondamentale et doit être résolue non seulement par les populations, mais aussi par les gouvernements, les urbanistes, les architectes, les conservateurs, ainsi que par un groupe pluridisciplinaire d'experts.

En raison de l'uniformisation de la culture et des phénomènes de mondialisation socio-économiques, les structures vernaculaires dans le monde sont extrêmement vulnérables parce qu'elles sont confrontées à de graves problèmes d'obsolescence, d'équilibre interne et d'intégration.

Il est par conséquent nécessaire, en complément de la Charte de Venise, d'établir des principes pour l'entretien et la protection de notre patrimoine bâti vernaculaire.

PRINCIPES GÉNÉRAUX

1.
Les bâtiments vernaculaires présentent les caractéristiques suivantes :

a) Un mode de construction partagé par la communauté ;

b) Un caractère local ou régional en réponse à son environnement ;

c) Une cohérence de style, de forme et d'aspect, ou un recours à des types de construction traditionnels ;

d) Une expertise traditionnelle en composition et en construction transmise de façon informelle ;

e) Une réponse efficace aux contraintes fonctionnelles, sociales et environnementales ;

f) Une application efficace de systèmes et du savoir-faire propres à la construction traditionnelle.

2. L'appréciation et l'efficacité de la protection du patrimoine vernaculaire dépendent de l'engagement et du soutien de la collectivité, de son utilisation et de son entretien continuels.

3. Les gouvernements et les autorités compétentes doivent reconnaître à toutes les collectivités le droit de préserver leurs modes de vie traditionnels et de les protéger par tous les moyens législatifs, administratifs et financiers à leur disposition et de les transmettre aux générations futures.

PRINCIPES DE CONSERVATION

1.
La conservation du patrimoine bâti vernaculaire doit être menée par des spécialistes de diverses disciplines, qui reconnaissent le caractère inéluctable du changement et du développement et le besoin de respecter l'identité culturelle de la collectivité.

2. Les interventions contemporaines sur les constructions, les ensembles et les établissements vernaculaires doivent respecter leurs valeurs culturelles et leur caractère traditionnel.

3. Le patrimoine vernaculaire s'exprime rarement par des constructions isolées et il est mieux conservé par le maintien et la préservation d'ensembles et d'établissements représentatifs, région par région.

4. Le patrimoine bâti vernaculaire fait partie intégrante du paysage culturel et cette relation doit donc être prise en compte dans la préparation des projets de conservation.

5. Le patrimoine vernaculaire ne comprend pas seulement les formes et les matériaux des bâtiments, structures et des lieux, mais également la manière dont ces éléments sont utilisés et perçus ainsi que les traditions et les liens intangibles qui leur sont reliés.

ORIENTATIONS PRATIQUES

1. Recherche et documentation


Toute intervention physique sur une structure vernaculaire devrait être menée avec prudence et précédée d'une analyse complète de sa forme et de sa structure. Ce document devrait être conservé dans des archives accessibles au public.

2. Emplacement, paysage et groupes de bâtiments

Les interventions sur les structures vernaculaires devraient être menées dans le respect et le maintien de l'intégrité de l'emplacement, de la relation avec les paysages physiques et culturels et de l'agencement d'une structure par rapport aux autres.

3. Systèmes de construction traditionnels

Le maintien des systèmes de construction traditionnels et du savoir-faire lié au patrimoine vernaculaire est capital pour l'architecture vernaculaire et essentiel pour la réfection et la restauration de ces structures. C'est par l'éducation et la formation que ce savoir-faire devrait être conservé, enregistré et transmis aux nouvelles générations d'artisans et de bâtisseurs.

4. Remplacement des matériaux et des éléments architecturaux

Les transformations qui satisfont légitimement aux exigences modernes devraient être réalisées avec des matériaux qui assurent la cohérence de l'expression, de l'aspect, de la texture et de la forme de l'ensemble de la construction et la cohésion des différents matériaux entre eux.

5. Adaptation

L'adaptation et la réutilisation des constructions vernaculaires devraient être effectuées dans le respect de l'intégrité de la structure, de son caractère et de sa forme tout en étant compatibles avec des standards de vie acceptables. La pérennité des modes de construction vernaculaire peut être assurée par l'élaboration par la collectivité d'un code d'éthique qui peut servir aux interventions.

