23/05/2018
tr: Projection du film : Guy Paul Chauder, la mémoire de la trace
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22/05/2018
2/ La chapelle San Quilicu di Cambia: les fresques
La chapelle San Quilicu di Cambia
2°/ partie: les fresques (XVI° siècle)
Derrière l'autel moderne au massif pied de bois, les fresques peintes dans l'abside en cul de four, en partie occultées par l'ensemble de stuc plus tardif (17°s) du maître-autel flanqué de ses ailes.
Madeleine Allegrini a réalisé dernièrement la restauration de ces fresques de San Quilicu, leur restituant leur fraîcheur: on peut lui envier ces longs moments passés dans l'intimité de cette chapelle, malgré le froid et la solitude ...
Il règne ici un esprit d'enfance. Ici plus qu'ailleurs, c'est une profusion de personnages et de décors fleuris planant dans une atmosphère de tendresse absolue. Oeuvre d'artiste populaire qui veut bien faire, essaie de se plier aux exigences iconographiques des commanditaires, s'embrouille parfois dans les consignes, mais témoigne de l'essentiel malgré les maladresses ou les erreurs, fait voler ses anges façon Chagall dans des nuées d'étoiles, parsème les robes de sapôtres de fleurettes, de rinceaux.
"Le Trône de Grâce" (sic)
Vision de la Trinité
Au centre de l'abside, au-dessus de la fenêtre meurtrière, et à l'emplacement traditionnel du Christ Pantocrator, c'est ici un mystèrieux "Trône de Grâce" de la Trinité entouré d'anges gracieux : dans sa mandorle, sous la colombe de l'Esprit Saint, Dieu le Père tient en son giron son Fils crucifié.
Sans doute à la demande du commanditaire, l'artiste a représenté la Trinité et non pas, comme dans d'autres chapelles de Corse ( Pastureccia, Sermanu, Valle di Campuloru, Castirla, Favallelu, Gavignanu...) le seul Christ Pantocrator.
De celui-ci, il a tout de même étrangement emprunté la silhouette générale et majestueuse, la taille imposante et le livre traditionnel ("EGO SUM LUX MUNDI ET VIA VERITAS") mais ce doux vieillard au regard empreint de mansuétude, aux sourcils interrogatifs, à la bouche bien dessinée sous un nez aquilin, à la barbe blanche et à la calvitie avancée, qui vous bénit du coeur de l'abside est bien Dieu le Père, tenant sur ses genoux le Fils en Croix, la tête inondée de l'Esprit Saint. sous sa forme de colombe. Le message de la Trinité est on ne peut plus clair. Le bleu intense du fond de la mandorle soulignée d'une guirlande végétale fait efficacement ressortir l'ensemble.
Et de part et d'autre, le Soleil et la Lune... petite erreur de notre fresquiste, la Lune (l'Ancien Testament) et le Soleil (le Nouveau Testament) ont échangé leur place : le Nouveau Testament éclairant l'Ancien Testament et la place de droite étant toujours privilégiée, la lune devrait être à la gauche de la Trinité et le soleil à sa droite ... Mais, en vérité, qui trouvera à redire?
Bien rond, sanguin et ardent, mais le regard étrangement lointain, le Soleil du Nouveau Testament
... et coiffée de son croissant, exsangue , mélancolique et pâle, la Lune de l'Ancien Testament
D'un graphisme un peu maladroit, le Christ en croix dans le giron du Père, comme l'enfant Jésus dans le giron de sa Mère.
Là aussi, l'artiste s'applique à dire les choses: le sang jaillit des plaies du Crucifié couronné de longues épines acérées.
A propos du "Trône de Grâce", connaissez-vous celui de l'église paroissiale de Palasca?
Palasca, la Trinité entourée d'anges récoltant le sang du Christ dans des calices.
Ici, Dieu le Père nimbé de lumière et coiffé d'une tiare papale, soutient la Croix et présente son Fils avec toute la dignité requise: la Colombe de l'Esprit Saint plane entre sa barbe et le Christ ...