6. Changements et restauration d'époque

Les modifications apportées dans le temps aux bâtiments doivent être appréciées et comprises comme des éléments importants de l'architecture vernaculaire. La conformité de tous les éléments d'un bâtiment à une même période ne sera pas, en général, l'objectif des interventions sur les structures vernaculaires.

7. Formation

Afin de conserver les valeurs culturelles de l'architecture vernaculaire, les gouvernements, les autorités compétentes, les groupes et les organismes devraient mettre l'accent sur :

a) Des programmes éducatifs susceptibles de transmettre les principes du patrimoine vernaculaire aux conservateurs ;

b) Des programmes de formation pour aider les collectivités à préserver les systèmes de construction, les matériaux et le savoir-faire traditionnels ;

c) Des programmes d'information qui accroissent la sensibilisation du public et des jeunes en particulier dans le domaine de l'architecture vernaculaire ;

d) Des réseaux inter-régionaux d'architecture vernaculaire pour échanger des expertises et des expériences.

Valle d'Orezza fuite en Egypte.jpg

(Valle d'Orezza: la fuite en Egypte)

 


ICOMOS PRINCIPES POUR LA PRESERVATION ET LA CONSERVATION/ RESTAURATION DES PEINTURES MURALES
(2003)


Ratifiée par la 14è Assemblée Générale de ICOMOS, à Victoria Falls, Zimbabwe, octobre 2003

Introduction et définition

Les peintures murales sont des expressions culturelles de la création humaine à travers l’histoire, depuis les origines, avec l’art rupestre, jusqu’aux œuvres d’art mural actuelles. Leur détérioration ou leur destruction, accidentelles ou intentionnelles, constituent une perte qui affecte une part importante du patrimoine culturel de l’humanité.

 

La Charte de Venise (1964) pose les principes généraux de la conservation/restauration du patrimoine culturel. La Déclaration d’Amsterdam (1975), qui introduit la notion de conservation intégrée, et le Document de Nara sur l’authenticité (1994), qui aborde la diversité culturelle, complètent ces principes. Parallèlement à ces documents et des contributions complémentaires pertinentes telles que le code d’éthique ICOM-CC (1984), le Document de Pavie (1997) et les Règles Professionnelles de l’E.C.C.O. (1997), l’objectif du présent document est de fournir des principes plus spécifiques pour la protection, la préservation et la conservation/restauration des peintures murales. Le présent document met en exergue des pratiques et des principes de base universels et ne tient pas compte des questions spécifiques à des régions ou des pays qui peuvent être traitées au niveau régional ou national par des recommandations supplémentaires si cela s’avérait nécessaire.

La richesse des peintures murales repose sur la diversité des expressions culturelles, des réussites esthétiques et sur la variété des matériaux et des techniques utilisés depuis les temps anciens jusqu’à nos jours. Les articles suivants se réfèrent à des peintures créées sur des supports inorganiques, tels que le plâtre, la brique, l’argile ou la pierre, et excluent des peintures réalisées sur des supports organiques, tels que le bois, le papier ou la toile. Les matériaux composites utilisés dans de nombreux bâtiments historiques doivent recevoir un traitement particulier, hors du champ d’application du présent document. Les surfaces architecturales et les couches de finition, avec leur valeur historique, esthétique ou technique, doivent être considérées comme des composantes importantes des monuments historiques.

Les peintures murales font partie intégrante des monuments et des sites et doivent être préservées in situ. Nombre de problèmes affectant les peintures murales sont liés au mauvais état des bâtiments ou des structures, à leur mauvais usage, à l’absence d’entretien ou à de fréquentes réparations et modifications. De même que de fréquentes restaurations, des dégagements intempestifs et l’usage de méthodes et de matériaux inadaptés peuvent entraîner des dommages irréparables. Des pratiques et des qualifications professionnelles insuffisantes ou inadéquates ont conduit à des résultats fâcheux. C'est la raison pour laquelle, un document pertinent, définissant les principes corrects de conservation/restauration des peintures murales, s’avère indispensable.

Article 1 : Politique de protection intégrée

Une approche initiale et nécessaire de la protection des peintures murales, quelles que soient les cultures et les religions, exige que l’on dresse l’inventaire des monuments et des sites comportant des peintures murales, même lorsqu’elles ne sont pas visibles. Les lois et les réglementations qui régissent la protection du patrimoine culturel doivent interdire la destruction, la dégradation ou la modification des peintures murales et de leur environnement. La législation doit non seulement protéger les peintures murales, mais aussi mettre à la disposition des spécialistes des ressources pour la recherche, organiser le traitement et la surveillance professionnels et faire valoir leurs valeurs matérielles et immatérielles aux yeux du public.
Si des interventions s’avèrent nécessaires, celles-ci doivent être entreprises en pleine connaissance et avec l’accord des autorités de tutelle. Des sanctions doivent être prévues pour toute violation des réglementations. De même que des dispositions doivent prendre en compte les nouvelles découvertes et leur préservation dans l’attente d’une protection officielle. Des projets d’aménagement urbains ou d’infrastructures, tels que la construction de routes, de barrages, la transformations de bâtiments, etc. qui affecteraient des peintures murales, ne doivent pas être entrepris sans réaliser une étude d’impact préalable et sans prévoir des dispositions adéquates de sauvegarde.

Des efforts particuliers doivent être fournis, avec la coopération de différentes autorités, pour intégrer et respecter la fonction cultuelle des peintures religieuses sans compromettre leur authenticité.

 



Article 2 : Investigation

Tout projet de conservation doit commencer par de rigoureuses investigations scientifiques. L’objectif est de rassembler autant d’informations que possible sur la composition de la structure et les différentes couches superposées et d’évaluer leurs dimensions historiques, esthétiques et techniques. Doivent être englobés dans de telles études toutes les valeurs matérielles et immatérielles de la peinture, ainsi que les modifications, les ajouts et les restaurations historiques.
Cela exige une approche pluridisciplinaire.

Les méthodes d’investigation doivent être autant que possible non-destructives. Une attention particulière doit être accordée aux peintures murales qui pourraient être dissimulées sous un lait de chaux, des couches de peinture, du plâtre, etc. Les préalables à tout programme de conservation sont l’investigation scientifique des mécanismes de macro- et micro-dégradations, l’analyse de matériau et le diagnostic de l’état.

Article 3 : Documentation

En accord avec la Charte de Venise, la conservation/restauration de peintures murales doit être accompagnée d’un programme défini de documentation sous la forme d’un rapport analytique et critique, comportant des illustrations : dessins, relevés, photographies, cartographies, etc. L’état des peintures, les caractéristiques techniques et formelles relevant du processus de la création et de l’histoire de l’objet doivent être connus. De plus, chaque étape de la conservation et de la restauration, chaque matériel et chaque méthode utilisés doivent être consignés. Ce rapport doit être conservé dans les archives d’une institution publique et mis à la disposition du public intéressé. Des copies de ces documents doivent aussi être conservées sur place ou confiés à la garde des responsables du monument. Il est également recommandé que les résultats des travaux soient publiés. Les documents doivent être classés par chapitres identifiables, par exemple investigation, diagnostic et traitement. Les supports traditionnels écrits et graphiques peuvent être complétés par des documents numérisés. Quelle que soit la technique utilisée, la permanence de ces archives et leur disponibilité future est toutefois de la plus haute importance.

Article 4 : Conservation préventive, entretien et gestion de site

L’objectif de la conservation préventive est de créer des conditions favorables pour limiter le délabrement et éviter le recours à des traitements curatifs inutiles afin de prolonger la durée de vie des peintures murales.
Une surveillance compétente et le contrôle de l’environnement sont tous deux des composantes essentielles de la conservation préventive. Des conditions climatiques défavorables et des problèmes d’humidité peuvent provoquer des détériorations et des attaques biologiques. Grâce à la surveillance, les premiers symptômes de délabrement de la peinture ou de la structure du support sont détectés, permettant ainsi d’éviter l’extension des dommages. Une déformation ou une défaillance de la structure, conduisant à de possibles effondrements, peuvent être détectés à un stade précoce. L’entretien régulier du bâtiment ou de la structure est la meilleure garantie pour la sauvegarde des peintures murales.