Le Tétramorphe - et les anges
Petit rappel à propos du Tétramorphe ("quatre formes"):
C'est la représentation symbolique des quatre Evangélistes. Une vision qui plonge ses racines dans la nuit des temps du monde ancien , fluctue, s'enrichit au cours de l'aventure humaine et des civilisations, donnant en tous cas à l'homme cette assise solide du chiffre quatre: le carré ( cf. la muraille carrée de la Jérusalem céleste), les quatre bras de la croix, les quatre saisons, les quatre points cardinaux, les quatre fleuves du Paradis, les quatre lettres du nom de Dieu YHVH ( Y: l'homme; H: le lion; W: le taureau; H: l'aigle) , les quatre prophètes (Isaïe, Jérémie, Ezéchiel, Daniel) et les quatre docteurs de l'Eglise (Augustin, Ambroise, Jérôme, Grégoire le Grand), les quatre Evangélistes, etc ... pour ne parler que du monde judéo-chrétien, car ce chiffre symbolique se retrouve sur tous les continents, nourrit la cosmologie de toutes les civilisations ...
L'Evangéliste Saint Mathieu: l'Ange, la plume et le Livre à la main. A son côté, un ange délicat et blond acclame la mandorle de la Trinité.
De l'autre côté de la mandorle, l'Evangéliste Saint Jean : l'Aigle, perché sur le Livre et un autre ange à la robe fleurie. Les sortes d'étoiles aux pieds des anges évoquent les nuées célestes ...
Sous l'Evangéliste Mathieu, le Lion de Saint Marc: "Oups!", petit problème d'étiquetage!
Et ici, bien sûr, le Taureau de Saint Luc et l'Aigle de Saint Jean : notre fresquiste n'avait peut-être pas bien entregistré la consigne ...
Un peu de révision, donc...
Dans l'interprétation christique d'Honorius d'Autun (XII°s.):
"Christus erat homo nascendo,
Vitulus moriendo,
Leo resurgendo,
Aquila ascendendo"
Saint Matthieu : le Christ nait homme (Mathieu commence son Evangile avec le récit de la naissance de Jésus)
Saint Luc : Il est Taureau en mourant (l'animal privilégié des sacrifices)
Saint Marc : Il est Lion en ressucitant
Saint Jean : Il est Aigle en montant vers son Père ( symbole de l'ascension de l'esprit vers le ciel)
Ce Tetramorphe est représenté traditionnellement dans l'abside de nos chapelles de Corse, entourant ou accompagnant le Tout-Puissant , "Celui qui siège sur le trône" (Jean):
"Autour du trône se tiennent quatre Vivants, constellés d'yeux par devant et par derrière. Le premier Vivant est comme un lion; le deuxième Vivant est comme un jeune taureau; le troisième Vivant a comme un visage d'homme; le quatrième Vivant est comme un aigle en plein vol. Les quatre Vivants, portant chacun six ailes, sont constellés d'yeux tout autour et par dedans" (...) qui " ne cessent de répéter jour et nuit: "Saint, Saint, Saint, Dieu maître de tout, il était, il est et il vient"
(La vision de saint Jean)
Et, dans leur nuage étoilé, ces anges éperdus d'amour,
dans leur belle robe à fleurettes
adorent
Et les autres ...
(à suivre!)
11:56 Publié dans chapelle San Chirgu de Cambia, Christ Pantocrator, fresques de corse, Trône de Grâce | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : san quilico, castagniccia, fresques de san chirgu, tetramorphe | Facebook |
1/ la chapelle San Quilicu à Cambia
En Castagniccia, la chapelle San Quilicu di Cambia. Pieve di e Vallerustie.
(Je reprends la note de l'hiver 2008 et la complète avec des images des fresques restaurées dernièrement par Madeleine ALLEGRINI)
1°/ La chapelle romane et ses décors sculptés
(à la lumière de cet été, le chevet de la chapelle, orientée comme il se doit à l'est)
Pour la visite, s'adresser à la mairie de Cambia.