Les usages publics inappropriés et incontrôlés des monuments et des sites comportant des peintures murales peuvent engendrer des dommages à ces dernières. Cela peut impliquer une limitation des visites et, dans certains cas, la fermeture temporaire au public. Il est toutefois préférable que le public ait la possibilité de connaître et d’apprécier des peintures murales qui font partie du patrimoine culturel commun. Par conséquent, il convient d’intégrer à la gestion des sites un aménagement adapté de l’accès et de l'usage des lieux, afin de préserver, autant que possible, les valeurs authentiques matérielles et immatérielles des monuments et des sites.

Pour diverses raisons sociologiques, idéologiques et économiques, de nombreuses peintures murales, souvent situées dans des lieux isolés, sont victimes de vandalisme et de vols. Dans ces cas-là, les autorités doivent prendre des mesures préventives particulières.

 

Article 5 : Conservation et restauration

Les peintures murales sont une partie intégrante du bâtiment ou de la structure. En conséquence, leur conservation doit être envisagée en même temps que la structure de l’entité architecturale et leur environnement. Toute intervention sur le monument doit prendre en compte le caractère spécifique des peintures murales et les conditions de leur préservation. Toutes les interventions, telles que la consolidation, le nettoyage et la réintégration, doivent être réduits au niveau minimum nécessaire permettant d’éviter toute disparition de matériel et toute diminution d’authenticité picturale. Partout où cela est possible, des échantillons de couches stratigraphiques attestant l’histoire des peintures doivent être préservés, de préférence in situ.

         Le vieillissement naturel est un témoignage du temps et doit être respecté. Les transformations chimiques et physiques irréversibles doivent être préservées s’il est nuisible de les ôter. Les restaurations précédentes, les ajouts et les couches picturales recouvrant des couches plus anciennes font partie de l’histoire des peintures murales. Ils doivent être considérés comme des témoins des interprétations et évalués de façon critique.

Toutes les méthodes et tous les matériaux utilisés dans la conservation et la restauration des peintures murales doivent prendre en compte l’éventualité de futurs traitements. L’utilisation de nouveaux matériaux et de nouvelles méthodes doit être basée sur des données scientifiques détaillées et des résultats d’essais concluants en laboratoire et sur site. Toutefois, on doit garder à l’esprit que les effets à long terme de nouveaux matériaux et de nouvelles méthodes sur les peintures murales sont inconnus et peuvent être dommageables. Par conséquent, l’utilisation de matériaux traditionnels, compatibles avec les composantes de la peinture et la structure environnante, doit être encouragée.

L’objectif d’une restauration est d’améliorer la lisibilité de la forme et du contenu des peintures murales tout en respectant la création originale et son histoire. La réintégration esthétique contribue à réduire la visibilité des dommages et doit d’abord être testée sur un matériel qui ne soit pas d’origine. Les retouches et les restitutions doivent être discernables de l’original. Tous les rajouts doivent être facilement reversibles. Trop de repeint doit être évité.

Le dégagement de couches picturales exige le respect de la situation historique et doit tenir compte de l’évaluation des pertes éventuelles. Cette opération ne devrait être effectuée qu’après étude préliminaire de leur état, de leur importance et de leur valeur et, lorsque cela est possible, sans provoquer de dommages. Les peintures récemment mises au jour ne doivent pas être exposées à des conditions défavorables.

Dans certains cas, la reconstitution de peintures murales décoratives ou de surfaces architecturales colorées fait partie d’un programme de conservation et de restauration. Cela suppose la conservation des fragments authentiques et pourrait impliquer leur recouvrement complet ou partiel par des couches protectrices. Une reconstitution bien documentée et exécutée de manière professionnelle, à l’aide de matériaux et de techniques traditionnels, témoigne de l’apparence historique de façades et de décors intérieurs.

Une direction compétente doit rester vigilante durant toutes les phases du projet de conservation/restauration et doit recevoir l’approbation des autorités compétentes. Il serait souhaitable qu’un contrôle indépendant du projet soit assuré par des autorités ou des institutions compétentes, libres de tout intérêt commercial dans le résultat final de l’opération. Les responsables des décisions de gestion doivent être nommés et les travaux doivent être mis en œuvre par des professionnels possédant des qualifications et des compétences adéquates.

Article 6: Mesures d’urgence

Dans les cas d’urgence, des mesures immédiates de sauvetage sont nécessaires pour sauvegarder des peintures murales. Les matériaux et les techniques utilisés doivent permettre un traitement ultérieur. Des mesures de conservation appropriées doivent être entreprises aussi vite que possible avec la permission des autorités compétentes.

La dépose et le transfert sont des opérations radicales, irréversibles et dangereuses qui affectent sévèrement la composition physique, la structure matérielle et les caractéristiques esthétiques des peintures murales. Ces opérations ne sont par conséquent justifiables que dans des cas extrêmes, lorsque aucune solution de traitement in situ n’est possible. Dans de telles circonstances, la décision de dépose et de transfert doit toujours être prise par une équipe de professionnels plutôt que par la personne chargée d’effectuer le travail de conservation. Les peintures déposées doivent être recollées à leurs emplacements d’origine dans la mesure du possible.

Des mesures spéciales doivent être prises pour la protection et l’entretien des peintures détachées de leur support d’origine, ainsi que pour la prévention des vols et la dispersion des œuvres.

L’application d’une couche de recouvrement dissimulant un décor existant, dans l’intention de prévenir des dommages ou la destruction par l’exposition à un environnement inhospitalier, doit être exécutée avec des matériaux compatibles avec les peintures murales et d’une manière qui permettra leur restitution ultérieure.

Article 7 : Recherche et information du public

La création de projets de recherche dans le domaine de la conservation/restauration des peintures murales est une condition essentielle à l’élaboration d’une politique de préservation durable. La recherche sur des questions susceptibles de compléter nos connaissances sur les processus de dégradation doit être encouragée. La recherche qui étendra nos connaissances sur les techniques de peintures originales, ainsi que sur les méthodes et les matériaux utilisés dans les restaurations anciennes est essentielle pour la mise en œuvre de projets de conservation adéquats. Cette recherche est également pertinente pour les disciplines connexes des arts et des sciences. Il convient de réduire au minimum les perturbations causées aux matériaux qui serviront à l’étude ou à l’obtention d’échantillons.

La diffusion de la connaissance est une caractéristique importante de la recherche, et devra être faite à destination de la communauté scientifique autant que du grand public. L’information du public contribue considérablement à la prise de conscience de la nécessité de préserver les peintures murales, même si les travaux de conservation/restauration peuvent causer des désagréments temporaires.

Article 8 : Qualifications et formation professionnels

La conservation/restauration de peintures murales est une discipline spécialisée appartenant au domaine de la préservation du patrimoine. Ces travaux exigent des connaissances, des compétences et des savoirs -faire particuliers, de sorte que les conservateurs -restaurateurs de ces biens culturels doivent recevoir une éducation et une formation professionnelle comme le recommandent le Code d’éthique du Comité conservation de l’ICOM (1984) et les associations telles que E.C.C.O. (European Confederation of Conservator -Restorers’ Organisations) et ENCoRE (European Network for Conservation-Restoration Education).

Article 9: Traditions de rénovation

Dans quelques régions du monde, les pratiques authentiques des artistes et des artisans se poursuivent par la reproduction de programmes iconographiques et de décors historiques utilisant des techniques et des matériaux traditionnels. Ces traditions, qui répondent à des exigences religieuses et culturelles et s’en tiennent aux principes de Nara, doivent être maintenues. Des savoir-faire traditionnels en matière de peintures sont également des conditions préalables pour la conservation/restauration. Cependant, bien qu’il soit important de préserver ces connaissances particulières, cela n’implique pas que les traitements de conservation/restauration de peintures murales soient effectués par des artisans ou des artistes.

Article 10: Coopération internationale

Partager l’entretien d’un patrimoine commun est une notion acceptée au niveau national et international. Il est donc nécessaire d’encourager l’échange des connaissances et la diffusion des informations à tous les niveaux. Dans l’esprit d’une collaboration interdisciplinaire, les conservateurs - restaurateurs de peintures murales ont besoin de travailler en liaison avec leurs collègues d’autres pays et avec les institutions adéquates et les spécialistes du monde entier.

L'ébauche de ce document, sous sa forme actuelle, a été rédigée à Copenhague les 28 octobre - 1er novembre 2002, puis révisé et complété à Thessalonique le 8 et 9 mai 2003. Rapporteur : Isabelle Brajer 

 

Santa Cristina Crucifixion.jpg
(Santa Cristina, Valle di Campuloru)


  

 

 

 

 

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