Cette chapelle San Quilico (alias saint Cyr) - comme sa petite sœur voisine dédiée à Santa Maria- semble dater du début du XIIIème siècle - leur fondation n’étant confirmée par aucun témoignage historique. On la découvre avec émerveillement blottie au secret d’une chênaie vigoureuse, au bord d'un ancien chemin muletier fort pentu qui descend à l'ombre des arbres. En hiver le grondement du torrent caché ajoute au mystère du lieu ...
(La nef mesure 12,60 m de long, 4,60m de large; l'abside: 3,20m en ouverture et 1,65m en profondeur, mesures données par l'archéologue Geneviève MORACCHINI-MAZEL dans "Les églises romanes de Corse", ouvrage de référence publié en 1967
Ses murs de schiste gris blondissent au moindre rayon de soleil , rythmés par la musique des arcatures et de leurs modillons sculptés sous la corniche, des fenêtres meurtrières, des deux portes surmontées de leurs tympans en fort relief. L’élégance dynamique de l’ensemble, la variété des sculptures, leur formidable vitalité est, à chaque visite, un enchantement …
( en ce mois d'août 2010, la façade ouest, avec notre chère Marie -Germaine Mary Conrad)
Une histoire verticale
(Où l'espèce humaine devient à son tour, tant bien que mal, championne de la verticalité)
"Si vous mangez du fruit de l'arbre, vous serez comme des dieux"
Le tympan de la porte de la façade occidentale illustre la scène de la tentation au Paradis du couple originel. Un arbre puissamment enraciné pousse droit, et le Serpent qui s'enlace autour du tronc avec force et élégance dépose dans la main d'Eve le fruit de la Connaissance par où l'humanité évolue vers son destin.
Avez -vous remarqué? Le Serpent semble sortir du corps d'Eve et lui fait l'offrande d'amour (et de la petite graine si utile à la croissance et la multiplication de la descendance humaine - ce que le bon Adam pour l'instant ignore).
Le serpent se dresse.
Animal par la suite rampant et voué à la terre, fluide ou immobile, il s'arrache du monde horizontal et glaiseux auquel il appartiendra pour se dresser de toute sa volonté, s'élèver de toute sa vigueur intelligente. Dans cette recherche verticale, il a besoin de l'arbre pour atteindre le plus haut des degrés supérieurs concevables ...
Dualité du serpent: symbole de mort, de luxure, bref, du Mal, ou bienveillant et guérisseur (le serpent d'airain érigé par Moïse dans le désert, le serpent d'Esculape sur le caducée, le Christ rédempteur figuré sous forme de serpent sur la Croix...). Quoi qu'il en soit, si besoin est, le serpent se dresse. A moins qu'il ne se morde la queue - mort et résurrection de l'ouroboros ... En tous cas si souvent présent sur le tympan de nos chapelles romanes qu'il faut bien s'accommoder de cette rencontre fatale.
Car le serpent est le symbole de l'intelligence, de tous les animaux, c'est même le plus rusé. Sa sagesse acquise, volée? se double de séduction: à la fois tentateur et gardien du sacré, il utilise l'arbre du Paradis pour s'élever et, en faisant goûter ses fruits, entraîne, nous dit-on, la mort spirituelle de ceux qu'il a séduits en leur faisant la promesse trompeuse d'une élévation au rang des dieux. Connaissance et Immortalité.
- Il a choisi Eve pour atteindre Adam: c'est la plus vive, la plus avide de sensations nouvelles, la plus téméraire, la plus spontanée peut-être aussi? Ou bien la plus intéressée, la plus envieuse, la plus calculatrice? Et qui pourrait dire à quel moment précis ces deux-là en ont fini avec la pureté de coeur?
"Si je parle à l'homme, il ne m'écoutera pas, car il est difficile d'infléchir l'esprit d'un homme. Voilà pourquoi je préfère m'adresser d'abord à la femme dont l'esprit est plus superficiel (et la voilà entamée, la vaste histoire des femmes trop curieuses, en passant par Barbe Bleue!). Je sais qu'elle m'écoutera car la femme prête attention à chacun. (Glosez comme vous voudrez)
Adam, tout comme Eve, tend la main du désir vers le fruit défendu: ils ne l'ont pas encore croqué le fruit que déjà ils ont pris la mesure de leur nudité, de leur différence, et se cachent le sexe de leur grande main maladroite... Leur conscience s'éveille... Deux étoiles stylisées accompagnent dans leur chute celle de nos pauvres parents... Annonce d'amour, d'exil et de mort.
L'Arbre du Paradis lui aussi s'élève, mais naturellement et sans artifices, sans engrais chimiques ni tripotages transgéniques - pas encore eu besoin de les inventer, la terre d'Eden est naturellement bio et généreuse ... A lui seul il contient toute notre nostalgie de l'ascension après la chute et d'une communication terre/ciel. Le monde judéo-chrétien partage cette symbolique universelle de l'arbre/ axe du monde/ échelle cosmique avec bien d'autres civilisations:
"Dans l'ordre rituel, rappelons-nous le cas typique des chamanes qui dressent le tronc d'un bouleau au centre de leur hutte, le sommet passant par le trou de fumée assimilé au pôle céleste, et en font l'ascension rituelle pour déboucher dans l'au-delà"
(Le monde des Symboles, éditions Zodiaque, p. 331)
Le futur Arbre de la Croix.
Axe cosmique de l'univers, l'Arbre exprime la croissance naturelle de la vie et l'aspiration de l'homme intérieur à se régénérer par la vie spirituelle: ses racines solides plongent dans le monde souterrain, celui des enfers, celui de l'obscurité - d'aucuns diraient celui de l'Inconscient, celui des trépassés, mais aussi celui de l'humus nourri des reliques des Saints, et il projette ses branches vers le monde céleste, en recevant lumière, spiritualité ("Pater noster qui es in caelis") et eaux fécondantes. Curieusement, les branches de l'arbre préfigurent à leur façon les bras de la Croix.
(enlacés, dans leur message cohérent, l'Arbre de la connaissance et la Croix: église pisane de la Trinité à Aregno, Balagne)
L'Arbre de la Croix :
"(...) Cet Arbre qui s'étend aussi loin que le ciel, monte de la terre aux cieux. Plante immortelle il se dresse au centre du ciel et de la terre: ferme soutien de l'univers, lien de toutes choses, support de toute la terre habitée, entrelacement cosmique, comprenant en soi toute la bigarrure de la nature humaine. Fixé par les clous invisibles de l'esprit, pour ne pas vaciller dans son ajustement au divin; touchant le ciel du sommet de sa tête, affermissant la terre de ses pieds, et, dans l'espace intermédiaire, embrassant l'atmosphère entière de ses mains incommensurables. (...)
Hymne composé par Hippolyte de Rome au IIIème siècle
A propos du fruit offert à Eve par le serpent.
En Corse on pourrait y voir, à la place de la pomme, une figue, ce qui faciliterait grandement par la suite le premier habillage d’Adam et Eve : les feuilles du figuier sont juste d'une taille adéquate- sinon d'un grand confort lorsqu'on en connait les vertus urticantes - pour cacher ce sexe qu’ils viennent honteusement de découvrir – c’est du reste ainsi qu’Albert Dürer choisit de figurer cette scène - La feuille du pommier serait trop petite, la feuille de bardane assurément trop encombrante et peut-être n’en auraient-ils pas eu sous la main, bref la figue fait parfaitement l’affaire, d’autant que c’est un fruit plutôt chargé de sens : la figue et le raisin ne sont-ils pas les attributs de Dionysos et de Priape ? Une invitation à « consommer » la figue dont nous sommes tous issus…
Et si ce n’est pas une figue, c’est une pomme, bien sucrée et toute féminine, même si l’on sait que la pomme n’était encore présente en Orient à l’époque de la Genèse … Et si c’est une pomme, cela facilite aussi grandement l’interprétation puisque son nom latin est malum, le terme recouvrant du reste d’autres fruits comme le coing, la grenade, le citron, la pêche, l’orange, homonyme de malum, le Mal. Nous y voilà ! Et c’est Eve bien sûr qui en fait cadeau à son grand benêt d’Adam, lequel manque de s’étouffer en la mangeant trop avidement (on le représente souvent portant la main à sa gorge : d’où la pomme d’Adam).
Si l’on trouve fréquemment sculptée sur nos églises romanes de Corse cette représentation de la Tentation d’Adam et Eve, elle disparaît de l’iconographie dans les églises baroques de l’île : c’est que le Concile de Trente est passé par là transformant cette malédiction du péché originel en message de rédemption.
C’est ainsi que Marie, la mère du Christ venu racheter le péché originel, a transmuté le nom de EVA, notre mère originelle, en AVE et en message de paix:
"Sumens illud ave
Gabrielis ore
Funda nos in pace
Mutans Hevae nomen"
( l'Annonciation de l' église d'Altiani )
Désormais, sur les autels retables de nos églises, la Vierge nimbée de lumière écrasera sous ses pieds nus le serpent du Mal, et, regardez bien, la plupart du temps, le Malin tient dans sa gueule une pomme … juste un petit rappel sympathique.
l'autel de l'Immaculée Conception à St Pierre et St Paul de Piedicroce
(sale Bête, va!)
Les symboles traversent les siècles sans se soucier du politiquement correct et les sculpteurs de cette époque n’étaient pas pudibonds, on en aura quelques exemples savoureux sur les murs de cette chapelle ...
Le petit personnage impudique installé au-dessus du chevet salue béatement chaque matin le soleil levant.
Sur les façades latérales, tous les modillons des arcs sont ornés de décors sculptés: têtes humaines ou animales, étoiles, fleurs, cordelières, croix , alternent avec des motifs géométriques.
(Oyez, oyez, Grandez'oreilles)
(le Serpent bicéphale)
( le tireur de langue: faire la grimace pour éloigner les mauvais esprits ?)
Et voici une charmante image, mi-ange, mi -diablotin , l'une de mes préférées !
(Alleluia!)
et un peu plus loin, cette bien curieuse sirène bifide... que l'on retrouve du reste ailleurs sur nos chapelles (Murato, Aregno ...) :
... plutôt triton ou drac, non? ... En tous cas, voilà un être symbolique qui semble contrôler son aventure : thème fréquent chez les imagiers romans. Vous pouvez retrouver sur ce sujet un essai d'interprétation dans le livre d'Anne et Robert Blanc: " Monstres, Sirènes et Centaures, symboles de l'art roman" , aux Editions du Rocher.
(le tympan de la porte sud)
La façade latérale sud est percée d’une porte surmontée d’un très beau tympan posé sur un linteau massif et mouluré : sous l’arc surhaussé où courent des entrelacs élégants lui faisant une auréole, un personnage se tient solidement debout, jambes écartées, sa tunique (me semble-t-il) serrée à la taille par une ceinture. De sa main gauche il empoigne le cou d’un gros serpent aux dents menaçantes et de l’autre il s’apprête à trancher la tête du monstre avec son glaive : le serpent monstrueux se tord puissamment autour de l’homme dont toute l’attitude déterminée et calme proclame la victoire du Bien sur le Mal…
C’est par cette porte que j'entrerai: dans la pénombre, les fresques nous attendent, nouvellement restaurées par Madeleine Allegrini ...
(à suivre)
3°/ La chapelle San Quilicu di Cambia (pieve de Vallerustie), les fresques (suite)
Et les autres ...
Dans l'écoinçon de gauche, le grand Saint Michel Archange à l'ouvrage : terrasser le Démon et ses diablotins, inlassablement peser les âmes en transit , pas de répit : la retraite n'est pas pour lui . Toujours magnifiquement cuirassé et armé, chevalier céleste incontournable dans nos chapelles . Dans sa main gauche, la balance fatidique et ses deux plateaux habités:
Avez-vous remarqué ses jambières? Deux têtes menaçantes armées de crocs, de quoi mettre en déroute le Malin, qui justement tente d'attaper cette petite âme pécheresse avec une espèce de pince à sucre. L'âme de droite, sereine et dévote, s'apprête pour l'ascension céleste ... Procédé efficace, le sol, sous le Diable ferré, marque la profondeur dans la fuite de ses carreaux.
Grand Saint Michel, gardez-nous de cette sale engeance griffue et poilue!
Dans l'écoinçon de droite, le groupe imposant des saints patrons de cette chapelle: Santa Giulitta (Sainte Julitte) en robe safran et manteau bleu et son fils , le petit San Quilicu (saint Cyr), dont on ne voit que les pieds, dépassant de sa tunique rouge ...
Toute la grâce et la douceur du visage de Santa Giulitta ... martyrisée ainsi que son fils à Tarse, lors des persécutions de Dioclétien. Le petit San Quilicu, à peine âgé de trois ans, meurt assommé sur les marches du tribunal en proclamant sa foi chrétienne ... Il est très populaire sur l'île où il a reçu un grand nombre de lieux de culte dès le Moyen-Age (cf.l'article qui lui est consacré dans le très précieux ouvrage Corsica Sacra , p. 29, de Geneviève Moracchni Mazel).
Le petit martyre
A gauche de la fenêtre meurtrière, la Sainte Vierge assise et tenant l'Enfant Jésus bénissant, debout sur ses genoux. A leur côté, Saint Pierre les regarde, tout fondu de tendresse ...
... suite et fin :
les Apôtres
Sur le côté droit de l'abside, une série de saints apôtres, drapés dans leur beau chamarré et serrant contre le coeur le Livre : à gauche, Paul et l'épée de son martyre, puis Jacques et son bourdon, Philippe, Barthélémy et le couteau de son supplice, Simon, et ? ...
Et à gauche: on reconnait le jeune Jean à son visage imberbe , André avec la croix de son supplice présumé et ses poissons (il est le saint patron des pêcheurs), Pierre et ses clefs ...
Humanité compatissante de ces visages barbus qui reflètent une même douceur dans les regards:
Saint Barthélémy
Saint Philippe
Saint Simon
Saint Pierre
Saint André
Saint Paul
Saint Jacques "Fils du tonnerre"
Saint Jean, "l'apôtre péréféré"
Manquent quelques personnages, cachés par les ailes du maître-autel construit au XVII°s contre les pieds-droits de l'arc. Fallait-il détruire l'ensemble de stucs pour retrouver l'ensemble des fresques ?
La profusion des éléments décoratifs occupe tout l'espace possible: carrelages en perspective, papiers pliés, tissus ornés de rinceaux, de fleurettes, étoiles ... notre fresquiste vernaculaire n'est pas avare de son art !
En tous cas il laisse ici une oeuvre poétique, naïve et intemporelle qui nous touche profondément par sa spontanéité et sa tendresse.
A nouveau, je vous invite à retrouver le beau livre de Joseph ORSOLINI: L'ART DE LA FRESQUE EN CORSE DE 1450 A 1520 (édition du Parc Naturel Régional de la Corse)
ici le vase qui surplombe le sommet l'arc triomphal, travaillé à la façon d'un vase d'étain aux motifs repoussés: il contient , tel le hanap magique des romans médiévaux, toute l'abondance divine, inépuisable ...
11:53 Publié dans chapelle San Chirgu de Cambia, chapelles romanes corses, corse, esprit d'enfance, fresques de corse, iconographie des saints, patrimoine des chapelles à fresques en Corse | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : fresques de san quilicu di cambia, castagniccia, sainte julitte, pieve de vallerustie, saint michel arhange | Facebook |
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